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Cas individuel (CAS) - Discussion : 2019, Publication : 108ème session CIT (2019)

 2019-BRA-C098-Fr

Informations écrites fournies par le gouvernement

Une fois de plus, le Brésil a appris avec perplexité qu’il figurait sur la liste préliminaire des cas pouvant faire l’objet d’un examen au cours de la Conférence internationale du Travail (CIT) de 2019.

A cette fin, à titre de rapport général, le Brésil reprend ci-après plusieurs éléments qui justifient son mécontentement face à l’attitude de cette CIT, surtout parce qu’il est l’un des pays ayant ratifié le plus de conventions internationales du travail et cherche, durablement et en conformité avec sa législation nationale, à conférer la plus grande efficacité à ces instruments.

La Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations

Il convient d’abord d’insister pour que la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations de l’Organisation internationale du Travail (OIT), dont la mission première est de contrôler l’application effective des conventions internationales du travail – dans la mesure des possibilités des différents Membres de l’Organisation –, garde à l’esprit que les conventions peuvent être interprétées différemment lors de leur application dans les pays, notamment pour des raisons d’harmonisation du texte international et de la législation nationale.

Cela dit, le Brésil réaffirme qu’il n’a violé aucune des dispositions de la convention no 98 de l’OIT en rédigeant la loi no 13467 du 13 juillet 2017.

Prévalence de la négociation sur la législation (articles 611-A et 611-B de la consolidation des lois du travail)

Comme le Brésil l’a déjà précisé dans des documents qu’il a envoyés à l’OIT, les dispositions des articles 611-A et 611-B de la loi no 13467 portant réforme de la consolidation des lois du travail (CLT) de 2017 sont parfaitement conformes au contenu de la convention no 98 de l’OIT, surtout en ce qui concerne son article 4.

Suivant cet axe de réflexion, l’intention du Brésil en adoptant les dispositions susmentionnées était d’augmenter la sécurité juridique des instruments collectifs négociés entre les travailleurs et les employeurs. A cette fin, il a établi une liste de droits au travail qui pourraient faire l’objet de négociations collectives. Toutefois, souhaitant clairement préserver les intérêts supérieurs de la négociation collective, une disposition spécifique a été rédigée pour énumérer les thèmes qui ne peuvent pas être inclus dans des dispositions collectives, ainsi qu’une série de droits garantis dans la Constitution de 1988 de la République fédérative du Brésil. Il s’agit donc bien d’une législation moderne dans le sens où elle indique de façon transparente aux partenaires sociaux le champ d’application de la négociation collective.

La précision des thèmes pouvant faire l’objet de négociations collectives est en parfait accord avec le contenu de la convention no 98 et, surtout, confère un caractère très concret à la Constitution de 1988 de la République fédérative du Brésil qui, depuis son adoption, promeut la négociation collective et considère la reconnaissance des conventions et des accords collectifs comme un droit fondamental des travailleurs.

Il convient également de souligner que, depuis son adoption en 2017, le système judiciaire, et surtout la Cour suprême du Brésil, s’est intéressé à plusieurs aspects de la loi no 13467. Pourtant, la Cour suprême du Brésil n’a été saisie d’aucune action constitutionnelle relative à la prévalence de la négociation sur la législation (articles 611-A et 611-B). A cet égard, les différentes commissions du Parlement du Brésil ayant examiné le respect de la Constitution et de la convention par ces dispositions, et celles-ci n’ayant fait l’objet d’aucune révocation de la part de la Cour suprême du Brésil, il apparaît clairement qu’elles sont conformes au système juridique et ne violent aucune loi nationale ni internationale. Elles relèvent surtout d’une action démocratique et souveraine dont l’objectif principal est de permettre des négociations collectives, libres et volontaires en jouissant d’une sécurité juridique.

En ce qui concerne le nombre d’instruments collectifs, il convient de garder à l’esprit que le système de médiation, chargé d’enregistrer les instruments collectifs négociés par les syndicats, indique que des négociations collectives continuent d’être menées et enregistrées à un rythme proche de celui d’avant l’adoption de la loi no 13467 de 2017. Quant aux chiffres précis, 13 435 instruments collectifs ont été signés en 2017, 11 234 en 2018 et 12 095 en 2019 (les chiffres se rapportant au premier trimestre de chaque année). Donc, si la comparaison entre les années 2017 et 2018 laisse apparaître une diminution de 16,38 pour cent, on note une évolution de 7,11 pour cent pour les années 2018 et 2019.

Compte tenu du temps raisonnable nécessaire aux parties pour appréhender le cadre réglementaire et l’appliquer, on peut en conclure que les négociations n’ont pas diminué de façon alarmante comme le prétendent ceux qui méconnaissent les données réelles. Par conséquent, dans la pratique, les articles 611-A et 611-B de la loi no 13467 de 2017 ne constituent pas un obstacle à la poursuite de la négociation collective au Brésil.

L’exception relative au paragraphe unique de l’article 444 de la consolidation des lois du travail (négociation individuelle)

A aucun moment le Brésil n’a ignoré le caractère collectif des règles de la négociation. Toutefois, après avoir constaté qu’une petite proportion de travailleurs disposait d’un plus grand pouvoir de négociation par rapport aux employeurs, il a été décidé, uniquement dans ces cas, que la loi no 13467 de 2017 conférerait davantage de poids aux négociations individuelles. Dès lors, les travailleurs titulaires d’un diplôme de l’enseignement supérieur qui perçoivent un salaire au moins deux fois supérieur au plafond des prestations du régime général de sécurité sociale brésilien peuvent prévoir des conditions contractuelles qui, de leur point de vue, sont plus avantageuses pour eux.

D’autre part, comme précisé plus haut, cette possibilité concerne approximativement 1,45 pour cent des travailleurs couverts par la CLT et 0,25 pour cent de la population brésilienne. Même si certains clament que la négociation individuelle a remplacé la négociation collective, cette affirmation est erronée. Il convient de rappeler que l’objectif recherché était d’offrir à un groupe précis de travailleurs, détenant un plus grand pouvoir de négociation, la possibilité de mener des négociations qui satisferaient plus avantageusement leurs intérêts personnels.

Réglementation s’appliquant aux travailleurs autonomes ou indépendants (article 442-B du Code du travail)

Comme c’est le cas de toutes les dispositions de la loi no 13467 de 2017, la fonction première de l’article 442-B est de conférer une sécurité juridique aux travailleurs indépendants et aux entreprises. Dans ce domaine, le Parlement brésilien, conscient de la nécessité de légiférer sur des situations qui existaient de longue date dans la pratique, a compris qu’il serait judicieux de réglementer la situation des travailleurs indépendants tout en excluant une relation de travail entre les parties contractantes.

La législation brésilienne ne s’est évidemment pas éloignée du principe dit de la primauté de la réalité. A ce propos, il est possible que les autorités compétentes du Brésil découvrent l’existence de relations de travail dissimulées derrière des accords de service. C’est pour cette raison que le Brésil a promulgué une ordonnance qui assure pleinement la reconnaissance d’une relation de travail en cas de subordination juridique entre un travailleur et un employeur. Une fois encore, il est prouvé que le texte de la loi no 13467 de 2017 a précisé la position de la législation tout en préservant la nécessaire sécurité juridique de tous les acteurs sociaux.

Prévalence des accords collectifs sur les conventions collectives (article 620 du Code du travail)

Une autre question soulevée dans le rapport de la commission d’experts fait référence à l’introduction par la loi no 13467 de 2017 d’une règle destinée à renforcer la négociation collective en tenant dûment compte du contexte spécifique d’une catégorie donnée de travailleurs au niveau de l’entreprise. L’intention de cette disposition est de permettre la prévalence de conditions spécifiques (accords collectifs) sur des conditions générales (conventions collectives).

Compte tenu de cela, il ne peut être nié que les accords collectifs reflètent bien mieux le quotidien des travailleurs au niveau de l’entreprise. Les accords collectifs traduisent donc mieux la réalité factuelle en donnant plus de concision aux dispositions négociées.

On peut donc en conclure que, loin de violer l’article 4 de la convention no 98, le nouvel article 620 du Code du travail est parfaitement conforme à cette norme internationale. Il ne fait aucun doute que la convention no 98 affirme le besoin d’adapter les mesures de promotion de la négociation collective aux circonstances nationales. Dès lors, le Parlement brésilien, tout en respectant la convention no 98, a reconnu le caractère spécifique des accords collectifs par rapport aux conventions collectives.

Conclusions

Par respect pour l’OIT, le Brésil a toujours fourni des informations précises sur des détails insignifiants de nombreuses dispositions de la loi no 13467 de 2017.

En outre, comme cela a déjà été indiqué à de nombreuses occasions, il convient de souligner que la situation interne du Brésil, sans aucune incidence sur des questions liées au travail, ne peut servir de prétexte pour exiger que le pays fournisse des explications sur une législation qui a fait l’objet de discussions approfondies au Parlement et qui a été progressivement mise en place dans le cadre des rapports juridiques entre les travailleurs et les employeurs.

De ce point de vue, l’inclusion du Brésil sur la liste préliminaire des cas, pour la deuxième année consécutive, est injustifiée. Toutefois, le Brésil a démontré que la loi no 13467 de 2017 n’a enfreint aucune norme internationale, et plus spécifiquement, la convention no 98.

Discussion par la commission

Représentant gouvernemental – Je me présente devant vous aujourd’hui avec un sentiment profond de déloyauté et d’injustice. Depuis trois ans, l’OIT traite le Brésil d’une manière déraisonnable, infondée et injuste. Au cours de cette période, la commission d’experts n’a pas satisfait aux normes les plus élémentaires d’impartialité et d’objectivité. En 2017, la commission d’experts a publié des observations à titre provisoire en spéculant sur ce qui n’était encore alors qu’un projet de loi en discussion au Congrès brésilien. En 2018, s’étant réunie à Genève quelques jours seulement après l’entrée en vigueur du nouveau Code du travail du Brésil, la commission d’experts a rompu de manière injustifiée le cycle de présentation des rapports et a considéré la nouvelle législation contraire à l’article 4 de la convention.

En dépit des informations complémentaires fournies par le Brésil l’année dernière, la commission d’experts a, encore une fois, en 2019, proposé des pistes de mesures législatives pour le pays, sur le fondement de simples suppositions et préjugés injustifiés. Malheureusement, les lacunes de la commission d’experts ont été aggravées par le manque de transparence, d’objectivité et de véritable tripartisme. Présélectionné deux fois de suite, sans motifs techniques ou valables à ces deux occasions, le Brésil est une illustration de la facilité avec laquelle le système de contrôle de l’OIT peut être utilisé à mauvais escient au détriment de la légitimité et de l’efficacité. Un système qui permet à une analyse hâtive de fabriquer – par le caprice politique de quelques-uns – un cas d’examen par la commission est bien en dessous de ce que l’on attend d’une organisation internationale comme l’OIT. Ce cas montre que le système de contrôle appelle une réforme sérieuse, profonde et globale, dans l’intérêt de tous les mandants, ainsi que le Brésil et le groupe des Etats d’Amérique latine et des Caraïbes (GRULAC) l’ont signalé chaque fois que nécessaire.

En résumé, la commission d’experts juge que la prévalence de la négociation collective, prévue à l’article 611-A du Code consolidé des loi du travail du Brésil, est trop générique et va à l’encontre de l’objectif de promotion de négociations collectives libres et volontaires de l’article 4 de la convention no 98, ainsi que des articles 7 et 8 de la convention (nº 154) sur la négociation collective, 1981. L’analyse de la commission d’experts dans ce domaine est entachée d’au moins trois défauts:

i) la commission ignore complètement les conditions qui ont conduit à ladite réforme du travail en 2017;

ii) le raisonnement juridique de la commission n’est pas fondé sur le texte de ces conventions;

iii) les preuves utilisées par la commission sont loin d’être complètes et impartiales.

En ce qui concerne le premier défaut, je tiens à signaler que la commission a négligé de mentionner qu’au Brésil il était courant dans le passé que le pouvoir judiciaire annule les clauses de travail des conventions collectives, ou des accords collectifs dans leur totalité, sans aucun raisonnement juridique objectif. Cette situation a créé une incertitude juridique et a profondément perturbé les incitations à la négociation collective, donnant lieu à de fréquentes plaintes de la part des syndicats et même des entreprises. Sur plus de 17 000 syndicats au Brésil, un tiers seulement a participé à quelques rares types de négociation collective par année, avant la réforme du travail. C’est un système plutôt dysfonctionnel, étranglé par la bureaucratie, appelant désespérément un nouveau souffle de vie. Ces questions sont devenues particulièrement pressantes dans un contexte de profonde récession économique. Une économie qui condamne plus de 40 pour cent de ses travailleurs à l’informalité, avec 12 millions de personnes sans emploi en plus, soit deux tiers de sa population se retrouvant soit sur le marché parallèle, soit au chômage, sans aucune protection de la sécurité sociale. Une telle économie ne peut en aucun cas être considérée comme saine. En renforçant les conventions collectives, nous donnons la possibilité à chaque catégorie de négocier, collectivement, les meilleures conditions pour concilier qualité de l’emploi et augmentation de la productivité, sans porter atteinte aux droits des travailleurs. Qui suis-je, derrière un bureau ministériel, pour décider de ce qui est le mieux pour chaque travailleur? Qui sommes-nous, ici à Genève, pour décider quels sont les meilleurs droits et les avantages les plus favorables pour une seule catégorie dans des négociations complexes? Nous devons permettre aux travailleurs et aux employeurs d’assumer leurs responsabilités et de décider de ce qui convient le mieux pour leur propre avenir. Bénéficiant d’autres expériences internationales, cependant, la réforme du travail au Brésil n’a pas investi dans des contrats temporaires, qui n’ont cours que pour seulement 1 pour cent de la main-d’œuvre. Elle a, en revanche, préféré opter pour une sécurité juridique accrue pour réduire les taux de renouvellement, améliorer la productivité et promouvoir de meilleures conditions de travail. D’un point de vue comparatif international, la réforme du travail au Brésil se rapproche des institutions en vigueur dans les pays développés, où la négociation collective peut toucher à des dispositions légales couvrant divers sujets. De plus, notre Constitution fédérale consacre plus de 30 droits qui ne peuvent être négociés à la baisse ou être supprimés par le biais d’instruments collectifs ou de négociation individuelle tels, entre autres, la valeur du salaire minimum; le 13e salaire; le congé maternité; les vacances; la rémunération minimale pour service exceptionnel. Aucun de ces thèmes n’a été touché par la réforme du travail. Par conséquent, il ne fait aucun doute que l’ensemble des dispositions pertinentes de la Constitution et du Code du travail prévoient un système qui assure un large éventail de droits tout en permettant des négociations collectives plus ouvertes sur d’autres sujets périphériques.

Sur le deuxième défaut de l’analyse de la commission d’experts, malgré les arguments du Brésil, la commission a simplement réitéré son interprétation selon laquelle les conventions nos 98, 151 et 154 contiennent toutes un «objectif général de promotion de la négociation collective en tant que moyen de parvenir à accord sur des conditions de travail plus favorables que celles envisagées dans la législation». Cette interprétation est simpliste et pourrait être qualifiée de paternaliste, surtout dans le contexte brésilien. En outre, une telle interprétation ne trouve aucun fondement dans les textes de ces conventions. La commission d’experts ne répond pas au gouvernement du Brésil au sujet de l’inexistence d’une base textuelle de sa position et du caractère inapproprié du recours aux «travaux préparatoires».

Quant au troisième défaut majeur de l’analyse de la commission d’experts, le rapport abonde de références à des menaces théoriques non identifiées concrètement sur le système national du travail. La seule base sur laquelle reposent ces références provient de données non justifiées. Par exemple, le rapport utilise des expressions telles que «la productivité du travail peut avoir des conséquences dangereuses», ou «il est possible de déroger», ou «la législation crée les conditions d’une concurrence à la baisse», «l’article 611 risque d’aboutir» et «pourrait inciter à la corruption».

Le rapport fonde également son analyse sur les «premières statistiques» et sur «diverses études» qui n’ont jamais été publiées et vérifiées. Ces soi-disant «études» sont, en fait, des articles de journaux ou des articles écrits par une organisation dirigée par un syndicat et financée de même. Cette organisation n’a consacré que quelques paragraphes à la question de la négociation collective. Toutes les accusations dirigées contre Brésil découlent d’analyses hypothétiques et de simples suppositions par la commission d’experts, un organe qui doit fonder ses procédures sur des constatations, pas sur des spéculations; une commission qui doit toujours s’efforcer de travailler comme un mécanisme s’appuyant sur des preuves et non juger des nations sur la base d’informations fragiles. Tous les pays du monde conçoivent leurs politiques publiques à partir des données disponibles et d’analyses de l’impact réglementaire. Des fondements techniques et des études économiques solides doivent être le socle minimum de tout dialogue, de toute prise de position ou recommandation concernant les politiques et législations nationales.

Il est intéressant d’analyser une étude de 160 pages sur la réforme du travail et les négociations collectives au Brésil récemment publiée par la Fundación Instituto de Investigación Económica (FIPE), une institution de recherche économique de premier plan liée à l’Université de São Paulo.

Dans l’ensemble, la commission d’experts estime que les données fournies par les critiques indiqueraient une diminution du nombre de conventions collectives après l’entrée en vigueur de la réforme du travail. Ce n’est pas une surprise dès lors que les parties ont dû s’adapter à un nouveau système, à un système plus responsable. Ce qui est surprenant, c’est la différence entre les chiffres réels et ceux avancés par la commission d’experts. Alors que les travailleurs déclarent une réduction de 45 pour cent du total des conventions collectives en 2018, la proportion réelle en est de 13,1 pour cent. Au cours des quatre premiers mois de 2019, au démarrage de la phase d’adaptation des négociations de haut niveau, le nombre des accords a augmenté de 7 pour cent, revenant à peu près au niveau d’avant la réforme du travail, ainsi que le démontre encore une fois l’étude de la FIPE.

Par conséquent, les négociations n’ont pas connu de diminution alarmante, comme le prétendent des détracteurs. Plus important encore, les données montrent l’augmentation du nombre de clauses négociées qui créent des conditions plus favorables pour les travailleurs syndiqués. L’étude de la FIPE montre que, sur un échantillon de 20 avantages, 17 sont plus introduits dans les conventions qu’avant la réforme du travail. Comme prévu, les conventions collectives couvrent en effet un éventail plus large d’avantages.

La réforme du travail au Brésil a également été évaluée et scrutée par d’autres organisations internationales. La Banque mondiale, par exemple, a publié une étude intitulée «Emploi et croissance: l’Agenda du Brésil pour la productivité», louant les incitations positives de la réforme visant à corriger les facteurs d’inefficacité du marché du travail, tout en offrant davantage de possibilités aux travailleurs, en particulier les pauvres et les plus vulnérables. Une deuxième étude de la Banque mondiale intitulée «Compétences et emplois: un agenda pour la jeunesse» indique que la réforme contribue accroître la sécurité juridique, qu’elle crée des incitations pour des syndicats plus réactifs et plus responsables, tout en facilitant la résolution des conflits sur le marché du travail.

L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et le Fonds monétaire international (FMI) ont également salué la réforme du travail du Brésil qui, à leur avis, contribue à la création d’emplois et à la diminution des taux scandaleux de travail informel. Ce sont des organisations internationales indépendantes dotées d’une expertise technique renommée, certainement une source d’information beaucoup plus fiable qu’un article de journal.

S’agissant de l’obligation de mener des consultations, la commission d’experts ne démontre pas la pertinence de la question pour l’examen de l’application de la convention. Le cas échéant, la commission devrait traiter cette question dans le cadre de la mise en œuvre de la convention (nº 144) sur les consultations tripartites relatives aux normes internationales du travail, 1976, qui n’est pas soumise à notre examen.

Les allégations à ce sujet sont encore plus absurdes. Depuis 2003, les négociations collectives font l’objet de vastes discussions avec les partenaires sociaux au Brésil. En 2016, avant que la réforme ne parvienne au Congrès, le gouvernement avait en effet entrepris des «consultations préalables» avec toutes les centrales syndicales avant de finaliser et de transmettre au Parlement le projet de loi contenant déjà les dispositions relatives à la négociation collective. Je dois rappeler que le projet de loi a été signé et envoyé au Congrès lors d’une cérémonie présidentielle dans le bâtiment principal de l’exécutif, en présence de toutes les confédérations d’employeurs et de toutes les centrales syndicales, sauf une.

Les deux chambres du Congrès brésilien ont tenu au total 30 audiences publiques réunissant plus de 120 spécialistes. Des économistes, des juristes, des employeurs et la grande majorité des centrales syndicales ont pris part à ces discussions. Sept séminaires régionaux officiels ont également été organisés, et des dizaines de séminaires privés, tables rondes et discussions formelles ont été organisés au sein d’une société civile dynamique du Brésil, un témoignage de la liberté d’expression et du dialogue social. A la chambre basse uniquement, une centaine de représentants étaient liés aux syndicats ou aux travailleurs. Enfin, la réforme a été approuvée par les deux chambres du Parlement à une large majorité des deux tiers environ des représentants.

Les consultations préalables, associées à une activité parlementaire intense de tous les groupes, attestent de la légitimité du processus et du plein respect de la convention. Plus de 2 000 amendements au projet de loi ont été présentés au sein du Congrès. Plusieurs aspects importants du projet de loi ont en effet été modifiés dans l’intérêt de la société dans son ensemble, ce qui a abouti à la loi no 13467, comme cela est normal et attendu dans tout pays démocratique.

A ce propos, c’est le même Congrès qui a évalué et ratifié 97 conventions de l’OIT. Remettre en question la capacité et la légitimité du Congrès brésilien à débattre de la réforme du travail serait remettre en cause sa légitimité à ratifier les conventions de l’OIT, et nous comprenons que ce n’est pas l’intention de l’Organisation.

Il est très important de noter qu’une trentaine de procédures judiciaires ont été présentées à la Cour suprême fédérale contre des aspects de la réforme. Aucune – je répète, aucune – n’évoque la négociation collective. Nous appelons à la cohérence et invitons les détracteurs à présenter leur cas à la Cour suprême afin de vérifier la cohérence de la réforme du travail au regard de la Constitution brésilienne et de la convention.

Pour conclure, considérant que le Brésil a ratifié 97 conventions de l’OIT et que ses résultats du point de vue des mécanismes de contrôle de l’OIT sont exemplaires; reconnaissant que le Code du travail du Brésil est l’un des plus complets au monde et que les droits du travail sont inscrits dans la Constitution brésilienne; considérant que les accusations portées contre le Brésil reposent sur des informations inconsistantes et que la commission d’experts devrait être un mécanisme fondé sur des preuves; tenant compte du fait que le Brésil a présenté des études techniques menées par des institutions de recherche renommées et par des organisations internationales; et, constatant que la modernisation du travail au Brésil est toujours en cours sous le contrôle de la Cour suprême, le Brésil demande à cette commission de corriger cette erreur historique et de s’abstenir de formuler de nouvelles recommandations sur la réforme du travail au Brésil, tout en reconnaissant la pleine conformité du Brésil avec la convention et l’Organisation internationale du travail.

Membres employeurs – Nous voudrions commencer par remercier, au nom du groupe des employeurs, le représentant du gouvernement pour son exposé détaillé sur les aspects de cas. Comme la commission en est consciente, ce cas porte sur une convention fondamentale, la convention no 98, et il est lié à la question plus large des réformes du marché du travail de 2017 au Brésil. La commission d’experts a fait observer que l’adoption des réformes du marché du travail n’était pas compatible avec l’article 4 de la convention. Toutefois, de l’avis du groupe des employeurs, le lien entre les réformes et l’article 4 de la convention est ténu, et les observations de la commission d’experts reposent sur des hypothèses sans fondement et des interprétations erronées. A notre avis, il n’y a pas de problème de fond substantiel en ce qui concerne le respect par le Brésil de la convention.

Pour ce qui est de la procédure, les employeurs notent que, l’année dernière, la commission d’experts avait interrompu le cycle de présentation des rapports et avait exprimé sa profonde préoccupation quant au fait que les réformes adoptées dans le cadre de la loi portant réforme de la consolidation des lois du travail (CLT) n’ont été adoptées que le 13 novembre 2017 et donc lors de l’examen du cas par la commission d’experts, les informations et l’expérience étaient insuffisantes pour qu’il puisse être fait correctement.

Nous notons également que les conclusions de la commission en 2018 demandent au gouvernement de fournir des informations sur la réforme du marché du travail aboutie. Nous notons également que les observations de la commission d’experts de 2018, soumises à cette session de la commission, sont les mêmes qu’auparavant, ce qui préoccupe le groupe des employeurs. La commission d’experts n’a peut-être pas correctement analysé la position des employeurs et les conclusions de la Commission de l’application des normes. Nous continuerons à travailler avec la commission d’experts pour mettre en lumière ces préoccupations et, à ce stade, je demande à un autre membre employeur de fournir les éléments de fond des observations du groupe des employeurs sur ce cas.

Autre membre employeur – Je me concentrerai dans mes commentaires point par point sur les problèmes soulevés par la commission d’experts dans l’observation de 2018.

Tout d’abord, et en ce qui concerne l’approbation de la loi no 13467 au Brésil, les experts tentent de justifier l’examen anticipé de la loi sur la base des demandes et des informations fournies par les syndicats brésiliens et internationaux sans tenir compte des points de vue divergents du gouvernement brésilien, des employeurs brésiliens et de l’ensemble du gouvernement et l’ensemble du groupe des employeurs suite à la discussion du cas l’année dernière. Cela nous inquiète.

Deuxièmement, en ce qui concerne la relation entre la négociation collective et la loi et les articles 611-A et 611-B, nous soulignons que nous ne partageons pas l’analyse des experts quant à la non-conformité des articles susmentionnés au regard de la convention no 98 ni quant à la demande des experts au gouvernement de réviser la législation en question.

Pour le groupe des employeurs, l’article 4 de la convention n’interdit pas à la loi d’autoriser des dérogations aux dispositions législatives par le biais de conventions collectives ni d’établir des niveaux de protection plus élevés ou plus bas que ceux prévus dans certaines dispositions de la loi. En fait, les niveaux de protection établis par la loi en l’espèce ne sont pas absolus, mais doivent être examinés à la lumière de la possibilité pour les conventions collectives d’apporter des changements pour des périodes déterminées. L’article 4 de la convention ne dit rien sur la relation entre la loi et les conventions collectives, notamment sur la possibilité d’autoriser légalement des exceptions à la loi au moyen des conventions collectives. En outre, l’article 4 de la convention ne contient aucune disposition selon laquelle les stipulations des conventions collectives doivent toujours être plus favorables aux travailleurs que les dispositions de la loi. Le seul but clair de l’article 4 de la convention est de permettre aux partenaires sociaux de négocier, dans le cadre établi par la loi (pouvant inclure des autorisations permettant d’établir des exceptions), des conditions plus appropriées (plus favorables en tout ou partie) pour ses membres, aux niveaux sectoriel, régional, professionnel ou de l’entreprise.

Cependant, la question de savoir si la loi peut autoriser des dérogations dans les conventions collectives et dans quelle mesure elle pourrait le faire n’est pas régie par l’article 4 de la convention. De même, l’article 4 de la convention ne prévoit pas l’autorisation générale ou plus restrictive d’apporter des changements, comme cela semble être le cas suivant les articles 611­A et 611-B. L’article 4 ne traite donc tout simplement pas de cette question, et c’est aussi simple que cela.

Nous ne partageons pas l’avis des experts selon lequel l’introduction des articles 611-A et 611-B ne favorise pas de manière adéquate «le développement complet et l’utilisation de mécanismes de négociation volontaire entre employeurs ou organisations d’employeurs et organisations de travailleurs...» Dans le sens de l’article 4 de la convention, pour les raisons suivantes:

1) le droit de négociation collective des organisations de travailleurs n’est pas affecté par les modifications de la législation;

2) les organisations de travailleurs brésiliennes ne rencontrent aucun obstacle pour négocier de meilleures conditions de travail pour leurs membres;

3) si les employeurs font des propositions que les organisations de travailleurs ne jugent pas appropriées, ces derniers ne sont pas obligés de les accepter;

4) la marge de négociation volontaire s’est agrandie, car non seulement des normes plus strictes peuvent être convenues, mais aussi, par exemple, des règles plus strictes en échange de normes moins strictes dans d’autres domaines (considérés comme mineurs);

5) l’argument des experts selon lequel il y a eu diminution significative du nombre de conventions collectives ne semble pas être un indicateur pertinent indiquant que la négociation collective n’est pas suffisamment encouragée: étant donné que les réformes du marché du travail impliquent diverses modifications législatives, la diminution de la conclusion de nouvelles conventions collectives peut avoir des raisons sans aucun lien avec les modifications introduites aux articles 611-A et 611-B et, en outre, étant donné que la portée des conventions collectives varie considérablement d’un pays à l’autre, aucun niveau de couverture particulier n’est prescrit pour ce qui est de la conformité à l’article 4 de la convention.

Il ne s’agit donc pas d’une question de quantité mais de qualité. Par conséquent, la seule chose que l’on puisse dire ici, c’est que le gouvernement, en consultation et en coopération avec les partenaires sociaux, peut continuer à observer l’impact des réformes dont la mise en œuvre date de peu de temps, pour décider des adaptations jugées opportunes.

Toutefois, le gouvernement n’est pas tenu de procéder à des modifications en raison des obligations qui lui incombent en vertu de la convention, même si les experts l’ont demandé. Rappelons que, dans ses conclusions sur le cas en 2018, la Commission de l’application des normes avait seulement demandé au gouvernement de fournir plus d’informations pertinentes et avait délibérément choisi de ne pas lui demander de modifier la loi.

Nous notons avec préoccupation que les experts (et d’une certaine manière le Bureau lui-même dans son rôle de soutien) ont ignoré le défaut de consensus tripartite sur cette question, comme en témoignent les conclusions de la commission de 2018, et continuent de demander au gouvernement de revoir la loi.

Je voudrais évoquer la relation entre la négociation collective et les contrats de travail individuels. En premier lieu, en ce qui concerne la possibilité prévue à l’article 444 de la loi portant réforme de la CLT, selon lequel les travailleurs ayant une éducation et un revenu supérieurs décident de négocier librement les termes et conditions de travail spécifiques (à l’exception des droits fondamentaux énumérées à l’article 611-B), nous considérons que cette question n’a aucun rapport avec l’article 4 de la convention. L’article 4 de la convention traite de la promotion de la négociation collective, mais pas des relations entre la loi et les contrats de travail individuels. Nous estimons donc que cette question sort complètement du cadre de la convention qui nous intéresse.

En outre, l’article 444 fait référence à un groupe de travailleurs qui, en raison de leurs études et de leurs revenus supérieurs, de leur statut social et de leur autonomie, semblent, en tout état de cause, être mieux placés pour négocier individuellement et peuvent être plus intéressés par une certaine flexibilité pour négocier leurs conditions de travail individuelles. Nous estimons donc que les vues des experts ne sont pas fondées sur l’article 4 de la convention.

Contrairement à ce qu’affirme la commission d’experts, l’article 4 n’exige pas que les contrats de travail prévoient des conditions et des termes toujours plus favorables que ceux des conventions collectives. S’il est vrai que les contrats de travail ne peuvent pas créer d’exceptions aux conventions collectives applicables sur la base de leur propre statut juridique, ils peuvent le faire lorsque la loi l’autorise de manière explicite. Et l’article 4 de la convention n’interdit pas à la loi d’accorder de telles autorisations dans des cas spécifiques.

La commission semble également considérer que l’article 444 exempt du champ d’application de la convention le groupe de travailleurs qui y est défini. Cependant, ce n’est pas le cas. Ces travailleurs jouissent de la pleine protection de l’article 4 de la convention, à moins que et dans la mesure où ils décident librement de ne pas exiger cette protection.

En ce qui concerne le champ d’application de la convention et la nouvelle définition du travailleur indépendant par le nouvel article 442-B, il faut d’abord préciser que l’article 4 de la convention s’applique aux «travailleurs» et à leurs organisations. Le gouvernement est parfaitement fondé à définir le terme «travailleur» et à faire la distinction entre «travailleurs» et «contractants indépendants». Il semble que le gouvernement utilise dans ce contexte le critère de la «position subordonnée», qui ne semble pas poser de problèmes avec les objectifs de l’article 4 de la convention. En ce sens, nous ne partageons donc pas l’analyse des experts et leur demande d’adaptation des procédures de négociation collective formulée dans le rapport, qui semble ne reposer que sur des informations générales fournies par les syndicats sans un examen exhaustif des questions par la commission d’experts.

Pour clore l’analyse des observations, j’évoquerai la relation entre les différents niveaux de la négociation collective. Nous considérons que l’article 620, qui donne la priorité aux conventions collectives de travail couvrant une ou plusieurs entreprises, sur les conventions collectives sectorielles ou professionnelles conclues à un niveau plus large, ne pose aucun problème au regard de l’article 4 de la convention ni à aucun autre instrument de l’OIT, à savoir:

- L’article 4 de la convention ne traite pas de la hiérarchie juridique des différents niveaux de la négociation collective.

- La recommandation (nº 91) sur les conventions collectives, 1951, ne mentionne que la relation entre les conventions collectives et les contrats de travail individuels.

Je tiens à préciser que les clauses plus favorables négociées uniquement au niveau sectoriel seront remplacées par des clauses moins favorables dans les conventions collectives de travail dans lesquelles:

- les syndicats au niveau de l’entreprise conviennent de conclure un accord d’entreprise; et quand

- les syndicats acceptent une clause moins favorable.

Rien de tout cela n’est automatique ou évident. Les syndicats ne sont en aucun cas obligés de le faire.

Dans la mesure où l’article 620 autorise également des clauses moins favorables dans les contrats de travail et, par conséquent, la négociation de conditions plus favorables dans des cas précis par rapport à des conditions moins favorables dans d’autres cas, il élargit le champ des négociations collectives à ce niveau. Etant donné que l’article 620 rend la négociation collective plus attrayante et la favorise, le groupe des employeurs est d’avis qu’il répond pleinement aux objectifs de l’article 4 de la convention.

Compte tenu de ce qui précède, le groupe des employeurs ne voit pas la nécessité de demander au gouvernement davantage d’informations sur ce dernier aspect.

Enfin, en ce qui concerne les problèmes évoqués dans l’observation de 2016, nous estimons qu’ils n’auraient pas dû l’être sous forme d’observation, mais sous forme de demande directe d’information au gouvernement concerné.

Membres travailleurs – C’est la deuxième fois que nous discutons de l’application de la convention au Brésil. Nous avons discuté de ce cas l’année dernière au sein de la commission, ainsi que l’année précédant l’inscription du Brésil sur une longue liste. Le cas du Brésil est en train de devenir un cas de défaut continu d’application des normes de l’OIT.

Cela est profondément attristant pour le groupe des travailleurs. Après des années de progrès social, alors que des millions de personnes sont sorties de la pauvreté, non seulement grâce à des mesures fortes de sécurité sociale, mais également grâce à la mise en place d’institutions puissantes de négociation collective, nous assistons à une destruction presque sans précédent de la négociation collective, ainsi que d’autres piliers des institutions du marché du travail et de la démocratie.

Comme nous le craignions, la loi no 13467 portant réforme de la consolidation des lois du travail a eu un impact désastreux sur les droits de négociation collective et les relations professionnelles dans leur ensemble.

L’année dernière, notre commission avait formulé deux recommandations principales: premièrement, que le gouvernement fournisse des informations et une analyse sur l’application des principes de négociation collective libre et volontaire dans la nouvelle réforme du droit du travail; et, deuxièmement, que le gouvernement fournisse des informations sur les consultations tripartites avec les partenaires sociaux concernant la réforme de la législation du travail.

Le groupe des travailleurs rappelle qu’un nouveau paragraphe 611-A de la loi portant réforme de la CLT inverse complètement la hiérarchie entre la loi et la négociation collective. Il établit un principe général voulant que les conventions et accords collectifs l’emportent sur la législation, à l’exception des 30 droits constitutionnels mentionnés à l’article 611-B de la CLT, auxquels il ne peut être dérogé. De même, aux termes de l’article 620 de la CLT, tel que modifié par la loi no 13467, les clauses plus favorables négociées au niveau de l’activité sectorielle professionnelle sont remplacées par des clauses moins protectrices négociées au niveau de l’entreprise.

L’année dernière, le groupe des travailleurs a vivement déploré les graves lacunes et faiblesses de ces dispositions. Nous avons mis en garde contre une atteinte irréversible, à terme, à la légitimité de la négociation collective. Ces dispositions constituent une atteinte frontale au principe de la négociation collective libre et volontaire consacré par l’article 4 de la convention. Nous rappelons que l’objectif général de la promotion de la négociation collective est de parvenir à un accord sur des conditions de travail plus favorables que celles prévues dans la législation ou dans des clauses négociées à un niveau supérieur. Cela est stipulé dans les conventions nos 98, 151 et 154, qui ont d’ailleurs toutes été ratifiées par le Brésil.

Les modifications introduites par la loi no 13467 ont un effet fortement dissuasif sur le recours à la négociation collective et créent les conditions d’une concurrence à la baisse entre les employeurs en matière de conditions d’emploi. Le gouvernement du Brésil a fait valoir l’an dernier que les réformes étaient liées à la récession économique et que le temps apporterait la preuve que les changements produiraient un effet positif sur l’emploi et les relations professionnelles. Un an après, nous ne pouvons que constater l’incidence catastrophique de la loi no 13467 relative à la négociation collective sur le chômage au Brésil. Selon les données officielles de l’Institut brésilien de géographie et de statistique, en avril 2019, le chômage atteignait 12,5 pour cent des Brésiliens, soit 13,2 millions de chômeurs, ce qui représente une augmentation de 4,4 pour cent par rapport à décembre 2018. La couverture de la négociation collective a été réduite de 39 pour cent. Cette loi a tout bonnement augmenté le chômage. Les conséquences de cette loi pour les travailleurs brésiliens ont été dévastatrices.

De plus, nous rejetons les arguments du gouvernement adressés à la commission d’experts selon lesquels les amendements apportent une plus grande sécurité juridique. Les preuves montrent que les nouvelles dispositions de la CLT restreignent la négociation collective en tant qu’instrument dont l’objectif est d’améliorer les conditions de travail. Elles exposent également les syndicats à des menaces et à des pressions pour les amener à accepter les dérogations et les inciter à la corruption dans les relations de travail collectives. En effet, les nouvelles dispositions de la CLT permettent à tous les syndicats, quel que soit leur niveau de représentativité, de négocier en deçà du niveau de protection juridique. Nous dénonçons, à l’instar de la commission d’experts, l’inversion de la hiérarchie des normes instaurée par les articles 611-A et 620 de la CLT. Nous dénonçons également les très vastes possibilités de dérogation aux normes plus élevées et plus protectrices offertes par ces dispositions de la CLT.

Nous rappelons les deux principes qui sous-tendent la convention. Et la recommandation no 91 réaffirme ces principes: le principe de la négociation collective libre et volontaire; et le caractère contraignant des conventions collectives. Les articles 611-A et 620 de la CLT modifiée sont contraires à ces principes.

Nous sommes extrêmement préoccupés par le mépris du gouvernement pour les effets désastreux que la loi no 13467 a déjà eus sur les travailleurs au Brésil. Ces effets négatifs seront encore plus graves si des mesures ne sont pas prises immédiatement pour abroger ces amendements régressifs. Par conséquent, nous demandons instamment au gouvernement du Brésil de procéder à un réexamen immédiat de la CLT, en consultation avec les partenaires sociaux, en vue d’abroger ses articles 611-A, 611-B et 620.

En outre, nous devons exprimer à nouveau notre profonde préoccupation au sujet du nouvel article 444 de la CLT. Cet article prévoit la possibilité de déroger au contenu des conventions collectives dans les contrats individuels de travail pour les travailleurs titulaires d’un diplôme d’enseignement supérieur et dont le salaire est au moins deux fois supérieur au plafond des prestations du régime général de sécurité sociale.

Dans son rapport à la commission d’experts, le gouvernement cherche à minimiser l’impact de cette disposition en faisant valoir qu’elle ne s’appliquerait qu’à une faible proportion des travailleurs, environ 2 pour cent. Un tel raisonnement, même s’il est prouvé qu’il est exact, n’exonère pas le gouvernement de l’application de la convention, y compris de l’objectif de promotion de la négociation collective énoncé à l’article 4. Il ne permet certainement pas au gouvernement de créer de nouvelles catégories de travailleurs pouvant être exclues du bénéfice de la convention.

Nous exhortons le gouvernement du Brésil à prendre sans tarder, en consultation avec les partenaires sociaux, les mesures nécessaires pour rétablir les principes de l’effet contraignant des conventions collectives et de leur primauté sur les contrats de travail individuels, lorsque ceux-ci sont moins favorables.

Nous réitérons également notre inquiétude quant à l’extension de la définition des travailleurs autonomes et des travailleurs indépendants dans le nouvel article 442-B de la CLT. Un nombre important de travailleurs est maintenant exclu des droits inscrits dans la convention.

Nous rappelons que plus de 23,9 millions de travailleurs sont des travailleurs indépendants au Brésil, soit une augmentation de 4,1 pour cent depuis avril 2018. De plus, 11,2 millions de travailleurs exercent leur activité dans l’économie informelle, sans aucune protection juridique contre les abus, ce qui représente une augmentation de 3,4 pour cent depuis 2018.

Nous nous associons à la commission d’experts pour ce qui est du principe de l’application du droit de négociation collective également aux organisations représentant les travailleurs indépendants. Toutes les mesures nécessaires doivent être adoptées pour que les travailleurs autonomes et les travailleurs indépendants soient autorisés à participer à une négociation collective libre et volontaire.

Enfin, nous appelons le gouvernement à remédier sans tarder aux lacunes et aux insuffisances législatives concernant les points suivants:

- une protection adéquate contre la discrimination antisyndicale;

- l’arbitrage obligatoire dans le cadre de l’obligation de promouvoir la négociation collective libre et volontaire;

- le droit de négociation collective dans le secteur public;

- la soumission des conventions collectives à la politique financière et économique.

Nous rappelons également à la commission que la loi no 13467 a été adoptée à la hâte et sans véritable consultation préalable des organisations de travailleurs. A cet égard, nous notons l’inquiétude exprimée par la commission d’experts face à l’absence d’un processus structuré de dialogue social tripartite destiné à l’élaboration d’un accord sur le contenu de la réforme. Des audiences publiques organisées au sein du Parlement en présence de syndicats et d’organisations d’employeurs ne sauraient remplacer le dialogue social. Le gouvernement doit impliquer les partenaires sociaux dans de véritables négociations dans le cadre de l’organe tripartite national. Ces négociations devraient de toute urgence être axées sur la révision des amendements introduits par la loi no 13467 et sur l’abrogation de toutes dispositions de la CLT non conformes aux principes et aux dispositions de la convention.

L’année dernière, nous avons porté ces questions à l’attention de la commission, et la commission d’experts a, entre-temps, formulé de nouvelles observations.

De plus, depuis notre dernière discussion sur ce cas, l’administration a changé. Mais pas tellement sur le plan de la politique et de la posture. Il a été publiquement proclamé que les travailleurs brésiliens doivent désormais choisir entre des droits et un emploi. Le gouvernement affirme que réclamer les deux ne sera pas possible et il indique donc clairement qu’il n’a nullement l’intention de donner effet aux droits inscrits dans la convention. C’est totalement inacceptable, et nous, les travailleurs, ne resterons pas silencieux. Si le gouvernement refuse de dialoguer de manière constructive avec nous, il nous obligera à faire entendre notre voix dans les rues et sur les lieux de travail.

Hier, 45 millions de travailleurs brésiliens à travers plus de 300 villes ont précisément fait cela à l’occasion de la grève générale menée par les syndicats, les mouvements sociaux et la population en général, tous scandalisés par la privation de la protection dont ils bénéficiaient ces vingt dernières années. Nous exhortons le gouvernement à prendre ce signal très au sérieux.

Il est clair que le gouvernement n’est pas content de devoir comparaître devant la commission et d’entendre les voix parvenant du monde entier. Mais ses véritables défis seront d’écouter réellement les voix de ses propres travailleurs et de sa population.

Membre employeur, Brésil – Tout d’abord, rappelons-nous que ce cas a été examiné par cette commission, sur les mêmes motifs, une prétendue contradiction par rapport à la convention. A cette occasion, il a été reconnu qu’il n’existait aucun élément constitutif d’infraction à la convention, il a été demandé uniquement des renseignements complémentaires, qui ont été soumis. Depuis lors, aucun fait nouveau ne justifie une nouvelle discussion du cas, ce qui nous amène à analyser le contexte et les motifs de l’inclusion du Brésil dans la liste restreinte et à nous demander pourquoi nous sommes ici.

Nous allons donc analyser les allégations qui ont amené le Brésil à fournir à nouveau des informations à cette commission. Commençons par l’interprétation de la commission d’experts selon laquelle une négociation ne devrait avoir lieu que pour offrir aux travailleurs des avantages supérieurs à ceux prévus par la loi.

A l’occasion du cas du Brésil, en 2018, nous avions déjà exprimé notre inquiétude face à l’adoption d’interprétations extensives des conventions dans ce cas. L’esprit de la convention est que des négociations libres et volontaires affirment la volonté des parties. La Constitution du Brésil honore la convention et reconnaît la négociation collective comme un droit social du travail, renforçant ainsi son engagement envers les membres constituants conformément aux préceptes de cette convention.

Cela soulève les questions suivantes: une interprétation aussi large doit-elle prévaloir pour l’application de la convention dans mon pays? Quel précédent sera créé pour les plus de 160 pays signataires de cette convention? Comment les futures analyses de la négociation collective seront-elles appliquées dans le monde entier? Allons-nous changer les règles du jeu? La négociation collective devient-elle un instrument de concessions unilatérales? Est-ce qu’elle cesse d’avoir comme essence un ajustement mutuel des termes et conditions de travail et des concessions réciproques?

La tentative réitérée d’analyser la législation brésilienne au regard de ces arguments soulève à nouveau des doutes. Nous ne comprenons pas plus quels sont les critères adoptés: s’agit-il de critères politiques au détriment de l’analyse partant obligatoirement du point de vue des critères techniques? Si tel est le cas, il convient de rappeler que cette organisation est essentiellement une organisation technique et qu’elle doit le rester.

Quoi qu’il en soit, je dois dire que la réforme du travail au Brésil, dont nous discutons aujourd’hui, est avant tout une réforme nationale. C’est bien justement grâce à elle que le Brésil est sorti d’une législation obsolète du siècle dernier et s’est aligné sur les principales économies du monde. C’est également grâce à elle que la voix des travailleurs et des employeurs a été renforcée afin qu’ils puissent établir ensemble leurs conditions de travail, avec une ingérence minimale de l’Etat.

On entend, sans fondement raisonnable, qu’en établissant la prédominance de la négociation collective pour réglementer les relations de travail le Brésil aurait adopté une loi contraire à la convention. L’article 4 de la convention indique clairement que les pays doivent adopter des «mesures adaptées aux conditions nationales, pour encourager et promouvoir le développement et l’utilisation de procédures de négociation volontaire», en vue de «réguler les conditions d’emploi».

D’autre part, la convention no 154 stipule dans son article 2 que la négociation collective sert à «fixer les conditions de travail et d’emploi» ou à «régler les relations entre employeurs et travailleurs». Il ne fait également aucun doute, dans son cinquième article, que les pays doivent adopter des mesures adaptées à leurs réalités. Ainsi, la négociation collective facilite toutes les questions relatives à la détermination des conditions de travail et d’emploi afin de régler les relations de travail. A cet égard, le Comité de la liberté syndicale a souligné à plusieurs reprises ce que nous soulignons ici: il est nécessaire de susciter et d’encourager le recours à la négociation avec une intervention minimale de l’Etat.

Au Brésil, après des discussions avec les acteurs sociaux, le Congrès national a défini les limites et les possibilités de la négociation collective. Cela a permis au Brésil de surmonter un scénario d’insécurité du dialogue social, qui s’est répété sous la forme d’une annulation parfois arbitraire d’instruments collectifs convenus librement et volontairement.

Ce scénario a été résumé de la manière suivante par la Cour constitutionnelle suprême du Brésil: «il ne faut pas voir d’un bon œil l’invalidation systématique des conventions collectives sur la base d’une logique de limitation de l’autonomie de la volonté applicable exclusivement aux relations de travail individuelles. Une telle ingérence viole plusieurs dispositions constitutionnelles qui confèrent un prestige à la négociation collective en tant qu’instrument de résolution des conflits collectifs, en plus de refuser aux employés la possibilité de participer à la formulation de normes qui régissent leur vie.»

Ce qui s’est passé alors, c’est que le Brésil a mis en place des mécanismes selon ses conditions, alors que l’insécurité juridique régnait.

Il est remarquable que le Brésil n’accorde en aucune manière l’autorisation de déroger à la législation du travail par le biais d’instruments collectifs. Il existe des limites temporelles et matérielles claires. Temporairement, l’instrument collectif a une durée maximale de validité de deux ans lorsqu’il n’est pas négocié, c’est-à-dire qu’en l’absence de clause collective les termes et conditions énoncés dans le droit commun et dans la Constitution prévalent dans leur intégralité.

En outre, il existe une longue liste de domaines qui ne peuvent être négociés, ni en vue de les réduire ni en vue de les supprimer, par exemple le montant du salaire minimum, les congés de maternité et de paternité, les 30 jours de congé annuel, les normes de sécurité et de santé, parmi plus de 40 droits garantis; il n’y a donc aucune raison permettant d’affirmer que la prédominance de la négociation collective sur la législation ordinaire, schéma défini par le Brésil, est contraire à la convention.

En ce qui concerne la négociation individuelle, il convient de noter que le nouveau règlement permet aux employés bien formés et bien rémunérés de négocier leurs conditions de travail. Sur le marché du travail actuel, cela représente 0,25 pour cent de la population brésilienne ou 1,45 pour cent des employés du secteur formel.

L’option brésilienne consiste dans le maintien des travailleurs qui sont dans une relation de travail, mais aussi à augmenter leur capacité de négociation, en garantissant tous les droits et toutes les protections. Elle est donc conforme à la convention.

Pour toutes ces raisons, je le réaffirme, le Brésil a donné de l’importance aux travailleurs et aux employeurs, avec la grande responsabilité de négocier, dans des limites bien définies, en réduisant la marge d’intervention des pouvoirs publics dans les négociations collectives, conformément à la convention.

En d’autres termes, la réforme du travail au Brésil:

i) applique la convention en instaurant une négociation libre et volontaire entre travailleurs et employeurs;

ii) protège la négociation collective des interférences extérieures;

iii) consolide un mécanisme efficace pour faire face à la concurrence économique, conformément aux tendances internationales en la matière;

iv) aligne le Brésil sur les autres pays Membres de l’OIT;

v) harmonise et équilibre, avec sa nouvelle formule qui permet la négociation de conditions de travail distinctes par rapport à la loi, à l’exception de tous les droits du travail prévus par la Constitution, le principe de la liberté de négociation avec le principe de protection des travailleurs.

Enfin, force est de constater que cette question n’a pas été soumise aux instances judiciaires nationales du Brésil avant de l’être à l’OIT. Aucun de ces syndicats n’a présenté de recours à la Cour constitutionnelle brésilienne pour signaler une quelconque violation de la Constitution, de la convention ou de toute autre norme de l’OIT et remettre en question le nouveau paradigme de la négociation collective. Parce qu’il n’y a rien à en redire qui relève de la Cour suprême fédérale, cette dernière a néanmoins examiné d’autres questions qui ne concernent pas du tout ce dont nous traitons ici et maintenant. En fait, le mécontentement semble s’expliquer par le fait que la cotisation syndicale est devenue facultative, mais cette question n’est pas soulevée par les commentaires de la commission d’experts.

Nous, employeurs du Brésil, espérons vivement que cette commission – espace de dialogue et de tripartisme –, en pleine célébration de son centenaire, n’examinera que les faits concrets et les motifs techniques et qu’elle conclura donc que la réforme du travail au Brésil est en conformité avec la convention.

Membre travailleur, Brésil – Nous discutons aujourd’hui du processus de développement et des effets néfastes de la réforme du travail au Brésil, la loi no 13467 de 2017, et de la manière dont le Brésil a violé à plusieurs reprises les termes de la convention. La réforme du travail brésilienne a été approuvée avec la promesse de moderniser les relations de travail, de créer des emplois, de promouvoir des négociations collectives plus nombreuses et de meilleure qualité et de lutter contre l’informalité. Aucune de ces promesses n’a été tenue!

En 2017, même avant l’approbation de la loi, nous avons fait part de nos préoccupations à cette Organisation. Le rapport de la commission d’experts de cette année-là mettait en garde contre l’impact possible de la réforme et rappelait que, comme conséquence de l’interprétation de la convention en relation avec la convention no 154, la négociation collective a pour objectif d’accroître la protection sociale, de ne jamais la diminuer!

En 2018, le cas du Brésil a été examiné par cette commission, et le gouvernement et les employeurs ont soutenu qu’il n’y avait pas eu violation des normes dans ce cas, que la loi no 13467 préconisait plus de négociations collectives et de meilleure qualité et que l’absence de données fausserait toute analyse du cas.

Et aujourd’hui, deux ans après l’approbation de la loi, quels sont les résultats?

Selon la dernière enquête de l’Institut brésilien de géographie et de statistique, organisme gouvernemental officiel, le chômage a atteint au Brésil 12,5 pour cent de la population active au premier trimestre 2019, contre 11,8 pour cent au dernier trimestre de l’année 2017 – date d’entrée en vigueur de la loi. C’est-à-dire que, depuis le début de la réforme du travail, le nombre de chômeurs brésiliens a augmenté de près de 1 million. Le travail informel a augmenté de 4,4 pour cent par rapport au premier trimestre de 2018, et le nombre de travailleurs découragés (qui ont cessé de chercher du travail) a atteint son record.

Selon la FIPE, liée à l’Université de São Paulo, l’une des plus respectées au Brésil, entre 2017 et 2018, les négociations collectives ont chuté de 45,7 pour cent, conséquence directe de la réforme du travail, c’est-à-dire que d’une année à l’autre près de la moitié de la couverture et de la protection collective ont tout simplement cessé d’exister.

A la chute vertigineuse du nombre de négociations collectives, il s’est ajouté la possibilité que, individuellement, les travailleurs soient obligés de renoncer aux droits garantis par les conventions collectives; un accord révoque des clauses de conventions plus favorables aux travailleurs et l’existence de contrats précaires ou cherchant à masquer la relation de travail. Tout cela, en pratique, signifie la fin des droits.

La loi no 13467 a résulté, dans une inversion sans précédent, de la hiérarchie des normes du travail: au lieu de construire une chaîne de protection croissante dans laquelle la loi serait le socle sur lequel seraient érigés des droits reconnus par la négociation collective, cette logique a été inversée pour permettre d’inclure un accord individuel qui l’emporte sur la loi, sur les accords et les conventions collectives, violant ainsi la convention de façon flagrante. Pour nous, cette loi est un retour à des niveaux de relations de travail d’il y a cent ans et un échec dans la recherche de la justice sociale.

Cela n’a pas suffi, une véritable persécution des syndicats est en cours dans le but de réduire notre capacité à agir et à mener des négociations collectives libres et volontaires.

En mars de cette année, le gouvernement, sans aucune consultation tripartite ni dialogue social, a promulgué la mesure provisoire no 873 (décret présidentiel ayant force de loi), dans lequel il est interdit aux employeurs et aux travailleurs de négocier librement des quotas de soutien financier approuvés lors d’assemblées. Une contradiction énorme avec la promesse de promouvoir une négociation libre entre les parties. Il est impossible de renforcer la négociation collective dans un pays où la loi empêche les travailleurs et les employeurs d’établir librement les conditions du financement des syndicats.

Nous dénonçons ici l’absence totale de dialogue social et tripartite dans ce processus, malgré toutes les recommandations et observations formulées par la commission d’experts au cours des trois dernières années.

Dans le rapport de 2019, page 63 de la version espagnole, la commission d’experts «demande au gouvernement d’adopter, en consultation avec les partenaires sociaux les plus représentatifs, les mesures nécessaires pour réviser les articles 611-A et 611-B de la CLT afin de définir de manière plus précise les situations dans lesquelles les clauses relatives aux exceptions à la législation pourraient être négociées, ainsi que leur portée». Nous avons demandé: y a-t-il eu une quelconque réunion tripartite pour répondre aux demandes de la commission? Si elle a eu lieu, quand? Où? Qui a participé?

En fait, la pratique du gouvernement brésilien, ces dernières années, consiste à éliminer ou à vider des espaces institutionnels tripartites, comme dans le cas du Conseil national du travail, qui ne s’est plus jamais réuni. Le manque de respect pour le dialogue social dans le pays est si grave que le gouvernement a récemment dissout, sans aucune consultation, la Commission nationale pour l’élimination du travail des esclaves et le Conseil national pour les droits des personnes handicapées, deux secteurs de composition tripartite. La disparition de ces organismes est tellement absurde qu’à notre avis cela ne peut faire partie que de la mise en œuvre de l’orientation du Président de la République, qui a déclaré à plusieurs reprises que les travailleurs brésiliens devront choisir entre «avoir un emploi ou avoir des droits, parce que les deux ce n’est pas possible». De plus, le gouvernement a dissout le ministère du Travail lui-même.

En outre, nous rejetons l’argument fallacieux selon lequel il n’y aurait aucun cas concret de violation de la convention ou de retrait de droits après l’approbation de la réforme du travail. Nous pourrions citer d’innombrables cas, mais limitons-nous à deux, pas plus.

– Une université privée présente dans tout le Brésil, quelques jours après l’entrée en vigueur de la réforme du travail, a licencié plus de 1 200 enseignants dans l’intention de les réembaucher avec des salaires moins élevés et sans la protection de la convention collective.

– Plus tôt cette année, les pilotes d’aéronef ont eu la surprise de recevoir un contrat individuel établi par leurs employeurs, aux termes duquel ces travailleurs devraient accepter de renoncer aux droits énoncés dans les accords et conventions collectives. De telles attaques contre des travailleurs n’ont pas été commises simplement parce que la justice est intervenue. Nous constatons ici qu’il existe d’innombrables actions en justice devant les tribunaux du travail du pays.

Cette Conférence célèbre les cent ans de cette Organisation et permet de réfléchir à tout ce que l’OIT a pu construire pour la paix et la justice sociale. Nous sommes ici avec l’espoir que cette Organisation continuera à jouer son rôle. Il est très troublant et très décevant que des représentants des gouvernements et des employeurs ne reconnaissent pas la valeur de l’OIT et du système des normes pour la construction de l’équilibre nécessaire à la paix dans le monde. S’attaquer au système de normes de l’OIT à l’heure actuelle, c’est attaquer l’Organisation elle-même et le multilatéralisme. Nous, travailleurs brésiliens, nous allons dans une autre direction, sur le chemin du renforcement de l’OIT, du système des normes, de la commission d’experts et du multilatéralisme.

Nous savons que le dialogue social tripartite est la pierre angulaire de cette Organisation. Nous avons toujours été ouverts au dialogue, et c’est précisément l’absence de dialogue qui nous a amenés ici aujourd’hui. Le rôle de médiateur de cette Organisation est fondamental. A cet égard, nous sollicitons l’appui de l’OIT dans le but de rouvrir le dialogue social au Brésil, complètement absent aujourd’hui. Nous soulignons que les audiences publiques organisées par le Parlement ne sont pas le tripartisme. Comme en 2018, nous mettrons à la disposition de la commission d’experts tous les éléments mentionnés ici.

Membre gouvernemental, Argentine – La grande majorité des Etats du GRULAC remercie le gouvernement du Brésil d’avoir présenté ses informations et ses arguments à la Commission de l’application des normes. Nous voudrions à nouveau souligner notre préoccupation et notre désaccord avec les méthodes de travail de cette commission et la mauvaise utilisation des mécanismes de contrôle de l’OIT. Dans le cas présent, nous revenons pour voir comment la légitimité de ces mécanismes et leur capacité à générer un dialogue social et des résultats concrets sont sérieusement altérées par le manque total de transparence, d’objectivité, d’impartialité et d’équilibre dans la sélection des cas et leur traitement au sein de cette commission.

L’OIT est intrinsèquement fondée sur le tripartisme; cependant, nous voyons comment, chaque année, les pays du GRULAC sont soumis sans discernement à une exposition internationale par le biais d’un mécanisme de consultation exclusivement bipartite, sans la participation de gouvernements, dans lesquels, nous le savons tous, se concluent des accords politiques sans aucun rapport avec la réalité.

Des pays sont condamnés avant de pouvoir se défendre. En conséquence, les listes de la Commission de l’application des normes perdent leur valeur et leur capacité à informer la société internationale de la situation réelle des relations de travail dans le monde.

En ce qui concerne les commentaires de la commission d’experts sur l’application de la convention au Brésil, nous regrettons que la commission d’experts, sans raisons objectives ni claires, ait à nouveau choisi de ne pas attendre le cycle de rapport régulier du gouvernement du Brésil sur l’application de la convention, prévu pour cette année.

En agissant de la sorte, la commission d’experts se prononce sans disposer de données concrètes, sans preuves factuelles et sans la possibilité d’avoir une vision plus large et plus complète d’une législation complexe et toujours en cours de mise en œuvre par les autorités brésiliennes, sous le regard du pouvoir judiciaire du pays.

Nous sommes également préoccupés par le peu d’attention accordé aux caractéristiques du système juridique brésilien qui, selon les informations fournies par le Brésil, prévoit des garanties constitutionnelles étendues en matière de droits du travail et de droits sociaux.

Nous rappelons que, conformément à son mandat, la commission d’experts devrait examiner l’application des conventions dans la législation et dans la pratique, en tenant compte des différentes réalités et systèmes juridiques, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.

Notre région reste attachée à la promotion de la négociation collective sur la base des principes inscrits dans la convention. Nous prenons note des informations communiquées par le Brésil selon lesquelles la réforme du travail a fait de la négociation collective l’un de ses principaux objectifs, conformément aux obligations du pays dans le contexte de l’OIT.

Membre gouvernementale, Inde – Nous remercions le gouvernement du Brésil d’avoir fourni la dernière mise à jour complète et détaillée sur ce cas. L’Inde se félicite de la volonté et de l’engagement constants du gouvernement du Brésil de coopérer de manière constructive avec l’OIT et les partenaires sociaux pour remplir ses obligations dans le domaine du travail. Nous prenons bonne note des efforts déployés par le gouvernement du Brésil pour réformer sa législation du travail en consultation avec les partenaires sociaux, conformément à ses obligations internationales et au contexte national.

Nous n’appuyons l’inclusion d’aucun pays dans la liste provisoire ou finale des cas avant la fin de la période du cycle de rapport, sans le respect des procédures en vigueur et pour des raisons autres que l’aspect technique de fond du cas. Nous souhaitons également réaffirmer la nécessité d’un engagement tripartite constructif, par le biais d’un mécanisme et d’un processus de contrôle de l’OIT transparents, inclusifs, fiables et objectifs, qui visent à améliorer la conformité aux normes internationales du travail et à maintenir leur pertinence normative dans le monde du travail. Nous souhaitons au gouvernement brésilien le plein succès dans ses efforts.

Membre employeur, Colombie – Je souhaite aborder deux aspects. La réforme du travail au Brésil est le fruit de longues discussions avec les partenaires sociaux depuis plus de vingt ans. Depuis 2003, le Forum national du travail a présenté, avec la participation des syndicats, des employeurs et du gouvernement, un rapport, et des dialogues tripartites se sont poursuivis, axés sur la consultation des secteurs sociaux qui s’occupent principalement de la situation des travailleurs. La question a été envoyée au Congrès national sur la base d’un projet de loi et non d’une mesure provisoire proposée par le gouvernement. Au Congrès, 10 audiences à l’attention du grand public se sont tenues au Sénat sur des sujets spécifiques et 20 autres à la Chambre des représentants. Des sujets spécifiques tels que la négociation collective, les formes de résolution des conflits, le travail intermittent, le télétravail, le travail temporaire et la sécurité juridique ont été discutés. Plus de 2 000 amendements provenant de différents acteurs sociaux et les courants idéologiques les plus divers sont intervenus dans le cadre d’un processus largement démocratique et dans la légalité.

La loi vise à améliorer les relations de travail au Brésil, en adaptant la législation aux nouvelles réalités, toujours sur la base de la négociation collective. Cette réforme du travail vise à créer des conditions plus favorables pour la compétitivité, la productivité et le développement économique et social, dans le respect des droits fondamentaux du travail et du travail décent.

La réforme du travail brésilienne n’accorde pas une autorisation générale de déroger à la législation du travail par la négociation collective comme cela a été dénoncé. Au Brésil, les droits et garanties du travail ont un statut constitutionnel. En ce sens, la négociation collective doit être soumise à des périodes et à des domaines limités fixés par la Constitution elle-même. La réforme vise à réduire l’ingérence des autorités brésiliennes.

Deuxièmement, la nouvelle législation définit avec précision ceux qui sont considérés comme des professionnels indépendants et les critères pertinents pour leur identification. L’origine de ces personnes et des salariés est expressément différenciée. Il s’agit de deux catégories complètement distinctes. Comme leur nom l’indique, les travailleurs indépendants ou autonomes sont des travailleurs régis par des normes différentes de celles des salariés et, dans les deux cas, le travail décent est garanti.

Ces différences de concepts et de réglementation du travail autonome sont nécessaires et ont déjà été appliquées dans plusieurs Etats; cependant, l’important dans ce cas est que le droit de se syndiquer et de négocier collectivement a été préservé avec cette réglementation. Les dispositions de la loi ne constituent pas une exclusion du champ d’application de la convention, car au Brésil la Constitution garantit à chaque travailleur le droit de s’affilier à un syndicat et de jouir des droits syndicaux.

La réforme vise à réduire l’ingérence des autorités brésiliennes et a donc une portée pleinement conforme aux conventions de cette Organisation et, en particulier, à cette convention.

Membre travailleur, Argentine – Je m’exprime au nom de la Centrale des travailleurs de l’Argentine (CTA autonome) et, par délégation, de la Confédération générale du travail (CGT) et de la Centrale des travailleurs de l’Argentine (CTA). La réforme du travail approuvée par le Brésil en 2017 heurte les principes qui ont donné naissance à l’OIT et sont inscrits dans sa Constitution. Les résultats en sont palpables: la couverture de la négociation collective est réduite de manière significative; la réglementation des relations de travail tend de plus en plus à l’individualisation; une concurrence exacerbée se traduit par l’affaiblissement des droits des travailleurs; et, en fin de compte, le dialogue social est vide de sens, parce qu’il lui manque un des éléments essentiels: le caractère volontaire.

En effet, la législation devient obligatoire lorsqu’il n’y a pas eu de débat préalable et tripartite permettant aux accords d’être l’aboutissement de la négociation collective. Il est paradigmatique que nous discutions de ces questions lors de la Conférence du centenaire de l’OIT. Est-ce là le modèle juridique qu’on nous propose pour les cent prochaines années? Rien de bon n’en résultera.

Je voudrais résumer l’essentiel de la législation brésilienne sur la négociation collective, car cela nous permettra de l’analyser dans son ensemble:

- La réforme permet aux conventions collectives et aux accords de déroger aux droits minima fixés dans la législation du travail.

- Elle favorise la centralisation de la négociation en établissant que les accords d’entreprise l’emportent sur les accords de branche d’activité.

- Elle permet la négociation de contrats individuels qui prévalent sur les conventions collectives.

- Elle interdit l’inclusion de clauses de maintien des effets des conventions collectives en cas de non-renouvellement de ces dernières après l’expiration de leur validité.

- Elle élargit le concept de travailleurs autonomes ou indépendants afin d’exclure ces derniers du champ d’application de ce droit fondamental.

L’application de ces dispositions dénature complètement l’obligation de promouvoir la négociation collective découlant de l’article 4 de la convention. Il s’agit d’un système qui supprime toutes les sauvegardes tendant à promouvoir, par ce moyen, une amélioration des droits des travailleurs. Compte tenu de ce système, il est logique de voir apparaître une réduction substantielle du nombre d’accords et de conventions collectives. Si le pouvoir du secteur des entreprises devient l’unique source de réglementation, par quoi les négociations collectives seront-elles encouragées? L’argument reste que le coût de la main-d’œuvre est un obstacle à l’investissement et que la réduction des coûts génère nécessairement de l’emploi et augmente l’investissement et la compétitivité.

Mais cette façon de présenter le problème nous oblige à accepter un principe disjonctif inadmissible: accepter un emploi précaire difficilement qualifiable comme travail décent. Accepter une journée de douze heures sans réagir souille la mémoire des martyrs de Chicago. Nous ne pourrions pas regarder nos camarades dans les yeux et les convaincre que continuer à travailler à la fin de la journée n’est pas considéré comme extraordinaire et que leur salaire n’augmentera pas. Nous ne pourrions pas nous sentir satisfaits et trouver normal de légaliser la fraude consistant à payer des travailleurs salariés comme travailleurs autonomes. Nous nous sentirions gênés en tant que dirigeants si nous acceptions le travail à la pièce sans garantie de salaire minimum assuré.

La négociation collective au Brésil perd de son poids et de sa signification en tant qu’instrument de réglementation des conditions d’emploi, tel que voulu par la convention. Une des caractéristiques essentielles de la négociation collective est son essence collective qui résulte en une norme juridique obligatoire; pour y parvenir, la recherche de l’intérêt commun bipartite est essentielle. Cette recherche est impossible avec une telle législation.

L’attaque de la réforme du marché du travail brésilien contre la négociation collective est loin d’être restreinte à ses frontières nationales; au contraire, les dispositions de cette réforme remettent en question un modèle de relations professionnelles dans la conception duquel l’OIT a joué un rôle central. Il est indispensable de modifier cette réforme dans le cadre du débat sur l’avenir du travail actuellement en suspens.

Membre gouvernemental, Algérie – L’Algérie soutient la déclaration de la République fédérative du Brésil concernant la convention et la question de la négociation collective. Nous avons pris bonne note des informations fournies selon lesquelles la réforme du travail au Brésil a pour objectif la promotion de la négociation collective.

L’Algérie soutient entièrement la position du Brésil et rappelle le rôle important des organes de contrôle dans l’évaluation du respect des conventions internationales du travail, en attirant l’attention à la fois sur la nécessité d’asseoir des règles de fonctionnement transparentes et des mécanismes clairs d’interprétation pour une application efficace des normes internationales du travail.

L’Algérie considère que les réalités économiques et politiques de certains pays ne s’adaptent nécessairement pas souvent aux interprétations des organes de contrôle, ce qui justifie d’ailleurs la complexité et la souplesse des conventions internationales du travail, dont la convention.

Le Brésil a ratifié un nombre important de conventions internationales du travail, ce qui n’est pas étonnant, parce que la législation du travail brésilienne est parvenue à un stade évolué et que certaines ratifications ont consacré des pratiques déjà réalisées.

Enfin, nous considérons que les dispositions de loi no 13462 de 2017 sont conformes à l’esprit de la convention. Le droit de négociation collective ne pourrait se développer spontanément. Les conventions et accords collectifs sont des outils supposant porter, dans leur globalité, une amélioration à la fois pour le travailleur salarié et pour l’entreprise. La législation peut décliner certaines limites à l’autonomie contractuelle dans le monde du travail, et ce compte tenu des impératifs nationaux. Cela étant, l’articulation entre les contours de l’ordre public et les limites de l’expression par des conventions et accords collectifs de travail nous paraît en cohérence avec les objectifs et dispositions de la convention.

Membre employeuse, Argentine – Nous sommes ici pour exprimer notre soutien aux employeurs brésiliens dans leur défense de la valeur d’une norme qui hiérarchise la négociation collective qui, comme nous l’avons déjà indiqué, est un outil essentiel pour garantir le travail décent dans un pays. L’incitation au dialogue social et à la valorisation de la négociation collective a toujours fait l’objet d’une grande estime au sein de cette Organisation, dans la mesure où elle permet de prendre en compte les intérêts et les préoccupations des acteurs sociaux afin de préserver la libre négociation entre employeurs et syndicats.

Le Brésil, comme tant d’autres pays du monde, a suivi une trajectoire particulière marquée par des transformations continues du monde du travail et de la production.

Adapter le système normatif qui régit ces relations est devenu une nécessité, une réponse institutionnelle pour permettre que le dynamisme des relations de travail soit un corollaire normatif garantissant une protection appropriée aux relations de travail.

Il est bon de rappeler que la négociation collective est un instrument de concessions et de bénéfices réciproques, qui permet de négocier des normes plus appropriées pour chaque secteur, région, profession ou entreprise.

Toutefois, l’instrument dont nous discutons ne prévoit pas l’obligation de négociation collective, qui ne régira les relations de travail que si elles résultent d’une décision libre et spontanée des entreprises et des syndicats. D’un côté, la réforme cherche à réduire l’ingérence des pouvoirs publics dans la volonté des parties, en conformité avec les principes de la convention.

Dans ce contexte, connaître les éléments subjectifs qui ont conduit à l’inclusion du Brésil dans la liste, pour la deuxième année consécutive, devient une nécessité. Pour assurer la transparence et la hiérarchie du système de contrôle que cette commission protège, nous pensons qu’il est nécessaire de rappeler qu’il s’agit de la mission de cette commission d’être un instrument de paix et de préservation des relations harmonieuses entre salariés et employeurs. En soumettant ce cas à la discussion pour la deuxième année consécutive, le conflit est attisé et contraire à l’objectif du système de contrôle. Il ne devrait en aucun cas être permis que des cas soumis pour analyse à cet organe soient fondés sur des spéculations liées à la politique intérieure d’un pays.

Nous espérons enfin que cette commission conclura de la manière la plus positive et la plus pratique, c’est-à-dire en valorisant la négociation collective et le dialogue social en tant qu’outils les plus efficaces pour résoudre les problèmes pouvant découler de conflits d’intérêts naturels inhérents aux relations et au monde du travail et assurer une paix sociale durable.

Observateur, Confédération syndicale internationale (CSI) – J’interviens au nom de tous les travailleurs africains. Cette discussion vise à améliorer la législation nationale à la lumière des dispositions de la convention, et non l’inverse. Le fait est que la réforme de la législation nationale du travail tente d’une certaine manière de saper les dispositions de la convention.

C’est la raison pour laquelle le processus de négociation collective donne lieu à des interprétations diverses, de sorte que la relation entre la négociation collective et la loi ne font pas avancer les intentions réelles et sans ambiguïté des dispositions de la convention. Comme l’a observé la commission d’experts, les pratiques actuelles en matière de négociation collective ont introduit le principe général selon lequel les conventions et accords collectifs ont préséance sur la législation. Il en résulte la possibilité de déroger, par la négociation collective, aux dispositions protectrices de la législation.

D’après notre expérience en Afrique, où il existe plusieurs niveaux de négociation collective, en particulier de processus d’entreprise et sectoriels, ainsi que de négociation collective nationale, la tendance de la législation à créer la condition d’une concurrence à la baisse entre les employeurs en termes de conditions de travail et d’emploi s’est avérée très préjudiciable aux relations professionnelles. Cela mine clairement le recours à la négociation collective en tant qu’instrument d’amélioration des conditions de travail.

Cette pratique est contraire à la négociation collective. Cela peut nuire aux travailleurs, en particulier au niveau de l’entreprise, et réduire à la baisse leurs avantages. La commission d’experts a observé dans ce cas de nombreuses références au rapport du ministère public du Travail montrant que, dans le contexte spécifique des relations collectives du travail au Brésil, il est probable que le principe énoncé à l’article 611-A de la CLT donne lieu au «recours de menaces et pressions sur les syndicats pour les amener à accepter des dérogations à la législation et fasse en sorte que tous les syndicats, quel que soit leur degré de représentativité, soient autorisés à négocier en deçà du cadre juridique national de protection sociale, incitant à la corruption dans le domaine des relations collectives de travail».

En Afrique, nous avons été enthousiasmés et encouragés par votre utilisation du recours aux processus de négociation collective progressifs pour améliorer la rémunération, la morale et l’harmonie des relations de travail, exactement dans l’esprit de ce que le gouvernement de Lula Da Silva a introduit et encouragé. C’est ce que nous appelons le «Mouvement Lula», en partie responsable de la sortie de la pauvreté de millions de personnes, dont les travailleurs.

Le gouvernement du Brésil doit être encouragé à modifier les dispositions de la CLT contraires aux dispositions de la convention, et cela doit être fait à travers un processus de consultation véritable et de bonne foi, associant tous les partenaires tripartites.

Membre gouvernementale, Chine – La délégation chinoise a écouté attentivement la déclaration du représentant du gouvernement du Brésil. Nous notons que la réforme du système de travail brésilien vise à promouvoir la négociation collective en tant qu’objectif essentiel. Nous saluons l’engagement du gouvernement brésilien à promouvoir la négociation collective. La délégation chinoise estime que, au moment important où l’OIT célèbre son centième anniversaire, elle devrait sérieusement mettre en œuvre le plan d’action visant à revoir les normes relatives au mécanisme de contrôle et améliorer continuellement ses activités, son impartialité et sa transparence. Il est raisonnable que le gouvernement brésilien intègre étroitement ses propres conditions et son système juridique national dans le processus de mise en œuvre du droit d’organisation en vertu de la convention sur la négociation collective. Nous espérons que le BIT fournira l’appui technique nécessaire au gouvernement brésilien pour la mise en œuvre des conventions pertinentes.

Membre employeuse, Costa Rica – En soutien au secteur des employeurs brésiliens, je voudrais commencer par souligner que les commentaires de la commission d’experts au sujet des articles 611-A et 611-B de la loi brésilienne donnent à la convention une interprétation que ses dispositions ne prévoient en aucune manière.

Dans la convention, aucun article ne stipule que la négociation collective visera à trouver un accord sur des conditions de travail plus favorables que celles prévues par la législation nationale. Plus précisément, l’article 4 de la convention ne prévoit aucune limitation de la négociation collective, au sens que la négociation collective ne peut créer que des conditions plus favorables que celles prévues par la loi. Il en est de même pour ce qui est de la convention no 154. En fait, ces conventions prévoient expressément la possibilité d’adopter des mesures qui s’adaptent aux conditions nationales. Dans un monde en mutation et confronté à de nouvelles formes d’emploi, il est important que les lois garantissent la liberté des parties de s’adapter aux changements et au monde moderne.

C’est ce que prévoit exactement la convention, et ce qui se reflète dans les innovations de la législation brésilienne sur la négociation des conditions de travail et d’emploi.

Observateur, IndustriALL Global Unions – C’est la deuxième année consécutive que le Brésil est sous la surveillance de la Commission de l’application des normes pour les violations de la convention par son gouvernement. Le gouvernement brésilien continue d’ignorer systématiquement et de ne mettre en œuvre aucune des recommandations de la commission d’experts, en particulier celles relatives à l’article 4 de la convention. Global Unions tient à exprimer son profond respect pour les travaux de la commission d’experts. Ces éminents juristes s’acquittent de leur mandat consistant à fournir une analyse impartiale et technique des normes internationales du travail avec la plus grande rigueur. Nous remercions la commission d’experts d’avoir contribué à faire en sorte que les pays appliquent de manière effective les conventions qu’ils ont ratifiées, en particulier les Etats qui négligent délibérément leurs obligations internationales.

Depuis 2008, nous avons assisté à de nombreuses réformes du travail dans le monde, notamment dans les pays européens. Il en résulte une réduction de la couverture des négociations collectives, une plus grande part de travail précaire, des salaires plus bas et un chômage croissant. C’est exactement ce que le Brésil a connu au cours des deux dernières années suivant la réforme du travail, atteignant les chiffres alarmants de 13 pour cent de chômage et de 54 pour cent de travail informel.

Comme l’a souligné la commission d’experts, le nouvel article 611-A du Code consolidé des lois du travail du Brésil sur la codification du travail a des conséquences catastrophiques pour les travailleurs. Dans les secteurs aérien et maritime, les dérogations autorisées par l’article 611-A peuvent interférer et réduire les normes de sécurité spécifiques à certains secteurs, y compris les limitations de temps de vol et de temps de navigation et des périodes minimales de repos. Certaines de ces protections vitales découlent des conventions de l’OIT. Les garanties prévues par l’article 611-B ne sont tout simplement pas suffisantes. De plus, même les conventions de l’OIT ne sont pas garanties et il est également possible pour la négociation collective de déroger à leur application.

En outre, le droit de négociation collective des fonctionnaires brésiliens a été limité par un récent veto présidentiel à la loi no 3831, alors même que le Congrès du Brésil a ratifié la convention no 151 de l’OIT. Le projet de loi a en fait été élaboré par consensus et approuvé à l’unanimité par le Sénat fédéral et la Chambre des députés du Brésil.

Si l’objectif de la réforme du travail était de promouvoir la négociation collective, le résultat en a été le contraire. A l’occasion du centenaire de l’OIT, nous devrions célébrer les succès et les réalisations, mais en même temps, nous, électeurs, avons l’obligation de ne pas fermer les yeux sur les violations régressives et de veiller à ce que la législation brésilienne soit conforme à la convention.

Membre gouvernementale, Fédération de Russie – Tout d’abord, nous voudrions remercier le distingué représentant du gouvernement brésilien pour ses commentaires sur le cas et aussi pour ce qu’il a dit à propos des aspects procéduraux de celui-ci. Le Brésil travaille sans relâche pour améliorer son mécanisme pour la mise en œuvre de la convention. Nous nous félicitons de l’attachement du gouvernement à faire progresser la coopération tripartite conformément à ses obligations à l’égard de l’Organisation internationale du Travail. Nous comprenons la préoccupation des autorités brésiliennes au sujet de certaines méthodes de travail des organes de contrôle de l’OIT. Grâce aux efforts tripartites récents, des décisions ont été prises à cet égard, y compris à propos du travail dans le domaine des normes. Nous pensons que le travail visant à améliorer les procédures relatives à ces normes doit se poursuivre. De manière générale, nous doutons qu’il soit nécessaire de réexaminer cette question au sein de la commission et nous espérons ne pas avoir à y revenir.

Membre employeur, Algérie – Le cas que nous examinons aujourd’hui concerne le Brésil sur la convention pour laquelle certains s’évertuent à accuser le Brésil d’entrave à cette convention. Il convient de nous référer à la déclaration du gouvernement du Brésil que ce cas a été examiné par la commission l’année dernière, et ce pour les mêmes motifs. Il a été reconnu par cette même commission qu’il n’existait aucun élément qui nous indique une entrave à cette convention.

En tant que membre employeur de cette commission, je me dois d’exprimer aussi mon grand étonnement face à ce grief qui est adressé au gouvernement du Brésil d’une manière récurrente depuis des années. En effet, comment peut-on aujourd’hui accuser un pays où plus de 17 000 organisations syndicales de travailleurs enregistrées sont actives en toute liberté? Voilà une question qui devait être posée. Comment peut-on aussi accuser le Brésil d’entrave à la convention, un pays qui a consacré sa loi fondamentale sur le pluralisme syndical, le droit de négociation collective et la protection sociale ainsi que le dialogue?

Je pense que l’article 4 de la convention est très clair et que chaque pays doit prendre des mesures qui sont adaptées à sa législation nationale, ainsi que l’article 5 de la convention qui précise bien que le pays devrait prendre des mesures adaptées à la législation nationale pour étendre la négociation collective à toutes les questions qui sont relatives à la détermination des conditions de travail et d’emploi en vue de réguler les relations de travail.

Pour résoudre ces conflits, le Brésil a toujours privilégié le recours au dialogue, à la négociation et aux droits et n’a jamais pris de mesures contraires à la législation nationale pour la convention à l’encontre des travailleurs.

Je crois savoir que toute la législation nationale du Brésil est en adéquation avec les conventions qui sont ratifiées, telle la loi no 13467 qui renforce la négociation collective libre et volontaire, et ce pour encadrer la loi sur les relations de travail. Cela étant, le Brésil s’est distingué depuis toujours par une politique visant à privilégier le dialogue, la concertation avec les partenaires économiques et sociaux, comme les différentes lois qui encadrent les relations de travail.

Le Brésil aspire à construire un Etat de droit, et à ce titre veille à ce que la loi soit appliquée dans tous les domaines, y compris en matière d’exercice du droit syndical et de négociation collective. A ce titre, il est tout à fait normal, me semble-t-il, que les syndicats de travailleurs doivent se conformer à la législation et à la réglementation. Les explications ont été fournies par le gouvernement du Brésil à maintes reprises à la commission sans qu’elles soient prises en considération. On est en droit de se poser ce genre de question quand on constate l’acharnement envers le Brésil, acharnement qui fait fi de toutes les avancées enregistrées en matière de respect des conventions.

Membre travailleuse, République de Corée – Je parle au nom de la Confédération coréenne des syndicats. Je voudrais d’abord exprimer une sérieuse inquiétude quant à certains des discours que nous avons entendus aujourd’hui sur le cas du Brésil, qui essaient indûment de politiser cette commission plutôt que de se fonder sur l’analyse de la mise en œuvre de la convention. Cette argumentation ne peut que discréditer le gouvernement.

La loi no 13467 de 2017 a modifié plus de 100 articles de la législation brésilienne consolidée du travail. Parmi les nombreux aspects, je veux aborder quelques problèmes qui affectent directement les travailleurs brésiliens. Avant la réforme, la législation brésilienne interdisait aux femmes enceintes et aux mères qui allaitent de travailler dans des endroits dangereux ou insalubres. Etonnamment, ces garanties ont été supprimées, ce qui témoigne d’un manque total de respect du gouvernement brésilien pour la santé des femmes et de leurs enfants. Heureusement, nous avons reçu l’information selon laquelle, la semaine dernière, la Cour suprême fédérale du Brésil a annulé cet amendement grâce à une action judiciaire initiée par les syndicats. Nous espérons que les nombreuses autres contestations sur des points de nature constitutionnelle et conventionnelle de la réforme du travail seront également traitées en faveur des travailleurs.

L’absence d’un vaste système social de dialogue tripartite constitue un autre aspect très préoccupant de ce litige et nous sommes étonnés d’apprendre que la Commission nationale contre le travail forcé (CONATRAE) a été dissoute.

Enfin, la manière dont l’Etat brésilien a établi un lien avec la Commission de l’application des normes de la Conférence et la commission d’experts est pour le moins irrespectueux. Les critiques constructives qui cherchent à améliorer les fonctions du système sont toujours les bienvenues, mais ce n’est pas ce que nous avons observé dans ce cas particulier. Nous encourageons donc le gouvernement à reprendre et à s’engager dans un vaste dialogue social tripartite, en tenant compte notamment des observations de la commission d’experts.

Membre gouvernemental, Egypte – Je voudrais remercier le gouvernement du Brésil pour les informations importantes qu’il nous a données à travers le discours du représentant du gouvernement, sur les mesures qu’il a prises pour mettre en œuvre la convention. A cet égard, il existe bien sûr un important besoin d’améliorer encore ces mécanismes pour que les travailleurs brésiliens puissent obtenir ce qu’ils veulent. La loi promulguée par le Brésil vise à intensifier les négociations collectives et non à la régression de la négociation collective, comme l’indique le représentant gouvernemental, chiffres à l’appui. Nous souhaitons la bienvenue à cette loi et nous l’appuyons. Nous sommes pleinement satisfaits, car les résultats des enquêtes menées par la Banque mondiale sur la loi concernée et ses effets positifs sur la croissance économique, la création d’emplois et de moyens de lutte contre l’emploi irrégulier. Nous soutenons également la procédure de dialogue social entreprise par le gouvernement en présence de représentants des travailleurs et des employeurs avant de promulguer cette loi. Nous voudrions encourager le gouvernement à poursuivre ce dialogue social dans tous les domaines du travail et à aller de l’avant pour améliorer les conditions de travail, de sorte qu’elles soient conformes aux conventions internationales. Nous espérons que ce comité tiendra compte des aspects importants pris en compte par le gouvernement du Brésil et les défis auxquels il est confronté.

Membre employeur, République bolivarienne du Venezuela – Nous nous associons à la proposition du groupe des employeurs quant à l’inclusion du cas du Brésil dans la liste restreinte et nous réitérons notre préoccupation quant à l’inclusion du cas pour des raisons non objectives ou de nature politique. En ce sens, nous invitons les mandants tripartites à revoir et à définir avec une clarté absolue les critères objectifs sur la base desquels la liste des pays dont les cas de violation des conventions est dressée et soumise à l’examen par la commission.

Sur le fond, nous considérons que la réforme du travail développée au Brésil, en particulier la loi no 13467/2017, est non seulement conforme, mais comprend aussi des progrès et qu’elle améliore les principes de la convention. Evidemment, la législation antérieure de 1943 n’était pas adaptée à l’évolution constante du monde du travail. La nouvelle législation établit des critères modernes et souples en totale harmonie avec les exigences actuelles en matière de travail et de production et, en tout état de cause, elle privilégie la négociation collective appliquée de manière responsable et volontaire entre les parties pour la réglementation les conditions de travail. Elle met en valeur et renforce également la négociation collective en protégeant les accords conclus par les parties, afin de se conformer à l’objectif et aux dispositions de la convention, qui permettent des adaptations de la réglementation du travail en fonction des exigences liées aux circonstances temporelles, aux activités et du lieu.

La discussion porte sur les pouvoirs reconnus aux parties par la nouvelle loi de s’entendre par la négociation sur la non-application des normes législatives spécifiques. Toutefois, cela ne signifie nullement que l’accord conclu ou les conditions de travail convenues ne seront pas plus favorables pour les travailleurs que le minimum garanti par la loi. En effet, ces dispositions ne sont applicables que dans des cas exceptionnels où le niveau de revenu élevé et les conditions intellectuelles ou professionnelles des travailleurs sont pris en compte; ainsi que le pouvoir de négociation sur une base égalitaire des syndicats qui les représentent, ce qui signifie que l’accord conclu, dans le contexte du plein exercice de la liberté de négociation, sera substantiellement plus favorable avec des avantages additionnels non prévus par la loi.

Les accords conclus lors des négociations ou des conventions collectives, conformément à la nouvelle loi, ne peuvent en aucun cas affecter ou réduire les 30 droits fondamentaux des travailleurs, tels que définis dans la Constitution fédérale. Ainsi, comme toute règle exceptionnelle, leur application est très limitée. De même, ces accords spécifiques sont applicables dans le seul contexte du secteur, de la région ou de la société concernés, pendant une période de validité maximale de deux ans. S’il n’y a pas d’instrument collectif spécifique, la législation du travail s’applique. Ainsi, les droits des travailleurs sont absolument protégés par la convention collective ou, à défaut, par la norme du travail.

Adopter une interprétation contraire impliquerait de méconnaître la capacité de négociation des travailleurs couverts par cette norme – capacité en lien avec leur niveau de rémunération et leurs capacités intellectuelles –, et également de méconnaître la responsabilité et le pouvoir de négociation des syndicats. C'est pourquoi nous nous félicitons de cette réforme du droit du travail qui modernise l’actualité des relations du travail au Brésil.

Membre travailleur, Etats-Unis – Les travailleurs canadiens s’associent à notre déclaration. Alors que nous faisons face aux défis et aux opportunités qui commencent à se présenter et seront de plus en plus nombreux avec les transformations du monde du travail, ceux qui se préoccupent des inégalités et de la polarisation grandissantes dans de nombreux pays notent avec une vive inquiétude l’affaiblissement délibéré des institutions qui œuvrent pour la justice sociale. Les institutions du marché du travail, le dialogue social et la négociation collective sont parmi les plus touchés. Les relations de travail sont une de ces institutions. Aux Etats-Unis, ces institutions ont connu un déclin au fil des décennies. Au cours de cette période, les inégalités se sont accrues de manière constante, la justice sociale s’est affaiblie et la polarisation s’est accentuée. Les changements drastiques, abrupts et irréfléchis de la législation du travail en démantelant certaines institutions sont légion. Je me concentrerai sur la création du statut de travailleur indépendant et de son impact sur les droits de négociation collective.

Dans son rapport, la commission d’experts s’est déclarée préoccupée par l’impact de la création de cette catégorie de travailleurs sur les droits de négociation. Notant que le Code du travail ne prévoit pas d’aménagement pour les droits de ces travailleurs, les experts ont invité le gouvernement à les informer en mars de l’avancement des consultations au sujet de cette partie importante et croissante de la population active qui n’a pas accès aux droits de négociation. En réponse, le mois dernier, le gouvernement a répondu franchement que la convention n’est pas, par définition, applicable aux travailleurs indépendants, la négociation collective n’étant pas adaptée au caractère occasionnel et indépendant de leurs activités. Le gouvernement a ajouté que les autorités brésiliennes compétentes peuvent détecter de véritables relations de travail dans des contrats de services déguisés. Peut-être le peuvent-t-ils, mais le feront-ils? Ce gouvernement a supprimé le ministère du Travail, restreint l’accès des travailleurs à la justice du travail et réduit la capacité des syndicats à agir de manière solidaire avec des travailleurs non affiliés, en instaurant des coûts élevés pour les travailleurs en quête de justice du travail et en refusant le prélèvement des cotisations des syndicats même lorsqu’elles ont été négociées par les employeurs et approuvées démocratiquement par les travailleurs des assemblées.

En réponse à la question de la commission d’experts au sujet de l’exclusion de ces travailleurs, le gouvernement ne fournit aucune information. Dans le meilleur des cas, gérer la création et l’expansion de cette catégorie de travailleurs nécessite un ministère du Travail extrêmement compétent et des partenaires sociaux puissants. Le Brésil n’a actuellement ni les uns ni les autres. Malgré les mises à jour des enquêtes de l’Institut brésilien de géographie et de statistique, même plusieurs mois après la création de la catégorie des travailleurs autonomes, aucune révision n’a fourni d’information précise sur la taille et le statut de cette nouvelle partie de la population active.

Selon le meilleur indicateur, celui des travailleurs indépendants, le Brésil comptait près de 24 millions de travailleurs de cette catégorie au cours du premier trimestre de cette année, soit plus du quart de la population active totale. Moins d’un tiers de ces derniers sont enregistrés et cotisent à la sécurité sociale. Moins de 15 pour cent des travailleurs indépendants sont officiellement enregistrés en tant que tels. Outre le manque de protection sociale de ces travailleurs, l’impact de ce nombre de travailleurs sans protection sera désastreux pour la société. L’accès à la négociation collective offre une certaine protection à ces travailleurs, mais le Brésil n’a rien fait à cet égard dans ses modifications irréfléchies du droit du travail.

Enfin, ces travailleurs ne sont ni suffisamment rémunérés ni suffisamment éduqués pour être en mesure de négocier pour eux-mêmes. Le salaire moyen des travailleurs indépendants au Brésil est de 417 dollars E.-U. par mois, soit 1,7 fois le salaire minimum, ce qui est nettement inférieur au salaire minimum moyen national. S’il est une catégorie de travailleurs qui a besoin d’accéder à la négociation collective, ce sont précisément ces travailleurs, mais le gouvernement leur a fermé la porte, acceptant et légalisant leur exclusion plutôt que d’agir pour la combattre. Nous remercions la commission d’experts d’avoir attiré l’attention de cette commission sur leur exclusion.

Membre gouvernemental, Angola – Je parle au nom de la délégation angolaise. Nous reconnaissons que le gouvernement brésilien prend de nombreuses mesures liées au droit d’organisation et à la négociation collective. Par conséquent, nous encourageons le Brésil à poursuivre dans cette pratique.

Membre employeur, Panama – L’OIT est l’unique Organisation des Nations Unies à caractère tripartite, et tient sa force de la négociation, de la concertation et de la création d’accords. Dans le cas du Brésil, il est important de signaler que la réforme du travail de 2017 est orientée vers la paix au moyen de la réduction de la pauvreté et des négociations individuelles et collectives. Les réformes du travail du Brésil ne violent nullement la convention de l’OIT, pas plus qu’elles ne peuvent être analysées de manière isolée, en dehors de tout le contexte économique, politique et social du pays.

Jusqu’en 2017, avant l’entrée en vigueur de la nouvelle loi, il y avait un total cumulé de 2,63 millions d’actions en justice. En décembre 2018, moins d’un an après l’entrée en vigueur de la nouvelle loi, il y a eu une réduction de 900 000 procédures, soit près de 40 pour cent des cas, c’est ça la paix sociale!

En ce qui concerne l’autonomie de la volonté des parties, la nouvelle loi autorise la négociation et l’accord mutuel en matière de résiliation de la relation de travail. Ainsi, au cours des quatre premiers mois, plus de 73 000 accords ont été négociés, c’est aussi ça la paix sociale.

Dans le cadre de la lutte contre le travail informel, qui nuit autant aux travailleurs qu’aux employeurs, de nombreuses mesures ont été mises en place pour créer de nouvelles formes de travail permettant précisément au pays de créer davantage de nouveaux postes de travail. Ainsi, plus de 97 000 nouveaux emplois ont été créés, réduisant la pauvreté.

La nouvelle législation du travail du Brésil ne viole aucun accord, pas plus qu’elle ne viole la convention; elle encourage la négociation et la concertation individuelle et collective, réduit l’informalité, réduit la pauvreté; c’est la paix sociale et c’est dans ce contexte que nous devons l’analyser. Par conséquent, il n’est pas nécessaire de réclamer au pays un rapport de plus.

Membre travailleur, Italie – Je m’exprime au nom des confédérations syndicales italiennes et la raison de cette intervention est une préoccupation majeure pour les travailleurs au Brésil. C’est une intervention qui fait référence à la longue expérience de la négociation collective que nous avions dans mon pays, l’Italie. Il s’agit d’une préoccupation justifiée, peut-être oubliez-vous que la ville la plus italienne au regard de ses habitants après Rome, n’est ni Turin, ni Milan ou Naples, mais São Paulo au Brésil.

Au fil des ans, l’Italie a été un laboratoire pour assurer un équilibre, lequel n’a jamais été assuré par la loi; il l’a été grâce à la capacité des acteurs sociaux à trouver un équilibre économique et toujours grâce à la négociation collective; toutes les réformes que nous avons faites au cours des années ne visaient pas à limiter mais à étendre la négociation collective également aux formes de travail individuel, et toujours avec la participation des acteurs sociaux.

Les données et les résultats obtenus par la négociation collective au Brésil sont impressionnants. Les programmes de distribution de pensions Bolsa Família et Fome Zero, ainsi que l’augmentation ces années de 90 pour cent, études à l’appui, de la négociation collective, ont permis à 40 millions de personnes de sortir de la pauvreté.

Et à présent, des données irréfutables disent que la réforme du travail et la loi no 873 ont résulté dans une baisse de l’emploi mais pas de la protection sociale dans ce pays. C’est une donnée politique qui nous préoccupe et c’est peut-être de cela que nous devrions débattre.

Il a été demandé, en 2018, de fournir des informations, mais aussi d’assurer la participation des acteurs sociaux. En 2019, il conviendrait, à la lumière des résultats que nous aurons obtenu, de convoquer, d’entrer en contact avec et de demander la participation des acteurs sociaux et d’examiner la loi de manière conjointe.

A la veille d’un accord qui pourrait être important avec l’Union européenne et le MERCOSUR – et nous savons que le Brésil détient 80 pour cent du produit intérieur brut du MERCOSUR –, il faut garantir la tutelle et surtout le rôle et la participation des acteurs sociaux qui sont en Europe au centre du modèle social européen.

Depuis l’Italie, depuis le système de relations professionnelles de mon pays, depuis le système et le mécanisme de dialogue social européen, nous lançons au gouvernement du Brésil un appel à la responsabilité.

Membre gouvernemental, Philippines – Les Philippines reconnaissent les efforts importants que le Brésil a déployés jusqu’à présent pour donner pleinement effet à la convention. Il faut cependant noter que les réformes et leurs résultats ne peuvent être atteints ni ressentis du jour au lendemain. Dans leur juridiction, tout comme la nôtre aux Philippines, il existe des procédures légales à respecter et à mettre en œuvre avec rigueur, en particulier dans le domaine de la législation, en conformité avec la Constitution fédérale du Brésil et d’autres lois nationales.

Les Philippines sont également d’avis que, compte tenu de la complexité des réformes envisagées, le Brésil doit disposer d’un délai suffisant et raisonnable pour institutionnaliser les réformes du travail.

En outre, l’institutionnalisation des réformes du travail n’est pas la seule fonction du gouvernement. Les Philippines espèrent donc que le Brésil engagera ses partenaires tripartites dans le cadre d’une consultation sérieuse, dans un esprit de dialogue social authentique, afin de résoudre les problèmes soulevés et d’adopter les mesures nécessaires adaptées aux conditions nationales. Les Philippines espèrent que le Brésil maintiendra son engagement au titre de la convention de l’OIT et continuera à entretenir un dialogue constructif avec ses partenaires sociaux.

Les Philippines partagent également certaines des préoccupations du Brésil en ce qui concerne les méthodes de travail de la commission d’experts, dans la mesure où le tripartisme, le consensus et la transparence devraient être pleinement appliqués, en vue d’améliorer ses procédures et de renforcer la confiance entre les gouvernements et les partenaires sociaux, ainsi que pour éviter une politisation excessive des cas de pays.

Enfin, les Philippines demandent au BIT, y compris à ses organes de contrôle, de continuer à fournir à ses Etats Membres l’assistance technique et les conseils nécessaires pour assurer le plein respect des conventions, de manière qu’aucun gouvernement, travailleur ou employeur ne soit laissé pour compte dans la préparation de l’avenir du travail.

Membre employeuse, Belgique – Le groupe des employeurs se pose de sérieuses questions sur ce cas, qui revient déjà devant notre commission après examen en 2018. Les employeurs expriment donc leur préoccupation devant l’examen précoce de la loi no 13467 par les experts. Ils ont l’impression que la commission d’experts n’a pas suffisamment pris en compte, en l’occurrence, les informations transmises par le gouvernement brésilien et la position des employeurs brésiliens.

Sur le fond, les employeurs ne sont pas d’accord avec la commission d’experts sur le fait que la révision des sections nos 611-A et 611-B de la loi consolidée sur le travail ne favoriserait pas de manière adéquate le développement et l’utilisation les plus larges des procédures de négociation volontaire de conventions collectives dans le sens de l’article 4 de la convention. N’est-il pas étrange que les experts reprochent à la loi brésilienne d’avoir récemment instauré la primauté des conventions collectives de travail et des accords collectifs par rapport à la législation, tout en préservant les droits sociaux constitutionnels.

Au contraire, nous constatons que la négociation collective est maintenue et promue par la nouvelle loi brésilienne sur le travail, et que les accords collectifs sont même placés au-dessus d’autres types de normes, tout en garantissant le plein respect des droits sociaux constitutionnels; c’est le Parlement qui a effectué la distinction entre les matières négociables et non négociables.

Les syndicats brésiliens ne sont pas empêchés de négocier collectivement de meilleures conditions de travail pour leurs membres; la marge de négociation volontaire a même été accrue dans la mesure où non seulement des normes plus élevées peuvent être conclues, mais aussi, par exemple, des normes plus strictes en échange de normes moins strictes dans d’autres domaines, ce qui est conforme à l’autonomie de la négociation collective.

Enfin, le lien causal entre la réforme et la prétendue diminution du nombre de conventions collectives n’a pas été établi par les experts.

Dans une perspective internationale comparative, il est fréquent de rencontrer des législations nationales qui autorisent aux conventions collectives d’introduire des exceptions, des dérogations à la loi, et ce dans le respect de la Constitution et des matières dites d’ordre public.

Il nous semble donc important que le gouvernement brésilien, en consultation et en coopération avec les partenaires sociaux, puisse continuer à examiner l’impact des réformes et, le cas échéant, décider d’adaptations éventuelles appropriées, et que le gouvernement n’est tenu en tout cas d’apporter aucune modification légale sur la base de la convention.

Pour conclure, je tiens à rappeler que la paix sociale et la prospérité reposent nécessairement sur le dialogue social. Ce dialogue doit être encouragé par les gouvernements. Ce dialogue passe par l’importance de la négociation collective, par la confiance mutuelle ainsi que par la non-ingérence des autorités publiques dans les négociations qui doivent rester l’apanage des partenaires sociaux.

Membre travailleur, Allemagne – Le Brésil est Membre de l’OIT depuis sa fondation en 1919. Lors de l’adoption de la convention en 1948, les délégués brésiliens ont unanimement voté en sa faveur. Le Brésil appartient également aux pays qui ont ratifié le plus grand nombre de conventions de l’OIT, mais cette approbation des normes internationales du travail semble appartenir au passé. Au contraire, l’érosion croissante des normes sociales et du travail est à l’ordre du jour depuis quelque temps sous couvert de flexibilisation. Les réformes qui avaient pour but d’améliorer la situation des travailleurs ont, au contraire, conduit à une précarité accrue de l’emploi et à une augmentation des taux de chômage. Une politique de polarisation a progressivement creusé le fossé entre travailleurs et employeurs.

Un exemple en est, en vertu de l’article 611-A du Code consolidé des lois du travail du Brésil, la possibilité de la prééminence des conventions collectives sur la législation et la possibilité de la prééminence des conventions collectives et des accords négociés au niveau de l’entreprise sur les autres conventions collectives en vigueur dans le domaine. Les éléments énumérés dans cette disposition, notamment les règles relatives au temps de travail, au représentant du personnel sur le lieu de travail, à l’accès au programme de protection de l’emploi ou à la classification du degré d’insalubrité des conditions de travail ne sont pas exhaustifs. Autrement dit, le contenu peut en être largement étendu par les parties, à l’exception du nombre de droits énumérés à l’article 611-B. L’article 611-A permet de manière expresse de saper des lois et conventions collectives qui établissent des normes pour la protection des travailleurs. Pour donner un exemple récent, en mai 2019, un tribunal régional du travail de São Paulo a interdit à l’exploitant d’une entreprise de taxis aériens, par une injonction temporaire, d’exhorter les membres d’équipage à signer des accords prévoyant notamment la suppression d’une clause ou d’instruments collectifs déjà signés. Ceci est vrai dans de nombreux cas, les entreprises faisant pression sur leurs employés pour leur appliquer des dispositions défavorables. Quel pouvoir de négociation avez-vous en tant que travailleur «autonome» si vous courez le risque de perdre votre emploi?

L’article 611-A renverse l’idée de base des accords de négociation collective. Ils sont destinés à permettre aux parties contractantes de s’accorder sur de meilleures conditions pour les employés. Ils ne doivent toutefois pas porter atteinte au niveau de la protection juridique existante. C’est également l’avis du Comité de la liberté syndicale, selon lequel les procédures visant à promouvoir systématiquement la négociation décentralisée de conditions de travail moins favorables que celles définies par les instances supérieures conduisent à une déstabilisation globale des mécanismes de négociation collective et à un affaiblissement de la liberté syndicale et de la négociation collective, contraires aux principes des conventions nos 87 et 98. Nous prions donc le gouvernement, en coopération avec les partenaires sociaux, de modifier les articles 611-A et 611-B de telle sorte que les conventions collectives ne diffèrent qu’en faveur des travailleurs, par rapport aux lois et autres conventions collectives.

Membre gouvernementale, Colombie – La Colombie exprime son ferme attachement à l’OIT et à ses organes de contrôle. La Commission de l’application des normes étant l’organe de contrôle suprême de l’OIT, nous sommes convaincus que ses méthodes de travail continueront de s’améliorer. Cela augmentera sûrement la confiance de chacun et permettra un système de contrôle de plus en plus renforcé.

Bien que le document D.1 indique, au chapitre VI, les critères à prendre en compte pour la sélection individuelle des pays convoqués à la commission, on observe que, malheureusement, la liste préliminaire et la liste finale souffrent d’un bon nombre de critères techniques, pour la confection desdites listes, ainsi que cela s’est produit dans le cas qui nous préoccupe.

Nous apprécions l’engagement pris en faveur de la promotion de la négociation collective, sur la base des principes inscrits dans la convention. Nous prenons bonne note des informations communiquées par le gouvernement du Brésil selon lesquelles la réforme de la législation du travail avait parmi ses objectifs centraux la promotion de la négociation collective, conformément aux obligations du pays dans le cadre de l’OIT. Notre pays apprécie les efforts déployés par le gouvernement brésilien pour renforcer les négociations collectives et nous espérons que le dialogue social tripartite continuera à progresser.

Membre employeur, Brésil – Comme vous le savez sans doute, nous n’avons pas de fédération nationale d’employeurs au Brésil, ni d’associations nationales d’employeurs au Brésil. Nous avons diverses confédérations nationales regroupant des employeurs de différents secteurs. Sont présentes dans cette salle les confédérations nationales de l’agriculture, de l’industrie, du commerce et des services, des transports, du système financier, des services de santé et des assurances, et je suis honoré de parler en leur nom.

Tout d’abord, nous appuyons avec force la déclaration du représentant gouvernemental, en ce sens qu’il s’agit d’un cas fondé sur des preuves insuffisantes, des données erronées et des informations très fragiles et que nous pensons qu’il manque un élément d’information dans notre discussion d’aujourd’hui, c’est trouver une solution pour le financement des syndicats au Brésil. C’est là la question – avant la réforme du travail, nous avions les travailleurs qui devaient cotiser à un syndicat spécifique, c’était obligatoire en vertu de la loi et, d’autre part, des syndicats qui détenaient le monopole d’une certaine catégorie d’une zone géographique spécifique, pour collecter ces contributions financières.

Il n’est donc pas surprenant que nous comptions aujourd’hui 17 000 syndicats au Brésil. C’est de loin le nombre le plus important au monde, environ 90 pour cent de tous les syndicats dans le monde, ce qui signifie, et je le souligne, que 9 syndicats sur 10 se trouvent au Brésil. Il s’agit d’une perception totale d’environ 4 milliards de dollars E.-U.

Puis vint cette réforme du travail, qui fut à nouveau approuvée par le Congrès. Elle a été approuvée à la chambre basse après dix audiences publiques, au Sénat après 22 audiences publiques, et contestée devant la Cour suprême sans succès. Cette réforme a été adoptée. Aujourd’hui, les travailleurs ne sont plus obligés de contribuer, ils ne «doivent» pas contribuer, ils «peuvent» contribuer aux syndicats et, par conséquent, les revenus chutent de quelque 90 pour cent. Un certain nombre de syndicats sont en train d’être dissous au Brésil.

Nous devons trouver une solution, mais la solution ne repose pas sur un cas basé sur une période approximative, des informations insuffisantes et des arguments fragiles. La solution consiste à s’adapter à une nouvelle économie dynamique en convaincant les travailleurs de l’efficacité et de la représentativité des syndicats.

En conclusion, nous demandons instamment à cette commission de reconnaître dans ses conclusions que, en aucune façon, il n’y a eu de violation de la convention.

Membre travailleuse, Portugal – Nous intervenons au nom de la Confédération syndicale des pays de langue portugaise qui intègre les confédérations syndicales des pays suivants: Angola, Brésil, Cabo Verde, Galice, Guinée-Bissau, Mozambique, Portugal, Sao Tomé-et-Principe et Timor-Leste.

Nous suivons avec une inquiétude profonde toutes les mesures appliquées au Brésil dans le domaine de la réforme du travail de 2017: la possibilité de dérogation généralisée aux normes juridiques qui doivent conférer un minimum de protection aux travailleurs; la prééminence accordée à la négociation au niveau de l’entreprise au détriment de la négociation sectorielle; la possibilité d’imposer des conditions moins favorables que la négociation collective à des contrats de travail individuels pour des travailleurs gagnant légèrement plus que le niveau établi, ainsi que d’exclure certains groupes de travailleurs de la protection qui leur est accordée en vertu de la négociation collective (tels que les travailleurs indépendants). Tout cela résulte d’une vision idéologique qui ne nous éloigne pas beaucoup de celle qui, au cours de la crise financière, avait essayé d’appliquer la troïka au Portugal.

Ce sont des normes qui cherchent à saper, affaiblir et même mettre fin au droit de négociation collective et au rôle des syndicats, toujours au prétexte d’accroître la sécurité juridique et de contribuer au progrès économique, ce qui a pour seul effet réel de remettre en question les principes, les valeurs et les droits fondamentaux défendus par l’OIT et de réduire la valeur du travail et sa soumission aux soi-disant libertés économiques.

Au Portugal, la contribution de mesures similaires visant à développer le pays s’est révélée nulle mais, dans le même temps, les droits du travail ont été réduits, la pauvreté s’est accrue et la couverture de la négociation collective s’est rétrécie d’année en année, obligeant à inverser les mesures après la crise.

L’image du Brésil ressemble beaucoup à celle d’avant l’application des mesures que nous venons d’évoquer. Par conséquent, il est essentiel de mettre en place un cadre juridique garantissant la pleine autonomie et le droit de participation des syndicats, ainsi que l’assistance d’une protection juridique minimale dans les matières fondamentales, fondé sur la base des principes de la négociation collective et du système de relations de travail qui sauvegarde la sécurité des travailleurs et le rôle fondamental de la négociation collective pour tous les travailleurs. C’est seulement ainsi que les bases de la croissance économique et d’un progrès social réel, durable et équitable seront posées.

Membre travailleur, Espagne – Nous sommes ici pour veiller au système de normes. La réforme du travail brésilienne et la loi no 873, qui établissent que la négociation collective peut déroger à la réglementation juridique des conditions de travail fondamentales pour garantir un travail décent au Brésil, ne sont pas évoquées ici pour des raisons politiques, mais parce qu’elles ont clairement violé la convention.

La législation mise en cause ici permet d’affaiblir la réglementation établie dans la législation nationale et même dans les conventions internationales ratifiées par le Brésil dans des domaines tels que la durée du travail, les périodes de repos ou le système de rémunération. Elle établit également la prédominance des accords d’entreprise sur les accords collectifs sectoriels et leur capacité à transformer la réglementation légale des conditions de travail par d’autres accords moins garantis, en excluant de facto les syndicats de la négociation.

Avec la réforme du travail et la loi no 873, le gouvernement du Brésil a provoqué et garanti la tourmente contre la nature de la négociation collective, les droits collectifs des travailleurs et la réglementation des conditions de travail décentes, en violation de la convention, dans la législation et la pratique. La possibilité donnée à la négociation collective de contourner les dispositions normatives, qui établissent le cadre minimum régissant les relations de travail, dynamite la nature de la négociation et sa fonction spécifique en tant qu’instrument d’amélioration des conditions de travail et de la qualité de la vie, et assouplit la législation du travail de telle manière que la classe ouvrière et les organisations syndicales sont laissées sans protection, au point de les soumettre à la volonté de ceux qui détiennent le pouvoir dans les relations de travail.

Le gouvernement du Brésil a la responsabilité de garantir la paix et la justice sociale, d’améliorer la qualité de la vie des citoyens et de garantir que les droits syndicaux et la négociation collective servent leur objectif et peuvent être exercés normalement.

Cependant, au lieu de cela, l’action du gouvernement a été de:

- mener une attaque frontale contre le droit des travailleurs de jouir de conditions de travail décentes;

- compromettre l’application des normes internationales régissant les conditions de travail minimales;

- enfreindre les droits collectifs des travailleurs;

- freiner la négociation de conventions collectives dont le nombre a considérablement diminué depuis la promulgation de la réforme législative en novembre 2017;

- promouvoir l’individualisation des relations de travail;

- s’en prendre à la survie des organisations syndicales.

Pour toutes ces raisons, en raison de la grave violation de la convention de l’OIT qu’elle implique, nous estimons que le gouvernement du Brésil mérite une réaction ferme et énergique de la part de cette commission.

Membre employeur, Chili – Pour la deuxième année consécutive, la commission doit s’occuper du cas du Brésil. Et il est important de rappeler que les employeurs ont déjà mis en doute la pertinence de l’inclusion de ce cas dans la liste restreinte l’année dernière, dès lors que la commission d’experts avait examiné le cas en dehors du cycle normal des rapports et que l’analyse était centrée sur la loi no 13467, dans des circonstances telles qu’il s’agissait d’une norme n’ayant que peu de mois de validité pour en évaluer les effets.

Les conclusions de la Commission de l’application des normes de l’année dernière recommandaient seulement au gouvernement de fournir des informations sur l’application de la nouvelle loi et sur les consultations menées avec les partenaires sociaux.

Cette année encore, le Brésil fera l’objet d’un examen de la part de cette commission dans des circonstances selon lesquelles, même s’il y a de nouvelles observations de la part de la commission d’experts, franchement, on ne comprend pas quels sont les critères objectifs de sélection des cas. Cela est très important, car la crédibilité et l’efficacité des travaux de la Commission de l’application des normes doivent reposer sur la transparence.

Nous sommes conscients qu’il existe des critères géographiques pour répartir le nombre de cas par pays, que les cas comportant une double note de bas de page sont également classés par ordre de priorité, que l’on essaie de hiérarchiser les cas qui font référence à des conventions fondamentales de l’OIT et que le nombre de cas pour lesquels les groupes peuvent mettre leur veto est limité.

Cependant, nous sommes préoccupés par le fait que les pressions politiques exercées par l’un des groupes constitutifs de l’OIT l’emportent sur les critères objectifs de conformité normative qui devraient guider les travaux de tous les organes de contrôle de l’OIT, y compris ceux de la Commission de l’application des normes.

En ce qui concerne les articles 611-A et 611-B de la loi no 13467, il est important d’être clair: il s’agit de dispositions qui ne peuvent en aucun cas porter atteinte aux droits fondamentaux des travailleurs définis par la Constitution fédérale brésilienne. Ils traitent «d’accords volontaires possibles entre syndicats et employeurs», qui ne constituent pas une imposition unilatérale et qui, en outre, ont une validité limitée à un maximum de deux ans.

Par conséquent, nous considérons que ces articles ont pour objectif d’encourager et de promouvoir la négociation collective volontaire, en soulignant son importance en tant qu’instrument permettant aux parties de participer volontairement, afin d’adapter une partie de la réglementation normative à leurs besoins spécifiques.

Penser que les dispositions susvisées pourraient être imposées unilatéralement par les employeurs aux syndicats équivaudrait à méconnaître les capacités de ces derniers à être les interlocuteurs des travailleurs qu’ils représentent.

Membre travailleur, Colombie – Au nom des travailleurs de Colombie, nous demandons à nouveau à la commission d’interroger le gouvernement du Brésil sur la mise en œuvre de sa législation du travail de 2017, contraire aux principes de cette convention fondamentale de l’OIT. La première chose à souligner est que les observations, demandes et recommandations des organes de contrôle: Comité de la liberté syndicale, commission d’experts et Commission de l’application des normes donnent vie aux normes internationales du travail; que leur travail est fondamental pour cette assemblée et que leurs déclarations, en particulier celles relatives à la liberté syndicale, sont l’application même des conventions nos 87 et 98 ou, comme on dit dans mon pays, entre les organes de contrôle et les conventions «il n’y a même pas une feuille de papier».

Hier, ici même, les employeurs ont interpellé le gouvernement uruguayen au sujet de certaines questions au sujet desquelles nous estimons que le gouvernement brésilien devrait être sérieusement critiqué aujourd’hui:

1) le gouvernement brésilien n’a pas consulté, n’a pas demandé aux représentants des travailleurs, ni informé les centrales syndicales brésiliennes de la réforme du travail qui allait être approuvée, il l’a simplement imposée;

2) le gouvernement du Brésil a complètement ignoré les recommandations des experts dans les rapports de 2017, 2018 et de nouveau en 2019, où ils ont estimé et noté avec préoccupation que «la dérogation au droit du travail par le biais de la négociation collective contrevient à l’objectif de promotion de la négociation collective libre et volontaire», et demandé au gouvernement de mettre la loi en conformité avec la convention;

3) le gouvernement du Brésil se réclame avec véhémence de la limitation de la période de validité maximale d’une convention collective ou d’un accord collectif à deux ans alors que les organes de contrôle ont précisé que cela est contraire à l’article 4 de la convention.

Enfin, nous souhaitons rappeler que l’esprit de la convention (nº 154) sur la négociation collective, 1981, et l’interprétation qui en est donnée par les organes de contrôle, est que «les accords individuels établis dans les contrats de travail ne devraient pas porter préjudice à la négociation collective avec les organisations syndicales» et ne doivent pas porter atteinte aux garanties prévues par la loi. La réforme du travail au Brésil vise précisément l’objectif inverse et, par là même, son gouvernement continue de violer les négociations collectives.

Membre employeur, Mexique – Je dois commencer par rappeler que le Brésil est l’un des pays où le taux de ratification des conventions de l’OIT est le plus élevé et que, dans le même esprit, les droits des travailleurs qui ont été créés au fil du temps ont été élevés au niveau constitutionnel en 1988, avec notamment la reconnaissance des instruments collectifs du travail.

Il est évident que la prétendue réforme du travail au Brésil n’a ni abrogé ni modifié les droits fondamentaux du travail consacrés dans la Constitution; la loi n’autorise les travailleurs et les employeurs, seulement s’ils le souhaitent, d’un commun accord et sur une base volontaire, qu’à établir des règles relatives aux formes de travail, dans des circonstances spécifiques et déterminées dans le temps, sans déroger aux droits fondamentaux susmentionnés, ce qui ne constitue en aucun cas une violation de la convention.

Il est important de rappeler et de préciser que, lorsqu’il n’y a pas d’accord entre les travailleurs et l’employeur par le biais de négociations collectives, le texte de la loi prévaut. Il est clair que la réforme du travail est conforme au contenu des normes de l’OIT, en particulier de la présente convention.

L’un des objectifs fondamentaux de la négociation collective dans le cadre de la réforme du travail est de permettre, par ce biais, de prendre des dispositions en rapport avec les activités et les besoins réels du lieu du travail qui peuvent ne pas avoir été nécessairement envisagées dans la loi, et ce, comme résultat d’un dialogue, de concessions réciproques et d’accords contractuels qui, contrairement à la perception qu’en donne le rapport, entraînent des opportunités d’amélioration des conditions de travail.

La preuve en est que, selon les informations obtenues, les travailleurs n’ont pas été affectés par la réforme; selon nos informations, les préoccupations ont été exposées devant les instances judiciaires nationales au Brésil, avant même de faire l’objet d’une proposition devant cette Organisation.

Un autre élément d’appréciation est qu’aucun syndicat de travailleurs au Brésil n’a signalé de violation de la Constitution, de la convention ou de toute autre norme de l’OIT. Tout cela montre clairement qu’il n’y a rien à remettre en question. En ce qui concerne l’avenir, au regard des particularités de tout lieu de travail, nous tenons à reconnaître que la loi est nécessaire pour établir un cadre définissant des seuils et des plafonds.

Cependant, il est également essentiel de permettre la négociation collective dans le cadre de la réforme du travail au Brésil afin d’identifier les besoins spécifiques et d’adapter les conditions de travail aux exigences des activités, dans l’intérêt des parties, de la compétitivité, de l’emploi et du développement durable.

Observatrice, Association latino-américaine des juristes du travail – Outre la vice-présidente de l’Association latino-américaine des juristes du travail, je représente l’Association brésilienne des juristes du travail. J’apporte des données permettant de clarifier les points qui devraient être pris en compte par cette commission, en ce qui concerne les aspects techniques et non politiques du cas.

Depuis la réforme du travail au Brésil, un large éventail de mesures directement liées à la convention a été mis en œuvre, toutes judiciarisées dans le cadre de trois instances ainsi que par la Cour constitutionnelle, actions dont la résolution prendra du temps. Selon les statistiques du Conseil supérieur de la justice du travail du Brésil, des dizaines de milliers de cas se sont accumulés.

La couverture de travailleurs par des conventions collectives s’est considérablement réduite. Selon l’Association brésilienne des magistrats du travail, le nombre de conventions collectives a chuté de 43 pour cent. Mais, phénomène plus ample et plus dangereux, la substitution de la négociation collective par des contrats individuels est effrayante par le nombre de déguisements artificiels de travailleurs en entrepreneurs indépendants, cachant ainsi une dépendance et une subordination strictes.

En mars 2016, l’enquête nationale menée auprès d’un échantillon local de l’Institut brésilien de géographie et de statistique, organisme gouvernemental officiel, a mis en évidence l’existence de 9,5 millions de travailleurs non immatriculés et, partant, non couverts par la négociation collective. En avril 2019, ce nombre est passé à plus de 11,2 millions ce qui signifie que, en trois ans, plus de 1 600 000 travailleurs ont été directement privés de protection.

Nous avons environ 8 millions de microentrepreneurs, après une augmentation de 25 pour cent en deux ans – presque tous des autoentrepreneurs – avec une augmentation qui pose la question de savoir comment les travailleurs brésiliens s’étaient endormis salariés et se sont réveillés employeurs.

Certains des gouvernements ici présents peuvent penser que la réforme faite au Brésil présente certaines similitudes avec les modifications apportées dans leurs Etats. Mais loin de nous l’idée paradoxale d’élargir les pouvoirs de négociation – en particulier afin de permettre la réduction des droits – tout en supprimant tous les moyens et toutes les armes de la négociation, dans des conditions de parité.

L’article 19.8 de la Constitution de l’OIT doit être invoqué, car le Brésil a privé de protection un nombre énorme de travailleurs, soumis à des règles régressives et antisyndicales, qui violent l’esprit de la convention, lequel doit être préservé.

Membre employeur, Paraguay – Je voudrais traduire l’opinion de ma délégation, au sujet du cas du Brésil, examiné ici pour la deuxième fois, ce qui constitue une injustice malgré les propos des adversaires de la réforme du travail au Brésil.

L’OIT est, par nature, tripartite, ce qui requiert que la discussion sur les relations de travail soit totalement technique.

Il est important de garder à l’esprit que la réforme du travail est un agenda du pays et qu’il s’agit d’un effort ciblé, résultat d’au moins vingt ans de débat en faveur de l’amélioration des relations de travail au Brésil et fondé sur le préalable de l’incitation et de l’évaluation de la négociation collective.

Ce fait revêt une importance particulière dans ce cas précis de la réforme du travail, lorsqu’il est vérifié que le préalable de la réforme est précisément l’incitation, la protection et la valorisation de négociations collectives libres et spontanées, de la manière préconisée par cette convention et la convention no 154, toutes deux ratifiées par le Brésil.

La Constitution fédérale du Brésil prévoit déjà, depuis 1988, parmi les droits des travailleurs, la reconnaissance des conventions et contrats collectifs du travail. La Cour suprême du Brésil s’est également positionnée en faveur de la préservation de la négociation collective.

Toutes ces questions ont servi d’éléments à la réforme du travail, mettant en évidence les lignes directrices de l’adoption de la négociation collective, par exemple, des conditions de travail négociables, telles que la rémunération à la productivité, le télétravail, le changement des jours fériés, etc., sans négliger de désigner les conditions de travail qui ne peuvent pas être négociées, telles que les droits des travailleurs énoncés dans la Constitution, parmi lesquels, les congés de maternité et de paternité, les congés annuels et l’assurances contre les accidents du travail.

Malgré tout, nous pouvons affirmer qu’il ne fait aucun doute que la réforme du travail au Brésil respecte pleinement la convention.

Membre gouvernemental, Argentine – Le gouvernement argentin remercie les représentants des gouvernements ainsi que les acteurs sociaux qui se sont exprimés sur ce point de l’ordre du jour. Conformément à ce qui a été exprimé par le GRULAC, nous voudrions dire notre préoccupation concernant les critères adoptés pour l’établissement de la liste des pays. Nous observons qu’un grave déséquilibre géographique persiste en la matière, affectant en particulier toute notre région.

Nous proposons donc l’application de critères plus objectifs et de méthodes plus transparentes pour attirer l’attention sur les cas de violation grave des normes internationales du travail, ce qui permet de suggérer des améliorations pour répondre en priorité aux revendications des acteurs sociaux dont les droits fondamentaux sont le plus sérieusement enfreints.

Nous avons écouté attentivement l’intervention du Brésil sur sa réforme de la main-d’œuvre. Le Brésil est l’un des pays qui a ratifié la majorité des conventions internationales du travail et qui cherche en permanence à réaliser l’harmonie nécessaire entre le texte de la norme internationale et sa législation nationale. La réforme du travail au Brésil est un processus de construction progressive de nature parlementaire, respectant les garanties constitutionnelles; c’est l’exemple frappant des défis qui se posent actuellement dans le pays et qui exigent l’adaptation des normes aux réalités économiques imposées par la mondialisation.

Aujourd’hui, le contrat social n’est plus le même qu’il y a quarante ans, il exige des changements conformes à un monde différent régi par les progrès et la dynamique de la compétitivité internationale. La nécessité d’un emploi équitable comporte de nouvelles conditions et nous devons nous y adapter en préservant les valeurs de justice sociale.

Il ne faut pas oublier que les explications fournies par le Brésil sur la convention no 87 au sujet des projets de loi émanant du Parlement ont été le fruit de profonds débats et qu’ils ont été appliqués de manière progressive dans le cadre des nouvelles relations de travail.

Il est incompréhensible que le Brésil ait été inclus dans la liste des pays en 2018 et 2019. Le supposé équilibre régional entraîne une injustice mondiale. Ceux qui ont fondé cette Organisation ont vu un travail décent et la justice sociale; ils n’ont pas vu le travail des enfants, ils ont vu le développement, la croissance et le progrès. Cent ans plus tard, alors que le Brésil figure dans la liste restreinte, il existe de nombreux endroits dans le monde où les travailleurs ne sont même pas au courant de l’existence de cette Organisation. Et c’est pourquoi il faut maintenir l’équilibre régional.

Comme dans de nombreux autres Etats du monde, la situation au Brésil, n’est pas paradisiaque. Je ne doute pas que le monde soit rempli de listes restreintes bien plus graves qui ne figurent pas dans notre catalogue. 

Ceux d’entre nous qui sont présents ici ne veulent pas que cette Organisation fasse, à l’avenir, partie du musée des acronymes. Pour éviter cela, nous devons jauger nos forces et nos capacités avec un sens critique et non complaisant. Tout cela parce que nous ne voulons pas, à l’avenir, nous rappeler avec nostalgie notre passé, qui est aujourd’hui notre présent.

Si nous ne disions pas tout cela, si nous gardions le silence, nous serions tous témoins d’une complicité internationale du silence.

Membre employeur, Espagne – Pour la deuxième fois consécutive, nous discutons de ce cas avec les mêmes arguments que l’an dernier et sans aucune base technique pour justifier l’intégration de cette question dans la liste des cas à examiner par cette commission. Nous, membres de la commission, devons veiller à ce que seuls les cas qui violent manifestement les accords figurent sur la liste, sur la base de méthodes et de critères objectifs. Nous souhaitons rappeler que cette même affaire a été examinée l’année dernière au sein de cette même commission qui, dans ses conclusions, a déterminé qu’il n’y avait aucun élément indiquant une violation de la convention.

D’entrée de jeu, nous sommes convaincus que la négociation collective promue dans la nouvelle réforme du travail ne viole en aucun cas les conventions de l’OIT, en particulier la présente convention.

Nous pensons qu’avec la nouvelle loi la négociation collective devient plus pertinente en permettant aux représentants des entreprises et des travailleurs de négocier de meilleures conditions que celles prévues dans la législation. C’est ce sens, et non un autre, que nous devons conférer à la prépondérance de la négociation collective, conforme à la loi, et inscrite dans la nouvelle législation.

Tout cela s’applique sans porter atteinte en aucun cas aux droits du travail garantis par la Constitution.

Dans le même temps, nous devons attirer l’attention sur le fait que l’article 4 de la convention devrait servir d’argument pour encourager les négociations volontaires. En ce sens, la législation brésilienne n’a fait que renforcer ce principe de négociation collective.

Mais, outre ce qui précède, nous tenons à souligner que la réforme a déjà commencé à générer ses premiers résultats positifs. Parmi eux, il faut mentionner les effets suivants:

- la réduction de 40 pour cent des conflits du travail devant les tribunaux;

- la mise à jour de la législation du travail;

- des incitations à favoriser le dialogue et à éviter les conflits juridiques, qui se sont traduits par 82 000 accords de médiation en 2018;

- de plus grandes opportunités de recrutement pour les travailleurs.

Le débat important que les agents sociaux ont entretenu lors du traitement de cette proposition législative et de la consultation de la société civile menée par le Congrès, dans le strict respect de la législation en vigueur, mérite une attention particulière.

Compte tenu de ce qui précède, la commission ne peut que conclure que la loi no 13467 est conforme aux conventions de l’OIT.

Membre gouvernementale, Panama – La délégation gouvernementale du Panama remercie le distingué délégué du Brésil pour ses explications sur la réforme du travail, mise en œuvre pour promouvoir la négociation collective en vue de l’exécution des obligations contractées par le pays à l’égard de l’OIT.

Nous tenons à réaffirmer que le cas présent est un exemple flagrant de ce que notre groupe régional, le GRULAC, a mis en lumière pour montrer que la sélection ne reflète pas une proportionnalité géographique adéquate des cas.

En ce qui concerne les commentaires de la commission d’experts sur l’application de la convention au Brésil, nous regrettons d’avoir choisi de ne pas attendre le cycle régulier de rapport du gouvernement brésilien sur l’application de cette convention, prévu pour cette année. Par conséquent, la commission ne dispose pas des éléments pertinents et opportuns sur le champ d’application des mesures législatives mises en œuvre par les autorités brésiliennes et que le pouvoir judiciaire national examine actuellement.

Cette commission et l’OIT, dans son ensemble, doivent reconnaître les efforts importants déployés par les gouvernements, les institutions et les organisations nationales pour interpréter les normes tout en tenant compte de la situation, du système juridique et des capacités nationales.

Nous encourageons le gouvernement du Brésil et les partenaires sociaux à rester fermement attachés à la promotion de la négociation collective et à mettre en place, par le biais du dialogue social tripartite, les mesures nécessaires pour préserver le respect des principes consacrés par la convention.

Membre employeur, Guatemala – C’est la deuxième fois que cette affaire est examinée au sein de la commission, comme l’ont dit les orateurs qui m’ont précédé. Sans entrer dans les motifs d’une telle inclusion, la vérité est qu’elle nous donne l’occasion d’analyser un peu plus en détail la législation brésilienne récemment adoptée, qui part du principe du renforcement de la négociation collective dans les termes requis par l’article 4 de la convention.

En conséquence, les droits des travailleurs inscrits dans la Constitution sont à la base de la négociation, laquelle constitue une garantie générale de protection dans un pays qui élève les droits du travail au niveau constitutionnel.

Que nous discutions de ce cas à l’occasion du centenaire de l’OIT et que ce centenaire coïncide avec le changement d’époque que représente la quatrième révolution me paraît très symbolique. L’occasion est donc propice pour analyser la manière dont les normes doivent s’adapter aux besoins actuels du marché du travail et, en corrélation avec cette vision de l’avenir, nous devons comprendre la portée des normes.

Il me semble que, dans la réforme mise en œuvre au Brésil, il existe de bons exemples de la manière de parvenir à une adéquation, sans pour autant renoncer aux garanties fondamentales du travail. Je cite, à titre d’exemple, la règle énoncée à l’article 444 du Code, relative à l’articulation entre la négociation collective et les contrats de travail individuels, qui laisse une plus grande marge d’action aux parties qui négocient leurs conditions de travail sous la forme d’un contrat déterminé dans des conditions spécifiques.

Une appréhension correcte de cette norme suppose de comprendre la double garantie qu’elle représente pour le travailleur, d’une part, en se référant aux personnes possédant certaines qualifications et, d’autre part, en garantissant une série de droits en vertu d’une disposition constitutionnelle. C’est également l’occasion d’adapter, dans cette situation changeante, les services spécialisés fournis par ce travailleur aux besoins changeants de l’entreprise et de son environnement.

Cela rend compatibles les besoins de sécurité juridique des droits du travailleur, avec le besoin d’adaptation aux nouvelles formes de travail et surtout la stabilité du travailleur, dont l’emploi pourrait disparaître en l’absence d’une règle permettant une telle adaptation.

Nous appuyons les propos du porte-parole de notre groupe, en ce sens que la disposition antérieure ne relève pas de l’article 4 de la convention, ce qui signifie qu’il n’y a pas d’infraction.

Membre gouvernementale, Chili – Notre délégation s’associe à la déclaration faite par l’Argentine au nom d’une majorité significative des Etats du GRULAC. Comme cela a également été exprimé par plusieurs pays de notre région qui nous ont précédés, nous partageons la préoccupation concernant l’application des critères de sélection des cas à analyser par la commission et, à cet égard, nous souhaiterions que cette procédure soit plus transparente et menée avec la participation de tous les mandants de manière tripartite.

Nous partageons la préoccupation relative au fait que les efforts du gouvernement brésilien n’aient pas été suffisamment reconnus. En outre, si ce pays avait eu suffisamment de temps pour pouvoir partager les informations pertinentes avec cette commission, peut-être ce cas ne ferait-il pas l’objet d’un examen ici. Nous sympathisons également avec les autres pays de notre région qui, malgré les efforts déployés en fonction de leurs réalités nationales, ont également été inclus dans cette courte liste.

Nous encourageons cette commission à proposer des mesures constructives et intégrant le dialogue social en tant qu’élément central pour avancer face aux nombreux défis de l’avenir du travail.

Membre employeur, Honduras – Rien ne permet de justifier l’interpellation du Brésil devant la commission, la réforme de la législation du travail introduite par la loi no 13467 de 2017 ne viole ni les normes internationales du travail ni les droits du travail garantis par la Constitution brésilienne. Au contraire, elle renforce les objectifs du concept juridique de négociation collective, garantissant que les instruments collectifs peuvent être conclus en tenant compte des modes de travail et de production actuels, sans ingérence de la part de l’Etat.

La nouvelle loi renforce les principes de l’Etat de droit en garantissant la sécurité juridique des partenaires sociaux qui recourent à la négociation collective, en tant qu’outil de préservation de l’autonomie des parties, en donnant la priorité à la négociation sur la loi.

Il semble nécessaire de réaffirmer avec force ce qui a déjà été exprimé dans cette salle: «L’article 4 de la convention n’énonce aucune obligation absolue pour la négociation collective de définir des conditions plus favorables que celles établies par la loi.» En réalité, la convention stipule que les pays doivent adopter des mesures telles que la négociation collective soit adaptée aux conditions nationales, ce qui est précisément le cas au Brésil.

Il est inquiétant que la commission d’experts puisse considérer que la négociation collective n’est valable que si elle contient des conditions de travail plus favorables que celles prévues par la loi. Il s’agit là d’une modification des règles définies par la convention et d’une violence à l’encontre des principes mêmes de l’OIT.

Par conséquent, il n’y a aucune raison pour que cette commission examine à nouveau le cas du Brésil.

Membre travailleur, Uruguay – Tout d’abord, je veux exprimer la plus profonde solidarité du mouvement syndical uruguayen, notre Intersyndicale plénière des travailleurs-Convention nationale des travailleurs (PITC-NT), avec les travailleurs du Brésil. Les travailleurs ne sont pas animés par une intention politique à court terme; les peuples, du fait de leurs connaissances, situent les gouvernements en fonction des différentes trajectoires politiques. Cela encourage les travailleurs non seulement à la nécessité technique de respecter les conventions internationales, mais également à la nécessité politique, non partisane, de faire progresser les droits des travailleurs et des peuples conformément à la réglementation en vigueur.

De notre point de vue, la convention est cohérente, sans quoi on ne s’expliquerait pas comment l’article 1 établit la liberté syndicale, et l’article 4, le droit de négociation collective. Ce sont les deux faces d’une même pièce.

La négociation collective dans cette société n’est pas une négociation entre égaux et, bien que le slogan selon lequel le travail ne serait pas une marchandise soit romantique, nous ne pouvons pas expliquer le fonctionnement de la société si nous ne tenons pas compte du fonctionnement du marché du travail. Strictement privés des moyens de production, nous, les travailleurs, sommes obligés de vendre notre capacité de travail, notre force de travail, en échange d’un salaire, et nous les vendons à ceux qui possèdent le pouvoir économique et les moyens de production de capital pour nous embaucher; le marché du travail est une réalité quotidienne.

Un événement extérieur à la négociation collective influe quotidiennement sur les conditions salariales et la durée du travail dans lesquelles les travailleurs doivent travailler. Par exemple, le phénomène de chômage: s’il y a beaucoup de chômage, les travailleurs doivent négocier à la baisse.

Nous sommes radicalement opposés à cette réforme du travail, car elle ajoute effectivement un élément de compétitivité à la baisse, des éléments de chantage, à l’encontre de la partie la plus faible de la relation de travail. En permettant que la convention puisse être inférieure à la loi, elle ajoute un élément de chantage encore plus important lorsqu’elle permet l’individualisation de la résiliation de la relation de travail en vertu de la convention collective.

Le syndicat est l’union libre et volontaire des travailleurs pour défendre leurs intérêts. Le syndicat est démantelé au moyen de l’individualisation la négociation collective et en soumettant les travailleurs à des systèmes de déréglementation importants.

Par conséquent, de notre point de vue, il est juste que cette commission analyse de manière approfondie la manière dont le Brésil se conforme aux dispositions établies par l’OIT, afin que la prétendue paix sociale ne soit pas la paix des cimetières.

Membre gouvernemental, Roumanie – Je parle au nom de l’Union européenne (UE) et de ses 28 Etats membres. La Norvège, pays de l’AELE, membre de l’Espace économique européen, s’associe à cette déclaration. Nous ne souhaitons pas faire de commentaires sur le cas dont nous discutons maintenant. Cependant, nous nous sentons obligés de soulever des points de nature fondamentale à propos de certains commentaires formulés depuis le début de cette commission sur le système de contrôle en soi. Nous voudrions rappeler que les normes internationales du travail fournissent le cadre juridique de l’Agenda du travail décent. Ces normes internationales du travail s’appuient sur un système de contrôle et la coopération technique du BIT sur le terrain pour leur application dans la loi et dans la pratique. L’UE et ses Etats membres soutiennent les normes de l’OIT et les mécanismes de contrôle et s’opposeront fermement à toute tentative visant à affaiblir ou à saper le système. Adopter des normes internationales sans disposer d’un système de contrôle puissant et indépendant pour superviser leur mise en œuvre serait non seulement inefficace, mais également inquiétant. En effet, nous ne devons pas douter du fait que le système de contrôle est essentiel pour assurer la crédibilité du travail de l’Organisation dans son ensemble. Par conséquent, nous appelons tous les constituants à maintenir une position constructive et à respecter les règles de ces mécanismes.

Représentant gouvernemental – Le Brésil s’associe à la déclaration faite par l’Argentine au nom du GRULAC et nous remercions tous les gouvernements et partenaires sociaux qui se sont joints à notre appel en faveur d’une réforme complète du système de contrôle, tant au sein de cette commission qu’ailleurs, lors de la présente Conférence. Nous avons présenté des faits concrets et des preuves que le Brésil se conforme pleinement à la convention no 98, ainsi qu’à d’autres conventions de l’OIT. En outre, nous avons indiqué que la commission d’experts s’était fondée sur des informations erronées extraites par les accusateurs d’études douteuses et partiales dans des articles de journaux. Cela est en contradiction manifeste avec l’analyse moderne des politiques publiques et les études de droit comparé international. Notre délégation transmettra les études de la FIPE sur les négociations collectives et les études mentionnées de la Banque mondiale, de l’OCDE et du FMI. Je tiens à exprimer mon plus grand respect pour les travailleurs qui ont pris la parole, en particulier pour le porte-parole des travailleurs, M. Mark Leemans, et le représentant des travailleurs brésiliens, M. Lisboa. Je dois cependant souligner que nous devrions nous concentrer sur les problèmes de la présente session. La réforme du travail est un outil important pour réduire l’emploi informel, assurer la sécurité juridique et encourager les investissements. La réforme du travail n’a toutefois pas porté atteinte aux droits du travail ni, donc, au coût du travail au Brésil. Et, comme on dit en portugais, «on ne décrète pas les emplois». La création d’emplois est le facteur de l’économie dans son ensemble, déjà faible après la récession économique la plus profonde de notre histoire. Cela dit, depuis la réforme du travail au Brésil, plus de 850 000 emplois ont été créés dans le secteur formel. Selon les statistiques officielles, il y avait 38,7 millions de travailleurs dans le secteur formel en avril 2019, contre 37,9 millions deux ans auparavant. A titre de comparaison, au cours des deux années précédant la modernisation de la législation du travail, plus de 1,6 million d’emplois formels ont été perdus. Les statistiques de l’enquête annuelle auprès des ménage (PNAD) confirment 3 millions de travailleurs de plus au premier trimestre de 2019 par rapport à la même période de 2017. De plus, elles ne font état d’aucune perte en termes de salaire réel des travailleurs. Les accusations de précarisation du marché du travail ne sont pas fondées et ne sont étayées par aucune preuve. Les nouvelles formes de contrats concernent un nombre négligeable de contrats. Par exemple, le travail intermittent représente 0,16 pour cent du total des contrats officiels. De même, les données officielles montrent que la part des contrats à durée déterminée représente moins de 1 pour cent du total des contrats formels. Il reste encore beaucoup à faire, et l’économie est toujours très faible, mais nous sommes sur la bonne voie. En ce qui concerne la relation entre la législation du travail et la convention collective, en l’occurrence l’article 611-A de la loi no 13467, la commission d’experts indique que la possibilité hypothétique, par la négociation collective, de dérogations susceptibles de réduire les droits et la protection conférés par la législation du travail aux travailleurs découragerait la négociation collective et irait donc à l’encontre des objectifs de la convention. Cette déclaration n’est qu’une présomption sans fondement. Aucune confirmation de dérogation ou de convention collective dommageable n’a été présentée au cours des trois dernières années depuis que la commission a commencé à accuser le Brésil. Une légère réduction du nombre de conventions collectives est liée à la faiblesse générale de l’économie brésilienne et s’est accompagnée de négociations plus multiformes dans l’intérêt des travailleurs et des employeurs. Ces données sont corroborées par des preuves solides d’études récentes d’institutions de recherche indépendantes et d’organisations internationales, une fois encore, comme la Banque mondiale. La réforme du travail est le fruit de nombreuses années de discussions au sein de la société brésilienne, suivies de consultations préalables avec les syndicats centraux et de centaines d’interactions au sein du Parlement brésilien, les mêmes institutions qui ont ratifié toutes les conventions de l’OIT.

En ce qui concerne la prééminence des accords collectifs sur les conditions générales des conventions collectives, l’article 620 a pour but de permettre des accords collectifs, beaucoup plus proches du quotidien des travailleurs, au niveau de l’entreprise. Ainsi, cette réalité concrète peut être mieux traduite au moyen de l’accord collectif, en donnant plus de densité aux clauses négociées.

En ce qui concerne la relation entre les contrats individuels et les conventions collectives, article 444, il convient de rappeler que l’article 4 de la convention ne fait pas référence aux contrats individuels de travail. En outre, les possibilités énoncées à l’article 444 (et non à l’article 442, comme indiqué à tort dans un précédent rapport) de la législation du travail modifiée ne s’appliquent qu’à une petite partie de la population brésilienne, soit 0,25 pour cent de la population appartenant à la couche supérieure de revenu, personnes occupant généralement des postes de direction.

En ce qui concerne la mesure provisoire no 873, la disposition est en réalité très simple, elle réaffirme que les contributions du syndicat dépendent d’une autorisation préalable écrite et individuelle du salarié ou de l’entreprise, de sorte que le salarié a le choix de financer le syndicat. Je voudrais rappeler qu’avant la réforme du travail les cotisations syndicales étaient obligatoires, au point qu’en portugais on parle de taxe syndicale et non de cotisations syndicales.

Depuis l’entrée en vigueur de la nouvelle loi, certains syndicats ont contourné la loi en imposant des contributions obligatoires par le biais d’assemblées générales et d’une représentation douteuse, qui permettait l’autorisation collective. Les salariés ont été lésés dans leurs droits à la liberté syndicale, de sorte que la mesure provisoire était nécessaire pour appliquer la réforme du travail et garantir la volonté du Parlement.

En conclusion, il n’y a aucune raison de penser, comme l’a suggéré la commission d’experts, que la nouvelle législation du travail au Brésil découragerait la négociation collective. Les travailleurs conservent la possibilité d’opter, lors d’une négociation volontaire, pour des dispositions légales lorsqu’elles sont jugées plus favorables que les conditions proposées par l’autre partie.

L’examen du cas brésilien a enfreint les principes les plus élémentaires d’une procédure régulière. Un système permettant cela, sans contrôles ni contrepoids efficaces, est contraire aux buts et objectifs de l’OIT.

Le Brésil refuse toute attaque contre ses institutions. Au cours des deux dernières années, le Brésil a fait face à une crise politique et à une récession économique. Nous avons mis en œuvre d’importantes réformes économiques et du travail, promulguées par la législation, et promu des changements positifs. La démocratie est vivante, la société civile est dynamique, le débat politique est en plein essor, l’Etat de droit est en place et solide, et le pouvoir judiciaire reste pleinement indépendant. Le Brésil continuera d’investir dans des réformes économiques pour créer plus d’emplois de qualité, en réorganisant nos mécanismes d’intermédiation du travail afin de sortir les personnes du chômage le plus tôt possible. Des services numériques sont proposés aux entreprises ainsi qu’aux travailleurs, ce qui réduit la bureaucratie et cède la place à la création d’emplois.

En tant que pays à revenu intermédiaire et vieillissant, nous savons tous que les augmentations de salaire et la justice sociale ne découleront que des gains de productivité. Nous invitons les travailleurs et les représentants des travailleurs à contribuer à ce programme, à lutter contre l’informalité, à sortir davantage de personnes de la pauvreté et à bâtir l’avenir du travail au Brésil.

Membres travailleurs – Nous ne pouvons que constater avec une profonde inquiétude l’impact désastreux des amendements introduits par la loi no 13467 de 2017 et l’incapacité du gouvernement du Brésil à respecter les principes fondamentaux de la négociation collective libre et volontaire et du caractère obligatoire des conventions collectives conclues, comme prescrit par la convention.

En vertu des dispositions modifiées de la codification des législations du travail, la hiérarchie des normes a été inversée et, en moins de deux ans, les relations professionnelles au Brésil ont été totalement démantelées. Avec ces changements régressifs, la codification de la législation du travail ne sert plus son objectif de filet de sécurité pour les travailleurs brésiliens, et le nombre d’accords collectifs diminue. Les travailleurs ont été spoliés de toutes les protections prévues par la loi ou par des conventions collectives plus favorables et, contrairement à ce que prétend le gouvernement, leur situation s’est dégradée.

Après des années de progrès social et de lois et de politiques inclusives qui ont permis à des millions de personnes de sortir de la pauvreté, les Brésiliens tombent dans la pauvreté et le chômage, pendant que les inégalités se creusent. Dans un pays où le taux de chômage augmente de manière effroyable et où plus de 50 millions de personnes, soit près de 25 pour cent de la population totale, vit avec moins de 5,50 dollars E.-U., nous déplorons le mépris total du gouvernement du Brésil pour sa population.

Le gouvernement persiste à promouvoir un système qui viole les principes, les objectifs et les dispositions de la convention et porte gravement atteinte aux fondements de la négociation collective et aux relations professionnelles au Brésil. Nous demandons instamment au gouvernement du Brésil de rester fidèle à son engagement en tant que Membre de l’OIT, donc lié par sa Constitution et par la convention.

Nous appelons à des consultations sincères et constructives avec les partenaires sociaux, dans les meilleurs délais et afin d’achever la révision de la codification des législations du travail pour mettre ses dispositions en pleine conformité avec la convention. Nous ne saurions trop insister sur l’importance de la restauration du dialogue social tripartite et des consultations au Brésil et nous invitons le gouvernement à prendre des mesures immédiates et concrètes à cette fin.

En outre, nous appelons le gouvernement à remédier sans tarder aux lacunes et aux insuffisances législatives mises en évidence par la commission d’experts en ce qui concerne les points suivants:

- une protection adéquate contre la discrimination antisyndicale;

- l’arbitrage obligatoire dans le cadre de l’obligation de promouvoir la négociation collective libre et volontaire;

- le droit de négociation collective dans le secteur public;

- la soumission des conventions collectives à la politique financière et économique.

Ce cas nécessite un examen sérieux de la part de la commission et de l’OIT dans son ensemble. Nous craignons que les réformes régressives du travail au Brésil ne soient considérées comme un modèle par d’autres gouvernements du monde, comme cela est illustré dans ce cas. Ce serait catastrophique.

Enfin, nous avons entendu un certain nombre d’intervenants des groupes d’employeurs et de gouvernements qui ont soulevé les questions suivantes: l’interprétation de l’article 4 de la convention par la commission d’experts; l’indépendance et l’impartialité de la commission d’experts; et le choix des cas individuels à examiner par cette commission. Nous sommes en désaccord avec leurs déclarations. Nous estimons qu’il n’est pas approprié de traiter de ces questions lorsqu’on discute d’un cas individuel. La discussion d’un cas individuel a pour objet d’examiner des questions de fond liées à l’application des conventions de l’OIT, et non de porter un jugement ou de suggérer des modifications au système de contrôle de l’OIT et à ses travaux. Il existe des procédures bien définies pour le faire si nécessaire. Les commentaires qui traitent de questions qui ne concernent pas le fond du cas ne sont pas pertinents et détournent simplement des questions graves dont nous sommes saisis. Par conséquent, nous répondrons à ces déclarations à un moment plus opportun, tout en remerciant l’UE pour ses commentaires constructifs en faveur du système de contrôle de l’OIT. Compte tenu de la gravité des problèmes, nous demandons à la commission d’inclure le Brésil dans un paragraphe spécial.

Membres employeurs – Nous avons écouté attentivement chacune des interventions. Nous saluons en particulier la présence du vice-ministre, de l’Ambassadeur du Brésil et de leurs équipes dans la salle, ainsi que les informations complètes, claires et détaillées communiquées à la commission.

Avant d’analyser les questions soulevées par la commission d’experts, je souhaite réagir aux déclarations du porte-parole des travailleurs. En ce qui nous concerne, nous comprenons que notre commission a pour mandat de se référer au rapport de la commission d’experts et à ses observations. Sinon quel sens aurait le débat public qui se déroule dans cette salle? Par conséquent, nous tenons à préciser que, pour nous, il est clair que nous sommes bien dans ce contexte, et nous continuons d’affirmer que nous rejetons les opinions exprimées dans votre déclaration pour ce qui est des aspects que nous avons déjà évoqués.

Ayant examiné les observations soulevées par la commission d’experts ainsi que les critiques que nous maintenons à leur égard, compte tenu de la présentation faite par le gouvernement et de la discussion qui a suivi, il est clair pour le groupe des employeurs que: premièrement, les modifications apportées aux articles 611-A et 611-B élargissent considérablement la possibilité d’encourager et de promouvoir le recours à la négociation collective; deuxièmement, les employeurs estiment que les modifications apportées à l’article 444 élargissent les possibilités de négociation individuelle des contrats de travail des travailleurs ayant un niveau d’instruction supérieur et un revenu sans limiter leur protection légale; et, troisièmement, de l’avis des employeurs, les modifications apportées à l’article 620 élargissent également le champ des conventions collectives et sont donc conformes à l’article 4 de la convention, dans la mesure où elles encouragent également la négociation collective au niveau d’une ou de plusieurs entreprises sans restreindre la négociation collective à des niveaux supérieurs.

Enfin, il est devenu évident que la réforme du travail, aux yeux des employeurs, a été le résultat d’un processus de dialogue social large et exhaustif.

Nous voulons rappeler que le dialogue social doit être de bonne foi, fructueux et productif, surpassant les instances qui le convoquent, mais il ne peut pas toujours signifier un consensus dans l’échange des idées, sinon il pourrait faire l’objet d’un veto sur les résultats. Il incombe en dernier ressort aux gouvernements de légiférer et d’assumer leurs responsabilités en légiférant en conformité avec les conventions internationales du travail, ce que nous estimons être le cas en l’espèce.

Compte tenu de ce qui précède, cette commission peut à nouveau conclure, comme elle l’a fait en 2018, que la législation du travail du Brésil et, en particulier la loi no 13467, est conforme aux dispositions de la convention ratifiée par le Brésil le 18 novembre 1952.

En conséquence, le groupe des employeurs s’oppose à l’inclusion de ce cas dans un paragraphe spécial.

Nous encourageons donc le gouvernement du Brésil à préparer, en consultation avec les organisations d’employeurs et de travailleurs les plus représentatives, et à soumettre à la commission d’experts un rapport pertinent conformément au cycle habituel d’envoi de rapports.

Conclusions de la commission

La commission a pris note des informations présentées par le représentant gouvernemental et de la discussion qui a suivi.

En tenant compte de la discussion qui a suivi, la commission demande au gouvernement de:

- continuer d’examiner, en coopération et consultation avec les organisations d’employeurs et de travailleurs les plus représentatives, l’impact des réformes et de déterminer si des ajustements appropriés sont nécessaires;

- élaborer, en consultation avec les organisations d’employeurs et de travailleurs les plus représentatives, un rapport qui sera présenté à la commission d’experts, conformément au cycle régulier de présentation des rapports.

Représentant gouvernemental – Une fois encore, nous avons vu concrètement combien il est urgent de réformer en profondeur le système de contrôle. Sous le toit même de cette Organisation tripartite, deux parties du prétendu tripartisme de l’Organisation internationale du Travail (OIT) viennent de rendre publiques leurs conclusions concernant le débat de samedi dernier, sans la participation de la troisième partie en question. Aucun autre système de la famille des organisations internationales des Nations Unies, qu’il soit de contrôle ou d’une autre nature, est aussi éloigné de la réalité que celui-ci. Le respect d’une procédure régulière reste à observer.

Dans tous les domaines de ce système de contrôle, seules deux des trois parties prennent les décisions. Dans la maison du tripartisme, seules deux parties élaborent la liste, dénoncent et concluent. Le Brésil souscrit aux interventions faites par tous les gouvernements et les partenaires sociaux qui appellent de leurs vœux, avec nous, une réforme complète du système de contrôle, tant au sein de la Commission de la Conférence qu’ailleurs, au cours de la présente Conférence.

Ce système de contrôle n’est nullement démocratique, transparent, impartial ou inclusif. Il possède tous les ingrédients d’un système solide mais ne prévoit pas le respect d’une procédure régulière et du droit de la défense. Ce système est trop important pour être dépourvu de protection contre les appropriations politiques et le manque de transparence. Nous sommes convaincus que les mandants de l’OIT peuvent parvenir à un consensus sur l’instauration d’un mécanisme de contrôle des normes qui soit efficace, réellement tripartite, et universel.

Nous avons présenté des faits et données concrets montrant que le Brésil respectait pleinement la convention no 98. D’après des instituts de recherche économique, telle l’Université de São Paulo, et des organisations internationales, tels la Banque mondiale, l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et le Fonds monétaire international (FMI). La position du Brésil a été officiellement soutenue par plus de 30 gouvernements et organisations d’employeurs, que nous remercions infiniment. Moins de la moitié d’entre eux ont appuyé l’ensemble des points de vue.

Ce sont là des mots forts parce que des mots forts doivent s’élever contre toutes sortes d’injustice. Une commission d’experts qui, malgré le caractère éminent de ses membres, ne fournit pas de travail technique solide; une commission qui agit comme un tribunal, reçoit des plaintes comme un tribunal sans enquêter sur les affaires, et examine les affaires comme un tribunal, en disant simplement qu’il n’y a pas besoin d’en faire toute une histoire parce qu’il n’y a pas de sanction officielle.

Ce système de contrôle ne plaide pas en faveur de la cause du multilatéralisme quand les valeurs et les principes qui sont les fondements mêmes du système multilatéral sont précisément ceux qui font défaut ici, aujourd’hui, et chaque jour, au sein du système de contrôle de l’OIT. Le Brésil a fait un effort pour dialoguer avec l’OIT de bonne foi et dans un esprit constructif. Notre capacité et notre volonté de poursuivre ce dialogue a néanmoins des limites si un dialogue ne peut être noué et si les réponses sont partiales et infondées. Si cette situation demeure, le Brésil se réserve le droit d’examiner toutes les options disponibles. Cela étant dit, comme nous le constatons, la position de la Commission de la Conférence reflète les négociations entre employeurs et travailleurs, et non la vision de l’OIT.

Le Brésil souhaiterait remercier le président pour la sagesse et la sérénité avec laquelle il conduit les travaux. Nous saluons également la capacité de la commission à tenir compte des informations fournies par le Brésil et à modérer ses conclusions. Il s’agit indiscutablement d’une évolution depuis trois ans. Le Brésil reste attaché aux conventions de l’Organisation, qu’il respecte, en ce qui concerne la création de davantage d’emplois, les stratégies d’apprentissage tout au long de la vie et les défis à relever en matière d’avenir du travail.

Cas individuel (CAS) - Discussion : 2018, Publication : 107ème session CIT (2018)

 2018-BRA-C098-Fr

Le gouvernement a communiqué les informations écrites ci-après.

Dans son rapport à la 107e session (mai-juin) de la Conférence internationale du Travail, publié en février dernier, la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations (CEACR), faisant ses observations sur le cycle régulier de présentation des rapports, s’est référée aux articles 611-A (prévalence de la négociation collective sur la législation), 442-B (travail indépendant) et 444, paragraphe unique (articulation entre les contrats de travail individuels et les conventions collectives) du Code du travail, tel que modifié par la loi no 13.467 (2017).

Réforme du travail au Brésil: contexte et objectifs

  • – La précédente législation brésilienne du travail, qui remonte à 1943, a subi quelques changements au fil des ans, mais a dû être actualisée pour répondre aux exigences de l’économie du XXIe siècle.
  • – L’intervention des tribunaux du travail annulant des clauses approuvées dans la négociation collective a conduit à de fréquentes plaintes de la part des syndicats. Dans ce contexte, les syndicats de la métallurgie de l’ABC, qui sont à l’origine du mouvement syndical brésilien, ont proposé en 2011 l’adoption de la convention collective à but spécifique (ACE) visant à faire prévaloir la négociation collective sur la loi et ayant comme seule limitation les droits inscrits à l’article 7 de la Constitution fédérale, plus précisément les aspects mis en œuvre par la réforme du travail.
  • – La réforme du travail (loi no 13.467, entrée en vigueur en novembre 2017) résulte de nombreuses années de discussions sur les défis auxquels le marché du travail brésilien doit faire face, les insuffisances de la législation du travail et les inquiétudes quant au fonctionnement de la justice du travail.
  • – Ces problèmes sont devenus particulièrement urgents dans le cadre de la grave récession économique que nous traversons: en 2016, le chômage est passé à 11,3 pour cent – taux le plus élevé depuis la formule moderne d’enregistrement qui date de 1992 – avec une augmentation de 82 pour cent depuis 2012. Il existe d’autres facteurs qui ont une incidence sur le marché du travail. On citera, par exemple, la proportion de 44 pour cent d’emplois informels par rapport au nombre total d’emplois, dont 60 pour cent de travailleurs non qualifiés; un nombre élevé d’interventions de la justice, une plus faible productivité du travail depuis les années soixante-dix (près de 1 pour cent par an); des mouvements importants de travailleurs; une sous-utilisation de la négociation collective et un manque de sécurité juridique dans le cadre de son application.
  • – Une consultation inclusive, exhaustive et approfondie avec tous les partenaires sociaux est un aspect essentiel de la réforme du travail au Brésil. La proposition de modernisation de la législation du travail a été élaborée à la suite d’une série de débats organisés par le ministère du Travail et par le chef du personnel du Cabinet de la présidence en décembre 2016, avec la participation de représentants de syndicats et d’employeurs.
  • – Par la suite, au cours de la procédure législative de 2017, 17 audiences publiques, 7 séminaires régionaux et plus de 40 réunions des parties concernées ont eu lieu au Parlement et dans différents Etats, ce qui a conduit à l’approbation du projet de loi par la Chambre des représentants et le Sénat fédéral.
  • – La réforme du travail vise à offrir à la fois au marché du travail et au système juridique plus de flexibilité, une meilleure productivité du travail, une sécurité juridique et rationnelle, des garanties renforcées contre les violations de la loi, ainsi que des principes et droits fondamentaux au travail pleinement respectés.
  • – Un des principaux aspects de la réforme du travail au Brésil est le renforcement des conventions et des accords collectifs entre syndicats et employeurs, de manière à permettre à chacune des parties de négocier collectivement les meilleures conditions pour concilier qualité de l’emploi et augmentation de la productivité sans porter atteinte aux droits des travailleurs.

CEACR – Mandat et cycles de présentation des rapports

  • – Comme stipulé régulièrement dans les rapports de la CEACR, la mission de la commission porte sur le contrôle, par le biais d’une analyse impartiale, de l’application des conventions «en droit et dans la pratique».
  • – L’évaluation du cas du Brésil par la CEACR ne répond pas à cette mission et aux exigences d’équité minimales, et ce au regard de plusieurs aspects.
  • – La CEACR n’a fourni aucune explication sur la mesure exceptionnelle consistant à ne pas respecter le cycle de présentation et à commenter sur la réforme avant même la présentation par le gouvernement du rapport sur l’application de la convention no 98. En outre, le vaste contexte de la réforme du Brésil n’a pas du tout été pris en considération.
  • – Manifestement, la CEACR n’a pas eu suffisamment de temps pour évaluer tous les aspects pertinents de la mise en œuvre de la nouvelle législation brésilienne. Lors de la réunion de la commission en novembre 2017, la loi no 13.467 n’était entrée en vigueur que depuis quelques jours.
  • – Un délai supplémentaire aurait été nécessaire pour permettre une compréhension appropriée et équilibrée du cadre juridique tel qu’il se présente, notamment des décisions des hautes juridictions, et de l’impact que peut avoir ce cadre sur le marché du travail.
  • – Le respect des cycles réguliers de présentation des rapports aurait facilité une évaluation exhaustive, en 2019-20, de l’application, dans le cadre de la réforme, des principes de la convention no 98. Le Brésil a présenté son dernier rapport sur la convention no 98 en 2016, et son prochain rapport est prévu normalement pour le 1er septembre 2019. La CEACR devra donc publier ses commentaires en février 2020, et toute discussion éventuelle de la Commission de l’application des normes ne pourra avoir lieu qu’à la 109e session de la Conférence (2020).

Articulation entre le droit du travail et les conventions collectives (article 611-A de la loi no 13.467)

  • – Selon les experts, l’article 611-A, malgré les garanties contenues à l’article 611-B du Code du travail, «contrevient aux dispositions et aux objectifs généraux des conventions nos 98 et 154, ainsi que de la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978», qui «est la promotion de la négociation collective pour trouver un accord sur des conditions de travail plus favorables que celles prévues par la législation [...]».
  • – L’analyse faite par les experts est sérieusement entachée par le fait que ces derniers n’ont fait aucun effort pour se reporter au sens courant donné au texte de la convention no 98, comme le prévoit pourtant le droit international.
  • – Il convient de souligner à cet égard qu’aucun élément de l’article 4 de la convention no 98 ni aucun des termes approuvés par les organes tripartites n’indiquent que la négociation collective se limite aux conditions plus favorables que «celles prévues par la législation» (voir l’article 4: «Des mesures appropriées aux conditions nationales doivent, si nécessaire, être prises pour encourager et promouvoir le développement et l’utilisation les plus larges de procédures de négociation volontaire de conventions collectives entre les employeurs et les organisations d’employeurs, d’une part, et les organisations de travailleurs, d’autre part, en vue de régler par ce moyen les conditions d’emploi.»).
  • – Au contraire, si l’on en croit les recommandations du Comité de la liberté syndicale, dans l’esprit de l’article 4 et de l’ensemble de la convention, aucune limitation du champ de négociations ni aucune annulation des conventions collectives par les tribunaux et le pouvoir exécutif ne sont prévues.
  • – Dans le même ordre d’idées, le Guide de politique sur la négociation collective (2015) stipule que: «Le cadre de la négociation collective a besoin de donner aux parties à la négociation toute la latitude nécessaire pour décider les sujets qu’elles souhaitent inclure dans leurs programmes de négociation. Le mécanisme de contrôle de l’OIT considère que les questions qui peuvent être négociées sont généralement incompatibles avec les normes internationales du travail et les principes sur le droit à la négociation collective.»
  • – De plus, la première partie du texte de l’article 4 porte expressément sur les mesures visant à promouvoir les procédures de négociation volontaire «aux conditions nationales appropriées» – termes qui ont une connotation à la fois juridique et pratique, ce qui nécessite un examen approfondi de la situation sur le terrain avant que la moindre conclusion ne puisse être tirée (là encore, la CEACR passe complètement sous silence un aspect pourtant essentiel si elle veut faire une interprétation correcte des obligations prévues par la convention no 98).
  • – Dans cette ligne de pensée, il est essentiel de procéder à une évaluation du contexte dans lequel a lieu la réforme du pays et du cadre plus large se référant aux principes et droits fondamentaux au travail contenus dans la Constitution brésilienne de 1988 (chaque élément composant les droits du travail contenus dans ladite Constitution a sa spécificité dans notre système juridique). Les dispositions pertinentes de la Constitution, l’article 611-B de la nouvelle législation (qui exclut de la négociation une trentaine de droits fondamentaux des travailleurs) ainsi que toutes les voies de recours juridique disponibles au Brésil permettent donc un système de garanties qui devrait être utilisé à chaque fois que l’application de la convention no 98, en droit comme dans la pratique, fait l’objet d’une étude approfondie (étude dont il n’est pas du tout fait état dans le rapport de la CEACR).
  • – Dans des systèmes de droits de l’homme solides et bien développés, comme c’est le cas au Brésil, une interprétation de l’article 4 comme celle de la commission peut conduire à une restriction grave et erronée de la portée de la négociation collective, ce qui va à l’encontre du texte et de l’esprit de la convention no 98.
  • – La référence faite aux «travaux préparatoires» de la convention no 154 (de 1981) constitue une autre irrégularité juridique grave relevée dans l’analyse effectuée par la CEACR. Les «travaux» ne devraient en aucune manière être un motif approprié pour restreindre les résultats de la négociation:
    • i) Cette convention ayant été conclue ultérieurement, elle ne peut déterminer le sens qu’ont voulu lui donner les Membres qui ont participé à l’élaboration de la convention no 98 (de 1949), ou ceux qui l’ont ensuite ratifiée (le Brésil a ratifié cette convention en 1952, soit vingt-neuf ans avant l’adoption de la convention no 154).
    • ii) Conformément à la Convention de Vienne sur le droit des traités, le recours à des «travaux» consiste en une interprétation à caractère purement supplétif, qui est subordonnée au sens ordinaire qui lui est donné, et qui doit être utilisé soit pour confirmer le texte du traité faisant l’objet de l’interprétation (en l’occurrence, la convention no 154, et aucune autre encore moins une convention plus ancienne, telle que la convention no 98), soit en cas d’ambiguïté ou de manque de clarté du texte.
    • iii) Si, par exemple, la convention no 154 devait être examinée, il convient de se prévaloir alors du texte de l’article 9 dudit instrument, plutôt que des «travaux préparatoires»: «La présente convention ne porte révision d’aucune convention ou recommandation existantes.»
    • iv) Même si ces «travaux» sont envisagés, il convient de lire l’ensemble du texte (rapport IV (1) de la 67e session de la CIT, 1981), et en particulier les paragraphes 58 et 65. On notera que la discussion est plus nuancée: l’interdiction de résultats qui dérogeraient aux dispositions de la loi n’est même pas envisagée et, quoiqu’il en soit, aucune partie ne prévoit la clause juridique spécifique contenue dans la législation du Brésil.

Articulation entre les contrats de travail individuels et la négociation collective

  • – La commission «rappelle également que les dispositions législatives permettant aux contrats de travail individuels de contenir des clauses contraires à celles contenues dans les conventions applicables (les contrats de travail individuels pouvant toujours contenir des clauses plus favorables aux travailleurs) sont contraires à l’obligation de promouvoir la négociation collective prescrite par l’article 4 de la convention».
  • – Il convient de rappeler que l’article 4 de la convention no 98 ne porte pas sur les contrats de travail individuels.
  • – L’éventualité prévue à l’article 444 (et non l’article 442, comme indiqué à tort dans le rapport) de la législation sur le travail telle qu’amendée ne s’applique qu’à une faible proportion de la population brésilienne (0,25 pour cent) dont les revenus sont les plus élevés et occupant en général des postes de direction.

Entrepreneurs indépendants (article 442-B de la loi no 13.467)

  • – La commission déclare en outre que «la convention s’applique à tous les travailleurs, à l’exception possible de la police, des forces armées (article 5) et des fonctionnaires commis à l’administration de l’Etat (article 6)».
  • – Le nouveau texte de l’article 442-B (et non 444-B, comme indiqué à tort dans le rapport) apporte simplement des éclaircissements sur le statut juridique de l’entrepreneur indépendant («autónomo», en portugais).
  • – Contrairement à la conclusion des experts, rien dans cette disposition ne va à l’encontre de la convention no 98: si l’entrepreneur indépendant (homme ou femme) ne garde pas une position de subordination vis-à-vis de la partie contractante dont il dépend, il n’aura pas le statut d’employé. De plus, l’article 511 n’a pas été modifié par la nouvelle législation, de sorte que les entrepreneurs indépendants («trabalhadores autónomos», en portugais) ont toujours la possibilité de s’organiser en syndicats.

Commission de l’application des normes

  • – Si l’on en croit les propres commentaires de la CEACR, le Brésil a jusqu’au 1er septembre 2018 pour soumettre l’ensemble de son rapport sur l’application de la convention no 98, afin de prévoir un délai suffisant pour répondre aux observations des partenaires sociaux et de la commission.
  • – Le pays était d’avis que, compte tenu du temps et des ressources limitées dont la Commission de l’application des normes dispose, il serait bon qu’elle se consacre aux cas graves. C’est pourquoi le fait d’inscrire le Brésil dans la liste restreinte de la Commission de l’application des normes revient à traiter son cas avant que le gouvernement ne se soit exprimé, ce qui va à l’encontre des normes applicables en matière de procédure régulière.
  • – Dans une analyse comparative d’autres cas ou de situations comparables, on constate que la CEACR n’a pas eu recours à des termes trop forts dans le cas du Brésil. Alors que des expressions telles que «profonde préoccupation», «profond regret», «prie instamment» ou «prie instamment et avec fermeté [diverses lignes d’action]», «la persistance et la gravité des allégations» reviennent relativement souvent dans le rapport, aucune d’elles n’est utilisée dans le cas du Brésil. Ces expressions révèlent clairement une situation de gravité et/ou d’urgence, dont les partenaires sociaux devraient tenir dûment compte au moment de dresser les listes de cas qu’elles soient complètes ou restreintes.

Conclusions

  • – En ne prenant pas en considération l’application des conventions dans la pratique et dans le contexte national, les observations des experts sont, au mieux, prématurées, en même temps qu’elles risquent d’aller à l’encontre du propre mandat de leur commission. En outre, elles proposent une interprétation de la convention no 98 qui est contraire à la loi et qui s’écarte du sens ordinaire donné dans le texte de l’instrument.
  • – Elle s’écarte également des recommandations cohérentes du Comité de la liberté syndicale, de même que des textes techniques de l’OIT.
  • – Il n’y a aucune raison de laisser entendre, comme le suggèrent les experts, que la nouvelle législation du travail au Brésil pourrait décourager la négociation collective. Les travailleurs ont toujours la possibilité et le choix, dans le cadre d’une négociation volontaire, de privilégier les dispositions légales partout où elles sont jugées plus favorables que les conditions proposées par l’autre partie.
  • – Inversement, la révision des articles pertinents du Code du travail, avec les modifications introduites par la réforme du travail (loi no 13.467 de 2017) que suggère la commission, découragerait les négociations, car elle permettrait au pouvoir judiciaire de réviser et d’annuler les conventions collectives, comme cela s’est du reste produit récemment, et la portée de ce qui peut être négocié en serait considérablement réduite, ce qui aurait un impact négatif sur le marché du travail.
  • – En fait, la réforme du travail prévoit une formule qui concilie négociations libres et volontaires et protection des droits des travailleurs (inscrits pour la plupart dans notre Constitution). Il convient de noter que le même principe (prévalence de la négociation sur la législation), introduit dans le Code du travail, a également été revendiqué en 2011 par les syndicats des métallurgistes de l’Etat de São Paulo, à travers leur proposition de convention collective à but spécifique (ACE).
  • – En assurant la sécurité juridique et la fiabilité de la négociation collective et sans porter atteinte à la protection des travailleurs, la réforme du travail respecte et promeut de manière effective la convention no 98, conformément à nos obligations internationales.
  • – Il est important de souligner que la protection des travailleurs n’est en aucune façon remise en cause par la nouvelle législation du Brésil. Les syndicats de travailleurs peuvent librement négocier les questions qui les intéressent tout en restant couverts par les dispositions du Code du travail pour tous autres sujets non négociés ou non convenus dans la négociation collective. Le système de protection juridique et les garanties constitutionnelles du Brésil offrent un niveau élevé de protection quel que soit le contexte. En outre, le processus de négociation collective lui-même garantit que l’intérêt supérieur des travailleurs est reflété dans les accords définitifs: d’abord, par le pouvoir de négociation de leur syndicat, qui doit être représentatif, puis par la prescription juridique selon laquelle la convention collective doit être approuvée par une assemblée générale de la branche; et, enfin, par le système de contrôle judiciaire exercé par le Bureau du Procureur du travail et les tribunaux du travail.
  • – Le Brésil a montré une volonté constante de favoriser le dialogue social tout au long et au-delà du processus qui a conduit à l’adoption de la réforme du travail. En juin 2017, le ministère du Travail a créé le Conseil national du travail pour discuter de toutes les questions urgentes du monde du travail, et, à partir d’octobre, les ordres permanents du Conseil sont approuvés par les mandants tripartites, ce qui les rend pleinement opérationnels.
  • – Enfin, il est important de noter que, depuis l’entrée en vigueur de la réforme du travail au Brésil, un certain nombre d’actions judiciaires revendiquant le caractère inconstitutionnel des nouvelles dispositions ont été déposées devant la Cour suprême, mais aucune d’entre elles n’a trait aux problèmes portés à l’attention de la CEACR. La plupart concernent en réalité la fin de la contribution obligatoire des syndicats.
  • – Le Brésil est disposé à continuer à discuter avec les partenaires sociaux et la société civile sur tous les aspects de notre législation.

En outre, devant la commission, un représentant gouvernemental, ministre du Travail, a regretté que la discussion de ce cas soit animée par des raisons politiques, ce qui peut avoir un impact négatif sur la qualité du système, alors que le Brésil a toujours été favorable à un renforcement du système de contrôle de l’OIT. Le Brésil est un membre fondateur et a ratifié 97 conventions, dont 80 sont en vigueur. Il est un des Etats les plus exposés au système de contrôle. Son comportement vis-à-vis des mécanismes de contrôle de l’OIT est exemplaire. Chaque année, le gouvernement communique tous les rapports dus, démontrant ainsi que tous les instruments ratifiés sont appliqués dans leur intégralité. En outre, la Commission tripartite des relations internationales, dans laquelle les normes de l’OIT et leur application sont largement discutées, appliquant pleinement en cela le dialogue social préconisé dans la convention (nº 144) sur les consultations tripartites relatives aux normes internationales du travail, 1976, se réunit régulièrement. Avec des références aussi solides, et alors que rien ne justifie l’urgence d’un tel examen, on peut difficilement comprendre pourquoi la commission d’experts, s’écartant de son mandat qui consiste à examiner l’application des instruments de l’OIT en droit et dans la pratique, n’a pas attendu la fin du cycle normal de présentation des rapports pour examiner la loi no 13.467/2017. Sur plusieurs points de grande importance, cette loi a été jugée prématurément quelques jours après son entrée en vigueur. L’analyse s’est faite trop vite, à un point tel que les articles de la législation examinée ont été échangés. Etant donné l’attachement du pays à l’OIT et à son système de contrôle des normes, le traitement tendancieux, partiel et techniquement vicié de ce cas est très dérangeant. L’OIT est l’otage d’un jeu politique qui conjugue motivations partisanes et intérêts corporatistes. La modernisation du Brésil n’a pas affecté les travailleurs, mais seulement les syndicats dépendant de l’Etat et manquant d’un réel engagement en faveur des travailleurs. Sur plus d’une vingtaine d’«actions directes en inconstitutionnalité» (procédure d’examen judiciaire) soumises à la Cour suprême fédérale contre certains points de la réforme, aucune ne portait sur les points analysés par la commission d’experts. Les deux tiers traitaient de la fin de la taxe sur les syndicats, une mesure qui fut très controversée, mais que les syndicats brésiliens n’ont pas remis en cause dans leurs observations adressées à la commission d’experts. Avec cette mesure, le Brésil s’approche de la pratique de la grande majorité des pays du monde et promeut l’autonomie et l’indépendance des syndicats que préconise la convention. L’orateur a affirmé que la mise en cause de cette mesure aurait mis en lumière la fragilité de l’ensemble des arguments des centrales syndicales (centrois sindicais). La réforme a abrogé une disposition qu’avait adopté, dans les années quarante, un gouvernement qui voulait avoir la mainmise sur les syndicats. La commission d’experts a déclaré que la possibilité d’apporter, par voie de négociation collective, des dérogations aux droits et à la protection que la législation du travail octroie aux travailleurs découragerait la négociation collective et serait par conséquent contraire aux objectifs poursuivis par la convention. Il est regrettable que la commission d’experts semble avoir fait sienne la thèse politique qui veut que la réforme soit synonyme de travail précaire. Or ce ne serait possible que si les syndicats acceptaient volontairement les termes d’un accord moins favorable que les dispositions légales existantes, que si l’inspection du travail ne fonctionnait pas, que s’il n’existait pas de tribunaux compétents en matière de travail et si la constitution fédérale n’était pas respectée. La commission d’experts a omis de considérer que les syndicats ne sont pas obligés d’accepter des conditions moins favorables que celles définies par la loi. Une négociation sans possibilité de concessions réciproques, qui ne confère des avantages qu’à une seule partie, n’incite pas l’autre à négocier. Un principe de base de toute négociation est qu’il y ait des concessions de chaque part.

Dans un pays comme le Brésil où la législation du travail est extrêmement vaste et détaillée, le fait de limiter la négociation collective aux seuls points qui ne sont pas couverts par la législation ou qui vont au-delà des dispositions légales réduirait leur portée et leur champ d’application d’une manière déraisonnable. Ce serait contraire à la convention qui dispose que les gouvernements doivent promouvoir une négociation aussi complète que possible, comme l’explique le manuel de l’OIT sur la question et comme le réaffirment de manière répétée les recommandations actuelles du Comité de la liberté syndicale. La commission d’experts n’a pas cité tout un éventail de droits au travail que protège la Constitution dans le système juridique brésilien et qu’aucune réforme ne peut abroger, même s’il s’agit d’une réforme de la Constitution. Ces droits figurent dans la loi no 13.467/2017. Quatre-vingts conventions de l’OIT sont intégrées dans le système légal brésilien et ne sont pas touchées par la réforme. Dans l’étude d’ensemble de 2018, la commission d’experts reconnaît que la protection que la Constitution garantit à ces droits au Brésil est un exemple à suivre. Ces droits ne peuvent pas faire l’objet de dérogations, et toute possibilité de négociation est expressément exclue dans leur cas. Cela prouve que le but de la réforme n’était pas d’abroger l’un ou l’autre droit mais, en les consolidant, de laisser autant de place que possible à la négociation collective, et ainsi appliquer la convention d’une manière plus efficace. La commission a négligé de mentionner que, dans le passé, il était courant que le pouvoir judiciaire brésilien annule des clauses de conventions collectives ou des conventions entières, sans aucune justification juridique objective. Cela créait une incertitude légale et décourageait la négociation collective. Celle-ci ne peut être renforcée, comme le préconise l’OIT, qu’en lui donnant force de loi et en protégeant l’autonomie des parties, en instaurant la primauté de ce qui est négocié sur ce qui est légiféré. Il est surprenant que des dirigeants syndicaux contestent ce point, étant donné qu’il reprend une proposition faite au départ en 2011 par un des plus grands et plus puissants syndicats du pays, le syndicat des travailleurs de la métallurgie ABC de São Paulo. On nous oppose que la primauté de ce qui est négocié sur ce qui est légiféré offre la possibilité à des syndicats de négocier contre les intérêts des travailleurs. Ce n’est pas ce qui se passe dans la négociation collective au Brésil. Des études montrent qu’en 2016, année d’une crise économique dure, dans plus de la moitié des conventions collectives les syndicats ont négocié des réajustements de salaires supérieurs à l’inflation, tandis que la grande majorité a réussi à préserver l’emploi à un moment où les licenciements étaient nombreux. Les syndicats brésiliens ont déjà intégré dans leurs conventions collectives les dispositions de la nouvelle législation. La nouvelle législation n’a pas découragé la négociation collective. Lorsque l’analyse pratique dément les théories qui servent au mieux les intérêts politiques, certains préfèrent ignorer la pratique et s’en tenir à la théorie. Outre les garanties que donne la Constitution, les travailleurs sont protégés par le système d’enregistrement des conventions collectives par le ministère du Travail, qui exige la preuve que la convention a été approuvée par une assemblée représentative de la catégorie; par les services de l’inspection du travail, composés de spécialistes qui savent identifier et combattre administrativement les fraudes et les violations; par le bureau du procureur de la juridiction du travail, une institution unique en son genre qui peut engager des poursuites lorsqu’elle perçoit des infractions aux préceptes juridiques, comme elle l’a déjà fait; et par l’appareil de la justice du travail, qui regroupe des spécialistes qui, en 2017, avant la prise d’effet de la nouvelle loi, a reçu plus de 4 millions de nouveaux recours. La commission d’experts n’a pas précisé que le Brésil compte 17 509 organisations syndicales enregistrées, dont beaucoup ont fait très peu pour leurs mandants. Il n’est pas difficile de comprendre pourquoi il y en a autant, contrairement à ce qui se passe dans le reste du monde. Du fait qu’il bénéficie d’une taxe obligatoire, un syndicat n’a pas besoin pour exister d’être représentatif ou de défendre les intérêts des travailleurs. L’enveloppe garantie par l’Etat, qui en 2017 dépassait les 4 milliards de reals (1,25 milliard de dollars E.-U.), justifie à suffisance leur existence, dans un incontestable détournement des valeurs qui devraient guider et justifier les organisations de travailleurs. La réforme du travail a mis fin à cette situation. Cela suppose que les syndicats travaillent davantage, au bénéfice des travailleurs comme des employeurs. Pour cette raison, la même réforme qui favorise la négociation collective promeut aussi l’indépendance des syndicats, qui est l’essence même de la convention. Il est clair que rien, d’un point de vue technique, ne justifie la mise à l’examen du cas du Brésil par la commission à ce stade et il est regrettable que l’OIT se soit fait manipuler politiquement. Cela arrive quand on privilégie les négociations politiques tenues secrètes au détriment des aspects techniques. Des analyses faites à la hâte et sans rigueur technique peuvent suffire à exposer un pays, si des intérêts politiques le requièrent, et le forcer à fournir des éclaircissements à la commission. Pendant une année électorale, cet examen est décrit par la presse brésilienne comme une procédure inquisitoire, sans qu’il soit tenu compte de l’engagement pris par le pays de remplir ses obligations. Un tel système ne répond ni aux revendications ni aux enjeux qui se posent au monde du travail, ni non plus aux attentes placées dans l’OIT. Alors qu’approche le centenaire de la création de l’OIT, le moment est venu de réformer le système afin d’améliorer sa cohérence vis-à-vis du monde du travail et de principes démocratiques et inclusifs, tels que la régularité de la procédure qui est exigée de toutes les institutions du système des Nations Unies. Depuis de nombreuses années, le GRULAC dénonce cet état de choses dans la plus totale indifférence. Le moment est venu de commencer à écouter, sinon le système de contrôle des normes courrait le grave risque de perdre sa crédibilité et, par conséquent, sa pertinence. Dans une organisation tripartite, il est étonnant que le système régulier de contrôle des normes n’ait rien de tripartite. Contrairement à ce qui se passe dans d’autres institutions, les gouvernements n’interviennent pas dans la sélection des membres de la commission d’experts ni dans la définition des méthodes de travail. Contrairement à ce qui se passe dans d’autres institutions, il n’existe pas réellement de méthode universelle de contrôle. C’est toujours le même groupe de pays qui, prétendument, ne respecte pas ses engagements. Une telle situation privilégie la sélectivité au détriment de la transparence et de l’universalité. L’orateur a pointé du doigt une fois encore les méthodes de travail actuelles de la commission. Si l’on veut améliorer le degré de respect et d’adhésion aux instruments de l’OIT, il faut prendre en compte les points de vues des gouvernements dans la sélection des listes de cas afin de répondre aux critères techniques, dans l’élaboration des conclusions afin qu’elles soient effectivement mises en application, et dans les méthodes de travail en général pour qu’elles soient respectées. La composition de la commission d’experts doit être revue afin de refléter la diversité et la qualité technique attendues. Les critères de sélection des listes de cas à examiner doivent être revus afin de s’assurer que les décisions soit exclusivement de nature technique. Le Brésil porte un vif intérêt à la poursuite du débat avec les acteurs sociaux dans le but d’améliorer sa législation du travail, et il est prêt à le faire. Il a exprimé la permanence de son engagement envers les obligations contractées envers l’OIT et a réitéré que la modernisation de la législation n’est contraire à aucune convention. Au contraire, la loi no 13.467/2017 promeut et renforce la négociation collective, en donnant pleinement effet à la convention. L’orateur a préconisé avec insistance un changement en profondeur dans le système de contrôle avant qu’il soit trop tard et exprimé la détermination de son gouvernement à participer de bonne foi à un effort collectif pour améliorer le système de contrôle pour tous.

Les membres travailleurs ont indiqué que c’est la première fois depuis vingt ans que la commission examine l’application de la convention au Brésil. Faisant observer que le pays est résolument engagé sur la voie du progrès social et du leadership mondial à cet égard, ils se sont dits profondément déçus par les mesures législatives régressives qui ont été prises et qui auront pour effet de démanteler le droit à la négociation collective et la forte tradition de relations de travail bâtie au fil de ces deux dernières décennies. En 2016, les syndicats brésiliens ont déjà communiqué des informations à la commission d’experts pour faire état de défauts et de lacunes graves concernant les projets de loi qui sont actuellement devant le Congrès. Considérant que l’introduction d’une possibilité générale d’abaisser, par le biais de la négociation collective, la protection des travailleurs prévue dans la législation aura un important effet dissuasif sur l’exercice du droit à la négociation collective et pourrait contribuer à saper sa légitimité à long terme, la commission d’experts a demandé au gouvernement de prendre ses commentaires en considération lors de l’examen des projets de loi. Bien que ce cas n’ait finalement pas été examiné par la Commission de la Conférence en 2017, le Brésil a été classé dans la liste préliminaire des cas. Malgré ces signaux avertisseurs, le gouvernement a adopté les amendements problématiques le 13 juillet 2017, sans tenir compte des commentaires de la commission d’experts. Tous les partenaires sociaux avaient préalablement donné leur avis sur cette réforme législative, adoptée avant la session de 2017 de la commission d’experts. Les membres travailleurs désapprouvent le fait que ce cas, portant sur un thème qui a une longue histoire au sein de ce système de contrôle, soit traité de manière prématurée par la commission d’experts. Ils désapprouvent aussi totalement les critiques liées au traitement de ce cas en dehors du cycle régulier des rapports. Rappelant que les critères pour modifier le cycle des rapports sont reproduits chaque année dans le rapport général de la commission d’experts, ils considèrent que le cas du Brésil est conforme aux critères selon lesquels les observations qui concernent des propositions législatives et des projets de loi peuvent être examinées par la commission, même en l’absence d’une réponse du gouvernement. Le mécanisme pour modifier le cycle des rapports a obtenu un soutien tripartite et a été mis en place à titre de précaution lorsque le Conseil d’administration a prolongé le cycle des rapports pour certains types de conventions, de manière à maintenir le contrôle efficace de l’application des conventions ratifiées. Les membres travailleurs n’accepteront jamais qu’un cas individuel soit utilisé pour mettre en cause l’impartialité et l’indépendance largement reconnues et soutenues de la commission d’experts. Les membres travailleurs se sont dits profondément préoccupés par les amendements législatifs très importants qui ont été apportés à la hâte, en l’absence de consultations véritables et significatives au préalable; ce qui aura effectivement pour effet de démanteler le cadre de la négociation collective au Brésil et d’affaiblir les droits des travailleurs. En ce qui concerne la déclaration du gouvernement selon laquelle la législation a été élaborée après une série de débats organisés par le gouvernement en décembre 2016, avec la participation de représentants syndicaux et d’employeurs, ils ont rappelé au gouvernement que ces «débats» ne sauraient remplacer de véritables consultations effectives et que la plupart des syndicats n’ont pas pris part à ces débats. En outre, le projet de loi ne contenait alors que sept articles, tandis que la loi, telle qu’adoptée, est très vaste et contient plus de 100 articles. Par ailleurs, le Conseil des relations du travail, qui était l’organe tripartite officiel chargé d’examiner les questions liées à l’OIT, n’a plus été convoqué après avril 2016. Lorsque le nouveau Conseil national du travail a été créé, le 1er juin 2017, la loi avait déjà été approuvée à la chambre basse.

Ils estiment que les amendements sont contraires à l’objectif et à l’esprit de la convention. Le nouvel article 611A de la loi sur la consolidation des lois du travail (CLT), qui pose comme principe général que les conventions collectives prévalent sur la législation et que les accords collectifs, négociés par des délégations sur le lieu de travail au niveau de l’entreprise, prévalent sur les conventions collectives, permet ainsi, par le biais de la négociation collective, de déroger aux dispositions protectrices de la législation. Si la loi no 13.467/2017 contient une liste de questions au sujet desquelles la négociation collective prévaut sur la législation, cette liste couvre de nombreux aspects de la relation de travail, par exemple sur l’aménagement du temps de travail. Dans la mesure où cette liste n’est qu’indicative, elle peut être largement étendue par les parties, avec pour seule limite la liste fermée des droits mentionnés à l’article 611B, qui en contient 30, énoncés à l’article 7 de la Constitution fédérale du Brésil. En outre, l’article 611A précise que l’absence de contrepartie ne constitue pas un motif de nullité des conventions collectives, même si ces dernières prévoient une dérogation aux droits reconnus par la loi. Les membres travailleurs souhaitent rappeler que l’objectif général de l’article 4 de la convention est de promouvoir de bonne foi la négociation collective afin de parvenir à un accord sur les conditions d’emploi qui sont plus favorables que celles prévues dans la loi. En autorisant des dérogations moins favorables que celles prévues dans les conventions collectives pour pratiquement tous les domaines de la relation de travail, le gouvernement supprime aux travailleurs le droit fondamental à la négociation collective et ne garantit pas la mise en œuvre d’un ensemble minimum de droits s’appliquant de la même manière à tous les travailleurs brésiliens. En outre, le nouvel article 444 de la CLT, qui dispose que les travailleurs titulaires d’un diplôme de l’enseignement supérieur qui perçoivent un salaire au moins deux fois supérieur au plafond des prestations du régime général de la sécurité sociale peuvent échapper, par le biais de leurs contrats de travail individuels, aux dispositions de la législation et des conventions collectives, n’est pas conforme à l’article 4 de la convention ni à la recommandation (nº 91) sur les conventions collectives, 1951, qui établit le principe de la force obligatoire des conventions collectives et de leur primauté sur le contrat de travail individuel, lorsque ce dernier est moins favorable. En outre, en élargissant le champ de la définition des travailleurs indépendants, qui ne jouissent pas du droit d’organisation et de négociation collective, pour y inclure ceux qui travaillent exclusivement et à titre permanent pour une entreprise, le nouvel article 442B de la CLT a pour effet de diluer la représentation des travailleurs moyennant une classification erronée. Les membres travailleurs se sont dits très préoccupés par les changements profonds et de grande portée mis en œuvre par la réforme législative, qui affaiblissent le droit à la négociation collective auparavant garanti aux travailleurs. En ce qui concerne l’argument du gouvernement selon lequel la réforme était nécessaire en raison du contexte général de récession économique, ils ont indiqué que, malgré la baisse de 29 pour cent du nombre des conventions collectives depuis l’adoption de la réforme, la situation économique du pays ne s’est pas pour autant améliorée. Le chômage et le niveau d’emploi dans l’économie informelle ont même augmenté. Aucun pays n’a jamais accompli de progrès économiques durables en privant les travailleurs de leurs droits fondamentaux. Réitérant leurs profondes préoccupations face aux pratiques régressives ayant cours dans le pays, alors que celui-ci était jadis le défenseur des droits fondamentaux au travail, les membres travailleurs ont appelé le gouvernement à prendre d’urgence les mesures nécessaires pour réformer la législation et la mettre en conformité avec la convention, avant que cela ne porte davantage atteinte aux travailleurs du Brésil.

Les membres employeurs se sont dits préoccupés par l’observation formulée par la commission d’experts sur l’application de la convention par le Brésil. Tout en reconnaissant que la commission d’experts peut décider, dans des situations exceptionnelles, d’examiner un cas en dehors du cycle régulier de présentation des rapports, ils se disent préoccupés par l’usage de ce pouvoir discrétionnaire dans le cas présent. Alors qu’un syndicat national a critiqué la réforme du travail, l’organisation nationale des employeurs a communiqué des informations faisant part de sa satisfaction quant à la modernisation du système de relations professionnelles, aujourd’hui dépassé. De plus, malgré le fait qu’elle n’a pas encore reçu de réponse du gouvernement au sujet des avis divergents des partenaires sociaux, la commission d’experts a adopté une observation, quelques jours seulement après que la réforme sur le droit du travail soit entrée en vigueur. Il convient d’ajouter que 2017 n’est pas une année où le Brésil doit présenter son rapport et qu’il est à jour dans ses obligations en la matière. Etant donné l’absence d’informations sur la position du gouvernement, il aurait peut-être été plus approprié de prévoir une demande directe qui aurait été une première étape dans l’examen de la situation. Etant donné qu’il s’agit là d’un cas sensible, les membres employeurs regrettent que la Commission de la Conférence n’aborde sa discussion que sur la base d’informations incomplètes, ce qui la met dans l’incapacité d’examiner ce cas de manière appropriée et équilibrée. L’examen du cas dans le cadre du cycle régulier aurait permis d’effectuer une évaluation complète de l’impact des réformes sur l’application de la convention, en droit comme dans la pratique. Les membres employeurs ont bien pris note de la déclaration du gouvernement. Des informations complémentaires sont nécessaires pour assimiler pleinement la réforme du droit du travail.

Les membres employeurs ont noté que la réforme du droit du travail établit, en tant que principe général, que les conventions collectives prévalent sur la législation nationale, à l’exception des droits constitutionnels cités à l’article 611B de la CLT. A cet égard, la commission d’experts a observé que l’objectif général de la convention est la promotion de la négociation collective en vue d’un accord sur des conditions de travail plus favorables que celles prévues par la législation. Les membres employeurs rappellent que les prescriptions de l’article 4 prévoient que les Etats Membres doivent prendre des mesures appropriées pour encourager et promouvoir le développement et l’utilisation les plus larges des procédures de négociation collective entre les employeurs et les organisations d’employeurs d’une part et les organisations de travailleurs d’autre part, en vue d’arrêter par ce moyen les conditions d’emploi. A leur avis, il n’est absolument pas nécessaire que les résultats de la négociation collective portent sur des conditions qui soient plus favorables que celles qui sont établies par la loi. Un mécanisme qui autorise les conventions collectives encourage dans la loi le principe de la négociation collective. Il peut créer une incitation à plus de négociation collective volontaire. Il n’est pas encore possible d’analyser l’effet qui peut être tiré du système dans la pratique, donc de savoir à ce stade si ce mécanisme porte atteinte au principe de la négociation collective. Afin de pouvoir vérifier en détail si la réforme est conforme à la convention, les membres employeurs encouragent le gouvernement à fournir dans son prochain rapport des informations sur le fonctionnement des articles 611A et 611B de la CLT, en droit comme dans la pratique. Cette analyse doit prendre en considération l’ensemble des droits des travailleurs consacrés dans la Constitution et repris à l’article 611B, portant sur 30 points relatifs à la protection, au droit à l’assurance chômage, au salaire minimum, au repos hebdomadaire et aux congés payés, aux congés de maternité et de paternité, à la sécurité et la santé au travail (SST) et à la liberté d’association. Il est préoccupant de noter que la liste complète des droits qui sont protégés ne figure pas dans l’observation adoptée par la commission d’experts. Pour ce qui est de la question de la relation entre les contrats de travail individuels et les conventions collectives, la commission d’experts a noté que les travailleurs titulaires d’un diplôme de l’enseignement supérieur, qui perçoivent un salaire au moins deux fois supérieur au plafond des prestations du régime général de la sécurité sociale, doivent pouvoir déroger aux dispositions de la législation et des conventions collectives par le biais de contrats de travail individuels. A cet égard, les membres employeurs notent qu’il n’est pas possible de tenir une discussion libre et éclairée sur l’impact d’une telle disposition dans le droit et dans la pratique, ni d’en évaluer la conformité avec la convention, sans que le gouvernement et les partenaires sociaux aient complété leurs informations. D’après eux, la question de la prévalence des contrats individuels sur la législation nationale n’entre pas dans le champ d’application de la convention. Enfin, en ce qui concerne l’extension de la définition des travailleurs autonomes et son effet sur les travailleurs qui se trouvent ainsi exclus des droits syndicaux, les membres travailleurs notent qu’il n’est pas possible d’avoir une discussion libre et éclairée sans informations appropriées. Ils demandent donc au gouvernement de faire part de ses commentaires sur les observations émanant des syndicats, pour examen par la commission d’experts.

Le membre travailleur du Brésil, s’exprimant au nom des centrales syndicales brésiliennes, a salué la qualité du travail de la commission d’experts, qui est devenue une référence indiscutable dans les discussions relatives aux relations professionnelles. Les connaissances techniques et l’impartialité des membres de la commission d’experts ne doivent pas être remises en question uniquement parce que leurs commentaires ne vont pas dans le sens d’une certaine position. La fonction de la commission d’experts est indispensable pour éclairer les débats et parvenir à l’équilibre nécessaire au sein de l’Organisation. Par conséquent, ceux qui attaquent la commission d’experts attaquent l’Organisation elle-même. La gravité des violations engendrées par la loi no 13.467/2017 se lit dans les observations sévères formulées par la commission d’experts. Ce nouveau texte de loi constitue l’attaque la plus grave portée aux droits syndicaux des travailleurs dans toute l’histoire du Brésil. Ce n’est pas la première fois que ce débat a lieu au sein de la commission. En effet, en 2001, le gouvernement avait tenté d’adopter une loi qui permettait de diminuer les droits prévus par la loi au moyen de négociations collectives. En 2002, suite à une consultation lancée par la Centrale unitaire des travailleurs (CUT), le Département des normes du BIT avait déjà affirmé que permettre de dévaloriser des droits garantis par le biais de la négociation collective était contraire aux dispositions des conventions nos 98 et 154. Le processus engagé, qui s’est conclu par l’adoption de la réforme du travail en juillet 2017, a été marqué par l’absence totale de consultation, tant avec les représentants des travailleurs que d’autres secteurs liés au monde du travail, notamment l’Association nationale des juges du travail, le ministère public du travail et l’Association des avocats du travail. La nouvelle loi facilite l’affaiblissement général de l’ensemble du système de protection des travailleurs, en attaquant l’organisation syndicale et le droit des travailleurs de saisir les tribunaux et en imposant des frais importants à ceux qui le font. A cet égard, l’orateur a dénoncé toute pratique visant à poursuivre les magistrats du travail qui ont suivi une approche juridique différente au moment d’appliquer la nouvelle loi. Au motif d’une modernisation des relations professionnelles, la nouvelle loi revient sur des paramètres de relations juridiques décidés depuis longtemps et fondés sur la liberté contractuelle et le principe selon lequel les parties ont le même pouvoir de négociation. Ce retour en arrière est manifeste si l’on tient compte du fait que la loi permet que la négociation individuelle prive d’effet les conventions collectives, en violation des dispositions de l’article 4 de la convention. De la même manière, sous prétexte de lutte contre le travail informel, la nouvelle loi légalise différents types de travail précaire et autorise le travail de femmes enceintes ou allaitantes dans des lieux insalubres. Non seulement la réforme n’a pas créé les emplois promis, mais elle a augmenté le taux de chômage. Ainsi, alors qu’au moment de l’entrée en vigueur de la loi le taux de chômage était de 12,2 pour cent, d’après les chiffres de l’Institut officiel de l’Etat brésilien (IBGE), en avril 2018, ce taux s’élevait à 13,1 pour cent, soit 13,7 millions de chômeurs. Si l’on ajoute à ce chiffre le nombre de travailleurs potentiels qui ont cessé de chercher du travail (7,8 millions) et ceux qui sont en sous-emploi (6,2 millions), 27,7 millions de Brésiliens ne sont pas sur le marché du travail, soit 24,7 pour cent de la population active. La position du gouvernement selon laquelle la nouvelle loi contribue à promouvoir la négociation collective est loin d’être la réalité. Une étude réalisée par l’Institut d’enquête économique de l’Université de São Paulo à ce sujet montre que le nombre d’accords collectifs conclus au cours des premiers mois de 2018 a chuté de 34 pour cent. D’après la nouvelle loi, la négociation collective prime sur la législation, y compris quand celle-ci énonce de meilleures conditions. L’accord d’entreprise prévaut sur la convention collective, et les accords individuels peuvent exclure des travailleurs de la protection garantie par les accords et conventions existants, ce qui contrevient clairement à la convention. Cette réforme a durement attaqué l’organisation syndicale dans la mesure où elle a supprimé le modèle de financement existant sans en créer d’autre. De la même manière, les syndicats, réunis en assemblée, n’ont pas le droit de fixer des redevances ou des contributions pour alimenter leur caisse, ce qui contrevient également à la convention. Il est impossible de renforcer la négociation collective si l’on affaiblit les syndicats. La nouvelle loi doit être abrogée, compte tenu qu’elle retire des droits, qu’elle attaque les syndicats, qu’elle encourage la négociation individuelle au détriment de la négociation collective et qu’elle éloigne le pays de l’Agenda du travail décent.

Le membre employeur du Brésil a affirmé qu’aucun fondement juridique ne justifie la comparution du Brésil devant la commission pour apporter des éclaircissements sur la négociation collective. La commission d’experts, en ne respectant pas le cycle régulier de soumission des rapports établi pour la convention, a préjugé de l’application de cet instrument, en s’appuyant sur une analyse superficielle et abstraite de la nouvelle loi qui ne prend pas en compte les effets de son application dans la pratique, ne se fonde pas sur des données ou des faits, rapidement et à partir du texte d’une législation récente (qui n’est appliquée que depuis six mois). On ne se trouve pas dans une discussion technique, mais dans un débat politique et idéologique. Le Brésil est l’un des pays qui ont ratifié le plus de conventions de l’OIT et un pays où les droits au travail ont rang constitutionnel. La réforme du travail n’abroge ni ne modifie ces droits. La nouvelle loi permet simplement aux travailleurs et aux employeurs d’arrêter, s’ils le souhaitent, des normes sur les conditions de travail applicables sur une période donnée. On ne peut affirmer que, en vertu de la réforme, la négociation collective prive d’effet la législation applicable, en particulier parce qu’en l’absence d’accord collectif la législation en vigueur est appliquée. Il apparaît clairement que, contrairement à ce qui a été affirmé, la loi no 13.467/2017 n’affaiblit pas la convention mais en renforce les objectifs dans le cadre de la législation du travail, en garantissant que des conventions et accords collectifs peuvent être conclus au vu des modalités de travail et de production réelles, sans ingérence de l’Etat. La Cour constitutionnelle du Brésil a reconnu, en 2015, le rôle fondamental de la négociation collective en tant que mécanisme d’adaptation des normes professionnelles à différents secteurs de l’économie et situations économiques. A cet égard, la réforme du travail ne fait que confirmer le grand principe de la convention, à savoir la négociation volontaire, en établissant expressément que les droits des travailleurs, consacrés dans la Constitution fédérale, ne peuvent être supprimés ou restreints au moyen de la négociation. Parmi ces droits figurent ceux énumérés par la porte-parole du groupe des employeurs. La nouvelle loi vise à instaurer un contexte propice à la négociation collective en assurant la sécurité juridique aux partenaires sociaux afin qu’ils puissent reprendre le dialogue sur des questions au sujet desquelles la négociation était incertaine, parce que ses résultats étaient souvent annulés par la justice du travail en dépit de la volonté exprimée par les parties. La réforme n’a nullement porté préjudice aux travailleurs, contrairement à ce qu’affirment certains syndicats qui réclament le rétablissement des cotisations syndicales obligatoires, sans offrir en échange les services dus à ceux qu’ils représentent. Aucun recours existant au niveau national n’a été formé avant que l’on se tourne vers l’OIT. En effet, les centrales syndicales ont uniquement saisi la Cour constitutionnelle pour demander que les cotisations syndicales redeviennent obligatoires, et non pour faire état de violations présumées de la Constitution ou de la convention. La réforme du travail était nécessaire pour relancer la négociation collective et moderniser une loi du début des années quarante. Cette nouvelle loi, fruit d’un processus démocratique dans le cadre de nombreuses auditions publiques et adoptée par une large majorité au Congrès national, n’affaiblit pas la convention, mais protège la négociation collective contre toute ingérence extérieure, renforce un mécanisme efficace face aux difficultés économiques, harmonise la législation avec celle des autres Etats Membres de l’OIT et s’emploie à trouver un équilibre entre la liberté de négociation et le principe de la protection des travailleurs. Il est préoccupant de constater que l’OIT peut estimer que la négociation n’est valable que si elle contient des termes et conditions de travail plus favorables que ceux établis dans la loi, en particulier parce que cette idée résulte d’une interprétation large de la convention qui, si elle suivie, finirait par devenir contraignante pour tous les 165 pays qui l’ont ratifiée alors que ne doit pas être permise une modification des règles du jeu fixées dans la convention. Rappelant qu’il y a quelques années encore la commission considérait son pays comme une référence, l’orateur a voulu croire que l’examen de ce cas se ferait en toute impartialité, dans le respect du rôle institutionnel de l’OIT, sur la base du tripartisme et sans enjeu politique ni idéologique, et il a demandé que la commission considère dans ses conclusions que la négociation collective doit être libre et spontanée, comme le dit le texte de la convention.

La membre gouvernementale du Paraguay, s’exprimant au nom d’une majorité significative des pays d’Amérique latine et des Caraïbes, a de nouveau exprimé sa vive préoccupation quant aux méthodes de travail adoptées par la Commission de la Conférence, qui ne se fondent pas sur le consensus tripartite. En outre, différents aspects des commentaires de la commission d’experts suscitent des interrogations. En ce qui concerne la rupture du cycle d’examen, en l’absence de rapport du gouvernement, l’existence de critères à cet égard montre simplement qu’il est nécessaire de justifier une décision de ce type. Compte tenu du mandat de la commission d’experts, reflété dans son rapport général, qui dispose que les avis de la commission d’experts n’ont pas un caractère contraignant et qu’ils tiennent compte de l’application des conventions «dans la législation et la pratique […], en gardant à l’esprit les diverses réalités nationales et les différents systèmes juridiques», il est regrettable qu’en l’espèce on n’ait pas laissé passer suffisamment de temps avant d’évaluer la complexe réforme du travail, qui doit être examinée dans son ensemble, ainsi que ses répercussions concrètes et l’interprétation qui en est faite par les tribunaux. Ainsi, le rôle important des droits au travail consacrés par la Constitution fédérale du Brésil n’a pas non plus été pris en compte. Dans le cas du Brésil, il convient de se pencher non seulement sur la Constitution, mais également sur l’action de la justice du travail et du bureau du procureur général chargé des questions relatives au travail, organe indépendant du gouvernement, sur le fait que les inspecteurs du travail sont des fonctionnaires et sur l’utilisation du cadre de la CLT. L’oratrice s’est de nouveau engagée à promouvoir la négociation collective et le principe contenu à l’article 4 de la convention, dont le sens premier est clair, y compris en ce qui concerne les «conditions nationales».

Le membre gouvernemental du Panama s’est référé au modèle des comités de dialogue social tripartites établis dans son pays pour l’harmonisation du système juridique avec les conventions et recommandations de l’OIT et a souligné le caractère fondamental de l’assistance technique fournie par le Département des normes internationales du travail du BIT à cet égard. Toutefois, il s’est dit préoccupé par les méthodes qui ont déterminé l’inclusion du Brésil dans la liste des cas à examiner par la Commission de la Conférence, notamment la rupture du cycle régulier par la commission d’experts, celle-ci s’étant prononcée en l’absence de rapport gouvernemental. Réaffirmant son attachement aux organes de contrôle, l’orateur a souligné la nécessité d’adopter des méthodes de travail dûment approuvées par les mandants.

Le membre travailleur du Portugal a estimé que la réforme de la législation du travail adoptée par le gouvernement brésilien suit la matrice des réformes intervenues en Espagne, au Portugal et en Grèce et qui, depuis 2009, a entraîné une régression sociale pour les travailleurs du sud de l’Europe à des niveaux remontant à plusieurs décennies. Sous prétexte d’assouplir les relations de travail, d’accroître l’emploi, de mettre fin à la fragmentation du marché du travail et de renforcer la négociation collective, la troïka, composée du Fonds monétaire international (FMI), de la Commission européenne et de la Banque centrale européenne (BCE), et les gouvernements ont imposé aux travailleurs des réformes du droit du travail permettant à des organisations informelles de négocier collectivement, éliminant ainsi le principe de faveur, augmentant la durée du travail et abaissant la rémunération des heures supplémentaires. Ces changements ont eu des conséquences désastreuses pour les travailleurs, avec une baisse des revenus du travail, des taux de chômage qui ont atteint des niveaux sans précédent, passant de moins de 10 pour cent à plus de 20 pour cent en moins de deux ans, forçant des centaines de milliers de travailleurs, principalement des jeunes, à chercher du travail dans d’autres pays. Il semble que l’objectif central de ces réformes de la législation du travail est de réduire les revenus des travailleurs et des retraités. La réforme qui est imposée aux travailleurs brésiliens suit la même matrice, les mêmes bases et les mêmes objectifs. En posant le principe qu’un contrat individuel de travail peut stipuler des conditions et modalités inférieures à celles fixées par la loi ou par des conventions collectives, en permettant que la négociation collective puisse être engagée sans la participation des syndicats et en permettant le développement de relations de travail précaires, la réforme du travail conduit à une augmentation du travail précaire et à la segmentation du marché du travail, au lieu de les combattre. La réforme du travail du gouvernement porte gravement atteinte aux droits fondamentaux des travailleurs consacrés par les conventions fondamentales de l’OIT et constitue une violation de la convention, dès lors qu’elle autorise la négociation collective sans la participation des syndicats et qu’elle écarte les conventions collectives au moyen de contrats individuels. L’orateur a exhorté le gouvernement à accepter l’assistance technique du BIT en vue de mettre la législation du travail en conformité avec les instruments internationaux auxquels il est tenu et à respecter le rôle indispensable de la commission d’experts pour assurer l’efficacité des conventions de l’OIT.

Le membre gouvernemental de l’Inde a salué les efforts déployés par le gouvernement et les mesures positives prises pour réformer sa législation du travail dans le but d’assurer la sécurité juridique et la fiabilité de la négociation collective, en concertation avec les partenaires sociaux et conformément à la Constitution du pays ainsi qu’à ses obligations internationales. Les pays ne doivent pas figurer dans la liste préliminaire ou finale des cas avant la fin du cycle de soumission des rapports, en dehors des procédures régulières et pour des motifs autres que les aspects techniques d’un cas. Un tripartisme véritable et constructif est la condition sine qua non d’un mécanisme de contrôle de l’OIT efficace et crédible. La commission doit soutenir pleinement le gouvernement dans la mise en œuvre de ses obligations relatives au travail.

La membre travailleuse de l’Italie a déclaré que le gouvernement a mis en œuvre dans la loi no 13.467/2017 une série de réformes qui violent les principes fondamentaux de l’OIT. Aucune consultation avec les partenaires sociaux n’a eu lieu, aucun débat public n’a accompagné la discussion, et la loi, qui a supprimé l’ensemble des garanties existantes, a été approuvée en un temps record. Les politiques néolibérales adoptées de manière unilatérale entraînent l’insécurité de l’emploi et la précarité. La soi-disant «innovation» ne fait qu’aggraver les conditions de travail et nier les droits syndicaux, compromettant ainsi les mécanismes de négociation collective. La loi no 13.467/2017 permet que la convention collective dégrade encore davantage les conditions prévues par la loi. Pour des millions de travailleurs brésiliens, les réformes signifient un creusement des inégalités dans l’un des pays industrialisés les plus inégaux. Les critères et la procédure que la commission d’experts doit respecter pour pouvoir rompre le cycle d’examen des cas prévoient des garanties pour assurer un contrôle efficace de l’application des conventions ratifiées. Cette possibilité renforce non seulement le système de contrôle de l’OIT, mais garantit également que des questions urgentes, y compris des questions de vie ou de mort ou de droits humains fondamentaux, soient traitées de manière appropriée. L’oratrice prie instamment le gouvernement de modifier la législation pour la rendre conforme à la convention.

Le membre gouvernemental de la Fédération de Russie a salué les informations fournies par le représentant gouvernemental sur le fond du problème, ainsi que sur ses aspects procéduraux. Il déclare partager bon nombre des préoccupations exprimées, en particulier en ce qui concerne la décision d’examiner ce cas en dehors du cycle régulier de présentation des rapports, des explications complémentaires sur les motifs de cette décision étant nécessaires. Lors de l’examen de la mise en œuvre des conventions de l’OIT, il est important de prendre en compte à la fois l’application de la loi dans la pratique et le contexte général lié aux particularités du système juridique du pays concerné. Etant donné que la réforme vient d’être adoptée, il faut laisser au gouvernement le temps de travailler avant de tirer des conclusions sans ambiguïté. L’orateur estime qu’il est possible d’améliorer les méthodes de travail de la commission. Les propositions concrètes faites à cet égard méritent un examen attentif. La commission étant essentielle pour assurer le respect conforme et rigoureux des normes internationales du travail, elle doit compter sur la pleine confiance des gouvernements, des travailleurs et des employeurs.

Le membre travailleur du Pakistan a rappelé que le mandat de la commission d’experts est clairement énoncé dans son rapport général. Il est important que la Commission de la Conférence rappelle que la légitimité et la rationalité des travaux de la commission d’experts reposent sur son impartialité, son expérience et son expertise. C’est sur cette base qu’au fil des ans, lorsque les allégations sont suffisamment étayées et qu’il est urgent de remédier à la situation, des cas exceptionnels sont identifiés et le cycle de présentation des rapports est rompu. En outre, les observations relatives à des propositions ou projets de loi peuvent être examinées par la commission d’experts en l’absence de réponse du gouvernement lorsqu’il en va de l’intérêt du pays. Par conséquent, l’orateur estime que la commission d’experts a agi dans le cadre de son mandat et conformément aux critères de rupture du cycle des rapports, le droit d’organisation et de négociation collective étant un droit humain fondamental susceptible d’être érodé par l’adoption de la loi no 13.467/2017.

Le membre employeur de la Colombie a signalé que la réforme du travail du Brésil est le fruit de vastes discussions menées avec les partenaires sociaux pendant plus de vingt ans. Il s’agit d’une norme établie pour améliorer les relations de travail au Brésil, en adaptant la législation aux nouvelles réalités, toujours sur la base de la négociation collective. Cette réforme du travail entend arrêter les conditions les plus favorables pour la compétitivité, la productivité et le développement socio-économique dans le respect des droits fondamentaux du travail et du travail décent. Une évaluation des effets produits par la réforme est prématurée; une période raisonnable de mise en œuvre est nécessaire pour parvenir à des conclusions précises et fondées sur des données probantes. La réforme du travail au Brésil n’est pas un blanc-seing pour déroger à la législation du travail au moyen de la négociation collective, comme cela a été dénoncé. Les changements réalisés visent à garantir les accords conclus entre les travailleurs et les employeurs et dans le cadre des négociations collectives. La nouvelle législation du travail ne prive pas les travailleurs de leurs droits et garanties en matière de travail ni ne porte atteinte aux conventions nos 98 et 154. La législation du travail en vigueur protège les négociations collectives, consolide un mécanisme nécessaire et efficace pour régler les conflits de nature économique et améliore les possibilités de négociation des employeurs et des travailleurs, sans porter atteinte aux droits du travail prévus par la Constitution. S’agissant de la réglementation du travail indépendant, la nouvelle législation donne une définition claire des personnes considérées comme travailleurs indépendants et des critères pour les identifier. Les travailleurs indépendants ou autonomes relèvent des normes différentes de celles des employés, normes qui dans les deux cas respectent le principe du travail décent. Les droits syndicaux ne sont pas restreints, car les travailleurs indépendants n’ont pas de relation de travail et, par conséquent, ne sont pas couverts par la législation du travail.

Le membre travailleur de l’Argentine a indiqué qu’une étude récente, présentée au Conseil des droits de l’homme des Nations Unies, affirme que plus de 130 pays ont engagé ces dernières années des réformes d’austérité en matière de politiques et de normes du travail et que la déréglementation du marché du travail ne favorise ni la croissance ni l’emploi. Au contraire, un nombre croissant d’études confirme que les normes du travail ont des effets économiques positifs tant en matière de productivité que d’innovation. La réforme du travail du Brésil généralise l’externalisation et la sous-traitance, ce qui porte atteinte aux salaires, fragilise les syndicats et la négociation collective et favorise les sociétés multinationales. La montée du travail informel et la précarisation aggravent les inégalités. La nouvelle loi élimine la notion de journée de travail en créant le travail intermittent, supprime les recours dont disposait le travailleur pour porter plainte devant la justice du travail, permet que les femmes enceintes travaillent dans des conditions insalubres et supprime le financement des syndicats, ce qui compromet l’existence des syndicats et de la négociation collective. En imposant la «négociation» entre l’employeur et le travailleur, sans la présence du syndicat, il est plus facile d’imposer des conditions inférieures à celles de la convention collective. La nouvelle loi constitue en outre une atteinte aux normes fondamentales de l’OIT et une mesure régressive qui ne saurait être une réponse admissible face aux crises économiques et financières. Il est nécessaire d’instaurer des économies durables, assurant la protection sociale, des emplois sûrs et des salaires décents tant au Brésil que dans le reste du continent américain.

Le membre gouvernemental du Honduras a exprimé ses préoccupations concernant l’interruption du cycle régulier de présentation des rapports. Il a formulé le vœu que le gouvernement continue d’encourager la négociation collective en adoptant des mesures adéquates visant à recourir à des processus de négociation libre et volontaire et à des conventions collectives qui réglementent les conditions de travail.

Le membre travailleur des Etats-Unis, s’exprimant également au nom du membre travailleur du Canada, a déclaré que les institutions stables du marché du travail, le dialogue social et la négociation collective sont en cours de démantèlement au Brésil. En novembre 2017 sont entrées en vigueur les modifications de la CLT qui réduisent la capacité des travailleurs à défendre leurs droits et à négocier de meilleurs salaires et de meilleures conditions. Ces changements ont eu pour effet que des syndicats et des particuliers ont négocié des accords qui abaissent les salaires et les conditions tout en faisant progresser le travail précaire. Contrairement au principe de la négociation collective, des employeurs et des travailleurs peuvent négocier des accords qui abaissent les normes en-dessous du seuil prévu par la législation. Comme l’indiquait le rapport de la commission d’experts, la loi no 13.467/2017 n’est pas fondée sur la négociation, mais sur l’abdication des droits dans un large éventail de matières. Les modifications apportées à la CLT ont créé une nouvelle catégorie, celle de travailleur autonome exclusif, et nient l’existence d’une relation d’emploi, même lorsqu’un travailleur a été engagé de manière exclusive et permanente par une seule et même firme. Ces travailleurs n’ont aucun droit, qu’il s’agisse de liberté syndicale ou de négociation collective, ce qui a conduit à une atomisation des relations de travail. Pendant les trois premiers mois de ce nouveau régime, on a vu une augmentation de près de 3 000 pour cent du nombre des relations d’emploi stables dissoutes, principalement dans les postes à bas salaires occupés par des travailleurs n’ayant pas le niveau d’instruction supposé leur donner davantage de force de négociation à titre individuel. Ces changements exposent un plus grand nombre de travailleurs au travail précaire et les syndicats ne peuvent plus compter sur un revenu stable de ceux qu’ils représentent. En mars 2018, les syndicats ont perçu à peu près 20 pour cent du montant de mars 2017. Au premier trimestre 2018, le nombre total des conventions collectives avait chuté de 29 pour cent par rapport à la même période en 2017. En 2018, on dénombre 1 000 conventions collectives de moins que les six années précédentes. Le chômage, l’informalité et le travail précaire ont progressé au cours de la même période. Le Brésil connaît une polarisation extrême exacerbée par un démantèlement délibéré du dialogue social et de relations du travail matures. Il ne faut pas qu’une réforme du droit du travail soit synonyme d’abandon des normes du travail. Une autre voie pourrait mener à un progrès et une croissance du revenu largement partagés.

Le membre gouvernemental du Bangladesh a salué le gouvernement brésilien pour la série de discussions qu’il a eues avec les représentants des syndicats et des employeurs pendant la réforme de la CLT qui est entrée en vigueur en novembre 2017. Une consultation des partenaires sociaux inclusive, complète et extensive est la clé de la réforme de toute législation portant sur les droits au travail. Un des aspects majeurs de la réforme du travail conduite au Brésil a été le renforcement des conventions collectives conclues entre les syndicats et les employeurs, dans le souci de permettre à chacun de négocier collectivement sans affecter les droits des travailleurs. Il faudra du temps pour constater l’impact de la loi sur le marché du travail parce qu’elle en est encore au premier stade de son application. Comme cela a été dit, il ne faut pas interrompre le cycle de présentation des rapports et faire des commentaires avant qu’un rapport soit déposé, et les propos du représentant du gouvernement sur la réforme du mécanisme de contrôle de l’OIT sont fondés. Pour conclure, il faut souligner l’importance de l’objectivité, la transparence, la neutralité et l’impartialité qui empreignent les travaux de la commission grâce à l’application du tripartisme à tous les processus décisionnels, notamment pour l’adoption de la liste finale des cas et pour l’examen des conclusions.

La membre travailleuse du Royaume-Uni a déclaré que la réforme de la législation du travail que le Brésil a appliquée en juillet 2017 est contraire à la convention. Elle a déréglementé plus de 120 normes du travail, dont des garanties visant à ce que les femmes enceintes ne soient pas exposées à des substances toxiques au travail, des règles en matière de licenciement et des lois sur l’égalité de rémunération. Cette réforme a en outre démantelé le système de négociation collective, notamment lorsqu’elle a permis que des conventions collectives supplantent des normes réglementaires. L’objectif affiché de la réforme était d’augmenter la flexibilité, de réduire le chômage et de régulariser l’économie informelle. Toutefois, le taux de chômage au Brésil reste élevé, l’économie informelle va grandissant et les formes précaires de travail sont en hausse. Les travailleurs occupant des postes non sécurisés sont dissuadés de s’affilier à des syndicats, par crainte de représailles ou de licenciement. Du fait de la réforme, des travailleurs diplômés ont conclu des contrats individuels excluant la rémunération et les conditions établies par une convention collective. Comme l’a observé la commission d’experts, il s’agit d’une violation manifeste de la convention. Le gouvernement est appelé à modifier sa législation nationale et à rétablir les droits syndicaux, conformément à la convention.

Le membre gouvernemental du Mexique a pris note avec intérêt du processus de larges consultations qui a abouti à l’adoption d’une réforme législative visant à offrir à la fois au marché du travail et au système juridique plus de flexibilité, une meilleure productivité du travail, ainsi qu’une sécurité juridique et rationnelle. Tout en soulignant sa préoccupation concernant l’interruption injustifiée du cycle régulier de présentation de rapports, l’orateur a estimé qu’il faut examiner les processus de réforme de façon globale, en tenant compte de leur contexte de mise en œuvre, ainsi que d’autres mesures pratiques qui contribuent à l’établissement d’un cadre juridique efficace, qui s’aligne sur les principes et droits fondamentaux.

Un membre travailleur de la Colombie a déclaré que la réforme ôte toute légitimité à l’objectif de la négociation collective, qui vise à améliorer les conditions de travail, en ce sens qu’elle permet que des décisions ou des conventions collectives portent atteinte aux normes minimales énoncées par la loi. La restriction de la durée des décisions et des conventions collectives, ramenée à deux ans maximum, conformément à l’article 614 de la réforme, et l’interdiction de maintenir la pleine application d’une décision ou d’une convention en attendant qu’elle soit remplacée limitent la capacité des parties et sont contraires à la convention. L’orateur a rejeté catégoriquement la possibilité selon laquelle les travailleurs, individuellement ou de manière collective, sans la participation des syndicats, négocient des conditions de travail en dehors du cadre de la négociation collective ou conviennent de déroger à l’application des décisions ou des conventions.

Un autre membre travailleur de la Colombie a dit vivement regretter que le gouvernement ne respecte pas la convention et il a exprimé sa solidarité avec les centrales ouvrières du pays.

Le membre gouvernemental de la Chine a fait part des préoccupations exprimées concernant les méthodes de travail de la commission. Celle-ci est au cœur du système de contrôle de l’OIT, et ses méthodes de travail peuvent être améliorées. On constate un manque de transparence dans la sélection des cas individuels, qui doit être fondée sur des critères objectifs, équitables et transparents, et non sur des considérations politiques, conformément aux procédures établies par l’OIT. Il faut transmettre aux gouvernements qui sont appelés à se présenter devant la commission la liste définitive à l’avance, afin qu’ils aient suffisamment de temps pour se préparer. Les recommandations formulées par la commission doivent refléter le consensus tripartite. Il faut que les gouvernements jouissent pleinement du droit à l’information et du droit de participer au processus d’examen des cas individuels. En outre, le BIT doit renforcer les capacités du gouvernement concerné et lui fournir son assistance technique.

Le membre travailleur du Paraguay a fait observer que la réforme du travail au Brésil précarise le travail, fragilise la négociation collective et le dialogue social et porte atteinte à l’organisation syndicale. La réforme a été approuvée au pire moment de la crise politique et institutionnelle de l’histoire du Brésil, sans dialogue avec les syndicats et les travailleurs. La conséquence est que les chefs d’entreprise pourront procéder à des licenciements collectifs sans qu’il soit nécessaire de discuter avec le syndicat. En plus de restreindre la représentation syndicale, la réforme prive le mouvement syndical brésilien de ses principales sources de financement. Rappelant que les centrales syndicales du Brésil n’ont cessé ces dernières années de dénoncer les pratiques antisyndicales et les propositions de réforme qui viennent de se concrétiser, il a dit appuyer la discussion de ce cas de violation de la convention.

Le membre travailleur de l’Uruguay a exprimé sa solidarité avec les centrales syndicales du Brésil s’agissant de la nouvelle loi qui a pour effet d’accroître le chômage et la pauvreté et se traduit par une aggravation des conditions de vie dans le pays. S’agissant de la nécessité d’attendre l’envoi du rapport par le gouvernement, la mise en œuvre des dispositions de la convention est plus importante que l’obligation d’envoyer des rapports. Au niveau du Cône Sud, la Déclaration sociale et du travail du MERCOSUR, mécanisme tripartite qui protège les droits du travail, a été forgée à la faveur de vastes débats entre les partenaires sociaux. La réforme du travail au Brésil tend au contraire à imposer des recettes des années quatre-vingt-dix pour déréglementer les relations de travail.

Un observateur représentant l’Organisation mondiale des travailleurs a indiqué que la réforme du travail au Brésil constitue une violation du droit syndical fixé par la Constitution du pays et les articles 3 et 4 de la convention. Compte tenu de cette réforme, la réglementation des contrats de travail se fait de manière individuelle et privée, soit entre le travailleur et l’employeur, sans la participation des organisations syndicales, ce qui met les travailleurs dans une situation de vulnérabilité extrêmement dangereuse. Du fait de cette méconnaissance des organisations syndicales et de la négociation collective, les employeurs procèdent à des licenciements collectifs. Ces dernières années, les centrales de travailleurs du Brésil n’ont eu de cesse de dénoncer les pratiques antisyndicales. Si l’on autorise les violations de la liberté syndicale et de la négociation collective dans plusieurs pays, cela peut entraîner une régression des institutions syndicales dans le monde.

Le membre travailleur de la République bolivarienne du Venezuela a dit considérer que la réforme du travail au Brésil, qui permet de négocier les droits à la baisse, constitue une régression qui entraîne l’absence de protection des travailleurs et viole la convention. Elle permet aussi la dissolution du lien d’affiliation syndicale s’agissant des travailleurs qui perçoivent un salaire au moins deux fois supérieur au plafond des prestations du régime général de sécurité sociale. De plus, cette réforme permet la création du statut de travailleur autonome exclusif, ce qui porte préjudice aux droits de liberté syndicale et de négociation collective.

Le membre employeur du Mexique a souligné que l’OIT reconnaît la convention collective comme l’un des principaux moyens d’arrêter librement et volontairement les conditions de travail et autres réglementations par l’intermédiaire des représentants désignés à cet effet. La convention collective est un instrument contraignant qui lie les parties et garantit la sécurité juridique. Malheureusement, au Brésil, avant la réforme du travail, les contrats collectifs étaient continuellement soumis à l’intervention des autorités, qui les annulaient de manière récurrente. La réforme du travail reconnaît et privilégie l’importance de la négociation collective, dans le cadre constitutionnel qui établit les droits fondamentaux inaliénables.

Le membre employeur du Guatemala a considéré que la nouvelle législation répond à la nécessité de renforcer la négociation collective, au regard des dispositions prévues par l’article 4 de la convention. Le fait que les droits des travailleurs inscrits dans la Constitution constituent le socle de la négociation est une garantie de protection large. Avant la promulgation de la nouvelle législation, une décision de la Cour constitutionnelle a expressément reconnu le rôle important de la négociation collective en tant que mécanisme visant à assurer une application correcte des normes du travail aux différents secteurs de l’économie et à la conjoncture économique. Avant la réforme, l’ingérence du gouvernement par le biais de l’annulation de clauses convenues entre les parties a été fortement critiquée et sujette à des plaintes de la part des travailleurs et employeurs brésiliens. En 2011, un important syndicat du Brésil a proposé l’adoption d’une convention collective à but spécifique, visant à assurer la primauté de la négociation collective sur la loi. La réforme permet à ceux qui ne veulent pas négocier collectivement de jouir des garanties définies par la législation; ceux qui adhèrent à cette option auront la possibilité d’adapter la législation à leur convenance et en fonction de leur situation, sans préjudice des garanties générales du travail consacrées au niveau constitutionnel.

Le membre travailleur du Chili a fait remarquer qu’à de nombreux égards, avant l’adoption de la loi no 13.467/2017, la législation brésilienne relative à la liberté syndicale constituait un exemple. Il a pris note avec préoccupation de cette loi récente qui porte réforme de la CLT et qui pourrait avoir une incidence sur le respect de la convention. Il est aussi très préoccupant que, au nom de la défense supposée de l’emploi, de l’investissement et de la croissance économique, le pays ait recours à la formule classique qui consiste à priver les travailleurs de droits, en violation des dispositions de la convention. L’orateur a rappelé que l’inégalité est le principal défi de ce siècle et peut-être de l’histoire de l’humanité et que la négociation collective, avec des acteurs syndicaux forts, peut contribuer à créer un moyen pour une croissance équitable et inclusive permettant de réduire l’inégalité. Par conséquent, la commission devrait prier instamment le gouvernement de se conformer à la convention, en revoyant les aspects de la loi no 13.467/2017 qui ne sont pas conformes à la convention et à l’objectif de promouvoir la négociation collective libre et volontaire et les objectifs de développement durable.

Le membre employeur de l’Espagne a souligné que la réforme de la législation brésilienne du travail met l’accent sur la primauté de la négociation collective sur la législation ordinaire qui, par sa rigidité, laissait avant la réforme très peu de marge de négociation aux travailleurs et aux employeurs, ce qui entraînait de nombreux conflits. La modernisation de la législation du travail a renforcé la négociation collective, conformément à la convention. Les entreprises et les travailleurs, représentés par les syndicats, pourront convenir, après les avoir négociées, de conditions de travail adaptées aux réalités propres aux secteurs, aux régions et aux entreprises. L’orateur a souligné que la loi ne rend pas obligatoire la négociation collective, laquelle se fonde sur l’autonomie et la volonté des parties.

Une observatrice représentant l’Association latino-américaine des avocats du travail a souligné la gravité du cas et son importance pour l’application effective du système de contrôle de l’OIT. Elle a insisté sur le rôle de la négociation collective en tant que mécanisme pour compenser les inégalités qui existent dans la relation entre employeur et travailleur. La nécessité de normes minimales internationales se fonde sur ce principe. Les normes internationales découlent également de processus de négociation et l’emportent sur le droit interne lorsqu’il est moins favorable aux travailleurs. La réforme de la législation brésilienne du travail qui prévoit que l’accord individuel prévaut sur la convention collective est une régression grave et inacceptable en matière de droits sociaux et a un impact sur de nombreux pays, y compris dans la région de l’Amérique latine.

Le membre employeur de l’Uruguay a fait référence à la pratique dite du «recours à la justice du travail» dans les pays de la région, qui pollue la négociation collective et la gestion des entreprises. La faiblesse du cadre juridique encourage cette pratique. La réforme de la législation du travail au Brésil tente de trouver des solutions à ces situations d’abus en conférant une sécurité à tous les acteurs sociaux sur les conséquences de ce qui a été conclu.

La membre gouvernementale de l’Egypte a pris note des informations fournies par le représentant gouvernemental sur les mesures adoptées pour se conformer à la convention. Saluant les efforts consentis pour renforcer sa législation du travail et stimuler la négociation collective, elle a invité le gouvernement à poursuivre son action pour respecter entièrement la convention et à se prévaloir de l’assistance technique du BIT.

Le membre employeur du Chili a estimé que la commission d’experts a rompu le cycle de présentation des rapports sans aucune explication pour procéder à une évaluation précipitée de la loi no 13.467/2017. Il est évident que l’on n’a pas laissé le temps minimum nécessaire à la loi pour évaluer ses effets de façon sérieuse et responsable. Les commentaires de la commission d’experts donnent à la convention une interprétation que son contenu n’envisage pas lorsqu’ils estiment que l’objectif général de la convention est la promotion de la négociation collective pour trouver un accord sur des conditions de travail plus favorables que celles prévues par la législation. En outre, les commentaires ne tiennent pas compte de l’ampleur et du niveau de détail des droits au travail contenus dans la Constitution ni de toutes les voies de recours à la disposition des travailleurs pour garantir leurs droits. L’article 4 de la convention ne prévoit aucune limite à la négociation collective, dans le sens où celle-ci ne devrait aboutir qu’à un accord sur des conditions de travail plus favorables que celles prévues par la législation. Tout au contraire, l’article envisage expressément la possibilité d’adopter des mesures appropriées aux conditions nationales. Dans un monde en pleine évolution et face aux nouvelles formes d’emploi, il est important que les lois protègent la liberté des parties de s’adapter aux changements et à la modernisation.

Le membre gouvernemental de l’Angola, soulignant les liens d’amitié entre les deux pays, a soutenu la déclaration du Brésil et considéré que la présentation orale de la délégation du Brésil indiquait que le gouvernement avait rempli ses obligations.

Le membre employeur de la Grèce a indiqué qu’il y a une erreur méthodologique dans les données sur le chômage et l’informalité au Brésil auxquelles il a été fait référence pendant la discussion. Cela induit la commission en erreur. Les indicateurs que l’Institut brésilien de géographie et de statistiques a publiés en mai 2018 révèlent de façon évidente que, en tenant compte du caractère saisonnier de l’activité économique, le taux de chômage du Brésil a diminué de 0,7 pour cent en 2018 par rapport à la même période en 2017, reproduisant la même tendance que celle enregistrée lors du trimestre modèle couvrant la période janvier-mars 2018. De plus, il est encore trop tôt pour évaluer la nouvelle législation puisqu’elle n’a pas encore été entièrement mise en œuvre. L’orateur a dit estimer que la réforme de la législation du travail offre des possibilités d’accroître le nombre d’emplois formels et de qualité.

Une observatrice, représentant l’Internationale des services publics (ISP), s’est également exprimée au nom de l’Internationale de l’éducation (IE), d’IndustriALL Global Union et de la Fédération internationale des ouvriers du transport (ITF). La possibilité de déroger, au moyen de la négociation collective, aux droits minimums fixés par la loi trahit l’objectif fondamental de la convention, ainsi que les conventions nos 151 et 154. La commission d’experts n’a pas eu tort d’interpréter comme elle l’a fait l’article 4 de la convention, contrairement aux affirmations du gouvernement, et ses commentaires techniques sont recevables. Le nouvel article 611A de la CLT, qui permet que les accords collectifs restreignent les droits et les protections garantis par la législation du travail, peut avoir des conséquences catastrophiques sur les travailleurs et les syndicats. Dans les secteurs aéronautique et maritime, de telles exceptions peuvent compromettre l’application des normes de sécurité propres à ces secteurs, dans le respect des protections découlant des conventions techniques de l’OIT. Les garanties qui figurent à l’article 611B de la CLT sont insuffisantes. Il est également possible que la négociation collective déroge à l’application des conventions de l’OIT. Une récente décision de la Cour supérieure du travail contredit l’affirmation selon laquelle la réforme constitue une modernisation de la législation du travail visant à renforcer les négociations et les syndicats. La Cour a récemment déclaré l’illégalité d’une grève de travailleurs du secteur pétrolier et infligé aux syndicats une amende pour chaque jour de grève. Cela crée un environnement hostile qui n’est pas propice à un dialogue social réfléchi. En décembre 2017, le Président a opposé son veto à la loi no 3831, réglementant la négociation collective dans l’administration publique, ce qui constituait un affront pour les fonctionnaires brésiliens, d’autant plus que le Brésil est partie à la convention no 151. Cette loi avait été rédigée par consensus au sein de la Chambre bipartite du gouvernement et des fonctionnaires du ministère du Travail et de l’Emploi et approuvée à l’unanimité par le Sénat fédéral et la Chambre des députés. La réforme du travail a également eu des conséquences directes sur le secteur de l’éducation, en ce qui concerne la privatisation de l’enseignement secondaire et le salaire minimum des enseignants. Contrairement à ce qu’a indiqué le membre employeur du Brésil, la loi no 13.467/2017 n’est pas le fruit de larges discussions. Les syndicats brésiliens ont simplement été informés des modifications proposées. D’après les organes de contrôle de l’OIT, il est impératif qu’il y ait des consultations franches et libres sur toute question ou projet de loi qui a une incidence sur les droits syndicaux et de négociation collective. Une réforme complète de la législation du travail, en concertation avec l’ensemble des partenaires sociaux, est donc nécessaire pour mettre la législation du Brésil en conformité avec la convention.

Le représentant gouvernemental a apprécié le leadership, la fermeté et la sérénité dont le président a fait preuve en dirigeant les travaux de la commission, a remercié les pays et les orateurs qui ont soutenu le Brésil et affirmé l’importance d’améliorer le système de contrôle en vue d’une meilleure prédictibilité, d’une plus grande transparence et d’un véritable tripartisme. Le gouvernement s’est préparé au dialogue et a présenté des arguments techniques pour démontrer la totale conformité de la réforme du travail avec les normes de l’OIT. La discussion a renforcé ses convictions que le débat sur la réforme est prématuré, et l’orateur a réaffirmé ses inquiétudes à propos du mauvais usage du mécanisme pour servir d’autres desseins que le mandat et les objectifs de l’Organisation, qui doivent rester techniques, impartiaux et justes afin de préserver son efficacité et sa légitimité. Par rapport à certains points abordés lors du débat, il convient de rappeler que la réforme du travail est le fruit de nombreuses années de discussions sur les difficultés que rencontre le marché du travail brésilien en raison de failles dans la législation du travail et du mauvais fonctionnement de la justice du travail. De telles discussions se faisaient de plus en plus pressantes ces dernières années compte tenu de la vigueur de la crise économique. En 2016, le pays a connu le plus haut taux de chômage jamais enregistré depuis le début des relevés, en 1992, et une augmentation du taux de chômage de 82 pour cent depuis 2012. La crise n’est pas le fait du gouvernement, qui ne peut en être tenu responsable, mais la réforme est une partie de la solution et produit déjà des résultats. De janvier à avril 2018, plus de 310 000 emplois formels ont été créés, la plus forte hausse enregistrée ces cinq dernières années. Malgré la présentation de statistiques qui critiquent la modernisation du travail au Brésil, la comparaison du trimestre de février à avril 2018 avec la même période en 2017 révèle une diminution de 0,7 point de pourcentage du taux de chômage, confirmant la tendance déjà notée au trimestre mobile de janvier à mars 2018, où une réduction de 0,6 point de pourcentage a été enregistrée par rapport au même trimestre de 2017. L’orateur a rejeté les affirmations selon lesquelles la réforme précarise les droits. La réforme lutte contre l’informalité et les pires formes de précarité et assortit les nouvelles formes d’emploi de toutes les garanties juridiques et des droits constitutionnels, par exemple en multipliant pratiquement par huit le montant des amendes appliquées aux entreprises qui ne déclarent pas leurs salariés. En ce qui concerne l’article 444 de la CLT, l’observation de la commission d’experts n’a pas de fondement, puisque la convention ne fait pas référence aux contrats individuels. En outre, la loi no 13.467/2017 ne prévoit l’application d’une telle disposition que dans des cas exceptionnels, pour les travailleurs titulaires d’un diplôme de l’enseignement supérieur qui perçoivent un salaire au moins deux fois supérieur au plafond des prestations du régime général de la sécurité sociale. Cette disposition légale vise à stimuler les négociations pour mieux traiter la situation particulière de ces travailleurs, qui n’est en général pas prévue dans les conventions collectives. Alors que la précédente législation prévoyait déjà le traitement différencié de cette catégorie de travailleurs, la réforme du travail instaure une série de critères objectifs pour veiller à ce que cette disposition ne s’applique qu’aux personnes disposant d’une capacité de négociation, sans préjudice de leurs droits. La réforme n’a pas affaibli les syndicats, puisque les cotisations syndicales n’ont pas été supprimées et peuvent toujours être déduites avec l’accord du travailleur ou de l’entreprise. Afin d’encourager l’indépendance financière des organisations syndicales par rapport à l’Etat, conformément à la convention, l’obligation faite à tous les travailleurs de cotiser à un syndicat a été annulée, mais les organisations syndicales brésiliennes peuvent toujours compter sur d’autres sources de financement autorisées par la loi. Il est également faux que la réforme a eu lieu sans consultation des travailleurs, une série de débats ayant été organisée par le précédent ministre du Travail qui, en décembre 2016, a rencontré les six principales centrales syndicales et des représentants des plus grandes confédérations d’employeurs afin de discuter des propositions préparées par le ministère du Travail, qui ont été ensuite soumises au Congrès national. En 2017, au cours du processus législatif, 17 audiences publiques, 7 séminaires régionaux et plus de 40 réunions avec les parties prenantes ont eu lieu au Parlement et dans les différents Etats, ce qui a permis au projet de loi d’être approuvé par une large majorité à la Chambre des députés et ensuite au Sénat. Il y a eu 1 340 propositions d’amendements au projet de réforme du travail, un des nombres les plus élevés de toute l’histoire du Parlement brésilien. Sur les 452 amendements acceptés, 62 ont été présentés par des parlementaires de l’opposition. L’amendement no 150, qui a été accepté, prévoit, entre autres mesures liées au renforcement de la négociation collective, la possibilité de négocier collectivement la durée journalière du travail dans les limites fixées par la Constitution et la protection contre les licenciements injustifiés en cas de réduction de la durée du travail et/ou du salaire. L’auteur de l’amendement a souligné qu’il s’agissait du fruit de «la précieuse contribution de la Confédération nationale des travailleurs du commerce (CNTC)», prouvant bien la participation effective des travailleurs et l’approbation de leurs suggestions. En ce qui concerne la représentation sur le lieu de travail, il s’agit d’une demande de longue date du mouvement syndical brésilien, prévue depuis une trentaine d’années dans l’article 11 de la Constitution et réglementée par la réforme du travail, conformément aux dispositions de la convention no 135. Les représentants des travailleurs au sein de l’entreprise ne font pas concurrence aux syndicats ni à leur mission. Le nombre de conventions collectives diminue depuis 2016, ce qui laisse penser que ce phénomène est davantage lié à la crise économique qu’à la réforme du travail. De plus, la même étude indique que les représentants des travailleurs ont noté un changement qualitatif des accords conclus, ce qui atteste de l’extension de la portée de la négociation et du souci d’améliorer la représentation sur le lieu de travail. En ce qui concerne les femmes enceintes, les nouvelles règles ont été pensées pour prévenir la discrimination à l’embauche des femmes. Elles ont été rédigées par des syndicats de travailleurs de la santé et défendues par le groupe parlementaire des femmes, et elles garantissent la protection de la santé de la mère et de l’enfant. La norme réglementaire no 15 contient une définition large des lieux insalubres, qui incluent par exemple des hôpitaux et des aéroports, et la règle reste la protection des femmes enceintes. Une journée de travail de douze heures n’est permise que si elle est suivie d’un repos obligatoire de trente-six heures, ce qui, à la fin de la semaine ou du mois, représente moins d’heures de travail sans réduction de salaire. La commission d’experts a également commis une grave erreur en considérant que la loi refuse aux travailleurs contractuels indépendants la possibilité de créer des syndicats et de mener des négociations collectives. Celle-ci est prévue à l’article 511 qui traite des organisations syndicales et qui n’a pas été modifié par la nouvelle loi. L’objectif de l’article 442B est simplement de préciser conceptuellement et d’affirmer les éléments qui caractérisent la relation de travail, conformément à la recommandation no 198 de l’OIT, telle que définie par l’article 3 de la CLT que la réforme n’a pas modifié. Le représentant gouvernemental a rejeté les commentaires de la commission d’experts selon lesquels la convention devrait s’appliquer aux travailleurs autonomes, puisqu’elle ne contient pas de définition du «travailleur» aux fins de l’application de la convention et que la nouvelle législation ne modifie pas la caractérisation de l’emploi déjà présente dans la CLT. Le gouvernement a travaillé de façon constructive et dans le respect de l’intérêt commun de tous les membres de la Commission de la Conférence, et ce en dépit des déficiences de l’actuel processus. Le membre gouvernemental a réitéré son appel à tous les membres en faveur d’un effort urgent, collectif et véritablement tripartite pour réformer le système de contrôle des normes.

Les membres employeurs se sont félicités des informations détaillées fournies par le représentant gouvernemental, notamment en ce qui concerne les consultations qui ont eu lieu au sujet de la réforme du droit du travail, et sur la nature de la réforme. Certains aspects de la discussion à la commission dépassent le cadre de la discussion sur l’application de la convention. Rien ne permet de dire que le Brésil, suite à l’adoption de la réforme de la législation du travail, contrevient à ses obligations au titre de la convention. Moderniser le droit du travail peut être un processus difficile, source de changement et d’incertitude. La discussion du cas est prématurée. Au titre de l’article 4 de la convention, le gouvernement doit encourager et promouvoir la négociation volontaire de conventions collectives entre les organisations d’employeurs et de travailleurs en vue de régler par ce moyen les conditions d’emploi. C’est dans le cadre de cette obligation que doivent être appréciées les informations fournies par le gouvernement. S’agissant de la réforme du droit du travail, un mécanisme qui fait passer les négociations collectives avant les dispositions de la loi peut être perçu comme favorisant la négociation collective en droit, en élargissant le champ de la négociation collective tout en veillant à ce que le socle des droits de la Constitution demeure garanti. Cela ne saurait constituer une violation de l’obligation de promouvoir la négociation volontaire en droit. Rien ne permet en outre de soutenir l’affirmation selon laquelle la réforme constitue une violation de la convention dans la pratique. On ne dispose d’aucune évaluation objective de l’impact de la réforme sur le marché du travail et sur la négociation collective. Des éléments de fait sont donc nécessaires pour évaluer l’impact qu’elle a eu sur la capacité des partenaires sociaux à participer à des négociations collectives. Il est également possible d’examiner la question de la relation entre les contrats de travail individuels et les négociations collectives en prenant en compte le point de vue des membres employeurs selon lequel les travailleurs disposent en outre de la liberté contractuelle et ne peuvent être liés par un accord collectif contre leur volonté. La question de la primauté d’un contrat individuel sur la législation nationale n’entre pas dans le champ d’application de la convention. D’autres points soulevés durant la discussion, comme la protection de la maternité, n’entrent pas non plus dans le cadre de la discussion. Les membres employeurs ont encouragé le gouvernement à fournir des informations sur le contenu et l’application de la réforme du droit du travail, notamment dans quelle mesure les partenaires sociaux recourent à la possibilité de négocier des accords collectifs qui priment sur la législation nationale et dans quelle mesure les travailleurs adoptent des contrats de travail individuels qui priment sur les conventions collectives. Les membres employeurs ont noté la déclaration du gouvernement selon laquelle l’avis de la commission d’experts sur les travailleurs autonomes ou indépendants est erroné. En conséquence, des informations supplémentaires sur l’effet de l’extension de la définition d’un travailleur autonome doivent être fournies par le gouvernement, ainsi que sur l’impact que cela a eu sur la capacité de ces travailleurs à représenter leurs intérêts. Les membres employeurs ont conclu en encourageant le gouvernement à conserver son attachement au respect des normes internationales du travail, en coopération et en consultation avec les organisations nationales de travailleurs et d’employeurs.

Les membres travailleurs ont exprimé leur profonde déception devant les remarques du représentant du gouvernement qui a décrit les syndicats comme des instruments politiques qui n’auraient pas fait grand-chose pour faire progresser les droits des travailleurs. Le droit à la liberté syndicale est un préalable obligatoire du droit d’organisation et de négociation collective. Quant aux remarques sur la capacité de la commission d’experts à évaluer la législation brésilienne compte tenu du contexte de ce pays, il faut rappeler que les membres de la commission d’experts sont choisis par le Conseil d’administration du BIT et que ce sont d’éminents juristes venus des quatre coins du monde. Ils ont réitéré leur profond respect pour les travaux de cette commission. Pour rappel aussi, le document D.1 sur les méthodes de travail de la Commission de la Conférence a été adopté à l’unanimité et sur un mode tripartite. Les gouvernements ont toute occasion de participer à la Commission de la Conférence et d’apporter des compléments aux informations contenues dans le rapport de la commission d’experts. Il est à souligner que, comme cela fut rappelé dans les travaux préparatoires de la convention no 154, la négociation collective est un processus destiné à améliorer la protection des travailleurs garantie par la législation. Comme il est dit dans la Constitution de l’OIT, dans la Déclaration de Philadelphie, dans la Déclaration relative aux principes et droits fondamentaux au travail de 1998 et dans la Déclaration sur la justice sociale de 2008, la négociation collective contribue à ce que soient établis des conditions de travail justes et équitables ainsi que d’autres avantages et contribue, par là, à la paix sociale. Cela ne veut pas dire qu’il faille descendre sous les seuils de la protection minimale légale. Ce principe est bien appliqué dans de nombreux systèmes juridiques. A titre d’exemple la Cour de justice de l’Union européenne a statué que les conventions collectives échappent au champ d’application de la loi de la concurrence dans la mesure où elles visent à imposer des mesures améliorant les conditions de travail et d’emploi. La Cour européenne a été jusqu’à étendre ce principe pour protéger le droit des travailleurs erronément qualifiés d’indépendants de négocier collectivement. Les membres travailleurs se sont dits vivement tracassés par l’ampleur de la réforme de structure du système de négociation collective adoptée en 2017 et par les lourdes conséquences qu’elle aura sur la reconnaissance et l’exercice du droit fondamental de négocier collectivement pour les travailleurs du pays. Lorsqu’il a entrepris cette réforme, le gouvernement n’a pas pris en compte comme il l’aurait dû les précédents commentaires formulés par la commission d’experts à cet égard. Les partenaires sociaux ont simplement été informés de ces changements permanents et d’une portée considérable, qui pourraient avoir pour conséquence l’effondrement des relations professionnelles. Un processus de réforme complète de la législation s’impose si l’on veut renverser les changements dévastateurs qui ont été apportés. Il faut que le gouvernement fasse en sorte que la législation soit en totale conformité avec l’article 4 de la convention. Il faut que soient abrogées les dispositions législatives relatives à la possibilité d’ordre général de réduire, par la voie de la négociation collective, les droits et les protections que la législation du travail donne aux travailleurs. En outre, les dispositions qui offrent la possibilité de déroger, à titre individuel, de la loi et des conventions collectives aux travailleurs titulaires d’un diplôme supérieur ou qui dépassent un niveau de revenu donné doivent être abrogées. La définition du travailleur autonome doit être révisée pour faire en sorte que les travailleurs dont le classement est erroné ne soient pas privés du droit de s’organiser et de négocier collectivement. Etant donné l’absence de consultations tripartites dignes de ce nom pendant le processus de réforme législative, les membres travailleurs ont exhorté le gouvernement à associer les partenaires sociaux à d’authentiques négociations dans le cadre de l’instance tripartite nationale. A cet égard, ils ont invité le gouvernement à solliciter l’assistance technique du BIT afin d’élaborer une feuille de route assortie d’un calendrier pour la réforme de la législation. Le gouvernement devrait aussi accepter une mission de contacts directs avant la prochaine Conférence internationale du Travail afin de pouvoir évaluer les progrès accomplis. Enfin, il est essentiel que ce cas figure dans un paragraphe spécial du rapport.

Conclusions

La commission a pris note des informations écrites et orales fournies par le représentant gouvernemental et de la discussion qui a suivi.

Prenant en compte le fait que la commission d’experts a examiné ce cas en dehors du cycle régulier de présentation des rapports, considérant les éléments présentés oralement par le gouvernement devant la commission concernant la réforme de la législation du travail et la conformité de celle-ci avec ses obligations au titre de la convention no 98, et la discussion qui a suivi, la commission recommande au gouvernement de:

  • - fournir des informations et une analyse sur l’application des principes de la négociation collective libre et volontaire dans la nouvelle réforme de la législation du travail; et
  • - fournir des informations sur les consultations tripartites avec les partenaires sociaux à propos de la réforme de la législation du travail.

La commission prie le gouvernement de communiquer ces informations à la commission d’experts avant sa session de novembre 2018.

Le représentant gouvernemental a noté qu’une nette majorité des membres de la commission a incontestablement exprimé des critiques envers les méthodes de travail de la commission d’experts dans le cas du Brésil. Il a prié instamment la commission d’experts et la Commission de la Conférence de bien prendre en considération ce fait important. L’examen du cas du Brésil contrevient aux principes les plus fondamentaux de régularité de la procédure. Un système qui permet ce genre de situation, sans freins et contrepoids, ne correspond pas aux buts et objectifs de l’OIT. Il ébranle aussi le nécessaire sentiment fort et partagé par les Etats Membres et les partenaires sociaux que le système devrait fonctionner de manière juste et équitable, en fonction des mérites techniques des cas. A tous ces points de vue, le système a échoué. Sa réforme s’impose d’urgence pour le bien de l’Organisation. Son gouvernement a présenté des arguments solides quant à la pertinence et à l’actualité de la modernisation de la législation du travail, qui crée de nouveaux emplois, réintègre d’importants secteurs dans l’économie formelle, préserve les droits au travail et promeut la négociation collective dans le respect total des obligations internationales du pays et, en particulier, de la convention no 98. Tout en remerciant la majorité de la commission pour son comportement digne de parlementaires, l’orateur a dit regretter que certains membres aient porté un jugement sur des questions qui sont étrangères aux travaux de la commission. C’est là un nouvel exemple de la politisation de la commission qu’on ne peut accepter. Son pays rejette toutes les attaques contre ses institutions. Au cours des deux dernières années, le Brésil a été confronté à une crise politique et une récession économique. Il a mis en œuvre d’importantes réformes économiques et du travail, adopté une législation essentielle et suscité un changement positif. La démocratie est vivante, la société est vibrante, le débat politique bat son plein, l’état de droit règne et s’impose et le pouvoir judiciaire conserve sa totale indépendance. Quant aux conclusions adoptées par les seuls partenaires sociaux, dont il vient d’être informé, elles constituent un autre exemple des méthodes de travail déficientes de la commission où le consensus tripartite fait défaut. Si l’information sur le cas était incomplète, ce n’est pas à cause d’un manque d’engagement politique de son gouvernement. C’est plutôt une question d’une réalité qui s’impose, étant donné que la réforme n’a que six mois d’existence, et que les faits ne peuvent pas et surtout ne devraient pas être manipulés. S’agissant de la mention des consultations, la discussion doit porter sur l’application de la convention no 98 et toute question se rapportant à d’autres conventions doit à l’évidence être traitée dans le respect du cycle de soumission des rapports correspondants. L’orateur a conclu en indiquant que son gouvernement examinera le texte des conclusions qui viennent tout juste de lui être remises et, le cas échéant, y répondra en temps utile.

Cas individuel (CAS) - Discussion : 1998, Publication : 86ème session CIT (1998)

Un représentant gouvernemental du Brésil a déclaré que son pays accordait une grande importance aux travaux de la commission, comme en font foi ses prises de position en faveur de l'OIT, qu'il considère comme le forum privilégié pour les questions sociales. En outre, le Brésil a fourni à la commission d'experts l'un des plus grands nombres de rapports, sans laisser une seule observation sans réponse. Aussi lui semble-t-il normal d'être appelé à fournir à la commission des informations complémentaires en réponse à l'observation de la commission d'experts. S'agissant des commentaires communiqués en juin 1997 par le Syndicat des arrimeurs de Sao Sebastiao, des informations ont été fournies à la commission dans le cadre de l'application de la convention no 137. La commission d'experts a indiqué que, compte tenu du grand nombre de documents à analyser, elle examinerait ces informations à sa session de 1998. En l'absence de commentaires de la commission d'experts à ce sujet, une discussion sur ce point serait incomplète. Il convient toutefois de signaler la création d'une unité mobile de médiation pour le secteur maritime et portuaire qui aidera à améliorer les relations de travail dans ces secteurs. S'agissant de l'article 4 de la convention, l'article 623 des lois de travail consolidées ne constitue pas un obstacle à la libre négociation puisque la mesure provisoire no 1540 de juin 1997 régit clairement la négociation collective en attendant que la réforme constitutionnelle -- qui requiert beaucoup de temps, de consultations et une longue procédure législative -- soit réalisée. Entre-temps, le gouvernement, désireux de rendre possible la ratification de la convention no 87, s'est engagé dans la promotion d'une sérieuse réforme des relations professionnelles basée sur l'élargissement des espaces de négociation et le renforcement des organisations syndicales. Les points clés de cette réforme comprennent la réaffirmation du rôle du tripartisme dans la formulation de la politique de l'emploi même si actuellement les métiers et les syndicats participent largement à divers conseils et comités, et notamment au conseil qui administre le plus important fonds socioprofessionnel du pays; l'élargissement des espaces de négociation en transférant directement à la table des négociations des employeurs et des travailleurs, conformément à la convention, de nombreux droits et devoirs qui étaient automatiquement réglementés par la loi, notamment les salaires, la durée du travail, la participation aux bénéfices et aux résultats de l'entreprise; l'élimination des règles de l'unicité syndicale, la limitation territoriale et la contribution obligatoire afin de renforcer la légitimité syndicale, conformément à l'esprit de la convention no 87; la réduction du pouvoir normatif de la juridiction du travail de façon à ce qu'elle ne puisse intervenir avant l'épuisement des possibilités de négociation, conformément à une recommandation de la commission d'experts et du Comité de la liberté syndicale. La convention no 98 et dans une certaine mesure la convention no 87 retiennent actuellement toute l'attention du gouvernement qui cherche à renforcer les organisations syndicales. Le programme de modernisation des relations professionnelles subordonne dans tous les cas toute décision sur de nouvelles formes de contrats à l'accord des syndicats.

S'agissant des articles 4 et 6 de la convention, la commission d'experts a bien compris que le pays se trouvait en plein dans un programme de réformes qui ont besoin de temps pour produire leurs effets. Le gouvernement s'est engagé à transformer l'Etat pour qu'il soit plus efficace et mieux à même de répondre aux besoins des citoyens. En ce qui concerne les employés publics, une plus grande flexibilité est recherchée par l'adoption d'un régime différencié pour les fonctions et carrières qui ne sont pas inhérentes à l'Etat, ce qui devrait faciliter l'adoption de pratiques plus modernes d'administration et de coadministration.

Le gouvernement a proposé un ensemble substantiel de réformes pour consolider le plan de stabilisation économique, auquel se réfère l'observation, et qui a déjà donné des résultats positifs et profitables aux travailleurs. Tout cela se fait dans le cadre du respect des principes démocratiques qui exigent la discussion, la négociation et un processus législatif conséquent, dans un contexte marqué par les contraintes de l'instabilité financière internationale qui empêchent une progression rapide au moindre coût social.

Les membres travailleurs ont remercié le représentant gouvernemental pour ses explications et rappelé que la commission d'experts formulait des observations depuis de nombreuses années sur ce cas, la dernière discussion par la présente commission remontant à 1991. Malgré le rapport détaillé auquel s'est référé le représentant gouvernemental, force est de constater que la commission d'experts a eu de nouveau à revenir sur plusieurs problèmes d'application de la convention qui concernent des problèmes de principe très importants et qui ont une grave incidence sur l'ensemble du système de négociation collective. L'intervention des autorités dans la négociation collective et dans la fixation des salaires et des conditions d'emploi, que ce soit dans le secteur parapublic ou le secteur privé, apparaît bien comme une caractéristique structurelle du système brésilien de relations professionnelles. En effet, ce ne sont pas quelques dispositions transitoires ou isolées qui sont en cause, mais bien un ensemble de mécanismes et de pratiques trouvant leur origine dans les codes du travail des régimes dictatoriaux inspirés du Code du travail de Mussolini. Le Comité de la liberté syndicale a d'ailleurs eu à traiter plusieurs cas qui illustrent l'inadaptation du système de relations collectives du travail, parmi lesquels notamment les cas nos 1866 et 1889. Il est bien évident qu'à l'orée du XXIe siècle une telle législation n'est pas compatible avec l'existence d'un système de relations collectives et de règles sociales moderne et adapté à la mondialisation de l'économie. En dépit des modifications intervenues dans la législation et les procédures, la capacité d'intervention des autorités au sens large du terme dans le cours des négociations et le sort des conventions conclues restent fondamentalement maintenus.

Lors de sa discussion de ce même cas en 1991, la commission avait indiqué qu'elle était profondément préoccupée par le fait que l'article 623 des lois du travail consolidées, qui confère aux autorités de vastes pouvoirs pour annuler les conventions collectives ou les sentences arbitrales non conformes à la politique salariale du gouvernement, était toujours applicable. La commission d'experts doit pourtant y revenir encore cette année pour demander l'abrogation formelle de cette disposition dont le gouvernement déclare qu'elle n'a pas été appliquée au cours de ces dernières années. Les membres travailleurs sont également d'avis que cette disposition doit être formellement abrogée. L'article 623 a bien déjà été modifié ou complété, mais les autorités publiques au sens large disposent d'autres moyens d'intervenir dans la négociation collective, notamment par des tribunaux du travail spécifiques. Déjà en 1991, le représentant gouvernemental avait indiqué qu'un employeur pouvait recourir aux tribunaux du travail pour demander l'annulation ou la correction des conventions collectives. Les membres travailleurs estiment que la composition tripartite des tribunaux n'est pas une garantie suffisante contre des interventions dans le déroulement et le résultat de la négociation. Tout dépend des missions et objectifs assignés à ces tribunaux et de leur fonctionnement dans la pratique. En l'espèce, ils semblent parfois, de diverses manières, être le véhicule de l'ingérence étatique dans la négociation collective. En outre, les plans de stabilisation économique temporaires qui se succèdent depuis plusieurs années prévoient également des possibilités d'intervention directe ou indirecte dans les conventions collectives.

Dans ses conclusions de 1991, la présente commission avait souligné qu'elle était consciente de la gravité de la situation économique et financière du pays, mais rappelait que toute politique de stabilisation économique doit être le fruit de la concertation et non de la contrainte. Aussi est-ce à bon droit que la commission d'experts rappelle de nouveau au gouvernement la nécessité de prendre des mesures de nature à favoriser l'élaboration d'une procédure complète de négociation collective pour déterminer les conditions d'emploi des fonctionnaires publics non commis à l'administration de l'Etat.

Depuis de nombreuses années, les rapports et déclarations du gouvernement se réfèrent à différents projets de modification de la législation. En 1995, une commission de la législation sociale a été créée auprès du ministère du Travail pour examiner les projets de loi prioritaires. Le représentant gouvernemental vient encore de faire état de plusieurs projets de loi sur la négociation collective qui en seraient à différentes étapes de la procédure. Il est nécessaire que le gouvernement fournisse des informations sur le cours suivi par ces projets et qu'il communique copie des instruments dès leur adoption, comme le demande la commission d'experts. Un pays aussi important que le Brésil devrait disposer des compétences nécessaires à la conception des lois et des mesures nécessaires pour adapter et moderniser son système de relations professionnelles conformément aux demandes des organes de contrôle. Il peut, certes, faire appel à la coopération technique du BIT à cette fin, mais seulement pour autant qu'il ait véritablement la volonté politique de modifier réellement la législation dans son ensemble. Les membres travailleurs ne peuvent qu'insister pour que le système de relations collectives soit mis en conformité avec les normes internationales du travail et que disparaissent ainsi du droit du travail les traces d'une conception autoritaire des relations professionnelles héritée des régimes dictatoriaux.

Les membres employeurs ont également rappelé que c'est au début de la décennie que la commission a pour la dernière fois examiné l'application de la convention par le Brésil. Depuis lors, elle a eu l'occasion d'aborder des problèmes d'application d'autres conventions par ce même pays. La promotion de procédures volontaires de négociation collective est l'objectif principal de cette convention. De telles procédures doivent être mises en place et appliquées autant que possible par les pays concernés. D'une manière générale, le Brésil semble disposer en droit de la base légale nécessaire. Toutefois, les dispositions pertinentes s'inscrivent dans un réseau fort complexe de références croisées entre différents textes, ce à quoi s'ajoute une exigence complexe de respect d'indices salariaux convenus entre les partenaires sociaux ou, à défaut d'accord, arrêtés par l'Etat. De surcroît, l'article 623 des lois du travail consolidées habilite les autorités à annuler les conventions collectives qui ne seraient pas conformes aux politiques économiques et salariales du gouvernement. Les critiques adressées au gouvernement tiennent à ce que cette faculté laisse une latitude considérable à l'ingérence du gouvernement qui va à l'encontre de l'objectif de la convention qui est de promouvoir la négociation collective volontaire. Le gouvernement a déclaré par le passé que cette disposition n'avait qu'un caractère "virtuel" -- notion plutôt obscure en droit -- et qu'il n'en avait pas été fait application au cours des dernières années. La commission d'experts est donc fondée à rétorquer que, si cette disposition est "virtuelle", elle peut aisément être abrogée afin d'assurer la levée de tout obstacle à la négociation collective. Le représentant gouvernemental n'a pas apporté beaucoup de nouveaux éléments. Il est clair que son pays traverse un processus de profondes réformes, même si le sens de ces réformes et les résultats à en attendre restent indéterminés. Il faut que ces réformes aillent dans la bonne direction.

Le deuxième point soulevé par la commission d'experts a trait à la nécessité pour le gouvernement de prendre des mesures pour promouvoir la négociation collective volontaire des fonctionnaires publics non commis à l'administration de l'Etat. La commission d'experts relève que la Cour suprême fédérale a déclaré anticonstitutionnelle la disposition de la loi no 8112 de 1990 qui confère ce droit aux salariés du secteur public. Dans ses rapports, le gouvernement a fait état d'une réforme administrative en cours, ainsi que de mesures actuellement devant le Congrès.

Le gouvernement doit être appelé à faire rapport sur les progrès accomplis dans ces deux domaines. Il est certain que les problèmes soulevés, et notamment ceux qui ont trait à la négociation des salaires, ne peuvent être envisagés isolément et indépendamment des autres questions économiques. Une totale liberté de négociation collective n'existe nulle part et l'Etat peut toujours intervenir, par exemple à travers sa politique budgétaire ou fiscale, sans pour autant que l'on puisse qualifier d'ingérence ce type d'intervention indirecte. Mais il n'en reste pas moins que la tendance de fond doit être de progresser vers des possibilités toujours plus ouvertes de négociation collective, et non de la restreindre. Le gouvernement devrait donc passer en revue les obstacles actuels à la négociation collective et évaluer si l'intervention de l'Etat est nécessaire, ou si ses objectifs ne pourraient pas être atteints par d'autres moyens. Il devrait lui être demandé de fournir un rapport détaillé sur les mesures qui auront été prises, afin que la commission puisse réexaminer la situation dans un proche avenir à la lumière des informations fournies.

Le membre travailleur du Brésil a félicité la commission d'experts pour son traitement de ce cas qui permet d'en comprendre les principaux aspects. Le Brésil n'applique pas la convention depuis sa ratification il y a quarante-six ans. Plusieurs points sont à préciser pour bien comprendre ce cas. En premier lieu, le pays a subi cinq programmes d'ajustement structurel au cours des douze dernières années, qui se sont traduits par l'ingérence dans les conventions collectives, la modification des conditions d'emploi négociées et la remise en cause d'augmentations de salaires. Du fait de ces programmes, les préoccupations économiques l'ont emporté sur l'obligation de respecter la convention no 98. Par ailleurs, s'il est vrai que le gouvernement n'a pas recouru à l'article 623 des lois du travail consolidées au cours de ces dernières années, cet article continue d'être appliqué par les tribunaux du travail et rien ne garantit que le gouvernement lui-même ne reprendra pas son application. Il est donc inexact de qualifier de "virtuelle" cette disposition. Troisièmement, il importe de rappeler que les fonctionnaires publics continuent d'être exclus du droit de négociation collective. La Cour suprême fédérale a jugé ce droit anticonstitutionnel et il est bien évident que ce ne sont pas de simples réformes administratives telles que celles proposées par le gouvernement qui apporteront une solution à ce problème. Quatrièmement, la Constitution confère aux tribunaux du travail des pouvoirs spéciaux. Ils sont associés au règlement obligatoire des différends collectifs et recourent parfois à des procédures qui ne sont pas conformes à la légalité. Le manquement du gouvernement à appliquer les conventions fondamentales de l'OIT et à se conformer aux recommandations de ses organes de contrôle est patent et il doit lui être demandé instamment, une nouvelle fois, de donner pleinement effet aux principes de la liberté syndicale et de la libre négociation collective.

Le membre travailleur des Etats-Unis a félicité le Brésil d'avoir, comme 136 autres Etats Membres, ratifié la convention no 98 et de s'être engagé, du moins lors de sa ratification en 1952, à mettre son droit du travail en conformité avec les principes de la liberté syndicale et d'une authentique négociation collective. On ne peut que pleinement souscrire aux recommandations de la commission d'experts sur ce cas, s'agissant notamment des fonctionnaires publics non commis à l'administration de l'Etat qui devraient pleinement jouir du droit de négociation collective. L'arrêt de la Cour suprême fédérale de 1994 qui leur dénie ce droit est directement contraire à la convention no 98 et le gouvernement devrait insister pour que le Congrès national adopte rapidement les lois nécessaires pour assurer le respect de la convention. Il ne semble d'ailleurs pas y avoir eu de négociation collective entre les fonctionnaires et le gouvernement au cours de ces trois dernières années. La commission d'experts s'interroge sur le point de savoir si l'article 10 de la mesure provisoire no 1079 disposant de la libre négociation des salaires et conditions d'emploi ne serait pas altéré par les dispositions du plan de stabilisation économique adopté en 1994 (Plan Real) et si l'article 623 des lois du travail consolidées a été suspendu. Aux termes de cet article 623, les autorités disposent d'un large pouvoir d'annuler les conventions collectives ou les sentences arbitrales qui ne seraient pas conformes aux règles fixées par la politique salariale du gouvernement. En réalité, le texte exact vise toute clause qui serait contraire, "directement ou indirectement", à l'ensemble de la politique économique et financière du gouvernement; il est tellement large qu'il pourrait être invoqué pour invalider tout accord issu de la négociation collective prévoyant de meilleures conditions pour les travailleurs. C'est donc très réellement que l'article 623 fait obstacle à la libre négociation collective et, "virtuelle" ou non, cette disposition ne doit être abrogée que parce qu'elle existe bel et bien. C'est très rapidement que le gouvernement doit prendre les mesures pour procéder à cette abrogation.

Le membre travailleur de l'Argentine a déclaré que, malgré les informations fournies par le gouvernement, les faits ne correspondent pas à la réalité. Dans la pratique, par décision de la Cour suprême, depuis 1994, les fonctionnaires publics ne peuvent négocier collectivement, ce qui a provoqué un gel des salaires qui n'ont pas été ajustés depuis janvier 1995. Il est préoccupant de constater que la négociation collective ne peut être utilisée pour convenir librement des conditions de travail dans la mesure où l'article 623 des lois du travail consolidées (CLT) restreint gravement la libre négociation en la liant à la politique économique et financière du gouvernement. L'intervention répétée des tribunaux dans les conflits collectifs du travail empêche la libre négociation des salaires soumise aux politiques gouvernementales. Les réformes favorisées par le gouvernement ne limitent pas le pouvoir d'intervention dans les conflits de la juridiction du travail, fragilisant ainsi sérieusement le droit à la libre négociation garanti par la convention. La commission doit insister pour que les réformes à l'étude se poursuivent afin de parvenir à l'objectif d'une négociation collective sans conditions ni exclusions. Face à l'intégration des marchés, la démocratisation des relations professionnelles dans les pays du Cône sud est d'une importance fondamentale. Il convient donc d'exhorter le gouvernement à mettre en oeuvre le volet social du MERCOSUR, pour le profit de tous les travailleurs de la région.

Le membre travailleur de l'Uruguay a déclaré que la législation sur la négociation collective, en particulier l'article 623 des lois du travail consolidées (CLT), suscite la préoccupation de l'ensemble des travailleurs des pays de la région dans la mesure où cette législation ne respecte pas l'accord visant à coordonner la législation du travail et respecter les conventions fondamentales de l'OIT. Le Bureau international du Travail a pourtant fourni un appui technique afin de parvenir à cette coordination. La modernisation de l'économie ne peut être réalisée en sacrifiant certains droits fondamentaux des travailleurs tels que le droit de négociation collective. La négociation collective est la méthode la plus efficace de régulation du marché. Il n'est pas acceptable que la restructuration économique se réalise en sacrifiant l'aspect social, comme cela est le cas avec l'article 623 de la CLT. Le gouvernement indique que cet article n'est pas appliqué mais celui-ci est utilisé par les juridictions du travail pour limiter et porter atteinte aux conventions collectives. La situation est encore plus grave pour les fonctionnaires publics qui ne jouissent pas du droit de négociation collective, comme s'ils étaient des citoyens de seconde zone.

Le représentant gouvernemental a remercié les orateurs de leurs interventions. Il a reconnu la "connaissance approfondie" démontrée par les membres travailleurs sur la situation professionnelle dans son pays mais il a déploré leur retard sur l'actualité car des changements plus récents se sont produits dans le monde du travail. Les tribunaux du travail, par exemple, appliquent une résolution interne par laquelle les recours unilatéraux pour conflits de travail ne sont pas recevables avant l'épuisement des voies et moyens de la négociation collective et de la conciliation. Il a pris note des commentaires qui seront étudiés soigneusement. En outre, a-t-il ajouté, les nouvelles mesures qui seront prises éventuellement seront portées à la connaissance de la commission.

Il a rappellé le contenu des informations fournies, notamment les progrès réalisés par le gouvernement dans la modernisation des lois du travail, niant l'existence d'une forme quelconque d'intervention dans les relations professionnelles au contraire de ce qu'a affirmé une partie des membres travailleurs.

Le représentant gouvernemental a déclaré que les conclusions selon lesquelles il n'y avait pas eu de progrès tangibles lui paraissaient exagérées alors qu'on peut relever de nombreux cas d'avancement et des mesures significatives adoptées par le gouvernement, tels que la formation de 1.700 médiateurs tant gouvernementaux que privés avec l'appui du BIT au Centre de Turin.

Il a pris note des conclusions et déclaré ne pas prendre plus de temps à la commission.

La commission a pris note des informations orales fournies par le représentant gouvernemental, ainsi que de la discussion qui a suivi. La commission a relevé avec préoccupation qu'en dépit de commentaires répétés de longue date par la commission d'experts sur la nécessité de modifier la législation afin de promouvoir la libre négociation collective, aucun progrès significatif n'avait été accompli. Elle a pris note des assurances du gouvernement quant à la préparation en cours de projets législatifs visant à donner effet à l'article 4 de la convention. Elle a rappelé l'importance qu'elle attache à la mise en oeuvre de cette convention fondamentale et a insisté auprès du gouvernement pour qu'il soumette un rapport détaillé à l'examen de la commission d'experts, afin de lui permettre d'évaluer dans quelle mesure des progrès réels et substantiels auront été accomplis en droit et en pratique. La commission a rappelé au gouvernement que le Bureau international du Travail est à sa disposition pour lui fournir l'assistance technique qui serait nécessaire en vue d'assurer la levée des obstacles à la libre négociation collective dans le secteur privé et dans le secteur public couverts par la convention.

Le représentant gouvernemental a déclaré que les conclusions selon lesquelles il n'y avait pas eu de progrès tangibles lui paraissaient exagérées alors qu'on peut relever de nombreux cas d'avancement et des mesures significatives adoptées par le gouvernement, tels que la formation de 1.700 médiateurs tant gouvernementaux que privés avec l'appui du BIT au Centre de Turin.

Il a pris note des conclusions et déclaré ne pas prendre plus de temps à la commission.

Cas individuel (CAS) - Discussion : 1991, Publication : 78ème session CIT (1991)

Un représentant gouvernemental a décrit la situation qui prévaut à la Banque du Brésil, en rapport avec l'article premier de la convention et les commentaires formulés par la Centrale unie des travailleurs (CUT). La Banque du Brésil est une société d'économie mixte dont l'Etat fédéral détient 50 pour cent des actions, le reste étant négocié à la Bourse. Cette entreprise est régie par l'article 235 de la loi no 6404 de 1974 et soumise au régime commun de la libre entreprise en application de l'article 173 (1) de la Constitution fédérale. C'est donc la législation générale du travail qui s'applique à la Banque du Brésil. En ce qui concerne l'observation de la commission d'experts, la directive du président de la Banque n'était qu'un avant-projet dont les dirigeants devaient discuter pour élaborer une politique interne, comme dans toute entreprise. Suite à des interprétations équivoques et erronées sur le contenu de la proposition, le président de la Banque a tenu le 25 juin 1990 une réunion avec les représentants de la Confédération nationale des travailleurs des institutions de crédit et de la Commission exécutive nationale des fonctionnaires de la Banque du Brésil afin de les informer de la portée réelle du document en question. Des clarifications ont été envoyées par télex les 20 et 25 juin 1990 à tous les employés de la Banque. La direction de la Banque du Brésil n'a eu à aucun moment l'intention de licencier des travailleurs actifs dans le mouvement syndical; au contraire, le 25 février 1991, les fonctionnaires de la Banque ont élu, au cours d'un scrutin démocratique et direct - avec l'appui du conseil d'administration de la Banque - un travailleur syndiqué et représentant de la CUT, M. Luis Oswaldo Santiago Moreira de Souza, comme membre à part entière du Conseil de direction de la Banque du Brésil.

Les travailleurs de la Banque sont représentés sur l'ensemble du territoire national par 190 syndicats, 10 fédérations et une confédération; 185 employés sont dirigeants syndicaux et 175 sont à la disposition du syndicat à plein temps, avec pleine rémunération. Par ailleurs, huit employés sont à la disposition du syndicat, en application de l'article 543(1) des Lois du travail codifiées. Les accusations portées contre la Banque du Brésil sont dénuées de tout fondement et l'article premier de la convention No 98 est respecté.

S'agissant des observations de la commission d'experts sur l'application de l'article 4 de la convention, l'orateur a formulé des commentaires sur les trois points soulevés:

1. Les dispositions prévoyant que l'indice de productivité peut être réduit ou annulé en fonction de "l'incapacité économique" de l'entreprise (art. 11 de la loi no 6708 du 30 octobre 1979) offrent au juge une certaine flexibilité pour l'établissement dudit indice à un niveau supportable pour l'employeur; il s'agit d'une mesure exceptionnelle inspirée par la nécessité de préserver les emplois dans une entreprise qui fait face à des difficultés économiques et non pas d'une entrave à la négociation collective. Les tribunaux du travail ont une composition tripartite, conformément à l'article 113 de la Constitution fédérale. Dans les très rares cas où s'est appliquée la disposition mentionnée, les assesseurs patronaux et syndicaux ont eu la possibilité de participer à la discussion avec les juges professionnels, de clarifier les points en litige et d'influencer l'issue des décisions.

Afin de confirmer qu'il n'y a pas violation de la convention, l'orateur a précisé que la loi no 6708 - et notamment son article 11 - a été abrogée par la législation salariale postérieure. La loi no 8178 du 1er mars 1991 établit "les règles relatives aux prix et aux salaires"; toutefois, elle ne reprend pas les dispositions antérieures et ne remet pas en vigueur la disposition abrogée.

La loi no 8178 est le résultat d'intenses négociations politiques. L'article 13 de cette loi donnait au pouvoir exécutif jusqu'au 15 avril 1991 pour soumettre au Congrès national un projet de législation donnant application à l'article 8 de la Constitution fédérale et régissant la négociation collective. le projet de loi (no 821 d'avril 1991) a déjà été soumis au Congrès et doit être traité en priorité conformément à l'article 64(1) de la Constitution fédérale. Dans son message au président (exposé de motifs no 035 du 11 avril 1991), la Commission interministérielle chargée de l'élaboration du projet a notamment insisté sur la suprématie de la volonté collective et sur la promotion des ententes directes entre employeurs et travailleurs par le biais de la négociation collective.

En résumé: a)la loi no 6708 a été abrogée, et il n'existe pas de disposition semblable à l'article 11 de cette loi abrogée, que ce soit dans la loi no 8178 de 1991 ou dans la loi no 8030 du 12 avril 1990; b)même si cette disposition était en vigueur, elle n'entraverait pas la négociation collective puisqu'il s'agit simplement d'une clause de flexibilité prévue en faveur des entreprises en difficulté pour sauvegarder les emploi; c)le projet de loi no 821 d'avril 1991 illustre bien l'importance que le gouvernement attribue à la négociation collective, ce qui se reflète également par l'adoption de la loi no 8178.

2. En ce qui concerne l'article 623 des Lois du travail codifiées (LTC), il s'agit d'une disposition juridique qui n'est pas appliquée - comme le gouvernement l'avait déjà affirmé dans son rapport du 21 juin 1988 - et qui n'a donné lieu à aucun cas méritant d'être mentionné dans la communication de la CUT. Comme il a été déclaré le 14 mars 1991, lors de la présentation du projet de reconstruction nationale, la politique salariale doit être élaborée au niveau national par les partenaires sociaux grâce à la négociation collective. Le projet de loi no 821 abroge entièrement le Titre VI des LTC (ce qui comprend l'article 623) et révise complètement le régime de négociation collective.

3. Quant à l'article 12 de la loi no 6708, l'orateur réitère les commentaires formulés au paragraphe 1 puisque la législation en question a été abrogée. Le Conseil national de la politique salariale n'a pas survécu à la réforme administrative engagée par le président dès le début de son mandat. Par ailleurs, le Tribunal supérieur du travail a révisé sa jurisprudence en la matière aux termes de la résolution no 02/90 du 19 décembre 1990 (Diario da Justicia, 14 janvier 1991, p.110) et a annulé la décision no 280 qui disposait qu'une convention collective conclue sans consultation préalable de l'organe officiel compétent ne lie pas une société d'économie mixte.

L'orateur a conclu en insistant sur le fait que la loi no 6708 a été abrogée et que le projet de loi actuellement en cours assure la promotion de la négociation collective; par conséquent, la situation au Brésil est conforme à l'esprit et à la lettre des articles premier et 4 de la convention.

Les membres travailleurs ont remercié le représentant gouvernemental pour ses commentaires détaillés. Soulignant que tout détenteur de 49 pour cent des actions d'une banque a une influence déterminante sur la direction de l'institution, ils ont dit espérer que le gouvernement n'entendait pas suggérer qu'il n'avait pas d'influence sur la direction de la Banque du Brésil, en indiquant qu'il ne détenait que la moitié des actions.

En ce qui concerne l'article 4 de la convention, les membres travailleurs ont demandé au gouvernement d'envoyer à la commission d'experts les textes législatifs mentionnés par le représentant gouvernemental. Ils se sont dit préoccupés par les nombreuses lois ayant, selon le gouvernement, abrogé et remplacé d'anciens textes; ils ont invité le gouvernement à indiquer quand les nouvelles lois seront adoptées, puisqu'il semble que quelques-unes ne l'ont pas encore été. Ils ont estimé également qu'il serait utile pour le gouvernement d'envoyer une copie des projets de loi au BIT afin qu'ils soient examinés avant leur adoption.

Les membres travailleurs ont fait observer que, selon la commission d'experts, le gouvernement n'a pas fourni de renseignements sur les mesures prises ou les procédures utilisées pour persuader les partenaires sociaux d'observer sa politique d'austérité économique, et que la commission a exhorté le gouvernement à s'assurer que toutes les mesures de fixation des salaires soient adoptées dans le cadre d'un dialogue entre le gouvernement et les partenaires sociaux, de sorte qu'une entente sur la politique de fixation des salaires puisse être conclue entre les parties concernées. Ayant toutefois cru comprendre que plusieurs organismes avaient été consultés en ce qui concerne l'adhésion à la politique d'austérité économique du gouvernement et un accord sur la politique de fixation des salaires, les membres travailleurs ont invité le représentant gouvernemental à confirmer ce point. Le gouvernement devrait envoyer tous les textes de lois, adoptés ou envisagés, de façon que la Commission de la Conférence et la commission d'experts puissent mieux déterminer dans quelle mesure la convention est appliquée.

Les membres employeurs ont souscrit aux commentaires des travailleurs, se disant toutefois préoccupés par le fait que l'article 623 des Lois du travail codifiées reste en vigueur, même s'il n'est pas appliqué en fait; ce genre de situation pose toujours un problème et ils ont instamment invité le gouvernement à abroger cette disposition si elle n'est pas utilisée en pratique. Les membres employeurs notent, sur un plan général, qu'on ne peut dire clairement dans quelle mesure la législation passée ou actuelle répond aux observations de la commission d'experts; en se basant sur les renseignements contenus dans le rapport de la commission d'experts et sur ceux qu'a fournis le représentant gouvernemental, les membres employeurs ne sont pas en mesure de déterminer dans quelle mesure la politique gouvernementale rendrait difficile ou impossible le rattrapage des salaires pour compenser l'inflation. Ils ont souligné que les coûts de main-d'oeuvre pouvaient contribuer au maintien de l'inflation, surtout lorsque les augmentations de salaire ne sont pas liées aux gains de productivité. Le représentant gouvernemental ayant mentionné qu'un indice de productivité a été appliqué, les membres employeurs se demandent si cet indice a été utilisé pour limiter l'effet inflationniste des hausses salariales non liées à l'augmentation de productivité; le représentant gouvernemental devrait clarifier ce point.

Le membre travailleur de Sri Lanka a relevé dans l'intervention du représentant gouvernemental que le décret no 229 du 28 février 1967 (qui donne aux autorités de larges pouvoirs permettant d'annuler les conventions collectives ou les sentences arbitrales incompatibles, avec la politique salariale du gouvernement) n'a jamais été appliqué. Il s'est donc interrogé sur la nécessité de laisser ce décret en vigueur et s'est demandé si le gouvernement ne devait pas envisager de l'abroger.

Le représentant gouvernemental a assuré les membres travailleurs qu'en précisant le pourcentage de participation du gouvernement fédéral dans la Banque du Brésil, il n'entendait pas suggérer que le gouvernement n'influence pas sa gestion; toutefois, la directive du président de la Banque du Brésil contestée par la CUT ne saurait être considérée comme un acte de l'Etat mais plutôt comme un acte d'une entreprise privée. S'agissant de la fréquence des modifications législatives, comme l'orateur l'a déjà souligné, le projet de législation sur les négociations collectives vise précisément à mettre fin à cette situation. La loi no 8178 de mars 1991 est l'unique texte en vigueur en matière de politique salariale; par ailleurs, le Congrès national examine actuellement un projet de loi sur les négociations collectives. Quant à l'abrogation de l'article 623 des Lois du travail codifiées, elle est prévue dans le cadre du projet de loi mentionné. L'indice de productivité, au sens de la législation du travail du Brésil, reflète une augmentation salariale réelle en rapport avec les activités d'une entreprise durant un exercice financier. L'orateur a conclu en assurant que le gouvernement enverrait tous les textes disponibles à la commission d'experts.

Le représentant gouvernemental du Brésil a souligné, en ce qui concerne les problèmes qui subsistent, mentionnés dans les conclusions, que le gouvernement avait tenté de démontrer que ces problèmes n'existent plus. Le gouvernement est seulement dans une période d'attente et remettra bientôt à la commission d'experts la preuve des observations faites ici.

La commission a pris note des informations fournies par le représentant gouvernemental et du débat qui a eu lieu en son sein. La commission a également pris note du rapport de la commision d'experts et des graves problèmes qui subsistent, en particulier quant à la nécessité de lever les entraves à la négociation salariale et des conditions d'emploi. La commission est consciente de la gravité de la situation économique et financière que le pays traverse depuis de nombreuses années; néanmoins, elle rappelle que toute politique de stabilisation économique doit être le fruit de la concertation et non de la contrainte. La commission exprime le ferme espoir que le gouvernement sera en mesure de faire état dans son prochain rapport à la commission d'experts des mesures prises, suite notamment à la soumission d'un projet de loi au Congrès, pour mettre sa législation et sa pratique en conformité avec les exigences de la convention.

Le représentant gouvernemental du Brésil a souligné, en ce qui concerne les problèmes qui subsistent, mentionnés dans les conclusions, que le gouvernement avait tenté de démontrer que ces problèmes n'existent plus. Le gouvernement est seulement dans une période d'attente et remettra bientôt à la commission d'experts la preuve des observations faites ici.

Cas individuel (CAS) - Discussion : 1989, Publication : 76ème session CIT (1989)

La représentante gouvernementale du Brésil a déclaré que son pays vit un processus de transition, et que la promulgation de la nouvelle Constitution fédérale a introduit de grandes innovations dans le système juridique national. Il incombe maintenant au Congrès national d'élaborer une législation spécifique qui permettra de mettre en oeuvre la Constitution. Le ministère du Travail prépare actuellement des études et des projets de lois en vue d'accélérer le processus d'adaptation de la législation nationale aux nouvelles normes constitutionnelles, dans un effort pour surmonter les obstacles qui entravent le plein respect de la convention. Il faut observer que la Constitution représente un grand progrès à plusieurs égards: un salarié membre d'un syndicat ne peut être licencié, sauf faute grave, depuis le moment où il pose sa candidature à un poste de direction ou de représentation syndicale et, s'il est élu - également en tant que suppléant - pendant un an à compter de la fin de son mandat syndical, comme il est stipulé dans la législation (art. 8 (VIII) de la Constitution); les conventions et accords collectifs de travail sont reconnues (art. 7 (XXVI) de la Constitution); les fonctionnaires de l'administration publique ont le droit d'association et de grève (art. 37 (VI), (VII) de la Constitution); l'article 173, paragraphe 1, de la Constitution garantit au salarié des entreprises publiques, des sociétés d'économie mixte et autres les droits sociaux mentionnés à l'article 7 de la Constitution, parmi lesquels figure la reconnaissance des conventions et accords collectifs de travail. On peut conclure que la négociation est pleinement assurée grâce aux organisations représentatives. En outre, la libre négociation est prévue dans l'actuel projet de loi sur les politiques salariales qui a été approuvé par le Congrès national et est à l'heure actuelle soumis au Président de la République. Il convient également d'informer la présente commission que le Conseil interministériel des salaires des entreprises publiques (CISE) joue un rôle consultatif en qualité d'employeur dans les cas où le gouvernement détient plus de 50 pour cent du capital d'une entreprise. Ledit conseil est un organe consultatif pour les directions des entreprises publiques et n'est pas un instrument qui entrave la négociation.

La représentante gouvernementale a concédé qu'il existe encore certains obstacles, tant dans la législation que dans la pratique, qui entravent le plein respect de la convention, mais le gouvernement déploie tous les efforts possibles pour les surmonter. Il existe un accord de coopération technique entre le Brésil et l'OIT. Deux fonctionnaires du ministère du Travail ont participé récemment à des stages sur l'application des normes, et cette année le conseiller régional de l'OIT pour les normes se rendra au Brésil, et il a été demandé qu'il soit accompagné d'un expert juridique pour assister les experts nationaux dans l'élaboration de projets de lois qui soient pleinement conformes aux conventions de l'OIT.

Le membre travailleur du Brésil a déclaré que la présente commission ne devrait pas se limiter à une analyse de termes juridiques qui ne sont de toute façon pas appliqués dans la pratique. Il a mentionné en particulier l'observation de la commission d'experts sur le décret-loi no 2425 du 7 avril 1988, qui prévoit dans son article 7 que les entreprises publiques, les sociétés d'économie mixte et les entreprises privées subventionnées par l'Etat ou concessionnaires de services publics ne peuvent conclure de conventions ou d'accords collectifs que conformément aux résolutions adoptées par le Conseil interministériel des salaires des entreprises publiques (CISE). Il a déclaré à cet égard que dans les faits, ces entreprises demandent d'abord l'accord du CISE, dont la pratique habituelle est d'invalider les clauses des accords déjà négociés.

En ce qui concerne le droit de grève, l'orateur a mentionné les observations de la commission d'experts sur le droit des travailleurs à négocier librement leurs conditions d'emploi. Ces observations citaient la Centrale unitaire des travailleurs (CUT). Il faut dire clairement que la CUT représente à l'heure actuelle environ 15 millions de travailleurs, avec quelque 5 millions de membres de syndicats locaux. Il a déclaré que la CUT a refusé de participer à des discussions portant sur un accord social pour combattre l'inflation, car la CUT est d'avis que les travailleurs brésiliens n'ont rien à perdre sur le plan matériel, étant donné que le salaire minimum légal mensuel équivaut à environ 40 dollars des Etats-Unis. La CUT a également le sentiment que des valeurs autres que les valeurs matérielles - tel le droit de grève - ne peuvent se négocier. Elle a proposé au gouvernement et aux employeurs que soit négocié un accord collectif de travail pour remplacer les accords individuels actuels; la négociation devrait permettre de compenser les réductions des salaires provoquées par les mesures économiques et par l'absence de normes en matière de protection des salaires. L'orateur a indiqué qu'à l'heure actuelle les salaires ont diminué de 40 pour cent, et il s'est étonné du fait que dans son pays les employeurs ont maintenu la position selon laquelle les pertes de salaire ne peuvent être compensées au-delà de 6 pour cent, ce qui a été accepté par le gouvernement, qui n'a autorisé qu'une augmentation des salaires de 6 pour cent proposée par les employeurs. Cela a entraîné la grève la plus importante de l'histoire du Brésil, à laquelle ont participé 30 millions de travailleurs, et le gouvernement, au lieu de négocier avec les travailleurs comme on pouvait l'espérer, a adopté la mesure provisoire no 50 qui restreint violemment le droit de grève, contrevenant aux dispositions de la Constitution et de la convention. Cette restriction n'est comparable qu'avec celles qui existaient dans trois pays aux conditions historiques très spéciales à savoir l'Allemagne hitlérienne, l'Espagne de Franco et le Paraguay de Stro. Le Brésil est l'un des rares pays du monde qui n'aient pas ratifié jusqu'ici la convention no 87, et les grèves sont très fréquemment réprimées par les forces armées, comme cela a été le cas en novembre 1988, où trois travailleurs de Vuelta Redonda sont décédés; à cela vient s'ajouter la détention de syndicalistes pour motif de grève, et plus de 300 dirigeants syndicaux ont été licenciés ces deux dernières années. L'assassinat du syndicaliste bien connu Chico Méndez constitue l'un des multiples épisodes de ce type.

L'orateur a terminé en demandant à la présente commission d'aider les travailleurs à conquérir leurs droits légitimes, en particulier le droit de grève et de négociation collective, car on ne peut admettre qu'un pays qui se considère la huitième puissance économique du monde occidental continue à payer environ 4 pour cent de son PNB au titre de la dette extérieure, tandis que persiste une des réalités sociales les plus dégradantes de l'histoire moderne.

Les membres travailleurs ont partagé l'opinion des membres employeurs, selon lesquels le Brésil traverse une période de transition du point de vue des conventions collectives et de la liberté syndicale. Aujourd'hui, il est nécessaire de reconnaître l'existence du syndicalisme et d'accepter les organisations syndicales représentatives. Si ces dernières ne sont pas reconnues pour pouvoir négocier, elles sont contraintes de recourir à la grève uniquement pour y avoir droit, ce qui est regrettable, puisque la grève ne devrait être utilisée qu'en dernier recours dans des situations difficiles. Les membres travailleurs ont relevé trois points importants dans les propos tenus par la représentante gouvernementale: 1) l'amélioration de la protection contre le licenciement illégal des délégués syndicaux; 2) les restrictions aux droits syndicaux des fonctionnaires, en contradiction avec la convention no 98; et 3) la limitation du droit de grève dans des secteurs où il n'y a pas lieu de le limiter.

Les membres travailleurs ont rappelé les propositions qu'ils ont formulées concernant la négociation collective et le droit de grève. Il faudrait réunir les employeurs et les travailleurs de toutes tendances. pour tenter de remédier à la gravité de la situation, et veiller à ce que ce ne soit pas aux seuls travailleurs de supporter le poids du redressement économique. Les membres travailleurs ont, en conséquence, appelé à ce que des solutions soient recherchées avec les centrales syndicales réellement représentatives des forces vives, concernant les droits syndicaux.

Les membres employeurs ont rappelé que 37 années se sont écoulées depuis la ratification de cette convention par le Brésil. Il y a encore certains problèmes fondamentaux concernant le respect des dispositions de la convention, mais le tableau dépeint par le rapport de la commission d'experts n'est pas entièrement négatif. Cette commission a noté avec satisfaction une loi protégeant les dirigeants syndicaux contre les licenciements, sauf en cas de faute grave. Les membres employeurs ont également noté que le gouvernement paraît prêt à présenter un projet de loi visant à garantir le droit d'association et le droit de grève aux personnes employées directement ou indirectement dans la fonction publique. Par ailleurs, le droit des travailleurs à négocier librement les termes et conditions d'emploi (comme le prévoit l'article 4 de la convention) est limité par des contrôles des salaires et des prix et par des pouvoirs accordés au gouvernement d'annuler des accords obtenus par la négociation collective et des décisions arbitrales qui sont en contradiction avec ces contrôles. Les droits des travailleurs à négocier librement les termes et conditions de leur emploi dans certaines entreprises du secteur public doivent être adoptés. Les membres employeurs ont encouragé le gouvernement dans le souhait qu'il a exprimé de s'aider de la coopération technique pour résoudre les problèmes qui subsistent.

La représentante gouvernementale a souhaité indiquer clairement que la mesure provisoire no 50 portant sur l'exercice du droit de grève n'était en vigueur que pour 30 jours, que par conséquent, elle ne l'est plus. Par ailleurs, le Congrès national élabore actuellement un projet de loi qui réglementera de façon stricte l'exercice du droit de grève concernant les activités essentielles qui peuvent entraîner un risque réel pour la population. Pour ce qui est des accusations de répression à l'encontre des travailleurs et de violations de la liberté syndicale, le gouvernement brésilien a fourni toutes les informations requises et la question a été discutée de façon approfondie au Conseil d'administration. Il est important de noter qu'après la chute de la dictature militaire, la grande organisation syndicale CUT a été reconnue, et a été appelée à participer avec d'autres partenaires sociaux aux réunions organisées par le gouvernement.

Le membre travailleur du Brésil a indiqué que la CUT fait partie, pour la première fois, de la délégation brésilienne à la présente Conférence grâce aux efforts du ministère du Travail. Il faut espérer que tel sera le cas chaque année et qu'on supprimera la méthode traditionnelle du tirage au sort entre toutes les anciennes confédérations officielles. Il a souligné que la mesure provisoire no 50 n'est certes plus en vigueur, mais qu'elle a été reprise dans les mêmes termes sous le nom de mesure provisoire no 59, c'est-à-dire qu'elle continue tout de même à être en vigueur.

La commission a pris note du rapport de la commission d'experts et des informations fournies par la représentante gouvernementale. La commission a salué le fait que certains progrès ont été réalisés concernant la protection de la liberté d'association. Elle a cependant noté que des problèmes subsistent pour ce qui est de la libre fixation des salaires et du droit à la négociation collective pour les employés de l'Etat et les salariés de certaines entreprises du secteur privé. La commission a exprimé l'espoir que le gouvernement prendra bientôt les mesures nécessaires pour faire appliquer pleinement la convention dans la législation et dans la pratique. Elle a espéré qu'il pourra être fait usage de la possibilité d'un dialogue tripartite au niveau national à cet égard et que le gouvernement sera en mesure d'indiquer des progrès dans son prochain rapport.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2023, publiée 112ème session CIT (2024)

Article 4. Promotion de la négociation collective. Critères de détermination de l’organisation syndicale apte à négocier collectivement en cas de conflit de représentation entre plusieurs syndicats. La commission rappelle que, sur la base d’un renvoi du Comité de la liberté syndicale (cas no 3219), elle avait prié le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises pour assurer que les conflits de représentation soient résolus sur la base de critères de représentativité objectifs et fixés d’avance en tenant dûment compte des souhaits des travailleurs concernés.
La commission note que le gouvernement se limite à rappeler que: i) dans le cadre du système d’unicité syndicale en vigueur dans le pays, le ministère du travail se limite à effectuer l’enregistrement des organisations syndicales sans s’ingérer dans les affaires syndicales; et ii) les conflits pouvant surgir entre syndicats sont résolus soit par le biais de la conciliation et de la médiation soit par les tribunaux. La commission note par ailleurs que dans leurs observations respectives: i) la Confédération nationale de l’industrie fournit des éléments similaires à ceux du gouvernement; et ii) la Centrale unitaire des travailleurs souligne la particulière importance que ce thème soit traité par le groupe de travail créé par le décret no 11.477 d’avril 2023 et qui a pour but d’élaborer des propositions visant à restructurer les relations de travail et à promouvoir la négociation collective.
La commission observe qu’aucune de ces communications ne fait référence aux critères utilisés par les tribunaux pour résoudre les conflits de représentation pouvant surgir dans le cadre du système d’unicité syndicale ni à l’existence, dans ce contexte, de la prise en compte de l’audience réelle des syndicats cherchant à obtenir le monopole de la représentation syndicale. Soulignant de nouveau l’importance qu’en vertu des articles 2 et 4 de la convention, les organisations représentant les travailleurs dans le cadre des négociations collectives soient indépendantes et représentatives, la commission prie le gouvernement de prendre, en consultation avec les partenaires sociaux, les mesures nécessaires pour assurer que, dans le cadre du système d’unicité syndicale actuellement en vigueur dans le pays, les conflits de représentation entre organisations syndicales soient résolus sur la base de critères de représentativité objectifs et fixés d’avance en tenant bien compte des souhaits des travailleurs concernés. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur tout progrès à cet égard.
Durée des conventions et accords collectifs. La commission rappelle le dialogue en cours avec le gouvernement concernant l’article 614.3 de la Consolidation des lois du travail (CLT) qui, depuis la réforme législative de 2017 fixe à deux ans au plus la durée des conventions et accords collectifs et interdit l’inclusion dans lesdits accords et conventions de clauses prévoyant le maintien de leurs effets en cas de leur non-renouvellement. La commission avait invité le gouvernement à entamer des consultations avec les organisations d’employeurs et de travailleurs représentatives sur le contenu de l’article 614.3 de la CLT.
La commission note la référence du gouvernement à un arrêt du Tribunal suprême fédéral du 30 mai 2022 (ADPF n° 323) qui a considéré qu’il n’était pas possible de prolonger l’effet des conventions et accords collectifs une fois atteinte la date d’extinction de leur validité. La commission note en revanche que le gouvernement ne fournit pas de nouveaux éléments concernant la soumission au dialogue social du contenu de l’article 614.3 de la CLT. Rappelant de nouveau que la fixation de la durée des conventions collectives et de leurs effets entre les parties est couverte par le principe de la négociation collective libre et volontaire promu par la convention et que toute dérogation à cette règle devrait dans toute la mesure possible refléter un accord tripartite, la commission invite une nouvelle fois le gouvernement à entamer des consultations avec les organisations d’employeurs et de travailleurs représentatives sur le contenu de l’article 614.3 de la CLT. La commission prie le gouvernement de fournir des informations à cet égard.
Loi no 14.370/2022 qui crée un programme de service volontaire. La commission note les observations de la CUT selon lesquelles: i) Le programme s’adresse aux personnes de 18 à 29 ans, ainsi qu’aux personnes de plus de 50 ans et aux personnes porteuses de handicap; ii) les municipalités pourront engager des travailleurs pour une durée maximale de 22 h par semaine afin de mener des activités «d’intérêt public» en échange d’une indemnité égale à la moitié du salaire minimum sans que leurs soient reconnus la plupart des protections de la législation du travail; et iii) ces travailleurs ne seront couverts par aucune convention collective et n’auront pas la possibilité de s’organiser en syndicats. La commission note par ailleurs la réponse du gouvernement selon laquelle: i) Le programme a pour but d’aider à l’inclusion productive des personnes en situation de vulnérabilité et de réduire les impacts sociaux et sur le marché du travail de la crise consécutive à la pandémie de COVID-19; ii) le programme établi pour une période temporaire de 24 mois n’est pas encore entré en vigueur dans l’attente de l’adoption de textes d’application. La commission prend note de ces différents éléments et prie le gouvernement de fournir des informations sur: i) le nombre de personnes concernées par ce programme une fois qu’il sera entré en vigueur; ii) le point soulevé par la CUT concernant l’accès de ces personnes aux droits collectifs du travail.
Loi générale sur la protection des données. Partage d’informations et négociation collective. La commission note les observations de la CUT selon lesquelles la loi générale sur la protection des données no 13.709/2018 constituerait le fondement de décisions de justice déniant la communication aux organisations syndicales d’informations concernant les travailleurs, même lorsque le partage de ces informations est prévu par les accords collectifs eux-mêmes. La Commission note que, selon la CUT, le partage de ces informations est nécessaire à la fois pour que les syndicats puissent apprécier la bonne application des conventions collectives en vigueur ainsi que pouvoir négocier collectivement en connaissance de cause. Rappelant que la recommandation (no 163) sur la négociation collective, 1981, qui complète la convention (no 154) sur la négociation collective, 1981, ratifiée par le Brésil prévoit dans son paragraphe 7 que des mesures adaptées aux circonstances nationales devraient être prises, s’il y a lieu, pour que les parties aient accès aux informations nécessaires pour pouvoir négocier en connaissance de cause, la commission prie le gouvernement d’apporter ses commentaires aux observations de la CUT.

Observation (CEACR) - adoptée 2023, publiée 112ème session CIT (2024)

La commission prend note des observations de la Confédération Nationale de l’Industrie (CNI) reçues le 31 août 2023 et également communiquées par le gouvernement dans son rapport. La commission prend également note des observations de la Centrale unitaire des travailleurs (CUT) communiquées par le gouvernement dans son rapport. La commission constate que ces observations et les réponses correspondantes du gouvernement concernent des sujets examinés dans le présent commentaire.
Concernant les allégations de 2022 de la CUT concernant la loi 14.437/2022 de mise en œuvre par le pouvoir exécutif de mesures de travail alternatives et d’un programme d’urgence pour l’emploi et le maintien des revenus, afin de faire face aux conséquences sociales et économiques d’un état de calamité publique, la commission prend note de la réponse du gouvernement et renvoie à ses commentaires de 2020 concernant la loi 14.020 au vu de la similitude du contenu des deux instruments. La commission avait alors relevé que la loi en question n’avait pas pour objet de mettre à l’écart les conventions et accords collectifs en vigueur mais d’établir un système temporaire de réduction d’activité et de compensation des revenus qui pouvait être déclenché par accord individuel ou par accord collectif. La commission avait alors souligné l’importance de promouvoir la pleine utilisation de la négociation collective comme moyen de parvenir à des solutions équilibrées et durables en temps de crise.
Application de la convention et respect des libertés publiques. Dans ses commentaires précédents, la commission avait pris note avec profonde préoccupation des allégations de la Confédération Syndicale Internationale (CSI) relatives à l’assassinat de 3 dirigeants syndicaux et syndicalistes en 2020 ainsi que de plusieurs cas de menaces de mort contre d’autres dirigeants.
La commission note que le gouvernement se limite à indiquer que: i) il n’existe aucune disposition légale qui confère au ministère du travail de compétence en matière pénale pour mener des enquêtes ou sanctionner les auteurs d’infractions contre des dirigeants syndicaux; et ii) il est nécessaire de vérifier l’état d’avancement des procédures judiciaires pénales ou administratives en la matière. La commission note également les observations de la CUT qui déplore la réponse du gouvernement et lui demande de fournir toutes les informations sur les assassinats signalés.
La commission note avec regret l’absence d’informations du gouvernement sur l’avancement des enquêtes concernant les crimes allégués par la CSI et sur les mesures de protection prises en faveur des dirigeants syndicaux qui feraient l’objet de menaces de mort. Soulignant que le respect des conventions ratifiées incombe à l’ensemble des autorités compétentes, la commission se voit obligée de rappeler que les droits contenus dans la convention, en particulier ceux relatifs à la négociation collective libre et volontaire, ne peuvent s’exercer que dans un climat exempt de violences et de menaces. La commission prie de nouveau instamment le gouvernement de s’assurer que les mesures nécessaires soient prises pour: i) identifier et sanctionner les auteurs et instigateurs des crimes allégués; et ii) assurer une protection efficace aux dirigeants syndicaux dont l’intégrité physique est menacée. La commission prie instamment le gouvernement de fournir sans délai des informations détaillées à cet égard.
Article 1 de la convention. Protection adéquate contre la discrimination antisyndicale. La commission rappelle que, tout en notant l’existence de dispositions constitutionnelles et légales qui protègent de manière générale l’action syndicale, elle demande depuis de nombreuses années au gouvernement de prendre des mesures pour que la législation établisse expressément des sanctions spécifiques suffisamment dissuasives contre tous les actes de discrimination antisyndicale. Observant l’absence d’éléments nouveaux sur ce sujet et rappelant l’importance fondamentale d’assurer une protection effective contre la discrimination antisyndicale, la commission se voit donc obligée de réitérer sa demande et espère que le gouvernement sera en mesure de faire état de progrès tangibles à cet égard.
Article 4. Promotion de la négociation collective. Articulation entre la négociation collective et la loi. Dans ses commentaires précédents, la commission avait prié le gouvernement de prendre, en consultation avec les partenaires sociaux représentatifs, les mesures nécessaires pour réviser les articles 611-A et 611-B de la Consolidation des lois du travail (CLT) de manière à encadrer plus précisément les situations où des clauses dérogatoires de la législation pourraient être négociées ainsi que la portée de ces dernières. À cet égard, la commission avait pris note des préoccupations exprimées en 2021 par la CSI, la CUT et la Confédération nationale des travailleurs des établissements d’enseignement (CONTEE) concernant les effets de la mise en œuvre de ces dispositions dans le contexte de la crise économique causée par la pandémie de COVID-19 et pouvant, selon elles, conduire les travailleurs à devoir accepter, par le biais de la négociation collective, une forte détérioration de leurs conditions de travail et d’emploi.
La commission note que le gouvernement réaffirme que: i) la primauté de la négociation collective sur la législation instaurée par la loi no 13.467 de 2017 contribue à renforcer la confiance dans les mécanismes de négociation conformément à la convention et à la Constitution fédérale de 1988; ii) en garantissant que les droits des travailleurs consacrés par la Constitution (article 611-B de la CLT) ne peuvent être dérogés par voie de négociation collective, le législateur a cherché à clarifier le domaine de la négociation collective tout en préservant les droits fondamentaux des travailleurs de valeur constitutionnelle; et iii) Le Tribunal Suprême Fédéral a confirmé par un arrêt de juin 2022 la validité, indépendamment de l’indication spécifique d’avantages compensatoires, des conventions collectives qui limitent ou restreignent certains droits au travail dès lors que ceux-ci ne sont pas garantis par la Constitution.
La commission note également les informations fournies par le gouvernement sur le nombre des conventions et accords collectifs conclus dans le pays, et selon lesquelles: i) de janvier 2019 à juin 2023, 181 838 instruments collectifs de travail ont été enregistrés, dont 149 096 accords collectifs de travail (conclus au niveau d’une ou plusieurs entreprises) et 32 742 conventions collectives de travail (conclues à un niveau plus large, telles qu’un secteur d’activité ou une profession); ii) en 2022, 41 742 accords et conventions collectifs ont été conclus, en comparaison avec les 47 672 signés en 2017. Le gouvernement informe enfin de l’adoption du décret no 11.477 du 6 avril 2023, qui crée un groupe de travail interministériel chargé d’élaborer une proposition de restructuration des relations de travail et de valorisation de la négociation collective.
La commission note que les observations de la CNI coïncident avec les éléments fournis par le gouvernement, l’organisation d’employeurs ajoutant de plus que depuis l’entrée en vigueur de la réforme, le nombre d’actions en justice questionnant la validité de clauses de conventions collectives a baissé de 80 pour cent. La commission note que la CUT affirme pour sa part que selon les analyses du Département intersyndical des statistiques et des analyses socio-économiques: i) les négociations collectives sont devenues plus difficiles depuis l’entrée en vigueur de la réforme en 2017, ce qui se traduit par une diminution du nombre de conventions et d’accords collectifs de travail et par un plus grand pouvoir discrétionnaire des entreprises; ii) il est incontestable que les changements introduits par la réforme du travail, en particulier ceux contenus dans l’article 611-A de la CLT, violent les conventions no 98 et no 154 de l’OIT; et iii) rien n’a été fait par le gouvernement pour donner effet aux observations de la commission d’experts à cet égard et la commission établie en 2023 pour restructurer les relations de travail et valoriser la négociation collective n’a pour l’instant pas dans son plan de travail la prise en compte des observations de la commission d’experts.
La commission prend note des différent éléments fournis par les mandants tripartites nationaux et note les indications statistiques selon lesquelles le nombre total d’instruments collectifs conclus est en baisse de 12,5 pour cent par rapport à 2017 (le nombre de conventions collectives conclues étant stable tandis que le nombre d’accords collectifs conclus au niveau de l’entreprise a quant à lui baissé de 17,6 pour cent). La commission relève par ailleurs l’absence d’actions prises par le gouvernement pour réviser les articles 611-A et 611-B de la CLT. La commission rappelle qu’elle estime que, si des dispositions législatives ciblées portant sur des aspects spécifiques des conditions de travail et prévoyant, de manière circonscrite et motivée, la possibilité d’y déroger par la voie de la négociation collective peuvent être compatibles avec la convention, une disposition qui établirait une possibilité générale d’écarter les règles protectrices de la législation du travail au moyen de la négociation collective serait en revanche contraire à l’objectif de promouvoir la négociation collective libre et volontaire posé par l’article 4 de la convention. Tout en prenant note des limites déjà contenues dans l’article 611-B de la CLT, la commission prie de nouveau le gouvernement de prendre, en consultation avec les partenaires sociaux représentatifs, les mesures nécessaires pour réviser les articles 611-A et 611-B de la CLT de manière à encadrer plus précisément les situations où des clauses dérogatoires de la législation pourraient être négociées ainsi que la portée de ces dernières. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les avancées à cet égard. La commission prie par ailleurs le gouvernement de continuer à fournir des informations sur l’évolution du nombre de conventions et accords collectifs conclus dans le pays, en y incluant des données sur les conventions et accords qui contiennent des clauses dérogatoires à la législation en précisant la nature et la portée de ces dernières.
Articulation entre la négociation collective et les contrats de travail individuels. La commission rappelle que, en vertu de la loi 13.467 de 2017, il résulte de l’article 444 de la CLT que, dans le champ couvert par l’article 611-A de la CLT, les clauses des contrats individuels de travail des salariés titulaires d’un diplôme de l’enseignement supérieur et qui perçoivent un salaire au moins deux fois supérieur au plafond des prestations du régime général de sécurité sociale prévalent sur le contenu des conventions et accords collectifs, y compris lorsque les clauses des contrats individuels en question sont moins protectrices. La commission rappelle à cet égard que: i) la présente convention est pleinement applicable aux travailleurs couverts par l’article 444 de la CLT dans la mesure où, en vertu de ses articles 5 et 6, seuls peuvent être exclus de son champ d’application les membres de la police et des forces armées (article 5) ainsi que les fonctionnaires commis à l’administration de l’État (article 6); et ii) tel que par ailleurs explicitement exprimé dans le paragraphe 3 de la recommandation (no 91) sur les conventions collectives, 1951, l’obligation de promotion de la négociation collective posée par l’article 4 de la convention requiert que la négociation individuelle des clauses du contrat de travail ne puisse déroger aux conventions collectives applicables étant entendu que les contrats de travail peuvent toujours prévoir des conditions de travail et d’emploi plus favorables. Relevant l’absence d’informations à cet égard, la commission prie à nouveau le gouvernement de prendre, après consultation des partenaires sociaux représentatifs concernés, les mesures nécessaires afin d’assurer la mise en conformité de l’article 444 de la CLT avec la convention. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur toute avancée à cet égard.
Champ d’application de la convention. Travailleurs autonomes ou indépendants. La commission rappelle qu’à la suite de l’extension de la définition des travailleurs autonomes découlant du nouvel article 442-B de la CLT, elle a entamé un dialogue avec le gouvernement concernant l’accès de ces travailleurs au droit de négociation collective. À cet égard, la commission avait: i) accueilli favorablement les indications du gouvernement selon lesquelles il résulte de l’article 511 de la CLT, qui reconnaît aux travailleurs autonomes le droit de se syndiquer, que ces derniers jouissent également du droit de négociation collective; ii) relevé l’affirmation de la CUT que si l’article 511 de la CLT reconnaît aux travailleurs autonomes le droit de se syndiquer, cette disposition ne leur donne pas pour autant la possibilité d’accéder aux mécanismes de négociation collective, en particulier du fait de l’absence d’interlocuteur et que, dans la pratique, le passage du statut de salarié à celui de travailleur autonome en application de l’article 442-B aura pour effet d’exclure les travailleurs concernés du bénéfice des conventions collectives en vigueur; et iii) pris note de l’indication du gouvernement que l’émergence de différentes formes de travail atypique représente pour l’ensemble des pays un défi supplémentaire pour la négociation collective, en particulier du fait de leur faible niveau de syndicalisation. Au vu de ces éléments, la commission avait invité le gouvernement à: i) fournir des exemples de conventions ou accords collectifs négociés par des organisations représentant des travailleurs autonomes ou indépendants ou, à tout le moins, dont le champ d’application couvrirait ces catégories de travailleurs; et ii) à tenir des consultations avec toutes les parties concernées dans le but d’identifier les adaptations appropriées à introduire aux mécanismes de négociation collective afin de faciliter leur application aux travailleurs autonomes et indépendants. Relevant l’absence d’informations du gouvernement à ce sujet, la commission réitère au gouvernement ses requêtes précédentes et espère qu’il fournira des informations concrètes sur d’éventuelles conventions collectives couvrant ces catégories de travailleurs ainsi que sur la réalisation des consultations demandées avec les partenaires sociaux.
Articulation entre les différents niveaux de la négociation collective. La commission rappelle que selon l’article 620 de la CLT tel que révisé par la loi no 13.467, les conditions établies dans les accords collectifs de travail (conclus au niveau d’une ou plusieurs entreprises) prévalent toujours sur celles contenues dans les conventions collectives de travail (conclues à un niveau plus large, telles qu’un secteur d’activité ou une profession). La commission avait alors rappelé qu’il résulte de l’article 4 de la convention que la négociation collective doit être promue à tous les niveaux et que, selon le principe général énoncé au paragraphe 3(1) de la recommandation no 91, toute convention collective devrait lier ses signataires ainsi que les personnes au nom desquelles elle est conclue. Notant l’absence d’éléments fournis par le gouvernement dans son rapport sur l’articulation entre les différents niveaux de négociation, la commission prie à nouveau le gouvernement: i) d’indiquer de quelle manière est garanti le respect des engagements pris par les partenaires sociaux dans le cadre des conventions conclues au niveau de la branche ou de la profession; et ii) de fournir des informations sur l’impact de l’article 620 de la CLT sur le recours respectif à la négociation de conventions collectives et d’accords collectifs ainsi que sur le taux de couverture global de la négociation collective dans le pays.
Article 4. Promotion de la négociation collective libre et volontaire. Soumission des conventions collectives à la politique économique et financière. La commission rappelle que, depuis de très nombreuses années, elle souligne la nécessité d’abroger l’article 623 de la CLT en vertu duquel sont déclarées nulles et non avenues les dispositions d’une convention ou d’un accord qui seraient contraires aux normes régissant la politique économique et financière du gouvernement ou la politique salariale en vigueur.
Dans ses commentaires plus récents, après avoir relevé l’indication du gouvernement que l’article 623 de la CLT, adopté en 1967, n’est pas en accord avec les orientations de la constitution de 1988 et n’était donc plus appliqué, la commission avait insisté sur la nécessité d’éliminer de l’ordonnancement juridique cette disposition contraire au principe de la négociation collective libre et volontaire consacré par l’article 4 de la convention. Relevant l’absence d’éléments nouveaux de la part du gouvernement, la commission prie une nouvelle fois le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour abroger l’article 623 de la CLT et de communiquer des informations dans son prochain rapport sur toute mesure prise à cet égard.
La commission veut croire que le groupe de travail interministériel créé en avril 2023 pour élaborer une proposition de restructuration des relations de travail et de valorisation de la négociation collective prendra pleinement en compte les différents points et recommandations soulevés dans le présent commentaire et que le gouvernement sera prochainement en mesure de faire part d’avancées tangibles en la matière.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2022, publiée 111ème session CIT (2023)

Article 4 Promotion de la négociation collective. Critères de détermination de l’organisation syndicale apte à négocier collectivement en cas de conflit de représentation entre plusieurs syndicats. La commission note que le Comité de la liberté syndicale (CLS) lui a remis les aspects législatifs du cas 3219 (400e rapport du CLS, octobre 2022, paragr. 187-205). La commission relève que dans le cadre de ce cas, le CLS a: i) constaté que le système brésilien de relations collectives du travail régi par le principe de l’unicité syndicale n’empêche pas la survenue de conflits de représentation lorsque deux organisations syndicales prétendent être les plus aptes à représenter une catégorie donnée de travailleurs; ii) pris note de l’indication du gouvernement selon laquelle la législation nationale n’établit pas de critères de représentativité qui permettraient de régler les conflits de représentation pouvant impliquer plusieurs organisations syndicales; et iii) observé que cette absence peut entraver le droit des travailleurs d’être représentés dans la négociation collective par le syndicat de leur choix. Rappelant l’importance qu’en vertu des articles 2 et 4 de la convention, les organisations représentant les travailleurs dans le cadre des négociations collectives soient indépendantes et représentatives, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les mesures prises pour assurer que les conflits de représentation soient résolus sur la base de critères de représentativité objectifs et fixés d’avance en tenant dûment compte des souhaits des travailleurs concernés.

Observation (CEACR) - adoptée 2022, publiée 111ème session CIT (2023)

La commission prend note des observations de la Confédération nationale des travailleurs des établissements d’enseignement (CONTEE), de la Confédération syndicale internationale (CSI) et de la Centrale unitaire des travailleurs (CUT) reçues respectivement le 28 mars, le 1er et le 2 septembre 2022 qui concernent des questions examinées par la commission dans le présent commentaire.
La Commission prend également note des observations conjointes de l’Organisation internationale des employeurs (OIE) et de la Confédération nationale de l’industrie (CNI) reçues le 30 août 2022 et qui concernent elles aussi des sujets examinés par la commission dans le présent commentaire.
La commission rappelle que dans son commentaire précédent, elle avait prié le gouvernement de fournir des réponses aux observations envoyées en 2021 par la CSI, la CUT et la CONTEE et contenant en particulier des allégations relatives à: i) l’assassinat de 3 dirigeants syndicaux en 2020 ainsi que plusieurs cas de menaces de mort; et ii) l’aggravation des atteintes au droit de négociation collective dans le contexte de la crise économique consécutive à la pandémie de COVID-19.
La commission prend à cet égard note des commentaires du gouvernement en réponse aux différentes observations présentées. Concernant les réponses du gouvernement aux allégations de 2021 de la CUT sur la prise de mesures d’urgence dans le cadre de la pandémie de COVID-19 qui auraient porté atteinte, par le biais de la Mesure Provisoire 1045/2021 (MP 1045/2021), au droit de négociation collective, la commission note l’indication du gouvernement que la MP 1045/2021 n’est plus en vigueur. La commission relève toutefois que dans ses observations de 2022, la CUT affirme que certaines des dispositions et mesures contenues dans la MP 1045/2021 et critiquées dans ses observations de 2021 ont été réintroduites en droit positif par le biais des lois 14.437/2022 et14.370/2022. La commission prie le gouvernement de fournir ses commentaires à cet égard.
Application de la convention et respect des libertés publiques. Dans son précédent commentaire, la commission avait pris note des allégations de la CSI relatives à l’assassinat de 3 dirigeants syndicaux et syndicalistes en 2020 ainsi que de plusieurs cas de menaces de mort contre d’autres dirigeants et avait prié le gouvernement de fournir ses commentaires à cet égard. La commission note avec regret que le gouvernement se limite à indiquer de manière générale que l’ordonnancement juridique brésilien dispose des mécanismes nécessaires pour poursuivre et punir les éventuels auteurs d’actes de violence antisyndicale sans fournir d’informations sur les différents actes évoqués par la CSI. À cet égard, la commission note avec profonde préoccupation les allégations suivantes de la CSI: i) l’assassinat le 28 février 2020 de M. Paulo Silva Filho, membre de la Fédération des travailleurs ruraux et des agriculteurs familiaux de l’État du Pará (FETAGRI-PA); ii) l’assassinat le 23 juillet 2020 de José Diaz Hamilton de Moura, président du Syndicat des conducteurs et employés du transport de marchandises, de la logistique du transport et des entreprises spécialisées de Belo Horizonte et de la région (SIMECLODIF); iii) l’assassinat le 6 novembre 2020 de M. João Inácio da Silva, président de la coopérative de travailleurs de Montes Belos; iv) les menaces de mort reçues en 2020 en lien avec leurs activités syndicales par Mme Tamyres Filgueira, coordinatrice du syndicat des travailleurs technico-administratifs de UFRGS, UFCSPA et IFRS (ASSUFRGS), M. Aldo Lima, président du syndicat des travailleurs routiers de Recife ainsi que les dirigeants du syndicat des travailleurs du pétrole de São José dos Campos et sa région. Rappelant que les droits contenus dans la convention, en particulier ceux relatifs à la négociation collective libre et volontaire, ne peuvent s’exercer que dans un climat exempt de violences et de menaces, la commission prie instamment le gouvernement de s’assurer que les mesures nécessaires soient prises pour: i) identifier et sanctionner les auteurs et instigateurs des crimes allégués; et ii) assurer une protection efficace aux dirigeants syndicaux dont l’intégrité physique est menacée. La Commission prie le gouvernement de fournir sans délais des informations à cet égard.
Article 4. Promotion de la négociation collective. Application des dispositions de la loi 13.467 relatives à la négociation collective dans le contexte de la pandémie de COVID-19. La commission rappelle que dans ses précédents commentaires elle avait prié le gouvernement d’apporter, en consultation avec les partenaires sociaux représentatifs, un certain nombre d’amendements aux dispositions de la loi 13.467 de 2017 relatives à la négociation collective, en particulier celles concernant la possibilité de déroger par le biais de la négociation collective, à un nombre substantiel de dispositions protectrices de la législation du travail et celles permettant, pour certaines catégories de travailleurs, la mise à l’écart, par le biais des contrats individuels de travail, des clauses protectrices des conventions collectives. Dans leurs observations de 2021, la CSI, la CUT et la CONTEE avaient exprimé leur préoccupation concernant les effets de la mise en œuvre de ces dispositions dans le contexte de la crise économique causée par la pandémie de COVID-19 et pouvant selon elles, conduire les travailleurs à devoir accepter une forte détérioration de leurs conditions de travail et d’emploi. La commission prend note des indications du gouvernement, lesquelles coïncident avec les observations de la CNI et de l’OIE, selon lesquelles: i) depuis la réforme de 2017, le nombre de conventions et accords collectifs conclus est resté relativement stable, passant de 47 572 en 2017 à 42 303 en 2019 (11 pour cent), baissant à 36 011 en 2020 du fait de la pandémie de COVID-19 et remontant à 41 951 conventions et accords conclus en 2021; ii) la baisse de 21 pour cent du taux de syndicalisation dans le pays mise en lumière par la CSI ne peut être imputée à la réforme de 2017 mais s’inscrit dans un phénomène de longue durée également visible dans de nombreux autres pays; iii) la primauté reconnue à la négociation collective sur la législation du travail (à l’exception des droits constitutionnellement protégés) – reconnue comme constitutionnelle par le Tribunal Suprême Fédéral dans un arrêt de juin 2022 – a permis aux partenaires sociaux de décider ensemble des meilleures adaptations à apporter à la situation de crise en fonction de leur situation spécifique et de garantir la sécurité juridique des accords conclus; et iv) les effets économiques et sociaux de la crise ont été fortement atténués par des mesures spéciales de protection adoptées par le gouvernement.
La commission prend bonne note des éléments fournis par le gouvernement et relève dans le même temps que les observations de 2022 de la CSI, la CUT et la CONTEEmaintiennent des allégations similaires à celles des années antérieures. Tout en réitérant ses commentaires précédents sur la nécessité de réviser les différents aspects de la loi 13.467 mentionnés plus haut pour assurer leur conformité avec l’article 4 de la convention, la commission prie le gouvernement de continuer à communiquer des statistiques sur le nombre de conventions et accords collectifs conclus, en précisant leur niveau (entreprise ou secteur), les secteurs concernés et le nombre de travailleurs couverts. La commission prie également le gouvernement de fournir des informations sur la fréquence des conventions et accords qui contiennent des clauses dérogatoires à la législation en précisant la nature et la portée de ces dernières.
Enfin, la Commission prend note des éléments fournis par le gouvernement concernant les autres points examinés par la commission dans ses commentaires précédents en relation avec l’application des articles 1 et 4 de la convention. La commission relève que les positions exprimées et les informations fournies sont pour l’essentiel similaires à celles fournies par le gouvernement dans ses rapports antérieurs. La commission, tout en réitérant ses commentaires précédemment formulés, examinera ces questions dans le cadre du cycle régulier de présentation des rapports et prie le gouvernement de continuer à fournir à leur égard toutes informations pertinentes.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2021, publiée 110ème session CIT (2022)

La commission prend note des observations de la Confédération nationale des travailleurs des établissements d’enseignement (CONTEE), de la Confédération syndicale internationale (CSI) et de la Centrale unitaire des travailleurs (CUT) reçues respectivement le 14 mai, le 1er et le 2 septembre 2021.
La commission constate que ces observations contiennent notamment des allégations relatives à: i) l’assassinat de 3 dirigeants syndicaux en 2020 ainsi que plusieurs cas de menaces de morts; ii) l’aggravation des atteintes au droit de négociation collective dans le contexte de la crise économique consécutive à la pandémie de COVID-19.
Relevant la gravité de certaines des allégations contenues dans les observations précitées, la commission considère nécessaire de pouvoir examiner en 2022 les réponses correspondantes du gouvernement. La commission prie donc le gouvernement de fournir ses commentaires aux observations précitées des organisations syndicales.
[Le gouvernement est prié de répondre en détail aux présents commentaires en 2022.]

Demande directe (CEACR) - adoptée 2020, publiée 109ème session CIT (2021)

Article 4 de la convention. Promotion de la négociation collective. Durée des conventions et accords collectifs. Ayant constaté que l’article 614.3 de la Consolidation des lois du travail (CLT) fixe à deux ans au plus la durée des conventions et accords collectifs et interdit l’inclusion dans lesdits accords et conventions de clauses prévoyant le maintien de leurs effets en cas de leur non renouvellement, la commission avait souligné que la fixation de la durée des conventions collectives et de leurs effets entre les parties étant couverte par le principe de la négociation collective libre et volontaire promu par la convention et que toute dérogation à cette règle devait dans toute la mesure possible refléter un accord tripartite. Sur cette base, la commission avait invité le gouvernement à entamer des consultations avec les organisations d’employeurs et de travailleurs représentatives sur le contenu de l’article 614.3 de la CLT. À cet égard, la commission prend note, d’une part, de la position réitérée par le gouvernement et les organisations d’employeurs Confédération nationale de l’industrie (CNI) et Confédération nationale des transports (CNT) qui affirment que la durée des conventions collectives n’est pas envisagée par la convention et selon lesquels la limitation de leur durée a pour objet et pour effet de promouvoir le plus possible l’exercice régulier de la négociation collective. La commission prend note, d’autre part, de la persistante opposition à l’article 614.3 de la CLT exprimée par la Centrale unitaire des travailleurs (CUT) et par la Nouvelle centrale syndicale des travailleurs (NCST). La commission invite de nouveau le gouvernement à fournir des informations sur les consultations menées avec les organisations d’employeurs et de travailleurs représentatives sur le contenu de l’article 614.3 de la CLT afin de rechercher un accord tripartite sur la régulation de la durée des conventions et accords collectifs.

Observation (CEACR) - adoptée 2020, publiée 109ème session CIT (2021)

La commission prend note des informations supplémentaires fournies par le gouvernement à la lumière de la décision prise par le Conseil d’administration à sa 338e session (juin 2020). La commission a actualisé l’examen de l’application de la convention sur la base des informations supplémentaires reçues du gouvernement et des partenaires sociaux cette année ainsi que sur la base des informations dont elle disposait en 2019.
La commission prend note des: i) observations de la Confédération Nationale de l’Industrie (CNI) reçues le 24 septembre 2020 réitérant ses positions exprimées antérieurement et concernant des thèmes traités par la commission dans le présent commentaire; et ii) des observations de l’Organisation internationales des Employeurs (OIE) reçues le 1er octobre 2020 par le biais desquelles l’OIE réitère ses observations de l’année précédente et appuie les observations de la CNI.
La commission prend également note des: i) observations conjointes de la Centrale unitaire des travailleurs (CUT), de la Centrale des syndicats brésiliens (CSB) et de Force Syndicale, reçues le 12 juin 2020; ii) observations de la Conférence syndicale internationale (CSI) reçues le 16 septembre 2020; iii) observations de l’Internationale des services publics (ISP) reçues le 29 septembre 2020; iv) observations de la CUT reçues le 1er octobre 2020; et v) observations de la Confédération nationale des travailleurs de l’éducation (CNTE) reçues le 1er octobre 2020. La commission note que ces observations concernent des thèmes abordés dans le présent commentaire ainsi que des allégations de violation de la convention dans la pratique vis-à-vis desquelles le gouvernement apporte ses commentaires. À cet égard, la commission relève en premier lieu les observations de la CSI et de la CUT dénonçant la suspension de la convention collective de l’entreprise des postes par une décision du Tribunal Supérieur du Travail de septembre 2020 et la réponse du gouvernement indiquant qu’il ne s’est produit aucune violation de la négociation collective mais seulement un arrêt de la juridiction supérieure infirmant la décision de première instance prise en 2019 dans le cadre du conflit collectif en cours dans ledit secteur. Au vu de ces éléments, la commission prie le gouvernement de continuer de fournir des informations sur la poursuite de la négociation collective dans l’entreprise des postes. La commission relève également les allégations de la CSI selon lesquelles se seraient produits des actes de violence et d’intimidation perpétrés par la police contre les travailleurs et leurs représentants au cours de plusieurs grèves et assemblées de travailleurs. La commission prend note que le gouvernement indique à cet égard que: i) il s’agit de trois cas isolés pour lesquels les éléments fournis par la CSI ne permettent pas à eux seuls de déduire l’existence d’abus de la part de la police ou du pouvoir judiciaire; ii) il n’est pas possible de connaître la réalité des faits sans une analyse détaillée de l’action de la police; et iii) l’ordonnancement juridique brésilien offre des recours judiciaires suffisants pour traiter efficacement ce genre de situations. Soulignant l’importance que les organisations de travailleurs puissent exercer leurs activités légitimes de défense des intérêts de leurs membres en général et de négociation collective en particulier dans un contexte exempt de violence, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les résultats des enquêtes menées concernant les cas mentionnés par la CSI.
Pandémie de COVID-19 et application de la convention. La commission note les allégations de la CUT, de la CSB, de Force Syndicale et de l’ISP, selon lesquelles les mesures provisoires 927 (MP 927 publiée le 22 mars 2020) et 936 (MP 936 publiée le 1er avril 2020), adoptées en réponse à la pandémie de COVID 19 (ci-après la pandémie), porteraient sévèrement atteinte au droit de négociation collective en faisant prévaloir les accords individuels entre employeur et travailleur sur les mécanismes de négociation collective. La commission note que les centrales syndicales allèguent en particulier que: i) l’article 2 de la MP 927 prévoit la possibilité d’établir par accord individuel les adaptations nécessaires au maintien du contrat de travail dans le contexte de la crise sanitaire, cet accord individuel prévalant sur toutes les autres sources législatives et collectives du droit du travail, à la seule exception des garanties constitutionnelles; ii) la MP 927 accorde à l’employeur la faculté unilatérale de prolonger ou non l’applicabilité des accords collectifs arrivés à échéance et ne pouvant être renouvelés du fait de la crise sanitaire; iii) la MP 936 (relative aux mesures temporaires de réduction du temps de travail et à la suspension du contrat de travail pendant la crise sanitaire et prévoyant le versement d’indemnités compensatrices aux salariés concernés sur des fonds publics) privilégie la mise en œuvre de ce mécanisme par accord individuel en ne prévoyant son activation par accord collectif que pour une fraction réduite de la main d’œuvre salariée et en n’accordant pas aux réductions du temps de travail négociées collectivement les mêmes compensations financières; et iv) les MP 927 et 936, en ne soumettant pas l’activation des mécanismes d’urgence de réduction du temps de travail et de suspension des contrats de travail à la démonstration par les entreprises de la nécessité de celles-ci, créent les conditions d’un véritable état d’exception.
La commission note que, pour sa part, le gouvernement, tout en soulignant la nécessité d’apporter des réponses rapides et efficaces à la situation d’urgence causée par la pandémie, réfute toute violation de la convention et manifeste en particulier que: i) la MP 927 a permis de sauvegarder de manière immédiate les emplois mis en danger par la crise, dans une situation où existaient de très fortes incertitudes, y compris sur la possibilité de mener des négociations collectives dans un contexte de distanciation physique; ii) la MP 927 a permis aux employeurs de prendre différentes mesures temporaires sur des matières telles que le télétravail, les dates des vacances ou l’organisation des heures de travail; iii) la MP 927 n’interdisait pas de mener des négociations collectives pendant la période où elle était en vigueur et, s’il est exact que son article 2 faisait prévaloir les accords individuels sur les sources collectives et législatives du droit du travail, l’obligation de respecter les droits relatifs au travail protégés constitutionnellement entourait les accords signés individuellement de garanties substantielles; iv) pendant sa période de mise en œuvre, le Tribunal Suprême Fédéral, saisi sur la constitutionnalité de la MP 927, avait refusé d’ordonner sa suspension provisoire, en particulier parce qu’elle contribuait à l’impératif de sauvegarde des emplois dans une situation exceptionnelle; et v) il était prévu que la MP 927 expirerait au plus tard le 19 juillet 2020 en l’absence de consécration législative; il résulte de l’absence d’action du congrès en la matière que la MP ne fait plus partie, depuis cette date, de l’ordonnancement juridique brésilien.
La commission note que, concernant la MP 936, le gouvernement indique que: i) la MP 936 a instauré un programme d’urgence de maintien de l’emploi et du revenu afin d’atténuer l’impact de la situation de calamité publique; ii) la MP 936 prévoit, par le biais d’accords individuels ou collectifs, la possibilité temporaire-pendant la durée de l’état de calamité publique- soit de réduire le temps de travail et la rémunération de manière proportionnelle soit de suspendre le contrat de travail, accords donnant lieu, d’une part, à la garantie du maintien de l’emploi pendant la période considérée, et, d’autre part, au paiement par le gouvernement d’une indemnité de préservation de l’emploi et du revenu calculés à partir du montant de l’assurance-chômage auquel aurait droit le travailleur; iii) l’accès à ces mécanismes d’urgence n’est pas subordonné à la démonstration d’une réduction d’activités de l’entreprise afin de rendre plus souple le processus et de sauver le plus d’emplois possibles; iv) l’action en inconstitutionnalité présentée par les centrales syndicales contre la MP 936 a également été rejetée; v) à l’unanimité des 2 chambres du congrès, la MP 936, qui a permis de préserver plus de 10 millions d’emplois, a été transformée en instrument législatif par la loi 14.020 de 2020; vi) à la différence de ce qu’affirment les centrales syndicales, les mécanismes prévus par la MP 936 et la loi 14.020 peuvent être mis en œuvre par le biais de la négociation collective pour l’ensemble des salariés, quel que soit leur niveau de revenu; vii) en revanche, c’est seulement pour les travailleurs dont le salaire est situé entre 3, 135 et 12,102 reais que la réduction du temps de travail ou la suspension du contrat doivent nécessairement être décidés par le biais d’un accord collectif, et ce parce que ce sont ceux qui, en vertu du dispositif établi, ont un taux de remplacement du salaire plus bas que celui prévu pour la tranche inférieure de rémunération; viii) il n’existe pas de différenciation du montant des indemnités de compensation du revenu versées selon que la décision de réduction du temps de travail ou de suspension du contrat procède d’un accord individuel ou collectif mais seulement la règle générale selon laquelle en dessous de 25 pour cent de réduction du temps de travail, il n’y aura pas de versement d’indemnité; et ix) enfin, dans le but de promouvoir la négociation collective, la MP936 a réduit de moitié les délais applicables et les actes du pouvoir exécutif ont permis la réalisation de négociations virtuelles.
La commission prend bonne note des éléments apportés par le gouvernement et par les centrales syndicales. La commission reconnaît pleinement les circonstances exceptionnelles que connaît le pays en raison de la pandémie et la nécessité absolue qu’il y a eu d’adopter des mesures urgentes pour atténuer les effets économiques et sociaux de la crise générée par celle-ci. Dans le même temps, la commission rappelle sa position générale selon laquelle les mesures qui, en cas de crise aigüe, écartent l’application des conventions collectives en vigueur, doivent présenter un caractère exceptionnel, être limitées dans le temps et comporter des garanties pour les travailleurs les plus touchés. La commission souligne également que la recommandation (no 205) sur l’emploi et le travail décent pour la paix et la résilience, 2017, insiste sur l’importance du dialogue social en général et de la négociation collective en particulier pour répondre aux situations de crise, en encourageant la participation active des organisations d’employeurs et de travailleurs à la planification, à la mise en œuvre et au suivi des mesures de relance et de résilience.
La commission observe que la MP 927 qui, dans le but de sauvegarder l’emploi, établissait la primauté temporaire des accords individuels sur les accords collectifs et attribuait à l’employeur la faculté de prendre un certain nombre de décisions unilatérales, y compris celles de proroger ou non l’application des accords collectifs expirant pendant la pandémie, n’est plus en vigueur. La commission prie toutefois le gouvernement de préciser si les clauses des conventions collectives ayant pu être temporairement écartées par un accord conclu entre l’employeur et le travailleur ou par des décisions unilatérales de l’employeur prises en vertu de la MP 927 ont retrouvé leur pleine applicabilité.
Concernant la MP 936 convertie par le Congrès en loi 14/020, la commission comprend qu’elle a pour objet de permettre la réduction du temps de travail ou la suspension temporaire du contrat de travail pendant la période de calamité publique et de mettre en place un mécanisme temporaire de compensations des revenus par le biais de fonds publics. La commission observe à cet égard que, selon les instruments mentionnés: i) en cas de réduction du temps de travail, le salaire horaire doit être maintenu; ii) l’accès à ces mécanismes peut être déclenché soit par accord collectif soit par accord individuel pour les travailleurs à bas ou à très haut revenu tandis que le recours à l’accord collectif est obligatoire pour les salariés dont le salaire correspond à une fourchette intermédiaire (concernant environ 11 pour cent de la main d’œuvre selon le gouvernement); et iii) lorsqu’un accord collectif est signé, il prévaut sur les accords individuels sauf lorsque ceux-ci sont plus favorables pour le salarié. Tout en rappelant que la promotion des mécanismes de négociation collective incombant à l’État en vertu de la convention s’applique à tous les travailleurs quel que soit leur niveau de revenu, la commission comprend que les mécanismes de protection du revenu en cas de réduction de l’activité établis par la MP 936 et la loi 14.020 n’ont pas pour objet de mettre à l’écart les conventions et accords collectifs en vigueur mais d’établir un système temporaire de réduction d’activité et de compensation des revenus qui peut être déclenché par accord individuel ou par accord collectif. Dans ces conditions et sur la base des principes mentionnés précédemment, la commission, tout en prenant bonne note des efforts importants consentis par le gouvernement pour atténuer les pertes de revenu des travailleurs, encourage celui-ci à renforcer le dialogue avec les organisations représentatives d’employeurs et de travailleurs en vue d’évaluer l’impact de la mise en œuvre de la loi 14/020, d’assurer l’application des conventions et accords collectifs en vigueur et de promouvoir, pour l’ensemble des travailleurs couverts par la convention, la pleine utilisation de la négociation collective comme moyen de parvenir à des solutions équilibrées et durables en temps de crise. La commission prie le gouvernement de fournir des informations à cet égard.
La commission note également les allégations de la CSI affirmant que la conjonction de la crise économique causée par la pandémie avec la possibilité, résultant de la réforme de la législation du travail de 2017, d’écarter par le biais de la négociation collective, une partie significative des dispositions protectrices de la législation du travail, pourrait conduire les travailleurs à accepter des conditions de travail et de rémunération dégradées afin de conserver leur emploi. La commission note à cet égard la réponse du gouvernement qui réfute ces affirmations et qui souligne à la fois les garanties et la flexibilité offertes par la nouvelle législation du travail en vue de préserver l’emploi. Tout en prenant note de ces indications, la commission prie le gouvernement de fournir dans son prochain rapport des informations sur le nombre et le contenu des conventions et accords signés pendant la période de calamité publique, en précisant la fréquence des dérogations aux dispositions protectrices de la législation du travail pouvant y être contenues.
La commission prend également note des observations suivantes reçues en 2019 qui concernent des sujets examinés par la commission dans le présent commentaire: i) observations de la CUT reçues le 20 mai 2019; ii) observations conjointes de la CSI, l’Internationale des travailleurs du bâtiment et du bois (IBB), l’Internationale de l’Éducation (IE), IndustriALL Global Union (IndustriALL), la Fédération internationale des ouvriers du transport (FIT), l’Union internationale des travailleurs de l’alimentation, de l’agriculture, de l’hôtellerie-restauration, du tabac et des branches connexes (UITA), l’ISP et d’UNI Global Union, reçues le 1er septembre 2019; iii) observations de la CNI et de la Confédération nationale des transports (CNT) reçues toutes deux le 1er septembre 2019; iv) observations de la NCST reçues le 10 septembre 2019; et v) observations conjointes de la CUT et la CSI reçues le 18 septembre 2019.
La commission prend également note des observations de l’OIE reçues le 30 août 2019 et contenant les interventions réalisées par les employeurs auprès de la Commission de l’application des normes de la Conférence de 2019 (ci-après la Commission de la Conférence).

Suivi des conclusions de la Commission de l’application des normes (Conférence internationale du Travail, 108e session, juin 2019)

La commission prend note des discussions ayant eu lieu à la Commission de la Conférence en juin 2019 sur l’application de la convention par le Brésil. La commission note que la Commission de la Conférence a demandé au gouvernement de: i) continuer d’examiner, en coopération et consultation avec les organisations d’employeurs et de travailleurs les plus représentatives, l’impact des réformes et de déterminer si des ajustements appropriés sont nécessaires; et ii) élaborer, en consultation avec les organisations d’employeurs et de travailleurs les plus représentatives, un rapport qui sera présenté à la commission d’experts, conformément au cycle régulier de présentation des rapports.
Article 1 de la convention. Protection adéquate contre la discrimination antisyndicale. Dans de précédents commentaires, la commission avait noté que, dans le cadre de plusieurs plaintes examinées par le Comité de la liberté syndicale (cas nos 2635, 2636 et 2646) qui faisaient état d’actes de discrimination antisyndicale, le gouvernement avait indiqué que, «bien que la liberté syndicale soit un droit consacré par la Constitution, la législation nationale ne couvre pas les pratiques antisyndicales, ce qui empêche le ministère du Travail et de l’Emploi de prendre des mesures efficaces à caractère préventif et répressif pour lutter contre des pratiques telles que celles dénoncées dans le cas examiné». Lors de commentaires précédents, sur la base des informations fournies par le gouvernement, la commission avait exprimé l’espoir que, dans le cadre du Conseil des relations du travail (CRT), un projet de loi pourrait être élaboré afin d’établir expressément des recours et des sanctions suffisamment dissuasives contre les actes de discrimination antisyndicale.
La commission note que le gouvernement, dans son rapport de 2019 et dans les informations supplémentaires fournies en 2020, indique que: i) la liberté syndicale est protégée par la constitution; ii) si la législation ordinaire ne contient pas de section sur les actes antisyndicaux, elle dispose d’une section sur les droits des affiliés syndicaux; iii) au sein de cette section, l’article 543 de la Consolidation des lois du travail (CLT) assure la stabilité dans l’emploi des représentants syndicaux et l’article 543(6) prévoit une sanction administrative pour l’employeur qui empêcherait un travailleur d’exercer ses droits syndicaux, sans préjudice du droit à réparation que celui-ci pourrait obtenir; et iv) l’article 199 du code pénal criminalise le fait d’empêcher une personne d’adhérer à un syndicat par la menace ou la violence. La commission note également l’indication de la CNT que le nouvel article 510-B de la CLT attribue aux comités des représentants des travailleurs la fonction de veiller à la prévention de toute discrimination, dont les discriminations syndicales dans l’entreprise. La commission prend note de ces éléments. Elle constate à cet égard que: i) en vertu de la Mesure provisoire no 905 (MP 905) de novembre 2019, les sanctions administratives applicables en cas de violation de l’article 543(6) de la CLT étaient celles concernant les infractions à la législation du travail en général; et ii) la MP 905 n’est aujourd’hui plus en vigueur dans la mesure où elle n’a pas été confirmée par le Congrès de la République. ; ii ; Rappelant l’importance fondamentale d’assurer une protection effective contre la discrimination antisyndicale, la commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que la législation établisse expressément des sanctions spécifiques suffisamment dissuasives contre tous les actes de discrimination antisyndicale. La commission prie le gouvernement d’indiquer tout fait nouveau à cet égard.
Article 4. Promotion de la négociation collective. Articulation entre la négociation collective et la loi. Dans ses commentaires de 2017 et 2018, la commission avait noté qu’en vertu de la loi no 13467 adoptée le 13 novembre 2017, le nouvel article 611-A de la CLT avait introduit le principe général selon lequel les conventions et accords collectifs prévalent sur la législation, permettant ainsi, par le biais de la négociation collective, de déroger, dans la limite du respect des droits constitutionnels visés à l’article 611-B de la CLT, aux dispositions protectrices de la législation. La commission avait alors rappelé qu’elle estimait que, si des dispositions législatives ciblées portant sur des aspects spécifiques des conditions de travail et prévoyant, de manière circonscrite et motivée, la possibilité d’y déroger par la voie de la négociation collective peuvent être compatibles avec la convention, une disposition qui établirait une possibilité générale de déroger à la législation du travail au moyen de la négociation collective serait en revanche contraire à l’objectif de promouvoir la négociation collective libre et volontaire posé par l’article 4 de la convention. Sur cette base, la commission avait prié le gouvernement de prendre, en consultation avec les partenaires sociaux représentatifs, les mesures nécessaires pour réviser les articles 611-A et 611-B de la CLT, de manière à encadrer plus précisément les situations où des clauses dérogatoires de la législation pourraient être négociées collectivement ainsi que la portée de ces dernières.
La commission prend note des observations conjointes de la CSI, de l’IBB, de l’IE, d’IndustriALL, de la FIT, de l’UITA, de l’ISP et d’UNI Global Union qui dénoncent les effets néfastes que causerait la possibilité générale de déroger par le biais de la négociation collective aux dispositions protectrices de la législation. La commission note que les organisations syndicales internationales considèrent que la nouvelle articulation entre la négociation collective et la loi établie par la loi no 13467: i) remet radicalement en cause les piliers sur lesquels sont établis les mécanismes de négociation collective et constitue une attaque frontale à la négociation collective libre et volontaire garantie par la convention; ii) crée les conditions d’une compétition vers le bas entre employeurs pour la réduction des droits des travailleurs; et iii) produit un effet dissuasif sur l’exercice de la négociation collective qui aurait entraîné une baisse de 39 pour cent du taux de couverture de la négociation collective dans le pays. La commission prend également note des observations de la CUT qui affirme que: i) des mesures rendant possible la négociation à la baisse des conditions de travail ne promeuvent pas l’exercice de la négociation collective; et ii) la réforme a occasionné une baisse significative du nombre de conventions et accords collectifs signés. La commission prend également note des observations de la NCST à cet égard.
La commission prend note par ailleurs des observations de la CNT et de la CNI, selon lesquelles les articles 611-A et 611-B de la CLT: i) assurent une grande liberté pour que la négociation collective permette de fixer des conditions de travail favorables pour toutes les parties; ii) sont conformes aux dispositions de la constitution brésilienne qui prévoient la possibilité de déroger par accord collectif à certains droits ainsi qu’à la jurisprudence du Tribunal suprême fédéral qui souligne la nécessité de respecter les accords conclus par les partenaires sociaux.; et iii) sont conformes aux conventions de l’OIT en la matière, tel qu’il résulte de l’examen par la Commission de la Conférence qui n’a relevé aucun motif d’incompatibilité avec la convention.
La commission prend note des éléments fournis par le gouvernement qui réitère, pour l’essentiel, les positions exprimées dans ses rapports précédents. La commission note que le gouvernement considère que: i) la réforme législative de 2017 renforce le rôle et la valeur de la négociation collective en accroissant son champ matériel d’intervention, ce qui est pleinement conforme aux finalités des conventions de l’OIT en la matière et particulièrement nécessaire dans le contexte d’une législation du travail excessivement détaillée; ii) la primauté reconnue aux accords et conventions collectifs sur la loi renforce la sécurité juridique de la négociation collective, élément indispensable au vu de la traditionnelle ingérence du pouvoir judiciaire brésilien et répond à une demande historique du mouvement syndical brésilien; iii) l’article 611-A de la CLT n’oblige en aucun cas à ce que les syndicats signent des accords qui écartent les dispositions légales protectrices, les partenaires sociaux pouvant choisir de continuer à être régis, lorsque cela est dans l’intérêt des parties, par les dispositions légales; iv) le fait que l’article 611-A de la CLT établisse une liste non-exhaustive de thèmes vis-à-vis desquels les conventions et accords collectifs peuvent déroger aux dispositions de la législation a pour but d’assurer la flexibilité nécessaire aux partenaires sociaux dans le cadre de leurs négociations; v) la réforme assure dans le même temps la protection de 30 droits contenus dans l’article 611-B de la CLT et auxquels la négociation collective ne peut déroger; vi) aucune des 30 actions en justice intentées au niveau national contre la loi no 13467 n’a porté sur la négociation collective; vii) une situation où les négociations collectives pourraient uniquement déboucher sur des bénéfices additionnels pour les travailleurs découragerait la participation des employeurs à ces dernières; viii) après une baisse de 13,1 pour cent en 2018, le nombre de conventions et accords collectifs a commencé à croître lors des quatre premiers mois de l’année 2019 pour se rapprocher des niveaux antérieurs à la réforme; ix) tel que relevé dans une étude détaillée de la Fondation institut de recherche économique (FIPE), les contenus négociés sont favorables aux travailleurs et couvrent plus de thèmes qu’auparavant, ce qui démontre donc que l’hypothétique effet dissuasif de l’article 611-A sur la négociation collective ne s’est pas produit; et x) la réforme de la législation du travail a été favorablement accueillie par la Banque mondiale, l’Organisation de coopération et de développement économiques et le Fonds monétaire international. La commission note enfin les affirmations du gouvernement selon lesquelles: i) il n’existe pas de fondement textuel à la position de la commission selon laquelle cette convention ainsi que la convention (nº 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978, et la convention (nº 154) sur la négociation collective, 1981, auraient pour objectif général de promouvoir des conditions de travail plus favorables que celles prévues par la législation; et ii) l’utilisation des travaux préparatoires des conventions par la commission présente un caractère inapproprié.
La commission prend note des différents éléments fournis par le gouvernement ainsi que par les partenaires sociaux nationaux et internationaux et constate que les différents acteurs réitèrent dans les informations supplémentaires fournies en 2020 les positions antérieurement exprimées. La commission relève en premier lieu l’indication du gouvernement selon laquelle, contrairement à la position exprimée par les organisations syndicales, le nombre d’accords et conventions collectifs signés est en train de rejoindre les niveaux antérieurs à la réforme législative de 2017. La commission souligne l’importance de continuer à disposer d’informations complètes à cet égard, tant sur le nombre d’accords et conventions signées que sur leur contenu. La commission relève également que le gouvernement et les organisations d’employeurs réitèrent que les articles 611-A et 611-B de la CLT promeuvent la négociation collective au sens de la convention en assurant une liberté accrue aux parties à la négociation et en garantissant dans le même temps que de nombreux droits ne peuvent être écartés par le biais de la négociation collective.
La commission rappelle à ce sujet que, sur la base des informations détaillées fournies par le gouvernement, la commission a relevé dans ses commentaires précédents que: i) la possibilité de dérogation aux dispositions protectrices de la législation par le biais de la négociation collective introduite par la loi no 13467 n’est effectivement pas absolue puisque l’article 611-B de la CLT établit une liste limitative de 30 droits fondés sur le contenu de la Constitution brésilienne, qui ne peuvent être écartés par le biais d’accords ou de conventions collectives; et ii) les facultés de dérogation à la législation par la négociation collective ouvertes par l’article 611-A de la CLT sont toutefois très étendues dans la mesure où, d’une part, cet article se réfère explicitement à 14 points qui couvrent de nombreux aspects de la relation de travail, et où, d’autre part, cette liste, contrairement à celle qui figure à l’article 611-B est uniquement indicative («entre autres»), la possibilité d’écarter des dispositions législatives protectrices par le biais de la négociation collective, étant ainsi érigée en principe général.
La commission rappelle qu’elle estime que, si des dispositions législatives ciblées portant sur des aspects spécifiques des conditions de travail et prévoyant, de manière circonscrite et motivée, la possibilité d’y déroger par la voie de la négociation collective peuvent être compatibles avec la convention, une disposition qui établirait une possibilité générale d’écarter les règles protectrices de la législation du travail au moyen de la négociation collective serait en revanche contraire à l’objectif de promouvoir la négociation collective libre et volontaire posé par l’article 4 de la convention. Tout en soulignant l’importance d’obtenir, dans toute la mesure possible, un accord tripartite sur les règles de base de la négociation collective, la commission prie donc de nouveau le gouvernement de prendre, en consultation avec les partenaires sociaux représentatifs, les mesures nécessaires pour réviser les articles 611-A et 611-B de la CLT de manière à encadrer plus précisément les situations où des clauses dérogatoires de la législation pourraient être négociées ainsi que la portée de ces dernières. Prenant par ailleurs note des indications du gouvernement sur l’accroissement des conventions et accords collectifs signés lors des quatre premiers mois de 2019, la commission prie ce dernier de continuer à fournir des informations sur l’évolution du nombre de conventions et accords collectifs conclus dans le pays, y compris sur les conventions et accords qui contiennent des clauses dérogatoires à la législation en précisant la nature et la portée de ces dernières.
Articulation entre la négociation collective et les contrats de travail individuels. Dans ses commentaires précédents, la commission avait prié le gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin d’assurer la mise en conformité avec la convention de l’article 444 de la CLT qui permet aux travailleurs titulaires d’un diplôme de l’enseignement supérieur et qui perçoivent un salaire au moins deux fois supérieur au plafond des prestations du régime général de sécurité sociale de déroger, par le biais de leurs contrats de travail individuels, aux dispositions des conventions collectives applicables.
La commission note que le gouvernement manifeste à cet égard que l’article 4 de la convention ne se réfère pas aux contrats individuels de travail et qu’il réitère dans les informations supplémentaires remises en 2020 que l’article 444 de la CLT concerne un groupe très réduit de travailleurs, généralement des cadres supérieurs qui ne représentent qu’environ 0,25 pour cent de la population. La commission note également la position des organisations d’employeurs CNI et CNT qui estiment que les dispositions de l’article 444 étendent les possibilités de négociation des travailleurs considérés. La commission note enfin la position exprimée par les organisations syndicales nationales et internationales qui réclament l’abrogation de ladite disposition.
La commission rappelle à nouveau que l’obligation de promotion de la négociation collective posée par l’article 4 de la convention requiert que la négociation individuelle des clauses du contrat de travail ne puisse déroger aux droits et garanties fixées par les conventions collectives applicables, étant entendu que les contrats de travail peuvent toujours prévoir des conditions de travail et d’emploi plus favorables. La commission réitère également que ce principe est par ailleurs explicitement exprimé dans le paragraphe 3 de la recommandation (nº 91) sur les conventions collectives, 1951. Tout en soulignant de nouveau que les mécanismes de négociation collective sont en mesure de prendre en compte les besoins et intérêts spécifiques de catégories différenciées de travailleurs qui peuvent, si elles le souhaitent, être représentées par des organisations qui leur sont propres, la commission rappelle que la présente convention est pleinement applicable aux travailleurs couverts par l’article 444 de la CLT dans la mesure où, en vertu de ses articles 5 et 6, seuls peuvent être exclus de son champ d’application les membres de la police et des forces armées (article 5) ainsi que les fonctionnaires commis à l’administration de l’État (article 6). La commission réaffirme en conséquence que la convention ne permet pas une exclusion de son champ d’application fondée sur le niveau de la rémunération des travailleurs. La commission prie donc à nouveau le gouvernement de prendre, après consultation des partenaires sociaux représentatifs concernés, les mesures nécessaires afin d’assurer la mise en conformité de l’article 444 de la CLT avec la convention. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur toute avancée à cet égard.
Champ d’application de la convention. Travailleurs autonomes ou indépendants. Dans ses commentaires adoptés en 2017 et 2018, sur la base des observations d’organisations syndicales alléguant que l’extension de la définition des travailleurs indépendants découlant du nouvel article 442-B de la CLT aurait pour effet d’exclure une catégorie importante de travailleurs des droits reconnus par la convention, la commission avait invité le gouvernement à tenir des consultations avec toutes les parties concernées dans le but de garantir que les travailleurs autonomes ou indépendants soient autorisés à participer à une négociation collective libre et volontaire, tout en identifiant les adaptations appropriées à introduire aux mécanismes de négociation collective afin de faciliter leur application à ces catégories de travailleurs.
Indépendamment de la définition des travailleurs autonomes ou indépendants retenue par l’article 442-B de la CLT, la commission rappelle que tous les travailleurs, y compris les travailleurs autonomes ou indépendants, sont couverts par les dispositions de la convention. À cet égard, la commission a accueilli favorablement en 2019 les indications du gouvernement selon lesquelles il résulte de l’article 511 de la CLT, qui reconnaît aux travailleurs autonomes le droit de se syndiquer, que ces derniers jouissent également du droit de négociation collective. La commission a également noté à cet égard la position concordante exprimée par la CNT et la CNI. Dans le même temps, la commission relève: i) la demande formulée en 2019 par la CSI et sept fédérations syndicales internationales pour que toutes les mesures soient prises afin d’assurer l’accès effectif des travailleurs autonomes et indépendants à la négociation collective libre et volontaire; ii) l’affirmation par la CUT dans ses observations de 2020 que si l’article 511 de la CLT reconnaît aux travailleurs autonomes le droit de se syndiquer, cette disposition ne leur donne pas pour autant possibilité d’accéder aux mécanismes de négociation collective, en particulier du fait de l’absence d’interlocuteur et que, dans la pratique, le passage du statut de salarié à celui de travailleur autonome en application de l’article 442-B aura pour effet d’exclure les travailleurs concernés du bénéfice des conventions collectives en vigueur; et iii) l’indication du gouvernement dans les informations supplémentaires fournies en 2020 que l’émergence de différentes formes de travail atypique représente pour l’ensemble des pays un défi supplémentaire pour la négociation collective, en particulier du fait de leur faible niveau de syndicalisation. Au vu de ces éléments, tout en relevant le large champ d’application de l’article 511 de la CLT la commission invite le gouvernement à: i) fournir des exemples de conventions ou accords collectifs négociés par des organisations représentant des travailleurs autonomes ou indépendants ou, à tout le moins, dont le champ d’application couvrirait ces catégories de travailleurs; et ii) à tenir des consultations avec toutes les parties concernées dans le but d’identifier les adaptations appropriées à introduire aux mécanismes de négociation collective afin de faciliter leur application aux travailleurs autonomes et indépendants. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les progrès accomplis à cet égard.
Articulation entre les différents niveaux de la négociation collective. Ayant relevé que, selon l’article 620 de la CLT tel que révisé par la loi no 13467, les conditions établies dans les accords collectifs de travail (conclus au niveau d’une ou plusieurs entreprises) prévalent toujours sur celles contenues dans les conventions collectives de travail (conclues à un niveau plus large, telles qu’un secteur d’activité ou une profession), la commission avait prié le gouvernement d’indiquer de quelle manière est garanti le respect des engagements pris par les partenaires sociaux dans le cadre des conventions conclues au niveau du secteur d’activité ou de la profession et de fournir des informations sur l’impact de l’article 620 de la CLT sur le recours respectif à la négociation de conventions collectives et d’accords collectifs ainsi que sur le taux de couverture global de la négociation collective dans le pays.
La commission note que le gouvernement se limite à signaler à cet égard que l’objectif de l’article 620 de la CLT est de permettre la conclusion d’accords se situant au plus près des réalités quotidiennes des travailleurs et de l’entreprise. La commission relève également que la CNI et la CNT considèrent que la primauté accordée dans tous les cas aux accords collectifs sur les conventions collectives dotées d’un champ d’application plus large est pleinement conforme aux dispositions de la convention dans la mesure où cette dernière n’établit aucun ordre de préférence ou de hiérarchie entre les différents niveaux de négociation.
La commission rappelle à nouveau qu’il résulte de l’article 4 de la convention que la négociation collective doit être promue à tous les niveaux et que, selon le principe général énoncé au paragraphe 3(1) de la recommandation no 91, toute convention collective devrait lier ses signataires ainsi que les personnes au nom desquelles elle est conclue. Constatant l’absence de réponses du gouvernement à cet égard, la commission prie à nouveau le gouvernement: i) d’indiquer de quelle manière est garanti le respect des engagements pris par les partenaires sociaux dans le cadre des conventions conclues au niveau de la branche ou de la profession; et ii) de fournir des informations sur l’impact de l’article 620 de la CLT sur le recours respectif à la négociation de conventions collectives et d’accords collectifs ainsi que sur le taux de couverture global de la négociation collective dans le pays.
Article 4. Promotion de la négociation collective libre et volontaire. Soumission des conventions collectives à la politique économique et financière. La commission rappelle que, depuis des années, elle souligne la nécessité d’abroger l’article 623 de la CLT en vertu duquel sont déclarées nulles et non avenues les dispositions d’une convention ou d’un accord qui seraient contraires aux normes régissant la politique économique et financière du gouvernement ou la politique salariale en vigueur. À ce sujet, soulignant que l’article 4 de la convention exige de promouvoir la négociation collective libre et volontaire, la commission avait rappelé que: i) les pouvoirs publics peuvent élaborer des mécanismes de discussions et d’échanges en vue d’inciter les parties à la négociation à tenir compte volontairement de considérations relatives à la politique économique et sociale du gouvernement et à la sauvegarde de l’intérêt général; et ii) les restrictions à la négociation collective sur les questions économiques ne devraient être possibles que dans des circonstances exceptionnelles, c’est-à-dire dans des cas de difficultés graves et insurmontables, en vue du maintien des emplois et de la continuité des entreprises et des institutions. La commission note que, dans ses informations supplémentaires de 2020, le gouvernement indique que: i) l’article 623 de la CLT, adopté en 1967, n’est pas en accord avec les orientations de la constitution de 1988 et n’est donc plus appliqué; et ii) l’unique limitation effectivement en vigueur concerne l’interdiction du réajustement automatique des salaires en fonction de l’indice des prix afin d’éviter l’augmentation de l’inflation, ce qui ne limite en rien les négociations sur les salaires fondées sur d’autres bases. Tout en prenant bonne note des indications du gouvernement, la commission relève que la réforme de 2017 de la législation du travail n’a pas éliminé l’article 623 de la CLT. La commission prie donc à nouveau le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier la législation dans le sens indiqué et de communiquer des informations dans son prochain rapport sur toute mesure prise à cet égard.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2019, publiée 109ème session CIT (2021)

Article 4 de la convention. Promotion de la négociation collective. Durée des conventions et accords collectifs. Ayant constaté que l’article 614.3 de la Consolidation des lois du travail (CLT) fixe à deux ans au plus la durée des conventions et accords collectifs et interdit l’inclusion dans lesdits accords et conventions de clauses prévoyant le maintien de leurs effets en cas de leur non renouvellement, la commission avait souligné que la fixation de la durée des conventions collectives et de leurs effets entre les parties étant couverte par le principe de la négociation collective libre et volontaire promu par la convention et que toute dérogation à cette règle devait dans toute la mesure possible refléter un accord tripartite. Sur cette base, la commission avait invité le gouvernement à entamer des consultations avec les organisations d’employeurs et de travailleurs représentatives sur le contenu de l’article 614.3 de la CLT. A cet égard, la commission prend note, d’une part, de la position exprimée par le gouvernement et les organisations d’employeurs Confédération nationale de l’industrie (CNI) et Confédération nationale des transports (CNT) qui affirment que la durée des conventions collectives n’est pas envisagée par la convention et selon lesquels la limitation de leur durée a pour effet de promouvoir l’exercice régulier de la négociation collective. La commission prend note, d’autre part, de la persistante opposition à l’article 614.3 de la CLT exprimée par la Centrale unitaire des travailleurs (CUT) et par la Nouvelle centrale syndicale des travailleurs (NCST). La commission invite de nouveau le gouvernement à fournir des informations sur les consultations menées avec les organisations d’employeurs et de travailleurs représentatives sur le contenu de l’article 614.3 de la CLT afin de rechercher un accord tripartite sur la régulation de la durée des conventions et accords collectifs.

Observation (CEACR) - adoptée 2019, publiée 109ème session CIT (2021)

La commission prend note des observations suivantes qui concernent des sujets examinés par la commission dans le présent commentaire: i) observations de la Central Unica Dos Trabalhadores (CUT) reçues le 20 mai 2019; ii) observations conjointes de la Confédération syndicale internationale (CSI), l’Internationale des travailleurs du bâtiment et du bois (IBB), l’Internationale de l’Education (IE), IndustriALL Global Union (IndustriALL), la Fédération internationale des ouvriers du transport (FIT), l’Union internationale des travailleurs de l’alimentation, de l’agriculture, de l’hôtellerie-restauration, du tabac et des branches connexes (UITA), l’Internationale des Services Publics (ISP) et d’UNI Global Union, reçues le 1er septembre 2019; iii) observations de la Confédération nationale de l’industrie (CNI) et de la Confédération nationale des transports (CNT) reçues toutes deux le 1er septembre 2019; iv) observations de la Nouvelle centrale syndicale de travailleurs (NCST) reçues le 10 septembre 2019; et v) observations conjointes de la CUT et la CSI reçues le 18 septembre 2019.
La commission prend également note des observations de l’Organisation internationale des employeurs (OIE) reçues le 30 août 2019 et contenant les interventions réalisées par les employeurs auprès de la Commission de l’application des normes de la Conférence de 2019 (ci-après la Commission de la Conférence).

Suivi des conclusions de la Commission de l’application des normes (Conférence internationale du Travail, 108e session, juin 2019)

La commission prend note des discussions ayant eu lieu à la Commission de la Conférence en juin 2019 sur l’application de la convention par le Brésil. La commission note que la Commission de la Conférence a demandé au gouvernement de: i) continuer d’examiner, en coopération et consultation avec les organisations d’employeurs et de travailleurs les plus représentatives, l’impact des réformes et de déterminer si des ajustements appropriés sont nécessaires; et ii) élaborer, en consultation avec les organisations d’employeurs et de travailleurs les plus représentatives, un rapport qui sera présenté à la commission d’experts, conformément au cycle régulier de présentation des rapports.
Article 1 de la convention. Protection adéquate contre la discrimination antisyndicale. Dans de précédents commentaires, la commission avait noté que, dans le cadre de plusieurs plaintes examinées par le Comité de la liberté syndicale (cas nos 2635, 2636 et 2646) qui faisaient état d’actes de discrimination antisyndicale, le gouvernement avait indiqué que, «bien que la liberté syndicale soit un droit consacré par la Constitution, la législation nationale ne couvre pas les pratiques antisyndicales, ce qui empêche le ministère du Travail et de l’Emploi de prendre des mesures efficaces à caractère préventif et répressif pour lutter contre des pratiques telles que celles dénoncées dans le cas examiné». Lors de commentaires précédents, sur la base des informations fournies par le gouvernement, la commission avait exprimé l’espoir que, dans le cadre du Conseil des relations du travail (CRT), un projet de loi pourrait être élaboré afin d’établir expressément des recours et des sanctions suffisamment dissuasives contre les actes de discrimination antisyndicale.
La commission note que le gouvernement indique que: i) la liberté syndicale est protégée par la constitution; ii) si la législation ordinaire ne contient pas de section sur les actes antisyndicaux, elle dispose d’une section sur les droits des affiliés syndicaux; et iii) au sein de cette section, l’article 543 de la Consolidation des lois du travail (CLT) assure la stabilité dans l’emploi des représentants syndicaux et l’article 543(6) prévoit une sanction administrative pour l’employeur qui empêcherait un travailleur d’exercer ses droits syndicaux, sans préjudice du droit à réparation que celui-ci pourrait obtenir. La commission note également l’indication de la CNT que le nouvel article 510-B de la CLT attribue aux comités des représentants des travailleurs la fonction de veiller à la prévention de toute discrimination, dont les discriminations syndicales dans l’entreprise. La commission prend note de ces éléments. Elle constate à cet égard que: i) les sanctions administratives applicables en cas de violation de l’article 543(6) de la CLT sont actuellement établies par la Mesure provisoire no 905 de novembre 2019 (une mesure législative adoptée par le président et qui peut rester en vigueur pour une période maximale de cent vingt jours sans approbation du Congrès national); ii) les amendes applicables aux actes antisyndicaux prohibés par l’article 543(6) de la CLT sont celles concernant les infractions à la législation du travail en général; iii) le montant de ces dernières varie de 1 000 à 100 000 reais selon qu’il s’agit d’infractions de nature légère, moyenne, grave ou très grave; et iv) la législation ne précise pas à quel type d’infractions correspondent les actes de discrimination antisyndicale. Rappelant l’importance fondamentale d’assurer une protection effective contre la discrimination antisyndicale, la commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que la législation établisse expressément des sanctions spécifiques suffisamment dissuasives contre tous les actes de discrimination antisyndicale. La commission prie le gouvernement d’indiquer tout fait nouveau à cet égard.
Article 4. Promotion de la négociation collective. Articulation entre la négociation collective et la loi. Dans ses commentaires précédents, la commission avait noté qu’en vertu de la loi no 13467 adoptée le 13 novembre 2017, le nouvel article 611-A de la CLT avait introduit le principe général selon lequel les conventions et accords collectifs prévalent sur la législation, permettant ainsi, par le biais de la négociation collective, de déroger, dans la limite du respect des droits constitutionnels visés à l’article 611-B de la CLT, aux dispositions protectrices de la législation. La commission avait alors rappelé qu’elle estimait que, si des dispositions législatives ciblées portant sur des aspects spécifiques des conditions de travail et prévoyant, de manière circonscrite et motivée, la possibilité d’y déroger par la voie de la négociation collective peuvent être compatibles avec la convention, une disposition qui établirait une possibilité générale de déroger à la législation du travail au moyen de la négociation collective serait en revanche contraire à l’objectif de promouvoir la négociation collective libre et volontaire posé par l’article 4 de la convention. Sur cette base, la commission avait prié le gouvernement de prendre, en consultation avec les partenaires sociaux représentatifs, les mesures nécessaires pour réviser les articles 611-A et 611-B de la CLT, de manière à encadrer plus précisément les situations où des clauses dérogatoires de la législation pourraient être négociées collectivement ainsi que la portée de ces dernières.
La commission prend note des observations conjointes de la CSI, de l’IBB, de l’IE, d’IndustriALL, de la FIT, de l’UITA, de l’ISP et d’UNI Global Union qui dénoncent les effets néfastes que causerait la possibilité générale de déroger par le biais de la négociation collective aux dispositions protectrices de la législation. La commission note que les organisations syndicales internationales considèrent que la nouvelle articulation entre la négociation collective et la loi établie par la loi no 13467: i) remet radicalement en cause les piliers sur lesquels sont établis les mécanismes de négociation collective et constitue une attaque frontale à la négociation collective libre et volontaire garantie par la convention; ii) crée les conditions d’une compétition vers le bas entre employeurs pour la réduction des droits des travailleurs; et iii) produit un effet dissuasif sur l’exercice de la négociation collective qui aurait entraîné une baisse de 39 pour cent du taux de couverture de la négociation collective dans le pays. La commission prend également note des observations de la CUT qui affirme que: i) des mesures rendant possible la négociation à la baisse des conditions de travail ne promeuvent pas l’exercice de la négociation collective; et ii) la réforme a occasionné une baisse significative du nombre de conventions et accords collectifs signés. La commission prend également note des observations de la NCST à cet égard.
La commission prend note par ailleurs des observations de la CNT et de la CNI, selon lesquelles les articles 611-A et 611-B de la CLT: i) assurent une grande liberté pour que la négociation collective permette de fixer des conditions de travail favorables pour toutes les parties; ii) sont conformes aux dispositions de la constitution brésilienne qui prévoient la possibilité de déroger par accord collectif à certains droits ainsi qu’à la jurisprudence du Tribunal suprême fédéral qui souligne la nécessité de respecter les accords conclus par les partenaires sociaux.; et iii) sont conformes aux conventions de l’OIT en la matière, tel qu’il résulte de l’examen par la Commission de la Conférence qui n’a relevé aucun motif d’incompatibilité avec la convention.
La commission prend note des éléments fournis par le gouvernement qui réitère, pour l’essentiel, les positions exprimées dans ses rapports précédents. La commission note que le gouvernement considère que: i) la réforme législative de 2017 renforce le rôle et la valeur de la négociation collective en accroissant son champ matériel d’intervention, ce qui est pleinement conforme aux finalités des conventions de l’OIT en la matière et particulièrement nécessaire dans le contexte d’une législation du travail excessivement détaillée; ii) la primauté reconnue aux accords et conventions collectifs sur la loi renforce la sécurité juridique de la négociation collective, élément indispensable au vu de la traditionnelle ingérence du pouvoir judiciaire brésilien et répond à une demande historique du mouvement syndical brésilien; iii) l’article 611-A de la CLT n’oblige en aucun cas à ce que les syndicats signent des accords qui écartent les dispositions légales protectrices, les partenaires sociaux pouvant choisir de continuer à être régis, lorsque cela est dans l’intérêt des parties, par les dispositions légales; iv) la réforme assure dans le même temps la protection de 30 droits contenus dans l’article 611-B de la CLT et auxquels la négociation collective ne peut déroger; v) aucune des 30 actions en justice intentées au niveau national contre la loi no 13467 n’a porté sur la négociation collective; vi) une situation où les négociations collectives pourraient uniquement déboucher sur des bénéfices additionnels pour les travailleurs découragerait la participation des employeurs à ces dernières; vii) après une baisse de 13,1 pour cent en 2018, le nombre de conventions et accords collectifs a commencé à croître lors des quatre premiers mois de l’année 2019 pour se rapprocher des niveaux antérieurs à la réforme; viii) tel que relevé dans une étude détaillée de la Fondation institut de recherche économique (FIPE), les contenus négociés sont favorables aux travailleurs et couvrent plus de thèmes qu’auparavant, ce qui démontre donc que l’hypothétique effet dissuasif de l’article 611-A sur la négociation collective ne s’est pas produit; et ix) la réforme de la législation du travail a été favorablement accueillie par la Banque mondiale, l’Organisation de coopération et de développement économiques et le Fonds monétaire international. La commission note enfin les affirmations du gouvernement selon lesquelles: i) il n’existe pas de fondement textuel à la position de la commission selon laquelle cette convention ainsi que la convention (nº 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978, et la convention (nº 154) sur la négociation collective, 1981, auraient pour objectif général de promouvoir des conditions de travail plus favorables que celles prévues par la législation; et ii) l’utilisation des travaux préparatoires des conventions par la commission présente un caractère inapproprié.
La commission prend note des différents éléments fournis par le gouvernement ainsi que par les partenaires sociaux nationaux et internationaux. La commission relève en premier lieu l’indication du gouvernement selon laquelle, contrairement à la position exprimée par les organisations syndicales, le nombre d’accords et conventions collectifs signés est en train de rejoindre les niveaux antérieurs à la réforme législative de 2017. La commission souligne l’importance de continuer à disposer d’informations complètes à cet égard, tant sur le nombre d’accords et conventions signées que sur leur contenu. La commission relève également que le gouvernement et les organisations d’employeurs réitèrent que les articles 611-A et 611-B de la CLT promeuvent la négociation collective au sens de la convention en assurant une liberté accrue aux parties à la négociation et en garantissant dans le même temps que de nombreux droits ne peuvent être écartés par le biais de la négociation collective.
La commission rappelle à ce sujet que, sur la base des informations détaillées fournies par le gouvernement, la commission a relevé dans ses commentaires précédents que: i) la possibilité de dérogation aux dispositions protectrices de la législation par le biais de la négociation collective introduite par la loi no 13467 n’est effectivement pas absolue puisque l’article 611-B de la CLT établit une liste limitative de 30 droits fondés sur le contenu de la Constitution brésilienne, qui ne peuvent être écartés par le biais d’accords ou de conventions collectives; et ii) les facultés de dérogation à la législation par la négociation collective ouvertes par l’article 611-A de la CLT sont toutefois très étendues dans la mesure où, d’une part, cet article se réfère explicitement à 14 points qui couvrent de nombreux aspects de la relation de travail, et où, d’autre part, cette liste, contrairement à celle qui figure à l’article 611-B est uniquement indicative («entre autres»), la possibilité d’écarter des dispositions législatives protectrices par le biais de la négociation collective, étant ainsi érigée en principe général.
La commission rappelle qu’elle estime que, si des dispositions législatives ciblées portant sur des aspects spécifiques des conditions de travail et prévoyant, de manière circonscrite et motivée, la possibilité d’y déroger par la voie de la négociation collective peuvent être compatibles avec la convention, une disposition qui établirait une possibilité générale d’écarter les règles protectrices de la législation du travail au moyen de la négociation collective serait en revanche contraire à l’objectif de promouvoir la négociation collective libre et volontaire posé par l’article 4 de la convention. Tout en soulignant l’importance d’obtenir, dans toute la mesure possible, un accord tripartite sur les règles de base de la négociation collective, la commission prie donc de nouveau le gouvernement de prendre, en consultation avec les partenaires sociaux représentatifs, les mesures nécessaires pour réviser les articles 611-A et 611-B de la CLT de manière à encadrer plus précisément les situations où des clauses dérogatoires de la législation pourraient être négociées ainsi que la portée de ces dernières. Prenant par ailleurs note des indications du gouvernement sur l’accroissement des conventions et accords collectifs signés lors des quatre premiers mois de 2019, la commission prie ce dernier de continuer à fournir des informations sur l’évolution du nombre de conventions et accords collectifs conclus dans le pays, y compris sur les conventions et accords qui contiennent des clauses dérogatoires à la législation en précisant la nature et la portée de ces dernières.
Articulation entre la négociation collective et les contrats de travail individuels. Dans ses commentaires précédents, la commission avait prié le gouvernement de prendre les mesures nécessaires afin d’assurer la mise en conformité avec la convention de l’article 444 de la CLT qui permet aux travailleurs titulaires d’un diplôme de l’enseignement supérieur et qui perçoivent un salaire au moins deux fois supérieur au plafond des prestations du régime général de sécurité sociale de déroger, par le biais de leurs contrats de travail individuels, aux dispositions des conventions collectives applicables.
La commission note que le gouvernement manifeste à cet égard que l’article 4 de la convention ne se réfère pas aux contrats individuels de travail et qu’il réitère que l’article 444 de la CLT concerne un groupe très réduit de travailleurs, généralement des cadres supérieurs qui ne représentent qu’environ 0,25 pour cent de la population. La commission note également la position des organisations d’employeurs CNI et CNT qui estiment que les dispositions de l’article 444 étendent les possibilités de négociation des travailleurs considérés. La commission note enfin la position exprimée par les organisations syndicales nationales et internationales qui réclament l’abrogation de ladite disposition.
La commission rappelle à nouveau que l’obligation de promotion de la négociation collective posée par l’article 4 de la convention requiert que la négociation individuelle des clauses du contrat de travail ne puisse déroger aux droits et garanties fixées par les conventions collectives applicables, étant entendu que les contrats de travail peuvent toujours prévoir des conditions de travail et d’emploi plus favorables. La commission réitère également que ce principe est par ailleurs explicitement exprimé dans le paragraphe 3 de la recommandation (nº 91) sur les conventions collectives, 1951. Tout en soulignant de nouveau que les mécanismes de négociation collective sont en mesure de prendre en compte les besoins et intérêts spécifiques de catégories différenciées de travailleurs qui peuvent, si elles le souhaitent, être représentées par des organisations qui leur sont propres, la commission rappelle que la présente convention est pleinement applicable aux travailleurs couverts par l’article 444 de la CLT dans la mesure où, en vertu de ses articles 5 et 6, seuls peuvent être exclus de son champ d’application les membres de la police et des forces armées (article 5) ainsi que les fonctionnaires commis à l’administration de l’Etat (article 6). La commission réaffirme en conséquence que la convention ne permet pas une exclusion de son champ d’application fondée sur le niveau de la rémunération des travailleurs. La commission prie donc à nouveau le gouvernement de prendre, après consultation des partenaires sociaux représentatifs concernés, les mesures nécessaires afin d’assurer la mise en conformité de l’article 444 de la CLT avec la convention. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur toute avancée à cet égard.
Champ d’application de la convention. Travailleurs autonomes ou indépendants. Dans ses commentaires précédents, sur la base des observations d’organisations syndicales alléguant que l’extension de la définition des travailleurs indépendants découlant du nouvel article 442-B de la CLT aurait pour effet d’exclure une catégorie importante de travailleurs des droits reconnus par la convention, la commission avait invité le gouvernement à tenir des consultations avec toutes les parties concernées dans le but de garantir que les travailleurs autonomes ou indépendants soient autorisés à participer à une négociation collective libre et volontaire, tout en identifiant les adaptations appropriées à introduire aux mécanismes de négociation collective afin de faciliter leur application à ces catégories de travailleurs.
Indépendamment de la définition des travailleurs autonomes ou indépendants retenue par l’article 442-B de la CLT, la commission rappelle que tous les travailleurs, y compris les travailleurs autonomes ou indépendants, sont couverts par les dispositions de la convention. A cet égard, la commission accueille favorablement les indications du gouvernement selon lesquelles il résulte de l’article 511 de la CLT, qui reconnaît aux travailleurs autonomes le droit de se syndiquer, que ces derniers jouissent également du droit de négociation collective. La commission relève également à cet égard la position concordante exprimée par la CNT et de la CNI. Dans le même temps, la commission relève la demande formulée par la CSI et sept fédérations syndicales internationales pour que toutes les mesures soient prises afin d’assurer l’accès effectif des travailleurs autonomes et indépendants à la négociation collective libre et volontaire. La commission invite le gouvernement à fournir des exemples de conventions ou accords collectifs négociés par des organisations représentant des travailleurs autonomes ou indépendants ou, à tout le moins, dont le champ d’application couvre ces catégories de travailleurs.
Articulation entre les différents niveaux de la négociation collective. Ayant relevé que, selon l’article 620 de la CLT tel que révisé par la loi no 13467, les conditions établies dans les accords collectifs de travail (conclus au niveau d’une ou plusieurs entreprises) prévalent toujours sur celles contenues dans les conventions collectives de travail (conclues à un niveau plus large, telles qu’un secteur d’activité ou une profession), la commission avait prié le gouvernement d’indiquer de quelle manière est garanti le respect des engagements pris par les partenaires sociaux dans le cadre des conventions conclues au niveau du secteur d’activité ou de la profession et de fournir des informations sur l’impact de l’article 620 de la CLT sur le recours respectif à la négociation de conventions collectives et d’accords collectifs ainsi que sur le taux de couverture global de la négociation collective dans le pays.
La commission note que le gouvernement se limite à signaler à cet égard que l’objectif de l’article 620 de la CLT est de permettre la conclusion d’accords se situant au plus près des réalités quotidiennes des travailleurs et de l’entreprise. La commission relève également que la CNI et la CNT considèrent que la primauté accordée dans tous les cas aux accords collectifs sur les conventions collectives dotées d’un champ d’application plus large est pleinement conforme aux dispositions de la convention dans la mesure où cette dernière n’établit aucun ordre de préférence ou de hiérarchie entre les différents niveaux de négociation.
La commission rappelle à nouveau qu’il résulte de l’article 4 de la convention que la négociation collective doit être promue à tous les niveaux et que, selon le principe général énoncé au paragraphe 3(1) de la recommandation no 91, toute convention collective devrait lier ses signataires ainsi que les personnes au nom desquelles elle est conclue. Constatant l’absence de réponses du gouvernement à cet égard, la commission prie à nouveau le gouvernement: i) d’indiquer de quelle manière est garanti le respect des engagements pris par les partenaires sociaux dans le cadre des conventions conclues au niveau de la branche ou de la profession; et ii) de fournir des informations sur l’impact de l’article 620 de la CLT sur le recours respectif à la négociation de conventions collectives et d’accords collectifs ainsi que sur le taux de couverture global de la négociation collective dans le pays.
Article 4. Promotion de la négociation collective libre et volontaire. Soumission des conventions collectives à la politique économique et financière. La commission rappelle que, depuis des années, elle souligne la nécessité d’abroger l’article 623 de la CLT en vertu duquel sont déclarées nulles et non avenues les dispositions d’une convention ou d’un accord qui seraient contraires aux normes régissant la politique économique et financière du gouvernement ou la politique salariale en vigueur. A ce sujet, soulignant que l’article 4 de la convention exige de promouvoir la négociation collective libre et volontaire, la commission avait rappelé que: i) les pouvoirs publics peuvent élaborer des mécanismes de discussions et d’échanges en vue d’inciter les parties à la négociation à tenir compte volontairement de considérations relatives à la politique économique et sociale du gouvernement et à la sauvegarde de l’intérêt général; et ii) les restrictions à la négociation collective sur les questions économiques ne devraient être possibles que dans des circonstances exceptionnelles, c’est-à-dire dans des cas de difficultés graves et insurmontables, en vue du maintien des emplois et de la continuité des entreprises et des institutions. En l’absence de réponse du gouvernement sur cette question et relevant que la réforme de 2017 de la législation du travail n’a pas éliminé l’article précité, la commission prie à nouveau le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier la législation dans le sens indiqué et de communiquer des informations dans son prochain rapport sur toute mesure prise à cet égard.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2018, publiée 108ème session CIT (2019)

Article 4 de la convention. Promotion de la négociation collective. Durée des conventions et accords collectifs. La commission note les observations de la Confédération syndicale internationale (CSI) et de la Centrale unique des travailleurs (CTU) selon lesquelles l’article 614 de la Consolidation des lois du travail (CLT) et relatif à la durée des conventions serait contraire à la convention. La commission observe à cet égard que le paragraphe 3 de cette disposition fixe à deux ans au plus la durée des conventions et accords collectifs et interdit l’inclusion dans lesdits accords et conventions de clauses prévoyant le maintien de leurs effets en cas de leur non-renouvellement. Soulignant que la fixation de la durée des conventions collectives et de leurs effets entre les parties est couverte par le principe de la négociation collective libre et volontaire promu par la convention, la commission considère que toute dérogation à cette règle devrait dans toute la mesure possible refléter un accord tripartite. La commission invite le gouvernement à entamer des consultations avec les organisations d’employeurs et de travailleurs représentatives sur le contenu de l’article 614 de la CLT. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur tout élément à cet égard.

Observation (CEACR) - adoptée 2018, publiée 108ème session CIT (2019)

La commission prend note des observations de: i) l’Association nationale des magistrats de la justice du travail (ANAMATRA), reçues le 1er juin 2018; ii) la Confédération syndicale internationale (CSI), reçues le 1er septembre 2018; iii) la Centrale unique des travailleurs (CUT), envoyées conjointement avec la CSI et également reçues le 1er septembre 2018. La commission note que ces observations, présentées à la fois en vertu de la présente convention et de la convention (nº 154) sur la négociation collective, 1981, concernent les aspects de la loi no 13467 relatifs à la négociation collective.
La commission prend également note des observations conjointes de l’Organisation internationale des employeurs (OIE) et de la Confédération nationale de l’industrie (CNI), reçues le 1er septembre 2018, qui portent également sur les aspects de la loi no 13467 relatifs à la négociation collective examinés par la commission lors de son précédent commentaire.

Suivi des conclusions de la Commission de l’application des normes (Conférence internationale du Travail, 107e session, mai-juin 2018)

La commission prend note des discussions ayant eu lieu à la Commission de l’application des normes de la Conférence (ci-après: la Commission de la Conférence) en juin 2018 sur l’application de la convention par le Brésil. La commission note en particulier que la Commission de la Conférence, prenant en compte le fait que la commission d’experts a examiné ce cas en dehors du cycle régulier de présentation des rapports, considérant les éléments présentés oralement par le gouvernement devant la commission concernant la réforme de la législation du travail et la conformité de celle-ci avec ses obligations au titre de la convention, et la discussion qui a suivi, a recommandé au gouvernement de: i) fournir des informations et une analyse sur l’application des principes de la négociation collective libre et volontaire dans la nouvelle réforme de la législation du travail; et ii) fournir des informations sur les consultations tripartites avec les partenaires sociaux à propos de la réforme de la législation du travail.
Article 4 de la convention. Promotion de la négociation collective. Adoption de la loi no 13467. La commission prend note des indications du gouvernement concernant l’examen anticipé de l’application de la convention par la commission en 2017. La commission note que le gouvernement manifeste que: i) le mandat de la commission a pour objectif d’analyser l’application des conventions de l’OIT par les Etats Membres en droit et en pratique tout en prenant en compte les différentes réalités et systèmes juridiques nationaux; ii) dans ce sens, tel que mentionné lors de la discussion devant la Commission de la Conférence, le gouvernement aurait préféré que l’examen de la convention se déroule dans le cadre du cycle régulier de rapports afin qu’un temps suffisant se soit écoulé pour évaluer dans la pratique l’application de la loi. La commission souligne à cet égard que, en 2017, après avoir reçu des observations à la fois syndicales et patronales sur le processus de réforme de la législation du travail et ayant pris note des affirmations des organisations syndicales que l’adoption de la loi no 13467 était susceptible d’affecter fortement l’exercice du droit fondamental à la négociation collective, elle avait considéré approprié, en application des critères qu’elle a établis en la matière, d’examiner l’application de la convention par le Brésil de manière anticipée.
Articulation entre la négociation collective et la loi. Dans son commentaire précédent, la commission avait observé que, en vertu de la loi no 13467 adoptée le 13 novembre 2017, le nouvel article 611-A de la Consolidation des lois du travail (CLT) avait introduit le principe général selon lequel les conventions et accords collectifs prévalent sur la législation, permettant ainsi, par le biais de la négociation collective, de déroger aux dispositions protectrices de la législation, avec pour seule limite les droits constitutionnels visés à l’article 611-B de la CLT. Considérant que le principe mentionné était contraire à l’objectif de promouvoir la négociation collective libre et volontaire, la commission avait prié le gouvernement d’examiner, en consultation avec les partenaires sociaux, la révision des articles 611-A et 611-B afin de les mettre en conformité avec l’article 4 de la convention.
A cet égard, la commission note en premier lieu les observations des organisations syndicales nationales et internationales concernant la portée et l’impact du principe posé par l’article 611-A de la CLT. La commission note en particulier que les organisations syndicales allèguent, en s’appuyant entre autres sur un rapport du ministère public du Travail brésilien (Ministério Público do Trabalho) que les possibilités de mise à l’écart des dispositions protectrices de la législation par le biais d’accords et de conventions collectives sont particulièrement larges et importantes dans la mesure où: i) la liste des matières dérogeables posée par l’article 611-A de la CLT est définie comme non-exhaustive; ii) l’article 611-A prévoit explicitement que l’absence de contrepartie à la mise à l’écart d’une protection légale ne constituera pas une cause de nullité de la clause conventionnelle; iii) les dérogations rendues possibles par l’article 611-A peuvent être le fruit d’accords d’entreprise qui eux-mêmes, en vertu de l’article 620 de la CLT, prévalent sur les conventions collectives couvrant un champ plus vaste; iv) les matières explicitement définies comme dérogeables par l’article 611-A couvrent des éléments de base de la protection des travailleurs tels que les temps de travail et de repos, y compris la réglementation du travail et de sa durée en milieu insalubre; v) en violation des principes de base du droit international du travail, les articles 611-A et 611-B de la CLT déterminent que les questions de temps de travail et de repos ne seront pas considérées comme relevant de la santé et sécurité au travail; vi) la possibilité de déroger aux dispositions légales encadrant le système de rémunération basé sur la productivité du travail peut avoir des conséquences dangereuses sur la durée du travail et la santé des travailleurs; et vii) le respect des conventions internationales du travail ratifiées par le Brésil n’est pas signalé comme constituant une limite aux possibilités de déroger à la législation du travail par voie de négociation collective, ce qui met particulièrement en danger l’application de la convention (no 1) sur la durée du travail (industrie), 1919, de la convention (no 30) sur la durée du travail (commerce et bureaux), 1930, et de la convention (no 155) sur la sécurité et la santé des travailleurs, 1981, de l’OIT.
La commission note en deuxième lieu que les organisations syndicales affirment que la faculté de mettre à l’écart les dispositions protectrices de la législation crée les conditions d’une compétition vers le bas entre employeurs en matière de conditions de travail et d’emploi, ce qui inhibera la pratique de la négociation collective comme instrument d’amélioration des conditions de travail. La commission note également que le rapport du ministère public du Travail annexé par la CUT affirme que, dans le contexte particulier des relations collectives de travail du Brésil, le principe posé par l’article 611-A de la CLT est susceptible de soumettre les représentants syndicaux à des menaces et pressions afin qu’ils acceptent des dérogations à la législation, et qu’autoriser tous les syndicats, indépendamment de leur représentativité effective, de négocier en dessous de la protection légale pourrait constituer une incitation à la corruption dans les relations collectives de travail. La commission note enfin que les organisations syndicales affirment que les premières statistiques disponibles confirment les craintes précédemment exprimées sur les conséquences néfastes de l’instauration de la primauté des accords et conventions collectives sur la législation. La commission note à cet égard différentes études fournies par les organisations syndicales indiquant que le nombre d’accords et conventions collectifs signés lors du premier semestre 2018 serait entre 30 et 45 pour cent inférieur à celui du premier semestre de 2017.
La commission note également les observations des organisations d’employeurs qui affirment que: i) le principe de la négociation collective libre et volontaire est pleinement garanti par la Constitution brésilienne qui prévoit également dans son article 7 des hypothèses où il est possible, par le biais de la négociation collective, de flexibiliser certains droits; ii) la reconnaissance de la primauté de la négociation collective sur la législation était nécessaire dans un contexte jusque-là marqué par un interventionnisme excessif du pouvoir judiciaire dans les accords signés par les partenaires sociaux; iii) la primauté de la négociation sur la loi assurera donc une plus grande sécurité juridique aux partenaires sociaux, ce qui permettra de promouvoir la négociation collective; iv) la primauté de la négociation collective sur la loi est toutefois loin d’être absolue puisque l’article 611-B de la CLT établit une longue liste de droits indérogeables, tels que la durée normale du travail journalier (8 heures) et hebdomadaire (44 heures) ou encore les 50 pour cent de rémunération additionnelle pour les heures supplémentaires; et v) la négociation collective reste entièrement libre et volontaire puisque les syndicats peuvent parfaitement décider de ne pas signer un accord contenant des dérogations à la législation.
La commission note finalement les commentaires du gouvernement concernant en premier lieu le contenu et la portée des articles 611-A et 611-B de la CLT. Le gouvernement affirme à cet égard que: i) la réforme renforce le rôle et la valeur de la négociation collective en accroissant son champ matériel d’intervention, ce qui est pleinement conforme aux finalités des conventions de l’OIT en la matière; ii) la primauté reconnue aux accords et conventions collectifs sur la loi renforce la sécurité juridique de la négociation collective, élément indispensable au vu de la traditionnelle ingérence du pouvoir judiciaire brésilien en la matière et permet d’assouplir une législation du travail excessivement détaillée; iii) la réforme assure dans le même temps la protection de nombreux droits contenus dans l’article 611-B de la CLT; iv) la possibilité de déroger à des dispositions législatives ponctuelles ne signifie pas que l’accord ou la convention collective ne soit pas dans son ensemble plus favorable aux travailleurs; v) est ainsi consacrée législativement la position du Tribunal suprême fédéral qui a reconnu dans un arrêt récent la primauté de la négociation collective dès lors qu’un «socle minimal de civilisation» reste garanti par la législation; vi) la reconnaissance de la primauté de la négociation sur la législation va dans le sens de ce qui avait été proposé par un syndicat métallurgique en 2011; et vii) l’article 611-A n’oblige en aucun cas à ce que les syndicats signent des accords qui écartent les dispositions légales protectrices, les partenaires sociaux pouvant choisir de continuer à être régis, lorsque cela est dans l’intérêt des parties, par les dispositions légales. La commission note également les considérations du gouvernement sur le sens et la portée de la convention en matière de négociation collective. La commission note à cet égard que le gouvernement affirme que: i) rien dans l’article 4 de la convention ne permet d’établir de lien entre les contenus respectifs des conventions collectives et de la législation, l’unique but de la convention étant de promouvoir la négociation collective; ii) il en va de même de l’article 2 de la convention no 154 qui définit la finalité de la négociation collective et dont le seul but consiste à nouveau à permettre son plus ample champ d’application; iii) il n’est pas juridiquement fondé de se référer aux travaux préparatoires de la convention no 154 pour interpréter la convention no 98; et iv) il n’y a de toute façon pas lieu d’avoir recours aux travaux préparatoires dans le cas de l’article 4 de la convention dans la mesure où, en vertu de l’article 32 de la Convention de Vienne sur le droit des traités, le recours aux travaux préparatoires constitue uniquement un moyen complémentaire d’interprétation auquel il convient d’avoir recours soit pour confirmer les résultats des règles générales d’interprétation, soit quand ces dernières conduisent à un résultat ambigu, obscur ou manifestement déraisonnable, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.
La commission prend bonne note des informations fournies tant par les organisations d’employeurs et de travailleurs que par le gouvernement sur les articles 611-A et 611-B de la CLT et, en particulier, sur les liens entre lesdites dispositions et les obligations découlant de la convention, sur la portée des dérogations à la législation par le biais de la négociation collective rendues possibles par l’article 611-A ainsi que sur les limites établies à cet égard par l’article 611-B. La commission observe qu’il ressort de ces éléments que: i) la possibilité de dérogation aux dispositions protectrices de la législation par le biais de la négociation collective n’est pas absolue puisque l’article 611-B établit une liste limitative de 30 droits (comprenant par exemple le salaire minimum, la durée normale du travail journalier (8 heures) et hebdomadaire (44 heures) ou encore le pourcentage de rémunération additionnelle pour les heures supplémentaires), fondés sur le contenu de la Constitution brésilienne, qui ne peuvent être écartés par le biais d’accords ou de conventions collectives; ii) les facultés de dérogation à la législation ouvertes par l’article 611-A sont toutefois très étendues dans la mesure où, d’une part, les 14 points explicitement mentionnés dans cet article couvrent de nombreux aspects de la relation de travail, et où, d’autre part, cette liste, contrairement à celle qui figure à l’article 611-B est uniquement indicative («entre autres»). A la lumière de ces éléments, la commission constate que, même si elle est limitée par un nombre significatif d’exceptions, la possibilité d’écarter des dispositions législatives protectrices par le biais de la négociation collective, érigée en principe général par l’article 611-A de la CLT, reste particulièrement large. Soulignant que l’article 4 de la convention, de la même manière que les conventions nos 151 et 154 également ratifiées par le Brésil, a pour objectif général de promouvoir la négociation collective pour trouver un accord en vue de conditions de travail plus favorables que celles prévues dans la législation, la commission rappelle qu’elle estime que l’introduction d’une possibilité générale de déroger par le biais de la négociation collective aux protections légales établies en faveur des travailleurs peut, dans la pratique, avoir un fort effet dissuasif sur l’exercice de ce droit et contribuer à délégitimer durablement ce mécanisme. Dans le cas d’espèce, la commission considère que, par leur ampleur, les dérogations permises par l’article 611-A de la CLT, qui peuvent être effectuées tant par une convention collective de branche que par un accord d’entreprise, risquent d’affecter la finalité et l’attractivité du mécanisme de négociation collective dans le pays, ou, à tout le moins, de modifier significativement la perception de ce dernier par les acteurs concernés et de compromettre de ce fait sa promotion et son exercice. A cet égard, la commission note avec préoccupation les données contenues dans des enquêtes fournies par les organisations syndicales concernant une baisse significative du nombre de conventions et accords collectifs signés dans le pays depuis l’entrée en vigueur de la réforme de la législation en novembre 2017. La commission note que le gouvernement mentionne à cet égard que les organisations syndicales continuent de négocier et de signer des conventions et accords collectifs.
Au vu des éléments antérieurs, la commission rappelle qu’elle estime que, si des dispositions législatives ciblées portant sur des aspects spécifiques des conditions de travail et prévoyant, de manière circonscrite et motivée, la possibilité d’y déroger par la voie de la négociation collective peuvent être compatibles avec la convention, une disposition qui établirait une possibilité générale de déroger à la législation du travail au moyen de la négociation collective serait en revanche contraire à l’objectif de promouvoir la négociation collective libre et volontaire posé par l’article 4 de la convention. Tout en soulignant l’importance d’obtenir, dans toute la mesure possible, un accord tripartite sur les règles de base de la négociation collective, la commission prie donc le gouvernement de prendre, en consultation avec les partenaires sociaux représentatifs, les mesures nécessaires pour réviser les articles 611-A et 611-B de la CLT de manière à encadrer plus précisément les situations où des clauses dérogatoires de la législation pourraient être négociées ainsi que la portée de ces dernières. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur toute avancée à cet égard. Elle le prie également de communiquer des éléments détaillés de l’évolution du nombre de conventions et accords collectifs conclus dans le pays ainsi que sur le nombre, le contenu et la portée des clauses dérogatoires à la législation inclus dans lesdits accords et conventions.
Articulation entre la négociation collective et les contrats de travail individuels. Dans ses commentaires précédents, la commission avait noté que, en vertu du nouvel article 444 de la CLT, les travailleurs titulaires d’un diplôme de l’enseignement supérieur qui perçoivent un salaire au moins deux fois supérieur au plafond des prestations du régime général de sécurité sociale (actuellement autour de 11 000 reais, soit approximativement 3 390 dollars des Etats-Unis) peuvent déroger, par le biais de leurs contrats de travail individuels, aux dispositions de la législation et des conventions collectives. La commission avait rappelé que les dispositions législatives permettant d’inclure dans les contrats de travail individuels des clauses contraires aux conventions collectives applicables (les contrats de travail individuels pouvant toujours contenir des clauses plus favorables aux travailleurs) ne sont pas compatibles avec l’obligation de promouvoir la négociation collective prescrite par l’article 4 de la convention. La commission avait de ce fait prié le gouvernement d’examiner, en consultation avec les partenaires sociaux, la révision de cette disposition afin de la mettre en conformité avec l’article 4 de la convention.
La commission note que, au sujet de l’article 444 de la CLT, le gouvernement manifeste que: i) cette disposition concerne une proportion très réduite de travailleurs (environ 2 pour cent de la population active) qui disposent de l’autonomie suffisante pour défendre adéquatement leurs droits dans le cadre d’une négociation individuelle; ii) le contenu des conventions collectives est généralement de peu d’utilité pour cette catégorie de salariés dans la mesure où leur situation n’est généralement pas couverte par l’objet des négociations collectives; iii) les travailleurs couverts par l’article 444 de la CLT continuent à bénéficier de la garantie des droits fondamentaux énumérés par l’article 611-B de la CLT; et iv) rien dans l’article 4 de la convention n’interdit que les contrats individuels de travail puissent déroger aux conventions collectives de travail. La commission rappelle à cet égard que l’obligation de promotion de la négociation collective posée par l’article 4 de la convention requiert que la négociation individuelle des clauses du contrat de travail ne puisse déroger aux conventions collectives applicables étant entendu que les contrats de travail peuvent toujours prévoir des conditions de travail et d’emploi plus favorables. La commission rappelle que ce principe est par ailleurs explicitement exprimé dans le paragraphe 3 de la recommandation (no 91) sur les conventions collectives, 1951. Tout en soulignant que les mécanismes de négociation collective sont en mesure de prendre en compte les besoins et intérêts spécifiques de catégories différenciées de travailleurs qui peuvent, si elles le souhaitent, être représentées par des organisations qui leur sont propres, la commission rappelle que la présente convention est pleinement applicable aux travailleurs couverts par l’article 444 de la CLT dans la mesure où, en vertu de ses articles 5 et 6, seuls peuvent être exclus du champ d’application les membres de la police et des forces armées (article 5) ainsi que les fonctionnaires commis à l’administration de l’Etat (article 6). La commission prie donc à nouveau le gouvernement de prendre, après consultation des partenaires sociaux représentatifs concernés, les mesures nécessaires afin d’assurer la mise en conformité de l’article 444 de la CLT avec la convention. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur toute avancée à cet égard.
Champ d’application de la convention. Travailleurs autonomes ou indépendants. Dans ses commentaires précédents, la commission avait prié le gouvernement de répondre aux organisations syndicales alléguant que l’extension de la définition des travailleurs indépendants découlant du nouvel article 442-B de la CLT aurait pour effet d’exclure une catégorie importante de travailleurs des droits reconnus par la convention. La commission note à cet égard que le gouvernement déclare que: i) la convention, même si elle ne contient pas de définition de la notion de travailleur, n’est par définition pas applicable aux travailleurs autonomes, la négociation collective constituant de surcroît un mécanisme peu adapté au caractère occasionnel et indépendant de leur activité; et ii) l’article 442-B de la CLT a pour seul but de clarifier les critères déjà existants de la législation brésilienne en matière de définition des travailleurs autonomes. La commission rappelle que l’article 4 de la convention prévoit le principe de la négociation collective libre et volontaire et l’autonomie des parties dans la négociation concernant tous les travailleurs et tous les employeurs couverts par la convention. En ce qui concerne les travailleurs indépendants, la commission rappelle que, dans son étude d’ensemble de 2012 sur les conventions fondamentales, paragraphe 209, elle a souligné que le droit de négociation collective devrait couvrir notamment les organisations de travailleurs indépendants. Dans le même temps, la commission est consciente du fait que les mécanismes de négociation collective appliqués dans les relations traditionnelles de travail risquent de ne pas être adaptés aux circonstances et aux conditions spécifiques des activités réalisées par les travailleurs indépendants. La commission invite donc le gouvernement à tenir des consultations avec toutes les parties concernées dans le but de garantir que tous les travailleurs, y compris les travailleurs autonomes ou indépendants, soient autorisés à participer à une négociation collective libre et volontaire. Considérant que de telles consultations sont de nature à permettre au gouvernement et aux partenaires sociaux concernés d’identifier les adaptations appropriées à introduire aux mécanismes de négociation collective afin de faciliter leur application aux travailleurs autonomes ou indépendants, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur les progrès accomplis à cet égard.
Articulation entre les différents niveaux de la négociation collective. La commission note les indications de la CSI relatives à l’article 620 de la CLT, tel que révisé par la loi no 13467. La commission observe que, selon cette disposition, les conditions établies dans les accords collectifs de travail (conclus selon la législation brésilienne au niveau d’une ou plusieurs entreprises) prévalent toujours sur celles contenues dans les conventions collectives de travail (conclues selon la législation brésilienne à un niveau plus large, telles que la branche ou la profession). La commission observe qu’il résulte de cette disposition que les clauses plus favorables aux travailleurs négociées au niveau d’une branche ou d’une profession seront dans tous les cas écartées par l’effet de clauses moins protectrices négociées au niveau de l’entreprise. Rappelant qu’il résulte de l’article 4 de la convention que la négociation collective doit être promue à tous les niveaux et que, selon le principe général énoncé au paragraphe 3(1) de la recommandation no 91, toute convention collective devrait lier ses signataires ainsi que les personnes au nom desquelles elle est conclue, la commission prie le gouvernement: i) d’indiquer de quelle manière est garanti le respect des engagements pris par les partenaires sociaux dans le cadre des conventions conclues au niveau de la branche ou de la profession; et ii) de fournir des informations sur l’impact de l’article 620 de la CLT sur le recours respectif à la négociation de conventions collectives et d’accords collectifs ainsi que sur le taux de couverture global de la négociation collective dans le pays.
Consultations préalables à l’adoption de la loi no 13467. La commission prend note des informations détaillées fournies à cet égard par le gouvernement et les partenaires sociaux et constate les appréciations différentes des organisations syndicales d’un côté et, de l’autre, des organisations patronales et du gouvernement. Tout en prenant bonne note des intenses débats ayant eu lieu, avec la participation d’organisations syndicales et patronales, au sein des deux chambres du Parlement, la commission ne dispose pas d’éléments indiquant que la discussion parlementaire ait été précédée d’un processus structuré de dialogue social tripartite destiné à construire des accords sur le contenu de la réforme. Compte tenu de la nécessaire mise en conformité de différents aspects de cette réforme avec la convention, la commission invite le gouvernement à entamer un ample dialogue avec les organisations représentatives d’employeurs et de travailleurs afin d’assurer que, dans toute la mesure possible, les réformes à apporter à la législation en matière de négociation collective font l’objet d’un consensus avec les partenaires sociaux. Rappelant que le gouvernement peut se prévaloir de l’assistance technique du Bureau, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur tout fait nouveau à cet égard.
Observation de 2016. Dans son précédent commentaire, la commission avait également prié le gouvernement de fournir des réponses détaillées au sujet des autres points contenus dans son observation de 2016 relatifs à: i) la protection adéquate contre la discrimination antisyndicale; ii) l’arbitrage obligatoire dans le contexte de l’obligation de promouvoir la négociation collective libre et volontaire; iii) le droit de négociation collective dans le secteur public; et iv) la subordination des conventions collectives à la politique économique et financière. La commission prie à nouveau le gouvernement de répondre à ces commentaires en indiquant particulièrement pour chacun d’eux les possibles impacts de la réforme de la législation du travail de 2017.
La commission soulève d’autres questions dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.

Observation (CEACR) - adoptée 2017, publiée 107ème session CIT (2018)

Adoption de la loi no 13.467. La commission prend note des observations conjointes de la Confédération syndicale internationale (CSI) et de la Centrale unique des travailleurs (CUT), reçues le 1er septembre 2017, ainsi que des observations de la Confédération nationale des carrières typiques de l’Etat (CONACATE), reçues le 28 août 2017. Elle note que les deux communications font référence à l’adoption, le 13 juillet 2017, de la loi no 13.467 portant réforme de la consolidation des lois du travail (CLT) et à l’impact de la nouvelle loi sur le respect de la convention. La commission note que, dans leurs observations, les différentes organisations syndicales précédemment mentionnées affirment que: i) le nouvel article 611-A de la CLT, qui introduit dans le système juridique brésilien la possibilité générale que, par le biais de la négociation collective, les droits et protections reconnus par la législation du travail en faveur des travailleurs puissent faire l’objet d’une dérogation à la baisse, contrevient aux dispositions et aux objectifs de la présente convention et de la convention (nº 154) sur la négociation collective, 1981; ii) le paragraphe 2 du nouvel article 611-A, en soulignant que l’absence de contrepartie ne constitue pas un motif de nullité des clauses des conventions et accords collectifs, même si ces dernières prévoient une dérogation aux droits reconnus par la loi, démontre que le système établi par la loi no 13.467 n’est pas fondé sur la négociation, mais sur l’abdication des droits; iii) le nouvel article 444 de la CLT viole lui aussi les conventions susmentionnées de l’OIT, en autorisant, pour les travailleurs titulaires d’un diplôme de l’enseignement supérieur qui perçoivent un salaire au moins deux fois supérieur au plafond des prestations du régime général de sécurité sociale, une dérogation individuelle aux dispositions de la législation et des conventions collectives; et iv) la création, par le nouvel article 444-B de la CLT, du statut du travailleur autonome exclusif, en permettant à cette disposition d’exclure la qualification de travailleur salarié même si le travailleur indépendant travaille exclusivement et à titre permanent pour une entreprise, supprime pour cette nouvelle catégorie de travailleurs les droits à la liberté syndicale et à la négociation collective reconnus par la législation du travail. Les organisations syndicales affirment enfin que les modifications législatives introduites sont d’une gravité inédite et sont contraires aux commentaires formulés par la commission dans son observation de 2016.
La commission prend note par ailleurs des observations conjointes de l’Organisation internationale des employeurs (OIE) et de la Confédération nationale de l’industrie (CNI), reçues le 1er septembre 2017, qui portent elles aussi sur la loi no 13.467 à l’égard de laquelle elles déclarent que: i) la loi a été précédée d’un large processus de discussion, avec la possibilité pour les principaux interlocuteurs sociaux du pays d’être entendus par le Parlement; ii) la loi vise à renforcer la négociation collective et l’application des conventions nos 98 et 154 en encourageant la négociation collective libre et volontaire et en apportant une plus grande sécurité juridique par la limitation des interventions de la justice du travail dans ce qui a été convenu par les partenaires sociaux; et iii) il n’est pas exact d’affirmer que la nouvelle loi renforce la négociation collective au détriment de la protection des travailleurs, car le nouvel article 611-A de la CLT prévoit que le contenu des conventions et accords collectifs doit respecter plus de 30 droits relatifs au travail reconnus dans la Constitution brésilienne.
Article 4 de la convention. Promotion de la négociation collective. Articulation entre la négociation collective et la loi. La commission note que la loi no 13.467, adoptée le 13 juillet 2017, révise de nombreux aspects de la CLT. La commission prend également note de la mesure provisoire no 808 du Président de la République du 14 novembre 2017, qui modifie provisoirement certains aspects de la loi no 13.467. Elle constate que, comme l’indiquent les observations des différents partenaires sociaux, en vertu de la nouvelle loi: i) les conventions et accords collectifs prévalent sur les dispositions légales en ce qui concerne, entre autres, une liste de 14 questions (art. 611-A de la CLT); et ii) les conventions et accords collectifs ne peuvent toutefois pas suspendre ou réduire les droits en ce qui concerne une liste fermée de 30 points (art. 611-B de la CLT). La commission note, d’une part, que cette liste fermée de 30 points se fonde sur les dispositions relatives au travail contenues dans la Constitution brésilienne. Elle note, d’autre part, que la liste des questions au sujet desquelles la négociation collective prévaut sur la loi couvre de nombreux aspects de la relation de travail et que cette liste, contrairement à celle qui figure à l’article 611-B, n’est qu’indicative («entre autres») et qu’il est donc possible de déroger par la négociation collective à toutes les dispositions légales, à la seule exception des droits relatifs au travail consacrés par la Constitution nationale.
La commission rappelle qu’elle a souligné dans ses commentaires précédents, en se référant à plusieurs projets de lois présentés au Congrès en 2015 et en avril 2016, que, si des dispositions législatives ponctuelles, relatives à des aspects particuliers des conditions de travail, peuvent prévoir de manière circonscrite et motivée la possibilité d’y déroger par la voie de la négociation collective, une disposition qui instituerait la possibilité générale de déroger à la législation du travail au moyen de la négociation collective serait contraire à l’objectif de promouvoir la négociation collective libre et volontaire prévue par la convention. La commission avait prié le gouvernement de tenir pleinement compte de la portée de l’article 4 de la convention à cet égard. La commission note avec préoccupation que le nouvel article 611-A de la CLT pose comme principe général que les conventions et accords collectifs prévalent sur la législation, permettant ainsi, par le biais de la négociation collective, de déroger aux dispositions protectrices de la législation, avec pour seule limite les droits constitutionnels visés à l’article 611-B de la CLT. La commission rappelle de nouveau à cet égard que l’objectif général des conventions nos 98 et 154, ainsi que de la convention (nº 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978, est la promotion de la négociation collective pour trouver un accord sur des conditions de travail plus favorables que celles prévues par la législation (voir étude d’ensemble sur la négociation collective dans la fonction publique, 2013, paragr. 298) et que la définition de la négociation collective comme processus visant à améliorer la protection des travailleurs prévue par la législation est incluse dans les travaux préparatoires de la convention no 154, instrument dont le but, tel qu’il est défini dans son préambule, est de contribuer à la réalisation des objectifs de la convention no 98. Sur la base de ce qui précède, tout en le priant de fournir ses commentaires aux observations des partenaires sociaux concernant les articles 611-A et 611-B de la CLT, la commission prie le gouvernement d’examiner, en consultation avec les partenaires sociaux, la révision des dispositions susmentionnées afin de les mettre en conformité avec l’article 4 de la convention.
Articulation entre la négociation collective et les contrats de travail individuels. La commission note que, en vertu du nouvel article 442 de la CLT, les travailleurs titulaires d’un diplôme de l’enseignement supérieur qui perçoivent un salaire au moins deux fois supérieur au plafond des prestations du régime général de sécurité sociale (actuellement autour de 11 000 reals, soit 3 390 dollars des Etats Unis) peuvent déroger, par le biais de leurs contrats de travail individuels, aux dispositions de la législation et des conventions collectives. La commission rappelle que les dispositions législatives permettant aux contrats de travail individuels de contenir des clauses contraires à celles contenues dans les conventions applicables (les contrats de travail individuels pouvant toujours contenir des clauses plus favorables aux travailleurs) sont contraires à l’obligation de promouvoir la négociation collective prescrite par l’article 4 de la convention. Tout en le priant de transmettre ses commentaires en réponse aux observations des partenaires sociaux concernant l’article 442 de la CLT, la commission prie par conséquent le gouvernement d’examiner, en consultation avec les partenaires sociaux, la révision de cette disposition afin de la mettre en conformité avec l’article 4 de la convention.
Champ d’application de la convention. La commission prend note des observations des organisations syndicales alléguant que l’extension de la définition des travailleurs indépendants en vertu du nouvel article 444-B de la CLT aura pour effet d’exclure les travailleurs couverts par cette définition des droits syndicaux reconnus tant par la législation nationale du travail que par la convention. Rappelant que la convention s’applique à tous les travailleurs, à l’exception possible de la police, des forces armées (article 5) et des fonctionnaires commis à l’administration de l’Etat (article 6), la commission prie le gouvernement de communiquer ses commentaires sur les observations des organisations syndicales concernant l’impact de l’article 444-B de la CLT. La commission prie en outre le gouvernement de fournir des informations sur les autres aspects de la loi no 13.467 relatifs aux droits reconnus par la convention.
La commission invite le gouvernement à fournir, dans son prochain rapport, des réponses détaillées aux présents commentaires, ainsi qu’aux autres points contenus dans l’observation de 2016 relative à la convention.
[Le gouvernement est prié de répondre de manière complète aux présents commentaires en 2018.]

Observation (CEACR) - adoptée 2016, publiée 106ème session CIT (2017)

La commission prend note des observations de la Confédération nationale des professions libérales (CNPL), reçues le 15 septembre 2016, qui portent sur des questions traitées par la commission dans la présente observation. La commission prend note également des observations de la Confédération syndicale internationale (CSI), reçues le 1er septembre 2014, qui portent sur des questions traitées dans la présente observation ainsi que sur des allégations de discrimination antisyndicale, en particulier des licenciements dans une entreprise publique de l’Etat de São Paulo et dans une chaîne de télévision. Au sujet de ces allégations, la commission note que le gouvernement souligne que l’ordre juridique brésilien compte des mécanismes appropriés qui permettent de sanctionner les actes de discrimination antisyndicale qui ont été dénoncés. La commission prie le gouvernement d’indiquer les éventuelles décisions du ministère public et des tribunaux du travail dans les cas dénoncés par la CSI.
Article 1 de la convention. Protection adéquate contre la discrimination antisyndicale. La commission avait précédemment noté que, dans le cadre de plusieurs plaintes examinées par le Comité de la liberté syndicale (cas nos 2635, 2636 et 2646) qui faisaient état d’actes de discrimination antisyndicale, le gouvernement avait indiqué que, «bien que la liberté syndicale soit un droit consacré par la Constitution, la législation nationale ne couvre pas les pratiques antisyndicales, ce qui empêche le ministère du Travail et de l’Emploi de prendre des mesures efficaces à caractère préventif et répressif pour lutter contre des pratiques telles que celles dénoncées dans le cas examiné». Sur la base des informations fournies par le gouvernement, la commission avait exprimé l’espoir que, dans le cadre du Conseil des relations du travail (CRT), un projet de loi pourrait être élaboré afin d’établir expressément des recours et des sanctions suffisamment dissuasives contre les actes de discrimination antisyndicale. La commission note avec regret que le gouvernement fait état de l’absence de progrès substantiels dans l’élaboration du projet de loi susmentionné. La commission prie donc à nouveau le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que la législation établisse expressément des recours et des sanctions suffisamment dissuasifs contre les actes de discrimination antisyndicale. La commission prie le gouvernement d’indiquer tout fait nouveau à cet égard.
Article 4. Promotion de la négociation collective libre et volontaire. Arbitrage obligatoire. Dans ses commentaires précédents, la commission avait demandé au gouvernement d’indiquer si, dans la pratique, le «dissídio coletivo», assorti d’un arbitrage judiciaire obligatoire à la demande d’une seule des parties, était encore possible et de fournir des informations sur l’évolution du projet de réforme syndicale mentionné dans les rapports précédents. A ce sujet, la commission note que le gouvernement: i) réaffirme que, depuis l’adoption de l’amendement constitutionnel no 45 de 2004, l’intervention de la justice dans les processus de négociation collective n’est possible que lorsque les parties le demandent d’un commun accord; et ii) indique que le Congrès national continue d’examiner la proposition d’amendement constitutionnel no 369/2005 qui vise à amender les articles 8, 11, 37 et 114 de la Constitution fédérale, afin de promouvoir la négociation collective et de mettre fin à l’unicité syndicale. La commission prie le gouvernement de continuer à donner des informations sur tout progrès dans l’examen du projet de loi susmentionné.
Droit de négociation collective dans le secteur public. La commission rappelle que, depuis de nombreuses années, elle souligne la nécessité d’assurer aux fonctionnaires qui ne sont pas commis à l’administration de l’Etat la jouissance du droit de négociation collective, conformément aux articles 4 et 6 de la convention. A ce sujet, la commission note que: i) le gouvernement indique que la proposition d’amendement constitutionnel no 369/2005 susmentionnée porte également sur la négociation collective dans le secteur public; ii) la CNPL rappelle que, en vertu de l’ordre juridique en vigueur, les agents publics, qui travaillent dans des entreprises publiques et des sociétés d’économie mixte, sont couverts par la Codification des lois du travail (CLT) et jouissent donc du droit de négociation collective, alors que les fonctionnaires qui relèvent d’un statut qui leur est propre ne jouissent pas, en application de la loi, de ce droit; et iii) plusieurs projets de loi visant à réglementer la négociation collective dans le secteur public sont actuellement examinés par le Congrès. La commission encourage le gouvernement à prendre des initiatives en matière législative et veut croire que les projets de loi et d’amendement constitutionnel actuellement examinés prendront pleinement en compte les obligations entraînées par la convention, ainsi que la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978, et la convention (no 154) sur la négociation collective, 1981. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur tout progrès à cet égard et rappelle que, dans ce contexte, le gouvernement peut recourir, s’il le souhaite, à l’assistance technique du Bureau.
Soumission des conventions collectives à la politique économique et financière. La commission rappelle que, depuis des années, elle souligne la nécessité d’abroger l’article 623 de la CLT en vertu duquel sont déclarées nulles et non avenues les dispositions d’une convention ou d’un accord qui seraient contraires aux normes régissant la politique économique et financière du gouvernement ou la politique salariale en vigueur. De même, la commission demande depuis un certain temps au gouvernement de prendre des mesures pour modifier la loi no 10192 de février 2001 sur les mesures complémentaires au Plan Real, dont l’article 13 interdit de fixer dans les accords, conventions ou «dissídios coletivos» des clauses de réajustement ou de correction automatique des salaires en fonction de l’indice des prix. A ce sujet, la commission note que: i) dans ses observations de 2014, la CSI a déclaré que les dispositions susmentionnées sont utilisées pour imposer des restrictions à la négociation collective sur les salaires dans les entreprises publiques et mixtes; ii) le gouvernement indique que les restrictions à la portée des conventions collectives sont exceptionnelles, principalement dans le contexte de la prestation de services publics; et iii) le gouvernement ajoute que, dans ce contexte, la protection constitutionnelle de l’intérêt général peut exiger que les clauses économiques des conventions collectives ne compromettent pas l’équilibre des salaires sur le marché ni le niveau des prix dans l’économie du pays.
A ce sujet, soulignant que l’article 4 de la convention exige de promouvoir la négociation collective libre et volontaire, la commission rappelle que: i) les pouvoirs publics peuvent élaborer des mécanismes de discussions et d’échanges en vue d’inciter les parties à la négociation à tenir compte volontairement de considérations relatives à la politique économique et sociale du gouvernement et à la sauvegarde de l’intérêt général; et ii) les restrictions à la négociation collective sur les questions économiques ne devraient être possibles que dans des circonstances exceptionnelles, c’est-à-dire dans des cas de difficultés graves et insurmontables, en vue du maintien des emplois et de la continuité des entreprises et des institutions. La commission prie donc à nouveau le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier la législation dans le sens indiqué et de communiquer des informations dans son prochain rapport sur toute mesure prise à cet égard.
Hiérarchie entre la loi et la négociation collective. La commission note que plusieurs projets de loi, actuellement examinés par le Congrès, prévoient la révision de l’article 618 de la CLT afin que les conditions de travail fixées par une convention ou un accord collectif l’emportent sur les dispositions de la loi, à condition que les stipulations de la convention collective n’aillent pas à l’encontre de la Constitution fédérale et des normes de santé et de sécurité du travail. La commission note que ces projets de loi supposeraient une modification significative de la hiérarchie entre la loi et les conventions et accords collectifs en permettant d’une manière générale de déroger in pejus aux protections établies par la législation au moyen de la négociation collective. La Commission observe de surcroît que la possibilité de déroger aux dispositions législatives accordant une protection aux travailleurs par le biais de la négociation collective fait actuellement l’objet de débats devant les hautes instances judiciaires du pays. A ce sujet, la commission rappelle que l’objectif général des conventions nos 98, 151 et 154 est de promouvoir la négociation collective pour trouver un accord en vue de conditions de travail plus favorables que celles prévues dans la législation (voir étude d’ensemble intitulée La négociation collective dans la fonction publique: Un chemin à suivre, 2013, paragr. 298). La commission souligne que la définition de la négociation collective en tant que processus destiné à améliorer la protection des travailleurs garantie par la législation figure dans les travaux préparatoires de la convention no 154, instrument qui a pour but, comme indiqué dans son préambule, de contribuer à la réalisation des objectifs fixés par la convention no 98. Au cours de ces discussions préparatoires, il a été considéré qu’il n’était pas nécessaire d’expliciter dans la nouvelle convention le principe général selon lequel la négociation collective ne devrait pas avoir pour effet de fixer des conditions moins favorables que celles établies dans la loi – le comité tripartite de la Conférence chargé d’examiner le projet de convention avait estimé que cela était clair et que par conséquent il n’était pas nécessaire d’y faire expressément mention.
D’un point de vue pratique, la commission estime que l’introduction de la possibilité générale d’abaisser par le biais de la négociation collective les protections établies en faveur des travailleurs dans la législation aurait un fort effet dissuasif sur l’exercice de ce droit et pourrait contribuer à délégitimer durablement ce mécanisme. De même, la commission souligne que, bien que des dispositions législatives ponctuelles sur des aspects spécifiques des conditions de travail puissent prévoir, de manière circonscrite et motivée, la possibilité d’y déroger par la voie de la négociation collective, une disposition qui instituerait la possibilité de déroger d’une manière générale à la législation du travail au moyen de la négociation collective serait contraire à l’objectif de promouvoir la négociation collective libre et volontaire prévue par la convention. La commission veut croire que le contenu et la portée de l’article 4 de la convention seront pleinement pris en considération tant dans le cadre de l’examen des projets de loi susmentionnés que dans celui des recours judiciaires en attente de résolution. La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur toute évolution à cet égard.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2013, publiée 103ème session CIT (2014)

Article 1 de la convention. Protection contre la discrimination antisyndicale. La commission rappelle que, dans sa demande directe précédente, elle avait exprimé l’espoir que, dans le cadre des travaux du Conseil des relations de travail (CRT), il serait possible d’élaborer un projet de loi au moyen duquel seraient prévues de manière explicite des voies de recours ainsi que des sanctions suffisamment dissuasives contre les actes de discrimination antisyndicale. La commission note que, selon le gouvernement, dans le cadre du CRT le débat a progressé en ce qui concerne un projet de loi interdisant les pratiques antisyndicales dans le pays et que, dans ce sens, la question de la discrimination antisyndicale a été abordée au cours d’un séminaire organisé par le ministère du Travail et de l’Emploi, avec l’aide de l’OIT. La commission prie le gouvernement d’indiquer dans son prochain rapport tout progrès à ce sujet. Elle lui rappelle qu’il peut recourir à l’assistance technique du Bureau s’il le souhaite.
Article 4. Promotion de la négociation collective. Dans ses commentaires précédents, la commission avait demandé au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier la loi no 10192 de février 2001 relative à des mesures complémentaires au Plan Real, qui prévoit à son article 13 qu’il est interdit d’insérer dans les accords, conventions ou «dissidios coletivos» des clauses de réajustement ou de correction automatique des salaires en fonction de l’indice des prix, afin que les parties à la négociation collective puissent décider librement de prévoir ou non un réajustement automatique des salaires, en particulier dans les conventions collectives conclues pour une longue durée. Tout en notant que le gouvernement ne se réfère pas à cette question dans son rapport, la commission rappelle que les parties à la négociation collective devraient pouvoir décider librement et de leur propre initiative si elles veulent conclure des réajustements automatiques des salaires, en particulier dans les conventions de longue durée, et que les limitations aux négociations collectives en ce qui concerne des questions économiques ne devraient être possibles que dans des circonstances exceptionnelles pour protéger les postes de travail et la viabilité des entreprises ou institutions. La commission prie de nouveau le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier la législation dans le sens indiqué, étant donné que cette législation limite les possibilités des parties en matière de négociations salariales. La commission prie le gouvernement d’indiquer dans son prochain rapport tout progrès à cet égard.
Enfin, la commission prend note des diverses mesures prises par les autorités pour promouvoir l’application des dispositions de la convention, y compris d’importantes initiatives de médiation ainsi que des activités tripartites.

Observation (CEACR) - adoptée 2013, publiée 103ème session CIT (2014)

La commission prend note des commentaires de 2013 de la Confédération syndicale internationale (CSI) et de la Centrale unique des travailleurs (CUT), qui portent sur des questions que la commission a déjà soulevées et sur des allégations de pratiques antisyndicales dans les secteurs de l’information, de la banque et de la chimie. La commission prie le gouvernement de fournir ses observations au sujet de ces commentaires et, à nouveau, de communiquer les résultats des enquêtes judiciaires menées au sujet des meurtres des dirigeants syndicaux mentionnés par la CSI (et sur les meurtres allégués de 11 syndicalistes entre 1993 et 2009, dénoncés en 2009 par la Força Sindical, la Nova Central dos Trabalhadores do Brasil, la União Geral dos Trabalhadores, la Central Única dos Trabalhadores, la Central dos Trabalhadores e Trabalhadoras do Brasil et la Central General dos Trabalhadores do Brasil). La commission prend note aussi des commentaires de 2013 du Syndicat des travailleurs des hôtels, bars et établissements assimilés de São Paulo et sa région (SINTHORESP), qui affirme avoir été empêché de défendre les intérêts des travailleurs en situation de handicap et de participer en leur nom à la négociation dans une entreprise du secteur de l’alimentation. La commission prie le gouvernement de communiquer sa réponse.
Article 4 de la convention. Arbitrage obligatoire. La commission prie à nouveau le gouvernement d’indiquer si, dans la pratique, le «dissídio coletivo» avec un arbitrage judiciaire obligatoire à la demande d’une seule des parties est encore possible, et de fournir des informations, dans son prochain rapport, sur l’évolution du projet de réforme syndicale mentionné précédemment.
Droit de négociation collective dans le secteur public. La commission rappelle que, depuis de nombreuses années, elle souligne la nécessité d’assurer aux fonctionnaires qui ne sont pas commis à l’administration de l’Etat la jouissance du droit de négociation collective, conformément à l’article 4 de la convention. La commission note que le gouvernement fait à nouveau mention de la création, en septembre 2010, du Conseil des relations du travail (CRT). Il s’agit d’un organe tripartite et paritaire qui conseille le ministre du Travail en ce qui concerne des questions importantes du monde du travail (par exemple, actualisation de la législation, promotion de la négociation collective, règlement de différends, etc.). Tout en rappelant que, dans son observation précédente, elle avait noté à ce sujet qu’un groupe de travail avait été constitué sous les auspices du ministère du Travail avec les partenaires sociaux pour élaborer des propositions législatives qui seraient transmises à la présidence de la République puis présentées en tant que projet de loi et d’amendement constitutionnel, la commission prie le gouvernement d’indiquer dans son prochain rapport si le projet de loi en question a été abandonné et, dans l’affirmative, d’indiquer les mesures prises pour accorder aux fonctionnaires qui ne sont pas commis à l’administration de l’Etat le droit de négocier collectivement afin de pouvoir conclure des accords collectifs.
Soumission des conventions collectives à la politique économique et financière. La commission rappelle que, depuis des années, elle souligne la nécessité d’abroger l’article 623 de la Consolidation des lois du travail (CLT) en vertu duquel sont déclarées nulles et non avenues les dispositions d’une convention ou d’un accord qui seraient contraires aux normes qui régissent la politique économique et financière du gouvernement ou la politique salariale en vigueur. La commission note avec regret l’absence d’information du gouvernement à ce sujet et, à nouveau, elle le prie de prendre des mesures pour abroger les dispositions législatives ou constitutionnelles qui limitent le droit à la négociation collective – de telles limitations ne sons admissibles qu’en tant que mesures exceptionnelles en cas de crise économique grave, c’est-à-dire dans des cas de difficultés sérieuses et insurmontables en vue du maintien des emplois et de la continuité des entreprises et des institutions. La commission prie le gouvernement d’indiquer dans son prochain rapport toute mesure prise à cet égard.
La commission soulève d’autres points dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2011, publiée 101ème session CIT (2012)

Article 1 de la convention. Protection contre la discrimination antisyndicale. La commission prend note du fait que, dans son rapport, le gouvernement se réfère aux dispositions de la Constitution de la République et de la Consolidation des lois du travail qui, à son avis, donnent effet à cet article de la convention. Dans ses commentaires précédents, la commission avait pris note de diverses plaintes examinées par le Comité de la liberté syndicale (cas nos 2635, 2636 et 2646) et avait observé que, dans le cadre de ces cas, le gouvernement avait déclaré:
Répétition
… bien que la liberté syndicale soit un droit consacré par la Constitution, la législation nationale ne couvre pas les pratiques antisyndicales, ce qui empêche le ministère du Travail et de l’Emploi de prendre des mesures efficaces de caractère préventif et répressif pour lutter contre des pratiques telles que celles qui sont dénoncées dans le cas examiné; pour essayer de régler cette question, le gouvernement a élaboré, dans le cadre du Forum national du travail (FNT), en consultation avec les travailleurs et les employeurs, une proposition de réforme syndicale (no 369/05, dont est actuellement saisi le Congrès national), qui prévoit une qualification (plus complète) des actes antisyndicaux, ainsi que des sanctions pour les contrevenants, qui peuvent être imposées par le ministère du Travail et de l’Emploi; l’avant-projet de loi sur les relations syndicales, dont est actuellement saisi le Congrès national, prévoit une série de situations constituant des comportements antisyndicaux (conditionner l’accès à un emploi ou le maintien dans un emploi à l’affiliation ou la non-affiliation à une organisation syndicale ou à la démission d’une organisation syndicale, licencier un travailleur ou exercer des discriminations à son encontre en raison de son affiliation à une organisation syndicale ou de ses activités dans une telle organisation, de sa participation à une action de grève ou de ses activités en tant que représentant des travailleurs sur le lieu de travail, etc.); toute proposition visant à résoudre cette question devra inévitablement refléter les dispositions énoncées dans les conventions nos 98 et 135, et établir des mécanismes efficaces d’application de sanctions aux contrevenants, ce qui donne lieu à des divergences de vues entre les représentants des travailleurs et des employeurs en ce qui concerne le montant de l’amende à imposer en cas de comportement antisyndical; la proposition du Forum national du travail remédie au vide juridique par une qualification pénale (plus complète) des actes antisyndicaux pouvant être commis par des travailleurs ou des employeurs et l’imposition, parallèlement, de sanctions et de peines qui garantissent l’efficacité de la réglementation; il n’a pas été possible de trouver un consensus, dans le cadre du Forum national du travail, au sujet des sanctions et des peines, notamment en ce qui concerne le montant de l’amende à imposer en cas de comportement antisyndical, mais, bien que cela ait eu pour effet de ralentir la procédure d’examen du projet, cela n’a aucunement amoindri l’espoir qu’a le gouvernement de voir le projet approuvé prochainement.
La commission avait exprimé l’espoir que, dans le cadre du projet de réforme syndicale auquel le gouvernement se référait, il serait prévu de manière explicite des voies de recours ainsi que des sanctions suffisamment dissuasives contres les actes de discrimination antisyndicale, de manière à garantir l’efficacité, dans la pratique, de l’article 1. La commission note que, dans son rapport, le gouvernement indique que: 1) dans le but de proposer et appliquer la réforme syndicale et du travail, le gouvernement a créé le Conseil des relations du travail (CRT) (organisme collégial, tripartite et paritaire chargé de fournir des orientations); 2) cet organe a pour tâche de rendre des avis sur les propositions visant à la démocratisation des relations du travail dans le pays, à l’actualisation de la législation syndicale et du travail, à la promotion de la négociation collective, au règlement à l’amiable des conflits dans le domaine du travail, à la création d’un contexte favorable à la génération de l’emploi et du travail décent grâce au dialogue et à la négociation avec le gouvernement; 3) deux réunions du CRT ont été tenues en 2011 pour l’approbation de son règlement interne; 4) pour le moment, il n’y a pas eu de proposition de projet de loi sur les relations du travail et l’organisation syndicale. La commission espère que, dans le cadre des travaux du CRT, il sera possible d’élaborer un projet de loi au moyen duquel seront prévues de manière explicite des voies de recours ainsi que des sanctions suffisamment dissuasives contre les actes de discrimination antisyndicale. La commission prie le gouvernement de fournir des informations, dans son prochain rapport, sur tout progrès réalisé à cet égard.
Article 4. Dans ses commentaires antérieurs, la commission avait demandé au gouvernement de prendre des mesures pour modifier la loi no 10192 de février 2001 relative à des mesures complémentaires au Plan Real, plan qui prévoit à son article 13 qu’il est interdit d’insérer dans les accords, conventions ou «dissídios coletivos» des clauses de réajustement ou de correction automatique des salaires en fonction de l’indice des prix, afin que les parties à la négociation collective puissent décider librement de conclure des réajustements automatiques des salaires, en particulier dans les conventions collectives conclues pour une longue durée. Tout en observant que le gouvernement ne se réfère pas à cette question dans son rapport, la commission rappelle que les parties à la négociation collective devraient pouvoir décider librement et de leur propre initiative si elles veulent conclure des réajustements automatiques des salaires, en particulier dans les conventions collectives de longue durée. Compte tenu de ce qui précède, la commission prie de nouveau le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour modifier la législation dans le sens indiqué, dans la mesure où cette législation limite les possibilités des parties en matière de négociation salariale.

Observation (CEACR) - adoptée 2011, publiée 101ème session CIT (2012)

La commission prend note des commentaires du Syndicat des travailleurs des hôtels, bars et établissements assimilés de São Paulo (SINTHORESP) et de la Confédération des travailleurs du tourisme (CONTRATUH), datés du 25 juillet 2011, alléguant que les organisations syndicales ont été exclues du processus de négociation sur le recrutement de travailleurs handicapés dans une entreprise du secteur de l’alimentation. De même, la commission prend note des commentaires de la Confédération syndicale internationale (CSI), en date du 4 août 2011, qui se réfèrent à des questions déjà soulevées par la commission, ainsi qu’à des allégations d’actes antisyndicaux et à l’assassinat de deux dirigeants syndicaux et d’un syndicaliste. La commission note que le gouvernement déclare, en réponse aux commentaires de la CSI, qu’il rejette toute accusation concernant des actes qui auraient porté atteinte à la vie et la dignité des travailleurs et qu’à cet égard les autorités responsables des enquêtes criminelles font leur travail dans le respect des procédures judiciaires régulières. La commission note cette information et prie le gouvernement de communiquer les résultats des enquêtes judiciaires menées au sujet des meurtres des dirigeants syndicaux mentionnés par la CSI (ainsi que concernant les meurtres allégués de 11 syndicalistes entre 1993 et 2009, dénoncés en 2009 par la Força Sindical, le Noca Central dos Trabalhadores do Brasil, le União Geral dos Trabalhadores et Trabalhadoras do Brasil et la Central General dos Trabalhadores do Brasil).
Article 4 de la convention. Arbitrage obligatoire. Dans son observation précédente, la commission avait pris note de l’indication du gouvernement selon laquelle: 1) en vertu de l’amendement constitutionnel no 45 du 8 décembre 2004 (réforme du pouvoir judiciaire, amendement de l’article 114), il n’est désormais possible de juger un conflit collectif (par le biais de la procédure de dissídio coletivo) que s’il existe un accord dans ce sens entre les parties (c’est-à-dire qu’il ne sera plus possible de demander de manière unilatérale l’intervention du pouvoir judiciaire); 2) l’ordonnance no 186, en vertu de laquelle les parties peuvent discuter, sous l’égide du ministère du Travail et de l’Emploi, des conflits existant en matière d’enregistrement syndical, ce qui permet au ministère d’agir comme médiateur au conflit, a été adoptée; 3) la justice du travail ne peut intervenir dans la négociation collective qu’à la demande des deux parties au conflit. La commission avait prié le gouvernement d’indiquer si, «dans la pratique», le dissídio coletivo avec arbitrage obligatoire judiciaire à la demande d’une seule des parties était encore possible, et de fournir des informations, dans son prochain rapport, sur l’évolution du projet de réforme syndicale susvisé. Relevant que le gouvernement ne se réfère pas spécifiquement à cette question dans son rapport, la commission réitère sa demande.
Droit de négociation collective dans le secteur public. La commission rappelle que, depuis de nombreuses années, elle souligne la nécessité d’assurer aux fonctionnaires, qui ne sont pas commis à l’administration de l’Etat, la jouissance du droit de négociation collective, conformément à l’article 4 de la convention. La commission note que le gouvernement indique que, en ce qui concerne les fonctionnaires, il a ratifié la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978, en 2010 et qu’un groupe de travail a été constitué, sous les auspices du ministère du Travail, avec les partenaires sociaux pour élaborer des propositions législatives qui seront transmises à la Présidence de la République puis se présenteront comme un projet de loi et d’amendement constitutionnel. La commission accueille favorablement ces informations et exprime l’espoir que le projet de loi en question accordera le droit de conclure des conventions collectives aux fonctionnaires qui ne sont pas commis à l’administration de l’Etat. Elle prie le gouvernement de fournir des informations, dans son prochain rapport, sur tout progrès réalisé à cet égard.
Subordination des conventions collectives à la politique économique et financière. La commission rappelle que, dans ses observations précédentes, elle avait souligné la nécessité d’abroger l’article 623 de la Consolidation des lois du travail (CLT) en vertu duquel sont déclarées nulles et non avenues les dispositions d’une convention ou d’un accord qui seraient contraires aux normes qui régissent la politique économique et financière du gouvernement ou la politique salariale en vigueur. La commission note que le gouvernement indique que: 1) dans le passé, pour tenir compte de l’argument de la protection des salaires, des clauses ont été incluses dans les conventions collectives pour prévoir des ajustements automatiques en cas de dépassement d’un certain pourcentage par l’inflation; 2) il était courant que, durant la période au cours de laquelle la convention collective était en vigueur, des mesures économiques soient adoptées, accompagnées d’une nouvelle politique des salaires, et, par conséquent, les mesures de réajustement salarial se retrouvaient incompatibles avec les règles d’ajustement pour la période d’inflation; 3) en 2008, le Tribunal fédéral suprême a rendu une súmula (décision) ayant force obligatoire qui interdit l’utilisation du salaire minimum comme indice de base du salaire des fonctionnaires ou des salariés; 4) dans un contexte socio-économique différent de celui prévalant au moment où a été signée une convention collective, on ne saurait prétendre que l’on puisse garder intacte une clause incompatible avec une nouvelle réalité. La commission prend note de ces nouvelles informations du gouvernement et rappelle de nouveau que, sauf circonstances exceptionnelles qui requièrent des politiques de stabilisation économique, ce sont les parties à la négociation collective qui sont les mieux placées pour déterminer les salaires et ce sont elles qui doivent le faire, et elle estime que la restriction qui découle de l’article 623 de la CLT compromet l’autonomie des partenaires sociaux dans la négociation collective et va à l’encontre de la promotion des procédures de négociation collective volontaire entre les employeurs ou leurs organisations et les organisations de travailleurs pour établir les conditions d’emploi. La commission prie de nouveau le gouvernement de prendre des mesures pour abroger les dispositions législatives ou constitutionnelles qui limitent le droit à la négociation collective, et de fournir des informations dans son prochain rapport sur toute mesure prise à cet égard.
La commission soulève d’autres points dans une demande qu’elle adresse directement au gouvernement.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2009, publiée 99ème session CIT (2010)

Article 1 de la convention. La commission note que le gouvernement se réfère, dans son rapport, aux dispositions de la Constitution de la République et de la Consolidation des lois du travail donnant effet à cet article de la convention. La commission prend note, dans ce contexte, de diverses plaintes alléguant des actes de discrimination antisyndicale portées devant le Comité de la liberté syndicale (cas nos 2635, 2636 et 2646). Elle note que, dans le cadre de ces cas, le gouvernement déclare:

… bien que la liberté syndicale soit un droit consacré par la Constitution, la législation nationale ne couvre pas les pratiques antisyndicales, ce qui empêche le ministère du Travail de prendre des mesures efficaces de caractère préventif et répressif pour lutter contre des pratiques telles que celles qui sont dénoncées dans le cas examiné; pour essayer de régler cette question, le gouvernement a élaboré dans le cadre du Forum national du travail, en consultation avec les travailleurs et les employeurs, une proposition de réforme syndicale (no 369/05, dont est actuellement saisi le Congrès national), qui prévoit une qualification (plus complète) des actes antisyndicaux, et les contrevenants seront passibles de sanctions qui peuvent être imposées par le ministère du Travail et de l’Emploi; l’avant-projet de loi sur les relations syndicales, dont est actuellement saisi le Congrès national, prévoit une série de situations constituant des comportements antisyndicaux (conditionner l’accès à un emploi ou le maintien dans un emploi à l’affiliation ou à la non-affiliation à une organisation syndicale ou à la démission d’une organisation syndicale, licencier un travailleur ou exercer des discriminations à son encontre en raison de son affiliation à une organisation syndicale ou de ses activités dans une telle organisation, de sa participation à une action de grève ou de ses activités en tant que représentant des travailleurs sur le lieu de travail, etc.); toute proposition visant à résoudre cette question devra inévitablement refléter les dispositions énoncées dans les conventions nos 98 et 135 et établir des mécanismes efficaces d’application de sanctions aux contrevenants, ce qui donne lieu à des divergences de vues entre les représentants des travailleurs et des employeurs en ce qui concerne le montant de l’amende à imposer en cas de comportement antisyndical; la proposition du FNT remédie au vide juridique par une qualification pénale des actes antisyndicaux pouvant être commis par des travailleurs ou des employeurs et l’imposition, parallèlement, de sanctions et de peines qui garantissent l’efficacité de la réglementation; il n’a pas été possible de trouver un consensus dans le cadre du FNT au sujet des sanctions et des peines, en ce qui concerne notamment le montant de l’amende à imposer en cas de comportement antisyndical, mais, bien que cela ait eu pour effet de ralentir la procédure d’examen du projet, cela n’a aucunement diminué l’espoir qu’a le gouvernement de voir le projet approuvé prochainement.

Compte tenu de ces éléments, la commission espère que, dans le cadre du projet de réforme syndicale auquel le gouvernement se réfère, il sera prévu de manière explicite des voies de recours ainsi que des sanctions suffisamment dissuasives contre les actes de discrimination antisyndicale, de manière à garantir l’efficacité, dans la pratique, de l’article 1 de la convention. Elle prie le gouvernement de l’informer dans son prochain rapport de toute mesure prise à cet égard.

Article 4 de la convention. Dans sa demande directe précédente, la commission avait demandé au gouvernement d’indiquer quelle disposition du décret no 3735 du 24 janvier 2001 a permis d’abroger tacitement le décret no 908 du 31 août 1993 (décret qui fixait des limites à la négociation collective des salaires dans les entreprises publiques et les sociétés d’économie mixte en subordonnant les augmentations de salaire en termes réels à certains critères comme, par exemple, l’augmentation de la productivité, la distribution de dividendes ou la compatibilité de la rémunération globale des salariés avec les niveaux de salaire pratiqués sur le marché du travail). La commission prend dûment note du fait que le gouvernement indique que, en vertu de la loi d’introduction du Code civil, lorsqu’une matière est réglée par une nouvelle norme, la norme antérieure se trouve automatiquement abrogée, si bien qu’avec l’adoption du décret no 3735 de 2001, instaurant des règles générales pour les entreprises publiques, le décret no 908 de 1993 s’est trouvé tacitement abrogé.

Par ailleurs, dans ses commentaires antérieurs, la commission avait demandé que le gouvernement prenne des mesures pour modifier la loi no 10192 de février 2001 relative à des mesures complémentaires du Plan Real, plan qui prévoit sous son article 13 qu’il est interdit d’insérer dans les accords, conventions ou «dissidios colectivos» des clauses de réajustement ou de correction automatique des salaires en fonction de l’indice des prix, afin que les parties à la négociation collective puissent décider librement de conclure des réajustements automatiques des salaires, en particulier dans les conventions collectives conclues pour une longue durée. La commission note que le gouvernement expose que, contrairement à ce qu’elle fait observer, l’intention de cette disposition, outre d’éviter les indexations automatiques dans l’économie, était de favoriser la libre négociation entre les parties, étant donné que c’est à celles-ci qu’il incombe de décider des ajustements des salaires de la catégorie concernée. Le gouvernement ajoute qu’il convient de tenir compte également du processus d’inflation qui, bien que moindre, affecte toujours l’économie du Brésil. De l’avis du gouvernement, l’interdiction d’instaurer des réajustements automatiques des salaires ne restreint pas la libre négociation entre les parties. La commission considère à cet égard que les parties à la négociation collective devraient pouvoir décider librement et de leur propre initiative si elles veulent conclure des réajustements automatiques des salaires, en particulier dans les conventions collectives de longue durée. Dans ces conditions, la commission prie le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que la législation soit modifiée dans le sens indiqué, dans la mesure où cette législation limite les possibilités des parties en matière de négociation salariale.

Observation (CEACR) - adoptée 2009, publiée 99ème session CIT (2010)

La commission prend note de la réponse du gouvernement aux observations de la CSI de 2007 relatives à l’assassinat de dirigeants d’organisations de travailleurs ruraux et d’un syndicaliste du secteur de la chaussure et, en particulier, de l’ouverture d’enquêtes judiciaires à ce sujet. La commission prend note des observations de la Confédération syndicale internationale (CSI) du 26 août 2009, qui se réfèrent à des questions déjà soulevées par la commission ainsi qu’à des faits de répression policière de manifestants, d’attentats contre des sièges de syndicats et des domiciles de dirigeants syndicaux, de licenciements antisyndicaux et de non-application de conventions collectives. En outre, la commission prend note des observations du Syndicat des travailleurs des industries de l’énergie électrique du Nord et du Nord-Ouest Fluminense (STIEENNFF) alléguant la modification unilatérale de règles conclues avec les syndicats par une entreprise du secteur de l’énergie. Enfin, la commission prend note des observations datées du 3 septembre 2009 émanant des organisations suivantes: Força Sindical, Noca Central dos Trabalhadores do Brasil, Uniāo Geral dos Trabalhadores, Central Única dos Trabalhadores, Central dos Trabalhadores et Trabalhadoras do Brasil et Central Geral dos Trabalhadores do Brasil, relatifs à l’application de la convention et, en particulier, des allégations particulièrement préoccupantes d’assassinats de 11 syndicalistes entre 1993 et 2009 et d’attentats à la vie de syndicalistes. La commission prie le gouvernement de fournir ses commentaires à ce sujet et de veiller, sans attendre, à ce que des enquêtes soient ouvertes sur les faits de violences allégués afin de faire la lumière sur ces faits et sanctionner les coupables.

Article 4 de la convention. Arbitrage obligatoire. Dans son observation précédente, la commission avait pris note des indications suivantes données par le gouvernement: 1) en vertu de l’amendement constitutionnel no 45 du 8 décembre 2004 (réforme du pouvoir judiciaire; amendement de l’article 114), il n’est désormais possible de juger un conflit collectif (par le biais de la procédure de «dissidio coletivo») que s’il existe un accord dans ce sens entre les parties (c’est-à-dire qu’il ne sera plus possible de demander de manière unilatérale l’intervention du pouvoir judiciaire); 2) le projet de réforme syndicale élaboré dans le cadre du Forum national du travail (FNT) prévoit, parmi les questions les plus importantes, de promouvoir la négociation collective à tous les niveaux et dans tous les domaines de représentation, en tenant l’Etat à l’écart du dialogue entre les travailleurs et l’entreprise; 3) la réforme syndicale vise aussi à faire de la justice du travail une instance de règlement volontaire des différends (le gouvernement a signalé que, grâce aux discussions menées par le FNT, une proposition d’amendement constitutionnel a pu être consolidée et se trouve aujourd’hui devant le Congrès national, avec un avant-projet de loi sur les relations syndicales). La commission avait demandé que le gouvernement l’informe de toute évolution de ce projet de réforme syndicale et, en particulier, des dispositions adoptées au sujet de l’arbitrage en tant que moyen de résoudre les différends, et aussi de communiquer des informations statistiques sur le nombre de différends collectifs que la justice du travail a traités par le biais de la procédure de «dissidios coletivos» depuis l’adoption, en 2004, de la modification constitutionnelle.

La commission note que le gouvernement indique à cet égard dans son rapport que: 1) s’agissant du projet de réforme syndicale, le Congrès national est toujours saisi de la proposition d’amendement constitutionnel tendant à mettre fin au principe d’unicité syndicale et promouvoir la négociation collective; 2) grâce à l’adoption du décret no 186, les parties peuvent discuter sous l’égide du ministère du Travail et de l’Emploi des conflits existant en matière d’enregistrement syndical, ce qui permet au ministère d’agir comme médiateur au conflit; 3) la justice du travail ne peut intervenir dans la négociation collective qu’à la demande des deux parties au conflit; 4) pour ce qui est des informations statistiques demandées sur les «dissidios coletivos», 714 ont été tranchées en 2005, 561 en 2006, 592 en 2007 et 820 en 2008. La commission prie le gouvernement d’indiquer si, dans la pratique, le «dissidio coletivo» (arbitrage obligatoire judiciaire) à la demande d’une seule des parties est encore possible et de fournir des informations, dans son prochain rapport, sur l’évolution du projet de réforme syndical susvisé.

Droit de négociation collective dans le secteur public. La commission rappelle que, depuis de nombreuses années, elle souligne la nécessité d’assurer aux fonctionnaires, qui ne sont pas commis à l’administration de l’Etat, la jouissance du droit de négociation collective, conformément à l’article 4 de la convention. La commission note que le gouvernement indique que, comme il l’avait dit antérieurement, il y a des restrictions constitutionnelles à la liberté d’action de l’administration publique qui font obstacle à la négociation collective dans le secteur public et que, en juin 2003, dans le cadre de la fonction publique fédérale, le Conseil national de négociation permanente (MNNP) a été créé. Dans ce conseil siègent les représentants de huit ministères et de l’ensemble des entités représentatives des agents des services publics fédéraux. Cette instance a pour mission de dégager des solutions négociées sur les intérêts exprimés par les agents de l’administration publique fédérale, d’élaborer la réglementation d’un système de négociation permanente, de promouvoir la discussion et la négociation des revendications des agents des services publics, etc. Compte tenu de ce qui précède, la commission prie le gouvernement d’indiquer dans son prochain rapport si, par suite des activités du MNNP, une évolution s’est dégagée dans le sens de la possibilité de conclure des conventions collectives englobant les fonctionnaires qui ne sont pas commis à l’administration de l’Etat ou si des mesures d’un autre ordre ont été adoptées pour garantir les droits de ces catégories. Enfin, la commission note que le gouvernement signale avoir saisi le Congrès national d’un projet de décret législatif tendant à la ratification de la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978.

Subordination des conventions collectives à la politique économique et financière. La commission rappelle que, dans ses observations précédentes, elle avait souligné la nécessité d’abroger l’article 623 du Code consolidé des lois du travail (CLT) en vertu duquel sont déclarées nulles et non avenues les dispositions d’une convention ou d’un accord qui seraient contraire aux normes qui régissent la politique économique et financière du gouvernement ou la politique salariale en vigueur. La commission note que le gouvernement fait savoir que, bien que la Chambre des députés ait été saisie en 2007 de deux projets de loi tendant à modifier l’article en question, les projets ont été rejetés. La commission rappelle une fois de plus à ce propos que, sauf circonstances exceptionnelles, ce sont les parties à la négociation collective qui sont le mieux placées pour déterminer les salaires, et elle considère que la restriction prévue à l’article 623 du CLT affecte l’autonomie des partenaires sociaux dans le cadre de la négociation collective et n’est aucunement de nature à favoriser des procédures de négociation collective volontaire entre les employeurs ou leurs organisations et les organisations de travailleurs pour déterminer les conditions d’emploi. La commission demande une fois de plus que le gouvernement prenne les mesures nécessaires pour l’abrogation de la disposition législative en question, et d’indiquer, dans son prochain rapport, les mesures prises à cet égard.

La commission soulève d’autres points dans une demande adressée directement au gouvernement.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2007, publiée 97ème session CIT (2008)

La commission prend note du rapport du gouvernement et note qu’il n’y est pas fait mention des questions qu’elle a soulevées dans sa demande directe précédente.

Dans ces conditions, la commission demande de nouveau au gouvernement d’indiquer dans son prochain rapport quelle disposition du décret no 3735 du 24 janvier 2001 a permis d’abroger tacitement le décret no 908 du 31 août 1993; ce décret fixait des limites à la négociation collective des salaires dans les entreprises publiques et les sociétés d’économie mixte, en subordonnant les hausses salariales en termes réels à certains critères, par exemple l’augmentation de la productivité, la distribution de dividendes ou la compatibilité de la rémunération globale des salariés avec les niveaux de salaires pratiqués sur le marché du travail.

La commission demande aussi au gouvernement de prendre des mesures pour modifier la loi no 10192 de février 2001 qui porte sur des mesures complémentaires du Plan national, lequel prévoit à son article 13 qu’il est interdit d’insérer dans les accords, conventions ou «dissídios coletivos» des clauses de réajustement ou de correction automatique des salaires en fonction de l’indice des prix, afin que les parties à la négociation collective puissent décider librement de conclure des réajustements automatiques des salaires, en particulier dans les conventions collectives conclues pour une longue durée. La commission demande au gouvernement d’indiquer dans son prochain rapport les mesures prises dans ce sens.

Observation (CEACR) - adoptée 2007, publiée 97ème session CIT (2008)

La commission prend note du rapport du gouvernement.

La commission rappelle que, dans son observation précédente, elle avait pris note des commentaires de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL), désormais Confédération syndicale internationale (CSI), qui contiennent les allégations suivantes: les travailleurs occupés dans les entreprises sous-traitantes sont exclus de la négociation collective; des décisions de justice sont imposées dans la négociation collective à la demande d’une seule des deux parties; des dirigeants syndicaux ont été licenciés en violation de leur immunité syndicale; des listes noires sont établies; des dirigeants d’organisations de travailleurs ruraux et un syndicaliste du secteur de la chaussure ont été assassinés. A ce sujet, la commission prend note des déclarations du gouvernement: 1) le système juridique national n’empêche pas les travailleurs des entreprises sous-traitantes de constituer des syndicats et, une fois obtenu leur enregistrement auprès du ministère du Travail et de l’Emploi, ils peuvent négocier collectivement; il y a dans le pays de nombreuses entités syndicales en place dans des entreprises de services, notamment des entreprises qui assurent des services dans le cadre de la sous-traitance; 2) depuis la modification constitutionnelle no 45 de 2004, il faut l’accord des deux parties pour pouvoir recourir au «dissídio coletivo» (arbitrage judiciaire); et 3) des dispositions législatives garantissent une protection aux travailleurs syndiqués. La commission note que le gouvernement n’a pas communiqué d’informations sur les allégations d’actes de violence et rappelle que la liberté syndicale ne peut être exercée que si les droits fondamentaux sont pleinement respectés et garantis, en particulier les droits relatifs à la vie et à la sécurité de la personne. La commission demande au gouvernement d’entamer des enquêtes à ce sujet afin de faire la lumière sur ces faits et de sanctionner les coupables.

Article 4 de la convention.Arbitrage obligatoire. Dans une observation précédente, la commission avait noté qu’en vertu de l’amendement constitutionnel no 45 du 8 décembre 2004 (réforme du pouvoir judiciaire; amendement de l’article 114) il n’est désormais possible de juger un conflit collectif (par le biais de la procédure de «dissídio coletivo») que s’il existe un accord dans ce sens entre les parties (c’est-à-dire qu’il ne sera plus possible de demander de manière unilatérale l’intervention du pouvoir judiciaire). La commission avait prié le gouvernement de l’informer sur l’application de cet amendement constitutionnel dans la pratique. La commission prend note des informations du gouvernement, à savoir que le projet de réforme syndicale élaboré dans le cadre du Forum national du travail (FNT) prévoit, parmi les questions les plus importantes, de promouvoir la négociation collective à tous les niveaux et dans tous les domaines de représentation, en tenant l’Etat à l’écart du dialogue entre les travailleurs et l’entreprise. L’objectif est de renforcer l’autonomie des parties et de maintenir l’Etat dans son rôle de médiateur. La réforme syndicale vise aussi à faire de la justice du travail une instance de règlement volontaire des différends. Le gouvernement indique que, à la suite des discussions au FNT, une proposition de modification constitutionnelle – qui est en cours d’examen au Congrès national – ainsi qu’un avant-projet de loi sur les relations syndicales ont été formulés. La commission demande au gouvernement de l’informer dans son prochain rapport sur l’évolution du projet de réforme syndicale, et en particulier sur les dispositions adoptées au sujet de l’arbitrage en tant que moyen pour résoudre des différends. La commission demande aussi au gouvernement de communiquer des informations statistiques sur le nombre de différends collectifs que la justice du travail a traités par le biais de la procédure de «dissídios coletivos» depuis l’adoption en 2004 de la modification constitutionnelle.

Droit de négociation collective dans le secteur public. La commission rappelle que, depuis de nombreuses années, elle souligne la nécessité d’assurer que les fonctionnaires qui ne sont pas commis à l’administration de l’Etat jouissent du droit de négociation collective. La commission note que le gouvernement n’apporte pas d’informations à ce sujet. Dans ces conditions, la commission demande instamment au gouvernement d’indiquer dans son prochain rapport les mesures prises pour garantir que les fonctionnaires qui ne sont pas commis à l’administration de l’Etat jouissent du droit de négociation collective. En particulier, elle rappelle que dans son observation précédente elle avait noté les indications du gouvernement, à savoir qu’il y a des restrictions constitutionnelles à la liberté d’action de l’administration publique, qui font obstacle à la négociation collective dans le secteur public, et qu’en juin 2003, dans le cadre de la fonction publique fédérale, le Conseil national de négociation permanente (MNNP) a été créé. Il est composé de représentants de huit ministères et de l’ensemble des entités représentatives des agents des services publics fédéraux. La commission demande au gouvernement d’indiquer si une proposition de modification constitutionnelle a été présentée à ce sujet, et de fournir des informations sur les questions traitées au MNNP.

La commission rappelle que, dans ses observations précédentes, elle avait également souligné la nécessité d’abroger l’article 623 du Code consolidé des lois du travail (CLT) en vertu duquel sont déclarées nulles et non avenues les dispositions d’une convention ou d’un accord qui seraient contraires aux normes qui régissent la politique économique et financière du gouvernement ou à la politique salariale en vigueur. La commission note que le gouvernement n’a pas apporté d’informations à ce sujet. La commission souligne que, sauf dans le cas de circonstances exceptionnelles qui requièrent des politiques de stabilisation économique, ce sont les parties à la négociation collective qui sont les mieux placées pour déterminer les salaires, et celles qui doivent le faire. La commission estime que la restriction qui découle de l’article 623 de la CLT compromet l’autonomie des partenaires sociaux dans la négociation collective, et va à l’encontre de la promotion des procédures de négociation collective volontaire entre les employeurs ou leurs organisations et les organisations de travailleurs pour établir les conditions d’emploi. La commission demande de nouveau au gouvernement de prendre des mesures pour abroger la disposition législative susmentionnée, et de l’informer dans son prochain rapport sur toute mesure prise à cet égard.

Enfin, la commission prend note des commentaires de la CSI du 28 août 2007, dans lesquels la confédération formule de nouveau les commentaires qui avaient été présentés par la CISL au sujet de l’application de la convention. De plus, la CSI indique que, d’une part, les décisions du FNT soumises au Congrès national n’ont pas été approuvées et qu’il n’y a pas d’initiative gouvernementale visant à modifier la structure syndicale. D’autre part, la CSI fait état d’actes de discrimination antisyndicale dans le secteur de l’éducation. La commission demande au gouvernement de communiquer ses observations à ce sujet.

La commission adresse au gouvernement une demande directe sur certains points.

Observation (CEACR) - adoptée 2006, publiée 96ème session CIT (2007)

La commission prend note des commentaires en date du 10 août 2006 de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) qui contiennent les allégations suivantes: les travailleurs occupés dans les entreprises sous-traitantes sont exclus de la négociation collective; dans la négociation collective, la justice peut être saisie à la demande d’une seule des deux parties; des dirigeants syndicaux ont été licenciés en violation de leur immunité syndicale; l’action des autorités judiciaires est lente; des listes noires ont été établies; des dirigeants d’organisations de travailleurs ruraux et un syndicaliste du secteur de la chaussure ont été assassinés. A cet égard, la commission demande au gouvernement de communiquer ses observations à propos des allégations de la CISL. Etant donné la violence des actes dont fait état la CISL, la commission rappelle que la liberté syndicale ne peut s’exercer que dans une situation dans laquelle les droits fondamentaux de l’homme sont respectés et garantis pleinement, en particulier les droits relatifs à la vie et à la sécurité de la personne.

Par ailleurs, la commission demande au gouvernement de communiquer, dans le cadre du cycle régulier de présentation des rapports, à la prochaine session de novembre-décembre 2007, ses observations sur l’ensemble des questions ayant trait à la législation et à l’application pratique de la convention qui sont mentionnées dans son observation précédente (voir l’observation de 2005, 76e session).

Demande directe (CEACR) - adoptée 2005, publiée 95ème session CIT (2006)

Dans sa précédente demande directe, la commission avait demandé au gouvernement de communiquer copie du décret no 3735 du 24 janvier 2001 en vertu duquel a été tacitement abrogé (selon ce que le gouvernement avait indiqué dans son rapport précédent) le décret no 908 du 31 août 1993. Ce dernier décret posait des limites à la négociation collective des salaires dans les entreprises publiques et les sociétés d’économie mixte en subordonnant les hausses salariales en termes réels à certains critères, par exemple l’augmentation de la productivité, la distribution de dividendes ou la compatibilité de la rémunération globale des salariés avec les niveaux de salaire pratiqués sur le marché du travail. La commission note que le gouvernement reproduit dans son rapport le texte du décret en question. La commission prie le gouvernement d’indiquer dans son prochain rapport en vertu de quelle disposition le décret no 3735 du 24 janvier 2001 est considéré comme ayant abrogé tacitement le décret no 908 du 31 août 1993.

La commission note également que la loi no 10192 de février 2001 portant mesures complémentaires du Plan national prévoit sous son article 13 qu’il est interdit d’insérer dans les accords, conventions ou «dissídios coletivos» des clauses de réajustement ou de correction automatique des salaires en fonction de l’indice des prix. La commission note que le gouvernement déclare que l’intention à l’origine de cette règle était de favoriser la libre négociation collective entre les parties, considérant que ce sont celles-ci qui doivent fixer les ajustements de salaire pour la catégorie concernée et, de plus, que l’interdiction de l’indexation automatique des salaires ne constitue pas une restriction à la liberté de négociation proclamée par l’OIT. Toujours de l’avis du gouvernement, il paraît aléatoire de conclure que l’article critiqué puisse constituer un obstacle à un réajustement des salaires ayant pour objet de compenser la perte de pouvoir d’achat imputable à un processus inflationniste qui continue d’affecter, dans une mesure certes mineure, l’économie du Brésil.

La commission prie le gouvernement de prendre des mesures tendant à modifier cette disposition de telle sorte que les parties à la négociation collective puissent décider librement si elles veulent instaurer des mécanismes automatiques de réajustement des salaires, en particulier dans les conventions collectives conclues pour une longue durée. La commission prie le gouvernement de signaler dans son prochain rapport toute mesure prise dans le sens indiqué.

Observation (CEACR) - adoptée 2005, publiée 95ème session CIT (2006)

La commission prend note du rapport du gouvernement.

Article 4 de la convention. Arbitrage obligatoire. La commission rappelle qu’elle formule depuis de nombreuses années des commentaires sur la faculté, pour les parties à la négociation aussi bien que pour les autorités, de recourir au «dissídio colectivo» (arbitrage judiciaire obligatoire; art. 616 du Code consolidé des lois du travail). La commission note avec satisfaction que le gouvernement indique qu’en vertu de l’amendement constitutionnel no 45 en date du 8 décembre 2004 (réforme du pouvoir judiciaire; amendement à l’article 114) il n’est désormais possible de recourir au «dissídio colectivo» que s’il existe un accord dans ce sens entre les parties (c’est-à-dire qu’il ne sera plus possible de recourir de manière unilatérale à cette intervention du pouvoir judiciaire). La commission prie le gouvernement de fournir des informations sur l’application de cet amendement constitutionnel dans la pratique.

En outre, la commission note que le gouvernement indique qu’une fois que le projet de réforme syndicale élaboré sur la base d’un consensus tripartite dans le cadre du Forum national du travail sera devenu loi, il existera, pour résoudre les conflits, un nouveau système dont le principe de base sera l’incitation à recourir à des mécanismes volontaires de solution des conflits, comme la conciliation, la médiation ou l’arbitrage - par l’autorité judiciaire ou par un arbitre privé (par exemple l’article 188 du projet prévoit que, en cas d’échec de la négociation collective tendant à la conclusion ou à la reconduction d’une norme collective, les parties en conflit pourront, d’un commun accord, provoquer la saisine du tribunal du travail, de l’arbitre ou de l’organe arbitral dans le but d’instaurer certaines conditions de travail, de les modifier ou de les abroger). La commission prie le gouvernement de faire connaître dans son prochain rapport toute évolution du projet de réforme syndicale, notamment en ce qui concerne les dispositions qui pourraient être adoptées au sujet de l’arbitrage obligatoire en tant que moyen de solution des conflits.

Droit de négociation collective dans le secteur public. La commission rappelle qu’elle souligne depuis de nombreuses années la nécessité d’assurer que les fonctionnaires publics qui ne sont pas commis à l’administration de l’Etat jouissent du droit de négociation collective. La commission note que le gouvernement fait savoir que: 1) comme dit précédemment, il existe des limites d’ordre constitutionnel à la liberté d’action de l’administration publique, limites qui font obstacle à la négociation collective dans le secteur public; 2) il a été créé, dans le cadre du Forum national du travail, une chambre sectorielle chargée des questions concernant spécifiquement le secteur public, notamment des questions d’organisation syndicale, de négociation collective et de solution des conflits; 3) l’objectif est de transformer les résultats des discussions tenues par cette chambre en propositions législatives à transmettre à la présidence de la République en vue, ultérieurement, de leur présentation au Congrès national sous forme d’un projet de loi portant amendement de la Constitution; 4) il a été institué en juin 2003 dans le cadre de la fonction publique fédérale un Conseil national de négociation permanente (MNNP) composé de représentants de huit ministères et de l’ensemble des instances représentatives des agents des services publics fédéraux; 5) ce conseil a été mis en place pour garantir la démocratisation des relations du travail à travers l’instauration d’un système permanent de négociation collective, et l’un de ses principaux objectifs est de rechercher des solutions négociées aux intérêts exprimés par les agents des services publics et par l’administration publique fédérale; 6) même si certaines limites sont encore en place, des progrès sont enregistrés en ce qui concerne la négociation collective dans le secteur public.

La commission prie le gouvernement d’indiquer dans son prochain rapport les mesures prises en vue de garantir que les fonctionnaires qui ne sont pas affectés à l’administration de l’Etat jouissent du droit de négociation collective. Elle le prie en particulier d’indiquer si une proposition d’amendement de la Constitution a été présentée à ce sujet et d’exposer les questions qui ont été traitées dans le cadre du MNNP.

En dernier lieu, la commission rappelle qu’elle se référait dans ses observations antérieures à la nécessité d’abroger l’article 623 du Code consolidé des lois du travail (CLT), en vertu duquel sont réputées nulles et non avenues les dispositions d’une convention ou d’un accord qui seraient contraires aux normes de la politique économique et financière du gouvernement ou à sa politique salariale. La commission note que le gouvernement déclare que l’autorité judiciaire a estimé que les sentences peuvent donner lieu dans certains cas à une réglementation qui s’impose devant une lacune du droit mais que, lorsqu’une loi est adoptée, elle prime sur toute source de droit d’ordre secondaire (conventions, accords, etc.) rendant nulles de plein droit les dispositions de toute convention collective ou accord collectif qui seraient contraires à une interdiction ou une réglementation qui émane du gouvernement ou qui se réfère à la politique salariale en vigueur; de même, les ajustements salariaux prévus dans les conventions collectives sont conclus entre les parties en accord avec la réalité du moment, compte tenu de la santé financière des entreprises et étant entendu que tout nouveau contexte économique et social qui différerait profondément de celui dans lequel l’accord a été conclu interdirait de prétendre maintenir intacte une condition se révélant incompatible avec la réalité nouvelle.

La commission souligne à ce propos que, sauf circonstances exceptionnelles, ce sont les parties à la négociation collective qui sont le mieux placées pour déterminer les salaires, et elle considère que la restriction posée par l’article 623 du CLT affecte l’autonomie des partenaires sociaux dans le cadre de la négociation collective et n’est aucunement de nature à favoriser des procédures de négociation collective volontaire entre les employeurs ou leurs organisations et les organisations de travailleurs pour déterminer les conditions d’emploi. Dans ces circonstances, la commission prie une fois de plus le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour abroger la disposition législative en question et de faire état dans son prochain rapport des mesures prises à cet égard.

La commission adresse également au gouvernement une demande directe sur d’autres points.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2003, publiée 92ème session CIT (2004)

La commission demande de nouveau au gouvernement de communiquer dans son prochain rapport copie du décret no 3735 du 24 janvier 2001 en vertu duquel a été tacitement abrogé (selon ce que le gouvernement avait indiqué dans son rapport précédent) le décret no 908 du 31 août 1993. Ce dernier décret limite la négociation collective en matière de salaire dans les entreprises publiques et les sociétés d’économie mixte en subordonnant les hausses salariales en termes réels à certains critères, par exemple l’augmentation de la productivité, la distribution de dividendes ou la compatibilité de la rémunération globale des salariés avec les niveaux de salaire sur le marché du travail.

Enfin, la commission note que la loi no 10192 de février 2001 sur les mesures complémentaires applicables au plan Real indiquent, à son article 13, qu’il est interdit de prévoir dans les accords, conventions ou «dissídios colectivos» des clauses de réajustement ou de correction automatique des salaires liées à l’indice des prix. A ce sujet, dans son étude d’ensemble de 1994 sur la liberté syndicale et la négociation collective, la commission a rappelé que, «si au nom d’une politique de stabilisation économique ou d’ajustement structurel, c’est-à-dire pour des raisons impérieuses d’intérêt national économique, les taux de salaire ne peuvent pas être fixés librement par la négociation collective, ces restrictions doivent être appliquées comme une mesure d’exception, se limiter au nécessaire, ne pas dépasser une période raisonnable et être assorties de garanties appropriées pour protéger effectivement le niveau de vie des travailleurs concernés, notamment ceux qui risquent d’être les plus touchés» (paragr. 260). Dans ces conditions, notant que presque trois ans se sont écoulés depuis l’adoption de la loi en question, la commission demande au gouvernement de prendre des mesures pour modifier les dispositions susmentionnées, afin de favoriser la négociation collective libre et volontaire entre les parties. La commission demande au gouvernement de l’informer dans son prochain rapport sur toute mesure adoptée à cet égard.

Observation (CEACR) - adoptée 2003, publiée 92ème session CIT (2004)

La commission prend note du rapport du gouvernement. Elle prend aussi note des observations du gouvernement à propos de la communication de la Centrale unique des travailleurs (CUT) en date du 10 octobre 2002, qui se réfère à deux  points sur lesquels la commission formule des commentaires depuis plusieurs années (recours au «dissídio coletivo»- arbitrage obligatoire du pouvoir judiciaire - et nécessité que les fonctionnaires qui ne sont pas commis à l’administration de l’Etat jouissent du droit de négociation collective).

La commission note que le gouvernement indique ce qui suit au sujet de la possibilité qu’ont l’une des parties à la négociation collective ou les autorités de recourir au «dissídio coletivo» (arbitrage judiciaire obligatoire; art. 616 du Code consolidé des lois du travail): 1) il ressort des décisions du Tribunal supérieur du travail une tendance à la baisse du nombre des «dissídios coletivos» depuis la deuxième moitié des années quatre-vingt-dix (sont jointes des statistiques qui indiquent que ce nombre est passé de 2 725 en 1990 à 713 en 2001); et 2) le projet de loi no 623/98 qui, entre autres, prévoyait la révision des compétences normatives des instances du travail de façon à leur permettre de faire du «dissídio coletivo» un arbitrage facultatif a étéécarté par le pouvoir législatif; le Congrès national a été saisi d’un nouveau projet (no 16/84) qui vise à faire adopter le texte de la convention no 87. Dans ces conditions, la commission exprime l’espoir que l’article 616 du Code consolidé des lois du travail sera modifié afin que l’autorité judiciaire ne puisse recourir à l’arbitrage que dans les cas où les deux parties le demandent, en cas de services essentiels au sens strict du terme ou en cas de crise nationale grave. La commission demande au gouvernement de l’informer de tout fait nouveau à cet égard.

A propos des commentaires qu’elle formule depuis plusieurs années, commentaires dont la CUT fait aussi mention, à savoir que les fonctionnaires qui ne sont pas commis à l’administration de l’Etat doivent jouir du droit de négociation collective, la commission prend note des indications suivantes du gouvernement: 1) en raison d’une disposition constitutionnelle qui prévoit que leur rémunération ne peut être fixée ou modifiée que par une loi spécifique, les fonctionnaires ne jouissent pas du droit de négociation collective; 2) comme le gouvernement l’avait indiqué précédemment, est envisagée une réforme administrative qui prévoit divers régimes d’engagement de personnel dans l’administration publique afin de donner la possibilitéà certaines catégories de fonctionnaires de recourir à la négociation collective pour fixer leurs conditions d’emploi, comme c’est déjà le cas dans les entreprises publiques ou les sociétés d’économie mixte; 3) compte tenu de la tendance de la jurisprudence, le Tribunal supérieur du travail a confirmé l’interprétation selon laquelle les fonctionnaires ne jouissent pas du droit de conclure des accords ou des conventions collectives du travail. A cet égard, la commission demande au gouvernement d’indiquer dans son prochain rapport toutes mesures prises pour que les fonctionnaires qui ne sont pas commis à l’administration de l’Etat puissent jouir du droit de négociation collective.

La commission note que le gouvernement n’a pas répondu à propos de ses commentaires sur la nécessité d’abroger l’article 623 du Code consolidé des lois du travail, en vertu duquel sont réputées nulles et non avenues les dispositions d’une convention ou d’un accord qui seraient contraires aux normes de la politique économique et financière du gouvernement ou à sa politique salariale. La commission estime qu’une restriction de ce type nuit à l’autonomie des partenaires sociaux dans la négociation collective et ne permet pas de promouvoir les procédures de négociation collective volontaires entre les employeurs ou leurs organisations, d’une part, et les organisations de travailleurs, d’autre part, en vue d’établir les conditions d’emploi. Dans ces conditions, la commission demande au gouvernement de prendre des mesures pour abroger la disposition législative susmentionnée.

Enfin, la commission note avec intérêt que, selon le gouvernement, a été constitué le Forum national du travail afin de revoir la législation syndicale et du travail. Le forum réunira les partenaires sociaux liés au monde du travail et aura pour principal objectif de démocratiser les relations de travail, et d’adapter la législation à la nouvelle réalité du marché du travail, en favorisant l’adoption d’un régime de liberté et d’autonomie syndicale conforme aux conventions et recommandations de l’OIT. Selon le gouvernement, il est à espérer que, lorsque le forum aura achevé ses travaux, toutes les entraves à la pleine liberté syndicale et la négociation collective qui existent actuellement dans la législation auront étééliminées. La commission exprime l’espoir que les travaux du forum s’achèveront prochainement et qu’il sera tenu compte des commentaires qu’elle formule depuis plusieurs années en vue de rendre la législation pleinement conforme à la convention.

Observation (CEACR) - adoptée 2002, publiée 91ème session CIT (2003)

La commission prend note des informations transmises par la Centrale unique des travailleurs (CUT) dans une communication du 10 octobre 2002 qui porte sur l’application de la convention. La commission demande au gouvernement d’adresser dans son prochain rapport ses commentaires à ce sujet ainsi que sur les autres questions en instance afin qu’elle puisse les examiner à sa prochaine session.

Demande directe (CEACR) - adoptée 2001, publiée 90ème session CIT (2002)

La commission prend note du rapport du gouvernement.

La commission rappelle que, dans sa demande directe précédente, elle s’était référée au décret no 908 du 31 août 1993 qui limite la négociation collective en matière de salaire dans les entreprises publiques et les sociétés d’économie mixte en subordonnant les hausses salariales en termes réels à certains critères, par exemple l’augmentation de la productivité, la distribution de dividendes ou la compatibilité de la rémunération globale des salariés avec les niveaux en vigueur sur le marché du travail. La commission note que le gouvernement l’informe de ce qui suit: 1) le décret en question a été tacitement abrogé par le décret no 3735 du 24 janvier 2001 qui établit les principes directeurs applicables aux entreprises publiques fédérales; 2) dans la pratique, en vertu des décrets en question, le ministère de la Planification, du Budget et de la Gestion donne des instructions aux ministères qui supervisent les entreprises publiques fédérales à propos des paramètres, critères et indicateurs à observer dans la négociation collective, en particulier en ce qui concerne les activités des entreprises, le niveau des salaires sur le marché du travail et l’impact des salaires sur les dépenses publiques. La commission demande au gouvernement de lui communiquer, dans son prochain rapport, une copie du décret no 3735 du 24 janvier 2001.

Observation (CEACR) - adoptée 2001, publiée 90ème session CIT (2002)

La commission prend note du rapport du gouvernement.

Article 4 de la convention. 1. La commission fait observer que, depuis plusieurs années, ses commentaires concernent notamment la nécessité d’abroger l’article 623 du Code consolidé des lois du travail (CLT), en vertu duquel sont réputées nulles et non avenues les dispositions d’une convention ou d’un accord qui seraient contraires aux normes sur lesquelles se fonde la politique économique et financière du gouvernement ou sa politique salariale. A propos des articles 611 à 625 du CLT, le gouvernement indique que, ces dernières années, le pouvoir exécutif a adressé au Congrès national divers projets de modification de la législation du travail se caractérisant au premier chef par le souci d’encourager la négociation en tant que mécanisme de solution des conflits entre employeurs et travailleurs. La commission prie le gouvernement d’indiquer à cet égard si certains de ces projets prévoient l’abrogation de l’article 623 du CLT et, dans la négative, de prendre des mesures en vue de l’abrogation effective de cet article. Elle le prie également de faire état, dans son prochain rapport, de toute mesure concrète prise à cet effet.

2. Par ailleurs, la commission note que le gouvernement signale qu’en vue de supprimer les obstacles auxquels se heurte la liberté syndicale le pouvoir exécutif a saisi le Congrès d’une proposition d’amendement constitutionnel (623/98) prévoyant notamment la révision du pouvoir normatif des instances du travail dans un sens qui permettrait à cet organe de proposer un arbitrage facultatif, à la demande des deux parties, dans des conflits collectifs à caractère économique. La commission constate effectivement que, sous le titre IV du Code consolidé des lois du travail, qui porte sur les conventions collectives du travail, l’article 616 prévoit qu’en cas d’impossibilité de négocier collectivement les syndicats ou les entreprises peuvent recourir au départage collectif («dissidío-collectivo», procédure se déroulant devant les tribunaux du travail). De plus, lorsque cette procédure est inscrite dans une convention, dans un accord ou dans une sentence en vigueur, elle doit être exercée dans les soixante jours qui suivent l’expiration de l’instrument considéré pour que le nouvel instrument puisse entrer en vigueur à l’expiration de l’ancien. Sur ce plan, lors de la mission d’assistance technique menée par le Bureau en 1999, il avait été constaté une diminution marquée des recours formés dans ce sens devant les tribunaux susvisés. Compte tenu de ces éléments et du fait que plus de trois ans se sont écoulés depuis la présentation du projet no 623/98, la commission prie le gouvernement de l’informer dans son prochain rapport de l’état d’avancement dudit projet et, dans le cas où il aurait été mis à l’écart, de prendre des dispositions en vue de modifier l’article 616 du CLT de telle sorte que le recours à l’arbitrage des tribunaux du travail soit limité aux cas dans lesquels les deux parties le demandent, à ceux qui concernent des services essentiels au sens strict du terme ou encore aux circonstances dans lesquelles il apparaît que, malgré des négociations prolongées, le blocage ne pourra être surmonté sans une initiative des autorités. La commission prie le gouvernement de communiquer des statistiques illustrant la mesure dans laquelle la procédure de «départage collectif» est utilisée.

Articles 4 et 6. 3. La commission rappelle que, depuis de nombreuses années, ses commentaires portent également sur le fait que les fonctionnaires qui ne sont pas commis à l’administration de l’Etat doivent avoir le droit de négocier collectivement. Le gouvernement indique que: 1) les fonctionnaires ne jouissent pas du droit de négocier collectivement et leurs conditions de travail sont fixées par voie de législation; 2) la possibilité existe, pour certaines catégories de fonctionnaires considérées comme atypiques (fonctionnaires d’entreprises d’Etat ou de sociétés d’économie mixte), de recourir à la négociation collective pour modifier leurs conditions d’emploi, mais l’exercice de cette faculté est suspendu à une réforme administrative et à l’extension des normes en voie d’adoption aux relations du travail propres à certains secteurs de l’Etat. La commission rappelle avoir relevé, dans sa précédente observation, qu’il ressortait du rapport de la mission d’assistance technique de 1999 que, pour que ce droit soit reconnu à toutes les catégories de fonctionnaires, il serait nécessaire d’apporter un amendement à la Constitution et que le Secrétaire exécutif au travail avait indiquéà la mission qu’une discussion pourrait s’engager sur la négociation collective dans les collectivités locales et les fondations publiques dans le cadre du nouveau système de réforme administrative, attendu que ces entités ne sont pas au coeur des fonctions essentielles de l’Etat. Compte tenu de ces éléments, la commission prie le gouvernement de l’informer dans son prochain rapport de toute mesure prise pour que les fonctionnaires concernés jouissent effectivement de ce droit.

Demande directe (CEACR) - adoptée 1999, publiée 88ème session CIT (2000)

La commission note que le décret no 908 du 31 août 1993 limite la négociation collective en matière de salaires dans les entreprises publiques et les sociétés d'économie mixte en subordonnant les hausses salariales en termes réels à certains critères, par exemple l'augmentation de la productivité, la distribution de dividendes ou la compatibilité de la rémunération globale des salariés avec les niveaux en vigueur sur le marché du travail. La commission prie le gouvernement de lui fournir des informations sur la manière dont le décret est appliqué dans la pratique.

Observation (CEACR) - adoptée 1999, publiée 88ème session CIT (2000)

La commission prend note du rapport du gouvernement. De plus, elle note qu'une mission d'assistance technique s'est trouvée au Brésil du 26 au 30 avril 1999. A cet égard, la commission a pris connaissance des informations communiquées par le gouvernement.

1. Article 4 de la convention. Nullité des dispositions d'une convention ou d'un accord qui sont contraires aux normes que fixent la politique économique financière du gouvernement ou la politique salariale en vigueur (art. 623 de la Consolidation des lois du travail (CLT)). La commission note qu'il ressort du rapport du gouvernement et du rapport de la mission que le gouvernement et les partenaires sociaux sont d'accord sur l'abrogation de l'article susmentionné, qui ne s'applique pas dans la pratique, et le gouvernement envisage de le faire lors de la prochaine réforme de la législation. La commission espère que cette abrogation sera effectuée prochainement.

2. Articles 4 et 6. Droit de négociation collective des fonctionnaires qui ne sont pas commis à l'administration de l'Etat. La commission constate, à la lecture du rapport de la mission, qu'une réforme constitutionnelle serait nécessaire pour que toutes les catégories de fonctionnaires jouissent de ce droit. Par ailleurs, la commission note que le Secrétaire général du travail a indiqué à la mission qu'un débat pourrait être ouvert sur la négociation collective dans les entités autonomes et les fondations publiques, dans le cadre du nouveau modèle de réforme administrative, étant donné que ces entités ne relèvent pas des fonctions essentielles de l'Etat.

3. Enfin, la commission note que, pendant la visite de la mission, il a semblé opportun d'organiser un séminaire tripartite auquel participerait le BIT pour débattre de la négociation collective en général, y compris dans la fonction publique et dans le secteur public.

4. La commission prie le gouvernement de l'informer dans son prochain rapport sur toute mesure adoptée à propos des questions susmentionnées.

Observation (CEACR) - adoptée 1998, publiée 87ème session CIT (1999)

La commission note que, bien que n'étant pas tenu de le faire pour la présente session, le gouvernement a communiqué un rapport ayant trait aux diverses questions qu'elle avait soulevées dans sa précédente observation. Elle se propose d'analyser ce rapport à sa prochaine session, dans le cadre de l'examen régulier des rapports relatifs à la convention. La commission prend note avec intérêt que le gouvernement est prêt à recevoir une mission technique du BIT en avril 1999.

Par ailleurs, en ce qui concerne les commentaires formulés par le Sindicato dos Arrumádores de Sao Sebastiao et le Sindicato dos Estivadores de Sao Sebastiao en juin 1997, la commission prend note des discussions ayant eu lieu au sein de la Commission de la Conférence en juin 1998 au sujet de l'application de cette convention par le Brésil et de la réponse du gouvernement à ces commentaires. Les organisations syndicales susnommées déclarent que: i) le gouvernement, en invoquant une supposée déréglementation professionnelle de l'activité portuaire, a promulgué la loi fédérale no 8630/93 portant régime juridique d'exploitation des ports organisés et installations portuaires, qui abroge la section VII du corpus des lois du travail et autres décrets traitant de la matière, de sorte que cette loi marque une régression; et ii) le gouvernement ne prend pas de mesures devant l'absence de volonté, de la part des employeurs du secteur, de conclure un instrument collectif du travail, bien que la loi fédérale no 8630/93 stipule qu'il est nécessaire de pouvoir compter sur un instrument de cette nature.

La commission note qu'en réponse à ces commentaires le gouvernement déclare que: i) il était nécessaire de procéder à une modernisation du système portuaire et c'est à cet effet qu'a été édictée la loi no 8630/93 du 25 février 1993, connue sous le nom de loi des ports, qui introduit divers changements dans le régime juridique d'exploitation des ports et met fin au monopole des syndicats du secteur portuaire en matière d'engagement de la main-d'oeuvre; ii) considérant que les changements de la législation imposent aux travailleurs du secteur portuaire une nouvelle réalité, un groupe exécutif a été constitué pour moderniser les ports, ce groupe étant compétent pour élaborer, mettre en oeuvre et superviser un programme intégré de modernisation portuaire, programme dans le cadre duquel a été élaboré un plan d'action gouvernemental ayant notamment pour objectif de consolider le processus de négociation collective; iii) entre autres éléments, l'évaluation faite par le groupe exécutif chargé de la modernisation des ports à propos de la situation du travail dans les ports a permis d'établir que le processus de négociation collective nécessiterait un renforcement de l'action de médiation et de contrôle des pouvoirs publics, compte tenu du fait que dans certains ports on relève des abus flagrants de la part des partenaires; iv) pour réaliser les objectifs du plan susmentionné, un groupe de travail tripartite sera constitué avec pour mission de proposer des solutions; et v) le ministère du Travail a programmé plusieurs initiatives axées sur la protection des travailleurs du secteur portuaire; il envisage notamment une proposition d'instrument normatif tendant à régler les relations du travail portuaires.

La commission prend note des informations du gouvernement. Elle rappelle que la convention no 98 "ne devrait en aucune façon être interprétée comme autorisant ou interdisant les clauses de sécurité syndicale et que de telles questions relèvent de la réglementation et de la pratique nationales. Les problèmes liés aux clauses de sécurité syndicale devraient donc être résolus sur le plan national, conformément à la pratique et au système de relations professionnelles de chaque pays" (voir étude d'ensemble de 1994 sur la liberté syndicale et la négociation collective, paragr. 205). La commission note par ailleurs que la loi no 8630/93 prévoit que tout contrat, convention collective ou accord conclu prévaudra sur ce que prévoit l'organe de gestion de la main-d'oeuvre du travail portuaire qui, entre autres attributions, doit administrer l'embauche de la main-d'oeuvre dans le secteur (art. 18 de la loi). A ce propos, elle relève que les organisations syndicales déclarent que les employeurs du secteur se refusent à conclure une convention collective du travail et que le gouvernement reconnaît l'existence d'abus dans le secteur portuaire de la part des deux partenaires sociaux en ce qui concerne la négociation collective. Dans ces conditions, notant que le gouvernement lui aussi a constaté des carences en matière de négociations collectives dans le secteur portuaire, la commission prie celui-ci de prendre, conformément à l'article 4 de la convention, des mesures de nature à encourager et promouvoir, entre les employeurs, d'une part, et les organisations de travailleurs, d'autre part, le développement et l'utilisation les plus larges de procédures de négociation volontaire de conventions collectives en vue de régler par ce moyen les conditions d'emploi dans le secteur portuaire. Exprimant l'espoir que cette question pourra être résolue de manière satisfaisante dans un proche avenir, elle adresse également un appel dans ce sens aux deux partenaires sociaux.

Observation (CEACR) - adoptée 1997, publiée 86ème session CIT (1998)

La commission prend note du rapport du gouvernement.

De même, elle prend note des commentaires formulés en juin 1997 à propos de l'application de la convention par les syndicats Sindicato dos Arrumadores et Sindicato dos estivadores de Sao Sebastiao. Elle prie le gouvernement de communiquer ses commentaires à ce sujet dans son prochain rapport.

Article 4 de la convention. La commission rappelle qu'elle avait évoqué dans sa précédente observation l'article 8, paragraphe 2, de la Mesure provisoire no 1079, qui comporte des dispositions complémentaires du "Plan Real" (plan de stabilisation économique adopté en 1994) prévoyant que, dans le cas où il n'existe pas d'indice des prix de substitution et où les parties ne se sont pas mises d'accord, on doit utiliser la moyenne de l'indice des prix de portée nationale, sous forme de réglementation devant être fixée par le pouvoir exécutif. A cet égard, la commission prend dûment note que le gouvernement indique dans son rapport que l'article 8 de la Mesure provisoire en question (qui porte en fait le no 1540-25 du 11 juin 1997 et non le no 1079) ne s'applique pas à la négociation collective puisque c'est l'article 10 de cette même mesure qui s'applique en la matière, lequel dispose que les salaires et autres conditions de travail continuent d'être fixés librement par voie de négociation collective.

A cet égard, constatant que l'article 10 de la Mesure provisoire précitée dispose que les salaires sont librement fixés par voie de négociation collective, la commission prie le gouvernement de préciser si cette Mesure provisoire a suspendu temporairement l'article 623 de la Consolidation des lois du travail (CLT) dans sa teneur telle que modifiée par la loi no 5584 du 26 juin 1970 et par le décret-loi no 229 du 28 février 1967. Ces instruments, qui confèrent aux autorités de vastes pouvoirs pour annuler les conventions collectives ou les sentences arbitrales non conformes aux règles fixées par la politique salariale définie par le gouvernement, font l'objet de critiques de la part de la commission depuis de nombreuses années. En tout état de cause, considérant que le gouvernement a déclaré dans son rapport de 1996 que l'article 623 de la CLT est "purement virtuel" et n'a pas été invoqué ces dernières années, la commission invite le gouvernement à abroger formellement cette disposition, qui restreint la liberté de négocier collectivement.

Articles 4 et 6. Par ailleurs, la commission rappelle que dans une précédente demande directe elle avait rappelé au gouvernement la nécessité de prendre des mesures de nature à favoriser l'élaboration d'une procédure complète de négociation collective et l'utilisation d'une telle procédure dans le but de réglementer, par voie de conventions collectives, les conditions d'emploi des fonctionnaires publics non commis à l'administration de l'Etat (en 1994, le gouvernement avait fait savoir que la Cour suprême fédérale avait déclaré anticonstitutionnel l'alinéa d) de l'article 240 de la loi no 8112 de 1990 reconnaissant ce droit aux salariés du secteur public). La commission note que le gouvernement indique que le Congrès national est actuellement saisi de diverses mesures tendant à la mise en oeuvre d'une réforme administrative au niveau fédéral. Elle exprime l'espoir que les mesures devant être adoptées prévoiront que les fonctionnaires n'exerçant pas les activités propres à l'administration de l'Etat jouissent du droit de négocier collectivement leurs conditions de travail. La commission prie le gouvernement de l'informer dans son prochain rapport de toute mesure prise à cet égard.

Enfin, la commission note que le gouvernement indique que les divers projets de loi sur la négociation collective en sont actuellement à diverses étapes de la procédure. A cet égard, la commission prie le gouvernement de faire connaître dans son prochain rapport le cours suivi par ces projets et de lui communiquer copie de ces instruments dès qu'ils auront été adoptés.

Demande directe (CEACR) - adoptée 1996, publiée 85ème session CIT (1997)

La commission rappelle que, dans ses commentaires précédents, elle avait noté avec regret l'indication du gouvernement selon laquelle les agents de la fonction publique, même lorsqu'ils ne sont pas commis à l'administration de l'Etat, ne peuvent négocier collectivement leurs conditions d'emploi. A cet égard, la commission avait demandé au gouvernement d'indiquer les mesures qu'il envisageait prendre pour promouvoir la négociation collective pour ces catégories de travailleurs.

La commission prend bonne note du fait que, conformément à ce qu'avait indiqué le gouvernement, le pouvoir exécutif va envoyer prochainement au Congrès national un projet de réforme constitutionnelle proposant des changements significatifs dans l'organisation de l'Etat et dans le statut des agents de la fonction publique, lequel établira une distinction entre les fonctionnaires commis à l'administration de l'Etat et les autres agents. Il faut espérer que les décisions du congrès en la matière porteront aussi sur la négociation collective dans le secteur public.

La commission espère que, dans les changements susmentionnés, il sera tenu compte des commentaires de la commission pour encourager et promouvoir le développement et l'utilisation les plus larges des procédures de négociation volontaire en vue de régler par ce moyen les conditions d'emploi des agents de la fonction publique qui ne sont pas commis à l'administration de l'Etat.

La commission demande au gouvernement de la tenir informée de toute évolution à cet égard.

En outre, la commission a pris note des commentaires du Syndicat des travailleurs des eaux et des égouts de Bahia et de la Fédération nationale des arrimeurs ainsi que des réponses du gouvernement.

Observation (CEACR) - adoptée 1996, publiée 85ème session CIT (1997)

La commission rappelle que ses précédents commentaires portaient sur les questions suivantes.

La commission avait demandé au gouvernement de joindre à ses rapports tous les textes adoptés, ayant trait à la politique salariale ainsi qu'à la fixation et au réajustement des salaires.

La commission note à cet égard que le 28 juillet 1995 le gouvernement a adopté la Mesure provisoire no 1079, qui contient les dispositions complémentaires au "Plan Real" (Plan de stabilisation économique, adopté en 1994), et qui régissent les réajustements salariaux et la négociation collective, en abrogeant toutes les instructions pertinentes qui étaient en vigueur jusqu'à sa date de publication. A cet égard, la commission note avec intérêt que l'article 8, paragraphe 1, de la Mesure provisoire de référence dispose qu'à partir du 1er juillet 1995, s'agissant des obligations et conventions basées sur l'Indice des prix à la consommation (IPC), seront remplacées par un indice prévu par convention pour chaque cas. De même, l'article 10 dispose que les salaires et autres conditions de travail continueront d'être fixés ou révisés par libre négociation collective, à l'échéance annuelle.

Cependant, la commission observe que le paragraphe 2 de l'article 8 de la Mesure provisoire no 1079 dispose que, dans l'hypothèse où ne serait pas prévu d'indice des prix de substitution, au cas où les parties ne se seraient pas mises d'accord, il conviendrait d'utiliser un indice moyen des prix de couverture nationale, sous forme de réglementation que devrait établir le pouvoir exécutif.

La commission avait aussi rappelé au gouvernement la nécessité d'abroger les dispositions de caractère général qui sont en contradiction avec les dispositions de l'article 4 de la convention, en particulier l'article 623 sur la "consolidation des lois du travail", dans sa teneur modifiée par la loi no 5584 du 26 juin 1970, et le décret-loi no 229 du 28 février 1967, qui confèrent d'amples pouvoirs aux autorités pour annuler les conventions collectives ou les sentences arbitrales non conformes aux règles fixées par la politique salariale poursuivie par le gouvernement.

A cet égard, la commission prend note des informations fournies par le gouvernement, relatives à sa proposition visant à faire de la négociation collective un instrument normatif fondamental de la politique salariale, et du fait que la législation du travail du Brésil devra être radicalement modifiée pour tenir compte, d'une part, des principes de la liberté syndicale et de la libre négociation inscrits dans la Constitution et, d'autre part, des nouveaux modèles d'organisation de la production du travail.

A cet égard, la commission prend acte du fait que, le 10 août 1995, le ministère du Travail a créé une Commission permanente de législation sociale, constituée de juristes nationaux spécialisés dans le droit du travail, et dont les principales attributions consistent à traiter des questions relatives aux relations de travail, dont l'importance et l'urgence appellent de la part dudit ministère des propositions et des mesures, l'examen de projets de loi, des prises de position sur les conventions et recommandations internationales et l'établissement de rapports pour l'OIT.

Compte tenu de ce qui précède, la commission a bon espoir qu'un cadre adéquat a été créé qui permettra au gouvernement d'adopter, dans un avenir proche, les mesures spécifiques afin que, aussi bien dans la législation que dans la pratique, soient encouragés et favorisés entre les organisations d'employeurs et de travailleurs le développement et l'utilisation les plus larges des procédures de négociation volontaire en vue de régler par ce moyen les conditions d'emploi, ainsi que le prévoit l'article 4 de la convention.

La commission constate avec regret que le gouvernement n'a pas fourni d'informations sur le projet de loi no 821 du 21 avril 1991 et prend note du projet de loi no 1232-A/91 relatif à la négociation collective. La commission demande au gouvernement de préciser à quel stade en sont ces projets de lois et de fournir copie du texte qui aura été approuvé.

Demande directe (CEACR) - adoptée 1995, publiée 83ème session CIT (1996)

La commission prend note du rapport du gouvernement et rappelle que, dans ses commentaires précédents, elle avait noté avec regret l'indication du gouvernement selon laquelle les agents de la fonction publique, même lorsqu'ils ne sont pas commis à l'administration de l'Etat, ne peuvent négocier collectivement leurs conditions d'emploi. A cet égard, la commission avait demandé au gouvernement d'indiquer les mesures qu'il envisageait prendre pour promouvoir la négociation collective pour ces catégories de travailleurs.

La commission prend bonne note du fait que, conformément à ce qu'avait indiqué le gouvernement, le pouvoir exécutif va envoyer prochainement au Congrès national un projet de réforme constitutionnelle proposant des changements significatifs dans l'organisation de l'Etat et dans le statut des agents de la fonction publique, lequel établira une distinction entre les fonctionnaires commis à l'administration de l'Etat et les autres agents. Il faut espérer que les décisions du congrès en la matière porteront aussi sur la négociation collective dans le secteur public.

La commission espère que, dans les changements susmentionnés, il sera tenu compte des commentaires de la commission pour encourager et promouvoir le développement et l'utilisation les plus larges des procédures de négociation volontaire en vue de régler par ce moyen les conditions d'emploi des agents de la fonction publique qui ne sont pas commis à l'administration de l'Etat.

La commission demande au gouvernement de la tenir informée de toute évolution à cet égard.

Observation (CEACR) - adoptée 1995, publiée 83ème session CIT (1996)

La commission prend note du rapport du gouvernement et rappelle que ses précédents commentaires portaient sur les questions suivantes.

La commission avait demandé au gouvernement de joindre à ses rapports tous les textes adoptés, ayant trait à la politique salariale ainsi qu'à la fixation et au réajustement des salaires.

La commission note à cet égard que le 28 juillet 1995 le gouvernement a adopté la Mesure provisoire no 1079, qui contient les dispositions complémentaires au "Plan Real" (Plan de stabilisation économique, adopté en 1994), et qui régissent les réajustements salariaux et la négociation collective, en abrogeant toutes les instructions pertinentes qui étaient en vigueur jusqu'à sa date de publication. A cet égard, la commission note avec intérêt que l'article 8, paragraphe 1, de la Mesure provisoire de référence dispose qu'à partir du 1er juillet 1995, s'agissant des obligations et conventions stipulées comme base de l'Indice des prix à la consommation (IPC), celui-ci sera remplacé par un indice prévu par convention pour chaque cas. De même, l'article 10 dispose que les salaires et autres conditions de travail continueront d'être fixés ou révisés par libre négociation collective, à l'échéance annuelle.

Cependant, la commission observe que le paragraphe 2 de l'article 8 de la Mesure provisoire no 1079 dispose que, dans l'hypothèse où ne serait pas prévu d'indice des prix de substitution, au cas où les parties ne se seraient pas mises d'accord, il conviendrait d'utiliser un indice moyen des prix de couverture nationale, sous forme de réglementation que devrait établir le pouvoir exécutif.

La commission avait aussi rappelé au gouvernement la nécessité d'abroger les dispositions de caractère général qui sont en contradiction avec les dispositions de l'article 4 de la convention, en particulier l'article 623 sur la "consolidation des lois du travail", dans sa teneur modifiée par la loi no 5584 du 26 juin 1970, et le décret-loi no 229 du 28 février 1967, qui confèrent d'amples pouvoirs aux autorités pour annuler les conventions collectives ou les sentences arbitrales non conformes aux règles fixées par la politique salariale poursuivie par le gouvernement.

A cet égard, la commission prend note des informations fournies par le gouvernement, relatives à sa proposition visant à faire de la négociation collective un instrument normatif fondamental de la politique salariale, et du fait que la législation du travail du Brésil devra être radicalement modifiée pour tenir compte, d'une part, des principes de la liberté syndicale et de la libre négociation inscrits dans la Constitution et, d'autre part, des nouveaux modèles d'organisation de la production du travail.

A cet égard, la commission prend acte du fait que, le 10 août 1995, le ministère du Travail a créé une Commission permanente de législation sociale, constituée de juristes nationaux spécialisés dans le droit du travail, et dont les principales attributions consistent à traiter des questions relatives aux relations de travail, dont l'importance et l'urgence appellent de la part dudit ministère des propositions et des mesures, l'examen de projets de loi, des prises de position sur les conventions et recommandations internationales et l'établissement de rapports pour l'OIT.

Compte tenu de ce qui précède, la commission a bon espoir qu'un cadre adéquat a été créé qui permettra au gouvernement d'adopter, dans un avenir proche, les mesures spécifiques afin que, aussi bien dans la législation que dans la pratique, soient encouragés et favorisés entre les organisations d'employeurs et de travailleurs le développement et l'utilisation les plus larges des procédures de négociation volontaire en vue de régler par ce moyen les conditions d'emploi, ainsi que le prévoit l'article 4 de la convention.

La commission constate avec regret que le gouvernement n'a pas fourni d'informations sur le projet de loi no 821 du 21 avril 1991 et prend note du projet de loi no 1232-A/91 relatif à la négociation collective, dont il est fait état dans le rapport sur la convention no 154, ratifiée par le Brésil. La commission demande au gouvernement de préciser à quel stade en sont ces projets de lois et de fournir copie du texte qui aura été approuvé.

Demande directe (CEACR) - adoptée 1994, publiée 81ème session CIT (1994)

Articles 4 et 6 de la convention. Faisant suite à ses commentaires antérieurs, la commission note avec regret la réponse du gouvernement dans son rapport, selon laquelle les fonctionnaires publics qui ne sont pas commis à l'administration de l'Etat ne peuvent pas négocier collectivement leurs conditions d'emploi. Le gouvernement précise à cet égard que le Tribunal fédéral suprême a déclaré inconstitutionnel l'alinéa d) de l'article 240 de la loi no 8112 de 1990, qui accordait ce droit aux employés publics.

La commission rappelle qu'en vertu de l'article 4 de la convention des mesures appropriées aux conditions nationales doivent être prises pour encourager et promouvoir le développement et l'utilisation les plus larges de procédures de négociation de conventions collectives en vue de régler par ce moyen les conditions d'emploi. La commission rappelle également qu'elle a considéré que l'exclusion du champ d'application de la convention des personnes employées par l'Etat ou dans le secteur public, autres que celles commises à l'administration de l'Etat, est contraire au sens de la convention.

De l'avis de la commission, on ne peut envisager que des catégories importantes de travailleurs qui sont employés par l'Etat puissent être exclues du bénéfice de la convention du seul fait qu'elles sont formellement assimilées à certains fonctionnaires publics dont les activités sont propres à l'administration de l'Etat. S'il en était ainsi, la convention serait privée d'une partie de sa portée. Il convient donc de distinguer entre les fonctionnaires dont les activités sont propres à l'administration de l'Etat et les autres personnes employées par le gouvernement, les entreprises publiques ou les institutions publiques autonomes. Seuls les fonctionnaires publics commis à l'administration de l'Etat peuvent être exclus du champ de protection de la convention (Etude d'ensemble de 1994 sur la liberté syndicale et la négociation collective, paragr. 200).

La commission prie le gouvernement d'indiquer dans son prochain rapport quelles mesures il envisage de prendre, conformément à la convention, pour encourager la négociation collective pour cette catégorie de travailleurs.

Observation (CEACR) - adoptée 1994, publiée 81ème session CIT (1994)

La commission prend note du rapport du gouvernement ainsi que des discussions qui ont eu lieu à la Commission de la Conférence en 1991.

Article 4 de la convention. Mesures à prendre pour encourager et promouvoir le développement et l'utilisation des procédures de négociation volontaire des conventions collectives.

a) Régime général

Dans sa précédente observation, la commission avait souhaité que le gouvernement fasse état des mesures prises dans le cadre de sa politique économique pour élargir le champ des négociations collectives et pour associer les partenaires sociaux à sa politique salariale. La commission note les explications d'un représentant gouvernemental à la Commission de la Conférence. Elle note également que ladite commission avait exprimé le ferme espoir que le gouvernement serait en mesure de faire état dans son rapport à la présente commission des mesures prises, suite notamment à la soumission d'un projet de loi (sur les négociations collectives) au Congrès, pour mettre sa législation et sa pratique en conformité avec les exigences de la convention.

La commission constate que le rapport du gouvernement ne contient aucune information à cet égard.

Selon les informations fournies par le représentant gouvernemental à la Commission de la Conférence en 1991, la loi no 6708 - qui permettait d'exempter certaines entreprises des augmentations salariales prévues par conventions - avait été abrogée. La loi no 8178 du 1er mars 1991 établissait des règles relatives aux prix et aux salaires et ne reprenait pas les dispositions antérieures abrogées. Il s'agissait alors de l'unique texte en vigueur en matière de politique salariale. La commission croit savoir que depuis lors de nouveaux textes portant sur la politique salariale ont été adoptés, tels que la loi no 8542 du 23 décembre 1992, modifiée par la loi no 8700 du 27 août 1993. Elle note également que le représentant gouvernemental avait annoncé à la Commission de la Conférence qu'un projet de loi no 821 d'avril 1991, sur la négociation collective, avait été soumis au Congrès.

La commission, tout en étant consciente de la gravité de la situation économique et financière du pays, rappelle une fois de plus au gouvernement la nécessité d'abroger les dispositions générales qui contreviennent à l'article 4 de la convention, à savoir en particulier l'article 623 de la consolidation des lois du travail, tel qu'amendé par la loi no 5584 du 26 juin 1970, et le décret-loi no 229 du 28 février 1967 qui accorde de larges pouvoirs aux autorités pour annuler les conventions collectives ou les sentences arbitrales non conformes aux normes fixées par la politique salariale du gouvernement. La commission continue d'insister auprès du gouvernement pour que toutes les mesures de fixation des salaires soient adoptées dans le cadre d'un dialogue entre le gouvernement et les partenaires sociaux afin de parvenir à un accord entre les secteurs concernés sur la politique de fixation des salaires.

La commission prie également le gouvernement de fournir des informations précises sur le projet de loi no 821 du 21 avril 1991 et d'en communiquer le texte dès son adoption.

De manière plus générale, la commission prie le gouvernement de fournir avec chaque rapport tous les textes adoptés, notamment en matière de politique salariale, de fixation et de réajustement des salaires.

b) Régime applicable au secteur des entreprises publiques, sociétés d'économie mixte et autres entités contrôlées directement et indirectement par l'Etat

Dans sa précédente observation, la commission avait noté que les entreprises de ce secteur sont assujetties au régime juridique des entreprises privées (article 173, paragraphe 1, de la Constitution). A ce titre, la commission croit comprendre que les personnels de ces entreprises sont couverts par les lois successives portant sur la politique salariale, et elle se réfère donc aux commentaires formulés ci-dessus.

La commission note l'indication du représentant gouvernemental à la Commission de la Conférence, selon laquelle le Tribunal supérieur du travail a révisé sa jurisprudence et annulé une décision qui disposait qu'une convention collective conclue sans consultation préalable de l'organe officiel compétent ne lie pas une société d'économie mixte (résolution no 02/90 du 19 décembre 1990). La commission prie le gouvernement de fournir une copie de cette résolution et de la tenir informée de toute évolution de la situation dans ce domaine.

Demande directe (CEACR) - adoptée 1991, publiée 78ème session CIT (1991)

Articles 4 et 6 de la convention. La commission prie le gouvernement d'indiquer si les fonctionnaires, autres que ceux commis à l'administration de l'Etat, peuvent négocier collectivement leurs conditions d'emploi et, dans l'affirmative, en vertu de quelles dispositions législatives ou réglementaires.

Observation (CEACR) - adoptée 1991, publiée 78ème session CIT (1991)

La commission note les informations communiquées par le gouvernement dans son rapport ainsi que les discussions qui ont eu lieu à la Commission de la Conférence en 1989. Elle note également les commentaires de la Centrale unie des travailleurs (CUT) du 8 juillet 1990.

1. Article 1 de la convention (situation au sein de la Banque du Brésil). Dans ses commentaires, la CUT fait état d'une directive du président de la Banque du Brésil, dont l'objectif est de constituer un registre de noms des agents susceptibles d'être mis à pied dans le cadre de la politique de restructuration des effectifs. La commission note que cette directive met notamment l'accent sur les travailleurs qui "travaillent le moins et revendiquent le plus". La commission est d'avis que les critères de sélection retenus sont de nature à porter atteinte au droit syndical des travailleurs garanti par la Constitution et la législation nationale.

Dans ces conditions, la commission prie le gouvernement de fournir des informations sur la manière dont en pratique est mise en oeuvre la politique de restructuration du personnel de la Banque du Brésil, en indiquant notamment si les organisations syndicales participent à sa détermination et son application et si, en pratique, des mesures ont été prises ou sont envisagées pour garantir à ces travailleurs une protection adéquate contre tout acte de discrimination antisyndicale qui peut survenir dans le cadre de cette restructuration.

2. Article 4 de la convention. Mesures à prendre pour encourager et promouvoir le développement et l'utilisation des procédures de négociation volontaire des conventions collectives.

a) Régime général

Dans sa précédente observation, la commission avait souhaité que le gouvernement fasse état des mesures prises dans le cadre de sa politique économique pour élargir le champ des négociations collectives et pour associer les partenaires sociaux à sa politique salariale. Les conclusions de la Commission de la Conférence allaient également dans ce sens.

Au sujet des restrictions législatives contenues dans les articles 11 et 12 de la loi no 6.708 et dans l'article 623 de la consolidation des lois du travail, le gouvernement indique dans son rapport qu'un mécanisme de réajustement des salaires a été institué par la loi no 8.030 du 12 avril 1990 et par la mesure provisoire no 193 du 25 juin 1990. D'après le gouvernement, seul le salaire minimum est corrigé mensuellement en fonction de l'indice des prix à la consommation et fait l'objet d'une intervention. La fixation des autres salaires est laissée à la libre négociation qui est la seule façon de protéger efficacement le pouvoir d'achat, l'expérience des 20 dernière années ayant démontré que l'indexation des salaires et l'intervention de l'Etat dans la fixation des salaires ont conduit à une réduction significative de la valeur des salaires et à l'affaiblissement de la liberté de négociation. Le gouvernement affirme qu'il souhaite rétablir non seulement la valeur du salaire mais également l'esprit de libre négociation, qui doit présider aux négociations en matière de relations professionnelles, et il assure que sous peu il s'efforcera de lever toute entrave à la négociation collective.

La commission observe que les textes en question, tout en réaffirmant le principe constitutionnel de libre négociation collective, limitent la négociation collective dans le cadre de paramètres auxquels il est interdit de déroger, comme le soutient la CUT, qui objecte essentiellement à ces textes l'impossibilité d'obtenir la restitution des pertes de salaires dues à l'inflation. La commission constate également que le gouvernement ne fournit pas d'informations sur les mesures qui auraient pu être prises ou les mécanismes utilisés pour convaincre les partenaires sociaux d'adhérer à sa politique de rigueur économique.

La commission est consciente de la gravité de la situation économique et financière du pays, cependant elle rappelle au gouvernement la nécessité d'abroger les dispositions générales qui contreviennent à l'article 4 de la convention, à savoir l'article 623 de la consolidation des lois, tel qu'amendé par la loi no 5.584 du 26 juin 1970 et le décret-loi no 229 du 28 février 1967, qui accorde de larges pouvoirs aux autorités pour annuler les conventions collectives ou les sentences arbitrales non conformes aux normes fixées par la politique salariale du gouvernement, et les dispositions de la loi no 6.708 du 30 octobre 1979 qui permettent d'exclure les entreprises qui prouvent leur incapacité économique à supporter les augmentations de salaires du champ des conventions qui leur sont applicables. La commission insiste une fois de plus auprès du gouvernement pour que toutes mesures de fixation de salaires soient adoptées dans le cadre d'un dialogue entre le gouvernement et les partenaires sociaux afin de parvenir à un accord entre les secteurs concernés sur la politique de fixation des salaires.

b) Régime applicable au secteur des entreprises publiques, société d'économie mixte et autres entités contrôlées directement et indirectement par l'Etat

Se référant à la Constitution, la commission note que l'article 173, paragraphe 1, assujettit les entreprises de ce secteur au régime juridique des entreprises privées. A ce titre, la commission croit comprendre que les personnels de ces entreprises sont couverts par la loi no 8.030 du 12 avril 1990 et par la mesure provisoire no 193 du 25 juin 1990.

Dans ces conditions, la commission se réfère à ses commentaires formulés au paragraphe précédent. En outre, elle prie le gouvernement d'indiquer les mesures prises ou envisagées pour amender l'article 12 de la loi no 6.708 du 30 octobre 1979, qui soumet les conventions collectives conclues dans ce secteur aux résolutions adoptées par le Conseil national de politique salariale contrairement au principe constitutionnel de libre négociation collective et à l'article 4 de la convention.

La commission prie le gouvernement de la tenir informée de toute évolution de la situation en ce domaine.

Observation (CEACR) - adoptée 1989, publiée 76ème session CIT (1989)

La commission a pris note du rapport du gouvernement ainsi que des commentaires adressés par la Confédération nationale des transports terrestres en septembre 1987 et par la Confédération nationale de l'industrie en octobre 1987, sur l'application de la convention.

La commission note l'adoption de la nouvelle Constitution du 5 octobre 1988, en particulier les articles 7(XXVI) et 8(VI)(VIII) et 9, qui consacre le principe de la négociation collective et le droit de grève, lequel pourra être restreint dans les services essentiels définis par la loi.

1. Article 1 de la convention (protection des travailleurs contre des actes de discrimination antisyndicale). La commission note avec satisfaction que la loi no 7543 du 2 octobre 1986, modifiant l'article 543 3) de la Consolidation des lois du travail (CLT), prolonge la durée de l'interdiction de congédier un salarié ayant exercé des fonctions syndicales de 90 jours à une année, à compter de la fin de son mandat syndical. En outre, le principe selon lequel un dirigeant syndical ne peut être licencié, sauf faute grave, jusqu'à l'expiration du délai fixé par la loi no 7543 est inscrit dans la nouvelle Constitution (art. 8).

2. Dans son observation précédente, la commission avait demandé au gouvernement si les dispositions suivantes, objet de commentaires depuis plusieurs années, étaient toujours en vigueur:

- possibilité d'exclure les entreprises qui prouvent leur incapacité économique à supporter les augmentations de salaires du champ des conventions et faculté accordée auxdites entreprises d'exclure les augmentations (automatiques) de salaires (art. 11, 2) et 3), de la loi no 6708);

- larges pouvoirs des autorités d'annuler les conventions collectives ou les sentences arbitrales non conformes aux normes fixées par la politique salariale gouvernementale (art. 623 de la Consolidation des lois du travail dans sa teneur modifiée par le décret-loi no 229 du 28 février 1967 et art. 8 de la loi no 5584 du 26 juin 1970);

- ingérence du gouvernement en matière de convention collective et d'augmentation collective de salaires dans les sociétés d'économie mixte, les entreprises privées subventionnées par l'Etat ou concessionnaires de services publics, lesdites entreprises n'étant habilitées à conclure des conventions que "dans les termes des résolutions du Conseil national de la politique salariale" (art. 12 de la loi no 6708 du 30 octobre 1979).

Article 4 (droit des travailleurs de négocier librement leurs conditions d'emploi). La commission note, d'après le rapport du gouvernement, que le nombre d'accords et de conventions collectives s'accroît régulièrement et que la négociation collective demeure le mécanisme préféré pour résoudre les conflits du travail.

Se référant au décret-loi no 2335 du 12 juin 1987, la commission relève que le principe de la libre négociation des conditions d'emploi est réaffirmé (art. 9 dudit décret), mais qu'en ce qui concerne la question salariale la négociation se trouve être limitée au cadre fixé par la loi (art. 8 du décret-loi no 2335), comme le souligne d'ailleurs la Confédération nationale des transports terrestres dans ses commentaires. La commission prend note également des efforts du gouvernement pour associer les partenaires sociaux à sa politique économique qui ont abouti à la signature d'un accord anti-inflation par l'ensemble des partenaires sociaux, à l'exception de la CUT.

La commission croit comprendre cependant, d'après les informations disponibles, que depuis l'adoption de ces mesures le gouvernement est revenu à une politique de gel des prix et des salaires.

La commission est consciente des difficultés économiques auxquelles doit faire face le gouvernement; toutefois, se référant aux principes énoncés aux paragraphes 303 et suivants de son Etude d'ensemble de 1983 sur la liberté syndicale et la négociation collective, elle rappelle que les syndicats doivent avoir la possibilité de négocier librement des salaires avec les employeurs et leurs organisations, sans que des restrictions légales y fassent indûment obstacle. Si, pour des raisons majeures de politique économique, des mesures restrictives s'imposent en matière salariale, il convient d'envisager des mécanismes afin d'associer l'ensemble des partenaires sociaux à l'établissement et à la mise en oeuvre de la politique recherchée.

La commission espère que le gouvernement pourra dans un avenir rapproché revenir aux principes de la libre négociation collective et, à cet égard, reconsidérera les diverses dispositions objets de précédents commentaires qui semblent être toujours en vigueur (art. 623 de la CLT; art. 11 2) et 3) de la loi no 6708).

La commission demande donc au gouvernement de continuer à communiquer toute information sur les mesures prises ou envisagées, dans le cadre de sa politique salariale, visant à élargir le champ de la négociation collective relative aux salaires et/ou visant à associer les partenaires sociaux à ladite politique.

Article 4 (droit des travailleurs de certaines entreprises du secteur public de négocier librement leurs conditions d'emploi). La commission note qu'aux termes de l'article 7 du décret-loi no 2425 du 7 avril 1988, les entreprises publiques, les sociétés d'économie mixte, les entreprises privées subventionnées par l'Etat ou concessionnaires de services publics ne peuvent conclure de conventions ou accords collectifs que conformément aux résolutions adoptées par le Conseil interministériel des salaires des entreprises publiques (CISE) ou, le cas échéant, par le Conseil interministériel des rémunérations (CIRP), et compte dûment tenu de l'article 623 de la CLT ci-dessus mentionné.

La commission rappelle que cette disposition qui reprend, dans son principe, l'article 12 de la loi no 6708 du 30 octobre 1979, objet de précédents commentaires, constitue une ingérence du gouvernement en matière de convention collective et d'augmentation collective de salaire et demande au gouvernement de communiquer toute information concernant les mesures prises ou envisagées, afin de reconnaître aux travailleurs de ces entreprises le droit de libre négociation, conformément à l'article 4 de la convention.

3. Articles 4 et 6 (droit des travailleurs autres que les fonctionnaires commis à l'administration de l'Etat de se syndiquer afin de négocier collectivement). Dans ses commentaires précédents, la commission avait noté que le droit de se syndiquer, et donc de négocier collectivement, n'était pas reconnu aux employés de l'Etat et des institutions paraétatiques, à l'exception de ceux des entreprises d'économie mixte, aux termes de l'article 566 de la CLT dans sa teneur modifiée.

Dans son rapport, le gouvernement indique que le projet de loi visant à garantir le droit d'association et de grève des fonctionnaires de l'administration directe et indirecte est sur le point d'être adopté en application de l'article 37 de la nouvelle Constitution.

Tout en rappelant que l'exercice du droit de grève ne doit subir de restrictions que dans les services essentiels au sens strict du terme, c'est-à-dire ceux dont l'interruption mettrait en danger dans l'ensemble ou dans une partie de la population la vie, la sécurité ou la santé de la personne et à l'égard des fonctionnaires agissant en tant qu'organes de la puissance publique, la commission prend note avec intérêt de cette information et demande au gouvernement de continuer à fournir des informations sur les progrès réalisés sur ce point et de communiquer le texte du projet de loi susmentionné.

4. Dans son observation précédente, la commission avait noté qu'un projet de loi sur la négociation collective et le droit de grève avait été déposé devant la Chambre des députés. La commission note, d'après les informations communiquées par le gouvernement, que ce projet est actuellement en cours de révision suite à l'adoption de la nouvelle Constitution. La commission demande au gouvernement de communiquer avec son prochain rapport des informations sur les progrès réalisés à cet égard.

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