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- 716. Ces plaintes figurent dans des communications de la Centrale latino-américaine des travailleurs des 1er et 10 novembre 1993 et du 17 février 1994 et dans une communication de la Fédération syndicale mondiale (FSM) du 24 février 1994. Le gouvernement a fait parvenir certaines observations dans une communication du 28 avril 1994.
- 717. La Colombie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations des organisations plaignantes
A. Allégations des organisations plaignantes
- 718. Dans ses communications des 1er et 10 novembre 1993 et du 17 février 1994, la Centrale latino-américaine des travailleurs (CLAT) allègue que Rodrigo Rojas Acosta a été assassiné le 25 octobre 1993, à 21 h 30, devant la porte de son domicile dans le quartier "Luis Rolón" (Barrancabermeja), par deux tueurs à gages qui lui ont tiré dessus à bout portant. Agé de 28 ans, il militait dans le Mouvement ouvrier indépendant et révolutionnaire (MOIR). Entré comme ouvrier dans l'entreprise ECOPETROL en 1987, il avait été élu, il y a deux ans, au Comité directeur de l'USO, section raffinerie, et était candidat aux élections syndicales de décembre 1993.
- 719. La CLAT ajoute que M. Israel Perea a été assassiné le 11 octobre 1993, à 17 h 30, à Turbo dans la province bananière d'Urabá (département d'Antioquia). Agé de 70 ans, il présidait l'Association des dockers et autres manoeuvres d'Urabá et militait au Parti libéral colombien.
- 720. Dans sa communication du 24 février 1994, la Fédération syndicale mondiale allègue:
- - l'assassinat, à son domicile (Ciénaga), le 14 février 1994, de Reinaldo Maiguel Camelo, membre du Comité directeur de la section SINTRAINAGRO de Magdalena;
- - l'arrestation de Jorge Luis Ortega García, Rafael Tobar Arrieta, Flavio Trivino, Luis Fernando Orozco, César Martínez, Evelio Guiceno, Héctor Escobar et Germán Roncancio, membres du Comité directeur de la CUT, le 12 février 1994, sur ordre du Parquet par la XIIIe Brigade de l'armée, alors qu'ils participaient à un séminaire sur l'économie solidaire et sur les coopératives au siège des retraités de l'Universidad Nacional, à Mesitas del Colegio;
- - l'arrestation d'Alvaro Solano, secrétaire général de FEDEPETROL, le 11 février 1994, à Neiva, alors que s'achevait dans cette ville le premier Forum pétrolier concernant les mutations;
- - l'arrestation, le 17 février 1994, à Arauca, de Freddy Pulecio et de Pedro Chaparro et Nicodemo Luna, respectivement dirigeant national et militants du Syndicat du pétrole, et d'Orlando Patiño, membre de l'Union syndicale ouvrière (USO), affiliée à FEDEPETROL;
- - l'expulsion de militants du Syndicat de la construction (SINDICONS) du siège de leur syndicat, le 11 février 1994, à Cali;
- - l'intrusion de membres des forces de sécurité de l'Etat dans des assemblées syndicales et aux sièges de syndicats, par exemple au Congrès de la Fédération nationale des travailleurs de la construction et du ciment, qui s'est tenu à Bogotá du 9 au 12 février 1994.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement
- 721. Dans sa communication du 28 avril 1994, le gouvernement confirme l'assassinat des dirigeants syndicaux Israel Perea et Reinaldo Maiguel Camelo et indique que des informations ont été demandées sur l'état d'avancement de l'enquête.
- 722. En ce qui concerne les allégations de détention de huit dirigeants syndicaux le 12 février 1994 à Mesitas, selon le gouvernement il s'agit de membres de l'Armée de libération nationale qui assistaient à une réunion au sommet de dirigeants de la guérilla où ont été saisis des plans de la localité et de deux centrales électriques.
- 723. Le gouvernement déclare aussi que M. Pedro Chaparro a été arrêté le 30 avril 1993, à Barrancabermeja, en vertu d'un mandat d'arrêt du Parquet régional. M. Chaparro a par la suite été transféré à la prison modèle de Bogotá.
- 724. Enfin, le gouvernement signale que le dirigeant syndical Alvaro Solano n'a pas été détenu à Neiva, mais qu'il a été transféré à Bogotá. Le Département administratif de Bogotá a refusé de fournir des informations concernant cette détention.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
- 725. Le comité prend note avec préoccupation des allégations, très graves, qui se réfèrent à l'assassinat de trois dirigeants syndicaux, à l'arrestation de 12 dirigeants et militants syndicaux, à l'expulsion de travailleurs qui se trouvaient au siège du Syndicat des travailleurs de la construction et à l'intrusion de membres de la sécurité de l'Etat dans des locaux et dans des assemblées de syndicats.
- 726. De manière générale, le comité tient à signaler à l'attention du gouvernement que les droits des organisations de travailleurs et d'employeurs ne peuvent s'exercer que dans un climat exempt de violence, de pressions ou menaces de toutes sortes à l'encontre des dirigeants et des membres de ces organisations, et qu'il appartient aux gouvernements de garantir le respect de ce principe. (Voir 291e rapport, cas no 1700 (Nicaragua), paragr. 310.) Par ailleurs, la liberté syndicale ne peut s'exercer que dans une situation de respect et de garantie complets des droits fondamentaux de l'homme, en particulier du droit à la vie et du droit à la sécurité de la personne. (Voir, par exemple, 233e rapport, cas no 1233 (El Salvador), paragr. 682; 238e rapport, cas nos 1199, paragr. 267, et 1262, paragr. 280; 239e rapport, cas nos 1176, 1195 et 1215, paragr. 255 c).)
- 727. Plus concrètement, en ce qui concerne les allégations relatives à des atteintes au droit à la vie, le comité déplore profondément l'assassinat des dirigeants syndicaux Rodrigo Rojas Acosta, Israel Perea et Reinaldo Maiguel Camelo et observe que le gouvernement se contente de mentionner, en termes très vagues, que des enquêtes sont en cours à propos des deux derniers assassinats. Le comité tient à insister sur la nécessité de diligenter des enquêtes judiciaires sur tous les cas, afin d'éclaircir pleinement les faits, de déterminer les responsabilités et de sanctionner les coupables, et il demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires en ce sens et de l'en tenir informé. Le comité rappelle que l'absence de jugement contre les coupables entraîne une impunité de fait qui renforce le climat de violence et d'insécurité, et qui est donc extrêmement dommageable pour l'exercice des activités syndicales. (Voir 288e rapport, cas nos 1273, 1441, 1494 et 1524 (El Salvador), paragr. 30; 291e rapport, cas nos 1273, 1441, 1494 et 1524 (El Salvador), paragr. 241; et 292e rapport, cas nos 1434 et 1477 (Colombie), paragr. 255.)
- 728. Pour ce qui est de l'arrestation, le 12 février 1994, à Mesitas, de huit dirigeants syndicaux, le comité note que, selon le gouvernement, il s'agit de membres de l'Armée de libération nationale qui assistaient à une réunion au sommet des dirigeants de la guérilla où des plans de la localité et de deux centrales électriques ont été saisis. Le comité observe que les versions du gouvernement et des organisations plaignantes sont contradictoires puisque les organisations plaignantes soutiennent que les dirigeants en question participaient à un séminaire sur l'économie et les coopératives. Dans ces conditions, le comité demande au gouvernement d'indiquer si une procédure a été entamée contre ces dirigeants syndicaux et s'ils se trouvent en liberté.
- 729. En ce qui concerne les autres allégations relatives à des arrestations, le comité observe que le gouvernement n'a pas fourni d'observations à ce sujet (MM. Freddy Pulecio, Nicodemo Luna et Orlando Patiño) ou n'a donné que des informations insuffisantes (MM. Alvaro Solano et Pedro Chaparro) qui ne permettent pas au comité de déterminer si ces arrestations ont été motivées par des raisons syndicales. Le comité demande donc au gouvernement de lui indiquer les faits et délits qui sont reprochés à tous ces dirigeants, si une procédure a été entamée à leur encontre et s'ils se trouvent en liberté.
- 730. De manière générale, le comité souligne que la détention de militants et de dirigeants syndicaux pour des raisons liées à leurs activités de défense des intérêts des travailleurs est contraire aux principes de la liberté d'association. (Voir 270e rapport, cas no 508 (Soudan), paragr. 412 c).)
- 731. Enfin, le comité demande au gouvernement de lui faire parvenir ses observations sur les allégations auxquelles il n'a pas répondu, à savoir, premièrement, l'expulsion, le 11 février 1994, à Cali, de membres du Syndicat de la construction (SINDICONS) du siège du syndicat; deuxièmement, l'intrusion de membres de la sécurité de l'Etat dans des locaux et dans des assemblées de syndicats, comme par exemple au Congrès de la Fédération nationale des travailleurs de la construction et du ciment, qui a eu lieu à Bogotá du 9 au 12 février 1994.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 732. Vu les conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Rappelant que la liberté syndicale ne peut s'exercer que dans le respect et la garantie des droits fondamentaux de l'homme, en particulier du droit à la vie et à la sécurité de la personne, le comité demande au gouvernement de faire procéder à des enquêtes judiciaires afin d'éclaircir pleinement les faits, de déterminer les responsabilités et de sanctionner les coupables de l'assassinat des dirigeants syndicaux Rodrigo Rojas Acosta, Israel Perea et Reinaldo Maiguel Camelo, faits que le comité déplore profondément et qu'il condamne. Il prie le gouvernement de le tenir informé à cet égard. Le comité rappelle également que l'absence de jugements contre les coupables entraîne une impunité de fait qui renforce le climat de violence et d'insécurité, et qui est donc extrêmement dommageable pour l'exercice des activités syndicales.
- b) En ce qui concerne l'arrestation, le 12 février 1994, à Mesitas, de huit dirigeants syndicaux, le comité demande au gouvernement de lui indiquer si une procédure a été entamée à l'encontre de ces dirigeants et s'ils se trouvent en liberté.
- c) En ce qui concerne les autres allégations relatives à l'arrestation de dirigeants syndicaux (Freddy Pulecio, Nicodemo Luna, Orlando Patiño, Alvaro Solano et Pedro Chaparro), le comité demande au gouvernement d'indiquer quels sont les faits et délits reprochés à ces dirigeants, si des poursuites ont été engagées contre eux et s'ils se trouvent en liberté.
- d) Enfin, le comité demande au gouvernement de lui faire parvenir ses observations sur les allégations auxquelles il n'a pas répondu, à savoir, premièrement, l'expulsion, le 11 février 1994, à Cali, de membres du Syndicat de la construction (SINDICONS) du siège de ce syndicat; deuxièmement, l'intrusion de membres de la sécurité de l'Etat dans des locaux et dans des assemblées de syndicats, par exemple au Congrès de la Fédération nationale des travailleurs de la construction et du ciment, qui a eu lieu à Bogotá du 9 au 12 février 1994.