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- 838. La plainte est présentée dans des communications du Syndicat des travailleurs unis de MRF en date des 21 août et 26 septembre 2006 et des 28 mars et 15 juin 2007.
- 839. Le gouvernement a transmis ses observations par une communication datée du 14 septembre 2007.
- 840. L’Inde n’a ratifié ni la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l’organisation plaignante
A. Allégations de l’organisation plaignante- 841. Dans ses communications datées des 21 août et 26 septembre 2006 et des 28 mars et 15 juin 2007, le Syndicat des travailleurs unis de MRF affirme que plusieurs actes de discrimination antisyndicale et d’ingérence dans les affaires du syndicat ont été commis par la création de syndicats fantoches, le licenciement, la suspension et le transfert de membres actifs du syndicat, la réduction arbitraire des salaires, les actes de violence physique et la formation de fausses accusations pénales contre ses membres. L’organisation plaignante allègue également que l’employeur ne la reconnaît pas aux fins de la négociation collective. Elle affirme enfin que le système juridique indien ne garantit pas de protection suffisante des droits syndicaux.
- 842. L’organisation plaignante explique qu’elle représente 954 des 1 170 travailleurs permanents de l’usine d’Arakonam de MRF Limited, l’entreprise numéro un de fabrication de pneumatiques en Inde. Le syndicat a été dûment enregistré le 29 décembre 2003.
- 843. Pour resituer le contexte, l’organisation plaignante explique que, en 1978, les travailleurs de l’usine d’Arakonam ont tenté de créer un syndicat mais ont échoué en raison des mesures de représailles exercées par la direction. La même année, la direction de l’usine a créé un syndicat fantoche, l’Association des employés de l’unité de pneumatiques pour deux roues de MRF. Les dirigeants de l’association ont toujours été désignés par la direction de l’entreprise. Tous les travailleurs permanents de l’usine ont été obligés de cotiser à l’association. Au fil des ans, la direction a imposé unilatéralement les termes et conditions de travail aux travailleurs par le biais de pseudos «accords» conclus avec le syndicat fantoche que les travailleurs permanents ont été contraints d’approuver en apposant leur signature sur des feuilles vierges.
- 844. En 1989, les travailleurs de l’usine, souhaitant disposer d’un véritable syndicat pour les représenter, ont créé le Syndicat des travailleurs de MRF, affilié au Centre des syndicats indiens (CITU). La direction a pris plusieurs mesures pour éliminer le syndicat. Le secrétaire général de celui-ci a été licencié. Plusieurs dirigeants et membres du syndicat ont été suspendus en raison de leurs activités syndicales et visés par des procédures disciplinaires. Le contrat d’une centaine d’apprentis et de travailleurs à l’essai n’a pas été renouvelé en raison de leur lien avec le syndicat. Les membres de celui-ci ont été transférés dans d’autres départements et leur salaire a été réduit. En outre, la direction a formé plus de 25 fausses accusations pénales contre des dirigeants et membres du syndicat. Fait important, toutes les personnes accusées ont été acquittées. En septembre 1992, la direction a transmis un préavis de lock-out à plusieurs membres du syndicat, mesure qu’elle a par la suite annulée à l’égard des travailleurs qui avaient accepté d’obéir aux décisions de l’Association des employés de l’unité de pneumatiques pour deux roues de MRF. Cependant, 71 membres du syndicat qui avaient refusé de se conformer aux décisions de l’association ont continué d’être visés par le lock-out; 44 d’entre eux ont été licenciés et certains ont négocié des accords individuels avec la direction. Le secrétaire général du syndicat a succombé à la pression de la direction et s’est dissocié du syndicat. Dans ces circonstances, les activités du syndicat ont peu à peu cessé. Les procédures légales engagées au sujet du licenciement de plusieurs membres du syndicat en raison de leurs activités syndicales sont toujours en instance.
- 845. Environ une décennie plus tard, en 2001-02, les travailleurs de l’usine d’Arakonam ont une nouvelle fois décidé de créer un véritable syndicat chargé de représenter leurs intérêts. Deux travailleurs, N. Ramathilagam et P. Bhaskar, qui avaient été particulièrement actifs, ont, pour cette raison, été licenciés le 19 mars et le 25 mai 2002, respectivement, au motif allégué qu’ils avaient pris des congés sans autorisation préalable et que leur rendement était insuffisant. Ces deux travailleurs ont mis en doute la validité de leur licenciement. Les plaintes qu’ils ont déposées en raison de ce conflit professionnel sont en instance auprès du tribunal du travail de Vellore. Malgré l’opposition de la direction, le Syndicat des travailleurs unis de MRF a été créé en 2003.
- 846. Le 1er décembre 2003, le président de l’organisation plaignante a informé la direction de l’entreprise de la création du syndicat et lui a communiqué le nom de ses dirigeants élus. Le 5 février 2004, le syndicat a transmis à l’entreprise la liste de ses membres. A cette date, 898 des 1 029 travailleurs permanents de l’usine s’étaient affiliés au syndicat. Dans sa communication à l’entreprise, le syndicat nouvellement créé demandait à la direction de reconnaître son statut en tant que seul agent négociateur et de ne plus déduire les cotisations syndicales de l’Association des employés de l’unité de pneumatiques pour deux roues de MRF du salaire de ses membres.
- 847. L’organisation plaignante affirme que, suite à la création du syndicat, la direction de l’entreprise a organisé une campagne pernicieuse à son encontre. L’organisation plaignante fournit des informations détaillées sur l’hostilité manifestée par la direction de l’entreprise à l’égard du syndicat et de ses membres.
- 848. En particulier, l’organisation plaignante affirme que de nombreux membres du syndicat ont été transférés dans d’autres départements ou affectés à des domaines de fabrication qu’ils ne connaissaient pas ou pour lesquels ils ne disposaient pas de la formation nécessaire. Dans plusieurs cas, cela a provoqué des accidents. Selon l’organisation plaignante, la direction a pris des mesures pour s’assurer qu’il n’y ait pas de trace écrite de ces transferts. L’organisation plaignante cite le cas de D. Christopher, membre du comité exécutif du syndicat, qui a reçu oralement l’ordre, le 3 mai 2004, de passer de l’unité de vulcanisation de l’usine de tubes à l’unité de pneumatiques à carcasse diagonale dans le site principal de fabrication de pneumatiques afin qu’aucun membre du comité exécutif de l’organisation plaignante ne travaille dans l’usine de tubes. M. Cristopher a exigé que son ordre de transfert soit confirmé par écrit. Suite à cette demande, il ne s’est vu confier aucun travail et est resté inactif pendant une journée entière. Le 4 mai 2004, il a reçu une lettre d’avertissement grave pour avoir refusé d’obéir à l’ordre de son supérieur. Pendant plus de deux ans, ses fiches de salaires ont continué de mentionner qu’il était affecté à l’usine de tubes alors que, en réalité, il travaillait dans l’usine de fabrication de pneumatiques. Les membres du syndicat se sont individuellement plaints à la direction de ces transferts. La direction a répondu que les travailleurs étaient censés pouvoir travailler dans tous les domaines de l’usine, qu’ils pouvaient être affectés à des postes différents selon les exigences du moment et qu’il n’y avait pas d’autre motif derrière la «rotation des postes».
- 849. En 2004, 27 travailleurs ont été transférés après s’être affiliés à l’organisation plaignante. Dix membres ont été transférés après avoir refusé de signer l’«accord» du 22 décembre 2004 conclu entre la direction et son syndicat fantoche, l’Association des employés de l’unité de pneumatiques pour deux roues de MRF. Six autres membres du syndicat ont été affectés à un nouveau poste de travail. Ainsi, si l’on tient compte des dix travailleurs transférés parce qu’ils avaient tenté de créer l’organisation plaignante en 2002, au moins 56 dirigeants syndicaux et membres de l’organisation plaignante ont été transférés en raison de leurs activités syndicales et au moins six d’entre eux ont été affectés à un nouveau poste de travail moins bien rémunéré, sans qu’un seul ordre écrit de transfert ait été rédigé à cet effet.
- 850. L’organisation plaignante affirme, en outre, que la direction a cessé de soumettre plusieurs membres de l’organisation à une rotation des postes dans l’unité des précomposites chimiques de la zone Banbury où, en raison des dangers sanitaires causés par les produits chimiques, les travailleurs sont habituellement engagés selon ce principe. En outre, la direction ne leur fournit ni les vêtements, gants et masques de protection nécessaires. Neuf des membres de l’organisation plaignante ont été employés de manière permanente dans l’unité dangereuse des précomposites chimiques de Banbury après leur transfert.
- 851. La direction a également pris pour habitude d’envoyer des lettres d’avertissement et des avis d’exposé des motifs aux membres du syndicat qu’elle accuse d’opérations «escargot» ou d’un rendement insuffisant et de les sanctionner, y compris par des mesures de licenciement. L’organisation plaignante explique que les lettres d’avertissement et avis d’exposé des motifs font partie des documents relatifs à l’état de service des travailleurs et qu’il en est tenu compte lorsqu’il est décidé de sanctionner un travailleur. La plupart des membres de l’organisation plaignante n’ont jamais reçu une seule lettre d’avertissement ou d’avis d’exposé des motifs avant la création du syndicat. Or, après la création de celui-ci, afin de nuire aux états de service des travailleurs et de créer un sentiment de psychose parmi eux, la direction a arbitrairement adressé des lettres et mémos d’avertissement aux dirigeants syndicaux et membres de l’organisation plaignante. Depuis janvier 2004, la direction a adressé plus de 660 lettres et mémos d’avertissement aux membres de l’organisation plaignante, dont la plupart en février 2004 au motif que, pendant une semaine, ils avaient arboré un badge noir et refusé de déjeuner au réfectoire de l’établissement en signe de protestation contre l’attitude de la direction à l’égard de leur syndicat. La direction s’est opposée à ce qu’ils portent ces badges et a envoyé des lettres d’avertissement à un grand nombre de membres du syndicat indiquant que leur action était contraire au règlement intérieur de l’entreprise, que la direction aurait pu choisir de prendre des mesures disciplinaires à leur encontre mais qu’elle se contentait de leur adresser un sérieux avertissement. De même, la direction a également envoyé des lettres d’avertissement à un grand nombre de membres du syndicat au motif que leur refus de déjeuner au réfectoire avait causé des pertes à l’entreprise et que cela était contraire au règlement intérieur de celle-ci.
- 852. Au moins 64 avis d’exposé des motifs ont été adressés entre 2004 et 2007 par la direction aux membres du syndicat en représailles de leurs activités syndicales. Plusieurs de ces avis ont été suivis de licenciements. Outre le licenciement de deux travailleurs qui avaient participé à la création du Syndicat des travailleurs unis de MRF, 19 autres membres du syndicat ont été licenciés en 2004 et un autre en 2005. Quatre affaires de licenciement sont actuellement en instance auprès du tribunal du travail de Vellore. Les 16 autres affaires se trouvent à différents stades de la procédure individuelle de règlement des conflits. Dans ses communications les plus récentes, l’organisation plaignante indique que D. Christopher, membre de son comité exécutif, a été licencié le 25 février 2007 et que le secrétaire général du syndicat, G. Shankar, a été licencié le 4 avril 2007, portant le nombre de syndicalistes licenciés à 24.
- 853. La direction a également mis fin au contrat de travail de 15 travailleurs engagés comme apprentis ou à l’essai, malgré de longues années au service de l’entreprise, pour le simple fait d’avoir été en contact avec les membres ou dirigeants de l’organisation plaignante. Celle-ci souligne que, de peur de perdre leur emploi, les travailleurs sous contrat, les apprentis et les travailleurs engagés à l’essai se sont désaffiliés du syndicat. Les procédures engagées par cinq travailleurs sont en instance auprès du tribunal du travail. Dix travailleurs ont individuellement saisi l’inspecteur du travail de Vellore pour contester leur licenciement, mais ce dernier n’a pas encore rendu de rapport d’échec de la conciliation, document qui permettrait aux intéressés de saisir le tribunal du travail pour arbitrer leur différend professionnel.
- 854. Par ailleurs, suite à la création du syndicat, en 2004, 37 dirigeants et membres du syndicat ont été suspendus en attente des procédures disciplinaires engagées contre eux pour actes supposés de mauvaise conduite. La direction a également sanctionné 28 membres du syndicat d’une mise à pied sans versement de salaire pendant des périodes variables. Selon l’organisation plaignante, toutes les suspensions visaient à sanctionner les travailleurs qui avaient revendiqué leur liberté syndicale et, ce qui est plus grave encore, à les pousser à quitter le syndicat de peur de perdre leur emploi. D’autres syndicalistes ont été suspendus en 2006 et en 2007. Selon les communications les plus récentes de l’organisation plaignante, deux travailleurs le sont toujours.
- 855. L’organisation plaignante affirme par ailleurs que 92 syndicalistes ont vu leur salaire arbitrairement réduit.
- 856. L’organisation plaignante allègue, en outre, que pour affaiblir le syndicat, la direction a adopté une pratique consistant à former de fausses accusations contre le syndicat et ses membres. Le 17 février 2004, sur instruction de la direction, trois dirigeants syndicaux et deux membres de l’organisation plaignante ont été accusés d’avoir utilisé leur nom de caste, ce qui constitue une infraction à la loi de 1989 relative à la prévention des atrocités à l’égard des castes et des tribus répertoriées. La partie plaignante souligne que les personnes accusées de ces infractions à la loi ne peuvent être libérées sous caution et estime que la direction a considéré que l’arrestation et la détention de dirigeants syndicaux et de membres clés du syndicat lui permettraient d’éliminer ce dernier. Cependant, la police n’a pas donné suite à cette plainte, et la direction de l’entreprise n’est pas parvenue à faire arrêter et incarcérer les dirigeants syndicaux.
- 857. En outre, la direction a recruté des hommes de main qui ont menacé par la force les membres de l’organisation plaignante pour les contraindre à certifier leur appartenance à l’Association des employés de l’unité de pneumatiques pour deux roues de MRF. Le 28 février 2004, l’organisation plaignante a déposé plainte auprès du commissaire de police de Vellore et demandé à ce que les personnes non autorisées soient expulsées du site de l’usine. Elle a introduit une demande d’ordonnance auprès de la Haute Cour de Madras afin que le commissaire de police du district reçoive l’ordre d’instruire la plainte. Craignant que ses membres soient victimes d’actes de violence, le syndicat leur a recommandé de ne pas se présenter à leur travail à compter du 11 mars 2004. Le 18 mars 2004, la Haute Cour a demandé à l’inspecteur des usines de lui faire rapport de la situation qui régnait dans l’usine concernée. Celui-ci a fait savoir que la situation était normale. La direction a considéré que l’absence des travailleurs à leur poste du 11 au 18 mars 2004 constituait une grève illégale et a par conséquent amputé leur salaire des sommes correspondantes. L’organisation plaignante a mis en doute la validité de cette décision auprès de l’autorité compétente créée en vertu de la loi sur le paiement des salaires mais celle-ci, au lieu de trancher la question, l’a traitée comme un conflit du travail, ce qui nécessite l’adoption d’une décision de renvoi.
- 858. Le 8 mars 2004, le mât porte-drapeau de l’organisation plaignante et le tableau d’affichage du syndicat ont été retirés de l’entrée du site de l’usine par le Département des autoroutes à la demande de la direction. Les 11 et 13 mars 2004, les hommes de main recrutés par la direction ont brisé les vitres de deux autobus de la compagnie, ce qui a donné lieu à un dépôt de plainte contre sept membres du syndicat au motif allégué qu’ils avaient lancé des pierres contre les deux bus et empêché les ouvriers de se rendre à l’usine. Quatre de ces travailleurs ont été licenciés. Cependant, lors des procédures pénales engagées contre eux, ils ont été acquittés de toutes les charges formulées contre eux.
- 859. Bien que la direction ait déployé des efforts incessants pour éliminer l’organisation plaignante, elle a aussi continué à déduire des cotisations syndicales du salaire de ses membres et à les transférer sur le compte de l’Association des employés de l’unité de pneumatiques pour deux roues de MRF, en dépit de la lettre adressée le 5 février 2004 par l’organisation plaignante à la direction de l’entreprise demandant que ces déductions ne soient plus effectuées. En mars 2004, la direction a contraint par la force 60 membres de l’organisation plaignante à confirmer par écrit qu’ils étaient membres de ladite association. En avril 2004, l’organisation plaignante a intenté une action au civil auprès de la Haute Cour de Madras afin qu’il soit déclaré que l’organisation plaignante est majoritaire au sein de l’usine d’Arakonam et que l’Association des employés de l’unité de pneumatiques pour deux roues de MRF ne jouit d’aucun pouvoir de représentation. Dans cette plainte, l’organisation plaignante s’est dite prête à ce que soit organisé un vote à bulletin secret afin de démontrer qu’elle bénéficie du soutien total des travailleurs de l’usine. La Haute Cour a au départ jugé la plainte recevable mais est ensuite revenue sur sa décision au motif qu’elle ne jouissait pas de la juridiction territoriale nécessaire pour se prononcer sur les questions relatives à l’usine d’Arakonam. Cette décision a été confirmée en appel par des magistrats de la Haute Cour puis par la Cour suprême.
- 860. Auparavant, le 9 février 2004 puis le 17 mai 2004, l’organisation plaignante avait demandé au commissaire au travail d’organiser un vote à bulletin secret parmi les travailleurs de l’usine afin de déterminer quel syndicat était majoritaire. Le 30 juin 2004, le commissaire au travail a envoyé un courrier au syndicat indiquant qu’aucune mesure ne pouvait être prise au sujet de la représentation du syndicat attendu que la loi ne prévoit pas l’organisation d’un vote à bulletin secret aux fins de déterminer le caractère majoritaire d’un syndicat.
- 861. Le 4 juillet 2004, 300 membres de l’organisation plaignante se sont rassemblés devant l’usine pour attirer l’attention du gouvernement sur les actes de discrimination antisyndicale perpétrés par la direction de l’entreprise, espérant que le gouvernement s’intéresserait à la question et prendrait les mesures nécessaires. Cependant, les manifestations pacifiques des travailleurs n’ont servi à rien et le Département du travail a fait preuve d’une totale indifférence face aux doléances des travailleurs.
- 862. Le 25 septembre 2004, G. Shankar, secrétaire général du syndicat, a été électrocuté lorsque son contremaître a délibérément allumé le courant pendant qu’il effectuait un travail de maintenance sur un panneau électrique. La direction a répondu à sa réclamation en niant qu’un tel incident avait eu lieu. G. Shankar a alors porté plainte au poste de police mais la police a refusé d’instruire celle-ci. Le 22 novembre 2004, il lui a été demandé de veiller à ce que toutes les plaintes enregistrées par l’organisation plaignante contre la direction soient retirées et de se désaffilier du syndicat, faute de quoi il serait licencié. Deux jours plus tard, il a été suspendu sur la base de l’accusation fausse d’avoir menacé son contremaître.
- 863. Le 25 novembre 2004, dans la perspective de l’expiration, au 31 décembre 2004, des termes de l’accord sur les salaires conclu par la direction et l’Association des employés de l’unité de pneumatiques pour deux roues de MRF et craignant que la direction ne conclue un nouvel accord de ce type, l’organisation plaignante a saisi le commissaire adjoint au travail au titre de l’article 2, alinéa k), de la loi sur les conflits de travail d’un conflit relatif à sa liste de revendications. Plusieurs procédures de conciliation ont donc été entamées. Or, la direction ne s’étant pas présentée devant le conciliateur les 9 et 17 décembre 2004, un nouveau rendez-vous a été fixé au 27 décembre 2004. Cependant, le 22 décembre 2004, la direction a conclu un nouvel «accord» avec l’association. Ainsi, au lieu de participer aux procédures de conciliation sur la liste de revendications de l’organisation plaignante, la direction avait signé un accord avec son syndicat fantoche neuf jours avant l’expiration du précédent «accord», empêchant par là même l’organisation plaignante de dénoncer un conflit du travail.
- 864. L’accord du 22 décembre 2004, qui ne peut en aucun cas être considéré comme un accord collectif ayant fait l’objet d’une véritable négociation, constitue un autre exemple d’imposition unilatérale des termes et conditions d’emploi par la direction. Cet accord sera en vigueur jusqu’au 31 décembre 2008. Recourant à des menaces d’action disciplinaire et de licenciement, la direction est parvenue à ce que les travailleurs apposent leur signature sur des feuilles vierges qui ont par la suite été utilisées pour prouver qu’ils avaient accepté ledit «accord» ou étaient membres de l’association. En dépit des pressions exercées, 147 membres de l’organisation plaignante ont refusé de signer et donc d’accepter cet «accord» ou les autres documents que leur avait présentés la direction. En conséquence, ces travailleurs ont vu leur salaire diminué et leur demande de congé constamment refusée. Le 27 décembre 2004, l’organisation plaignante a dûment notifié à la direction que l’«accord» n’avait pas de force contraignante pour les membres du syndicat dont la signature avait été obtenue sous la contrainte et que la réception de leurs fiches de salaire révisé était sans préjudice de leurs droits et prétentions concernant la validité de l’accord.
- 865. Le 24 décembre 2004, en vertu de l’article 2, alinéa k), de la loi sur les conflits de travail, l’organisation plaignante a saisi le commissaire adjoint au travail d’un autre conflit professionnel relatif à la validité de l’accord du 22 décembre 2004. Des procédures de conciliation concernant le conflit professionnel portant sur la liste de revendications du syndicat et la validité de l’accord ont eu lieu simultanément. La direction a prétendu à tort devant le conciliateur que le nouvel «accord» avait été approuvé par 1 003 travailleurs et que seuls 137 d’entre eux l’avaient dénoncé. Elle a prétendu ainsi que les conflits invoqués par l’organisation plaignante n’étaient pas des conflits professionnels au sens de la loi sur les conflits de travail. Le 28 février 2005, au cours de la procédure de conciliation, l’organisation plaignante s’est dite prête à prouver qu’elle était majoritaire par un vote à bulletin secret. Elle avait également demandé à ce que l’affirmation de la direction soit mise aux voix à bulletin secret. Cependant, le conciliateur n’a pas fait droit à la demande du syndicat.
- 866. Les procédures de conciliation n’ont pas permis de régler les différends. Le conciliateur n’a rendu son rapport faisant état de l’échec de la conciliation que le 20 juin 2005, après que l’organisation plaignante a déposé une demande d’ordonnance devant la Haute Cour de Madras et que celle-ci a rendu un avis à cet effet. Cependant, cet avis ne mentionnait pas le différend relatif à la validité de l’«accord» du 22 décembre 2004. Après la publication du rapport, le gouvernement du Tamil Nadu n’a pas renvoyé les différends à l’arbitrage. L’organisation plaignante a donc déposé une demande d’ordonnance auprès de la Haute Cour de Madras afin que celle-ci rende une ordonnance de mandamus enjoignant au gouvernement du Tamil Nadu de renvoyer les conflits du travail invoqués par la partie plaignante à l’arbitrage. L’affaire n’a pas encore été programmée à l’audience.
- 867. Pendant ce temps, la direction a essayé de déguiser ses actes de discrimination antisyndicale contre l’organisation plaignante et son refus d’octroyer les droits de négociation collective à ses membres, comme demandé par cette dernière, en prétendant que le problème était en réalité une rivalité intersyndicale entre l’organisation plaignante et l’association. La direction a également plusieurs fois tenté de décrire l’organisation plaignante comme une organisation indisciplinée qui cherchait à perturber le fonctionnement de l’usine. Le 12 janvier 2005, environ deux semaines avant la fête nationale, durant laquelle l’organisation plaignante devait organiser un rassemblement devant les grilles de l’usine et hisser le drapeau national, la direction a protesté après du commissaire adjoint de police d’Arakonam alléguant que l’organisation plaignante était engagée dans une rivalité intersyndicale et avait perturbé la paix sociale de l’entreprise après la signature par le syndicat majoritaire et la direction d’un accord sur les salaires. Elle demandait donc à la police de ne pas autoriser l’organisation plaignante à hisser le drapeau national et à organiser de rassemblement dans le périmètre de l’entreprise. L’entreprise a ensuite formé de fausses accusations contre l’organisation plaignante. L’entreprise a prétendu que cette dernière ne comptait que 120 membres et que des rivalités intersyndicales l’opposaient à l’association. Elle a également prétendu que l’organisation plaignante était résolue à perturber le fonctionnement de l’usine d’Arakonam. L’entreprise a alors demandé l’émission d’une injonction pour empêcher l’organisation plaignante et ses membres de se réunir ou de se rassembler et d’approcher à moins de 200 mètres du site de l’usine. Elle a également demandé à ce qu’une injonction soit rendue pour empêcher l’organisation plaignante et ses membres d’approcher le personnel et les dirigeants de l’entreprise se rendant à, ou quittant, l’usine et de ne pas perturber le transport de matériaux bruts et de produits finis depuis et vers l’usine. L’entreprise a également déposé des demandes de mesures provisoires et d’ordonnances interlocutoires. Le 25 janvier 2005, le tribunal a rendu des ordonnances interlocutoires. Les recours interjetés par l’organisation plaignante en révision civile contre les ordonnances interlocutoires auprès de la Haute Cour de Madras n’ont pas été jugés recevables. Le recours principal a été examiné ex parte. L’organisation plaignante mène actuellement des démarches pour que soit annulée la décision ex parte et que l’affaire soit jugée sur le fond.
- 868. En mai 2006, afin que l’Association des employés de l’unité de pneumatiques pour deux roues de MRF apparaisse comme un syndicat démocratique, la direction a fait annoncer par des dirigeants choisis au hasard que des élections à bulletin secret seraient organisées pour constituer les comités exécutifs de l’association. Les élections ont eu lieu le 14 mai 2006. Contrairement aux attentes de la direction, plusieurs travailleurs ont décidé de ne pas voter pour les personnes désignées par la direction. Celle-ci a alors refusé d’accepter le verdict des urnes et a menacé les nouveaux dirigeants élus pour les contraindre à démissionner de leur poste au sein de l’association. La direction a ensuite tenté de perturber la réunion organisée par l’association le 26 mai 2006. Cependant, grâce à la présence de policiers requis par les nouveaux dirigeants élus qui avaient anticipé le problème, la réunion a pu se poursuivre.
- 869. Afin de sanctionner les travailleurs qui s’étaient librement exprimés, la direction a mené une nouvelle campagne antisyndicale, y compris par le biais de lettres d’avertissement, de procédures disciplinaires et de suspensions. Afin de s’assurer que les travailleurs de l’usine d’Arakonam soient à nouveau privés de représentation syndicale véritable, la direction a créé un nouveau syndicat, le Syndicat de protection des travailleurs de MRF d’Arakonam. Les 26 et 27 juillet 2006, les représentants de la direction qui avaient menacé les travailleurs de licenciement sont parvenus à contraindre un nombre important de travailleurs à signer un document stipulant qu’ils adhéraient à ce nouveau syndicat. La direction a également informé les travailleurs que ceux qui acceptaient d’y adhérer bénéficieraient d’une augmentation de salaire de 2 000 roupies et d’une avance spéciale sur salaire de 2 500 roupies. En juillet 2006, des cotisations syndicales ont été déduites du salaire de plus de 900 travailleurs et versées sur le compte du syndicat fantoche nouvellement créé.
- 870. La partie plaignante indique que, le 25 janvier 2007, l’inspecteur du travail de Vellore a adressé un courrier à l’organisation plaignante et à la direction de MRF Limited afin de réunir des informations au sujet de la présente plainte. Cette démarche a été effectuée afin de permettre au gouvernement de communiquer sa réponse sur la question à l’Organisation internationale du Travail. Entre janvier et mars 2007, un inspecteur du travail du gouvernement du Tamil Nadu a demandé aux représentants des trois syndicats de l’entreprise et à la direction d’établir les faits. Bien que l’inspecteur ait rendu son rapport en mars 2007, le gouvernement du Tamil Nadu ne l’a pas transmis au gouvernement de l’Inde.
- 871. En février 2007, lorsqu’elle a appris que le Syndicat des travailleurs unis de MRF avait saisi le Comité de la liberté syndicale, la direction de MRF Limited a informé les travailleurs qu’il était inutile de déposer une plainte auprès de l’OIT attendu que le comité n’était pas un tribunal et que ses décisions n’étaient pas de nature contraignante. En outre, elle a déclaré que la puissance financière de l’entreprise lui permettait de croire que le gouvernement rendrait un rapport favorable. La direction a menacé de licencier les travailleurs qui continuaient d’appuyer le syndicat. Il a été indiqué aux travailleurs que tous ceux qui signeraient des documents pour soutenir la plainte du syndicat auprès de l’OIT seraient licenciés. En outre, l’un des plus importants actionnaires de l’entreprise s’est rendu au domicile de plusieurs travailleurs et a averti leurs familles qu’ils perdraient leur emploi s’ils continuaient à soutenir l’organisation plaignante.
- 872. Egalement en février 2007, de fausses accusations ont été formées contre six dirigeants et membres de l’organisation plaignante. B.M. Baskaran, membre de l’organisation plaignante et vice-président de l’association, a notamment été suspendu sur la base de fausses accusations.
- 873. L’organisation plaignante indique que la direction a récemment encouragé les membres de l’organisation plaignante à changer d’affiliation syndicale en leur proposant une augmentation substantielle de salaire.
- 874. L’organisation plaignante souligne que, même au cours des élections du 14 mai 2006, lorsque les membres désignés par la direction pour siéger au comité exécutif de l’association ont été battus et que les travailleurs ont élu leurs représentants, la direction a contraint les membres de l’organisation plaignante à signer des documents certifiant qu’ils étaient membres du Syndicat de protection des travailleurs de MRF d’Arakonam récemment créé par la direction. Ainsi, même si l’organisation plaignante a de fait été le syndicat majoritaire de l’usine d’Arakonam au cours de ces trois dernières années, non seulement la direction ne l’a pas reconnue, mais a en outre déployé tout un arsenal de mesures pour l’éliminer.
- 875. L’organisation plaignante ajoute que la loi sur les conflits de travail ne prévoit pas de moyens effectifs immédiats pour empêcher que de tels actes de discrimination antisyndicale et d’ingérence dans les activités syndicales ne soient commis. La loi ne contient pas non plus de disposition sur des mesures de réparation immédiate en cas de discrimination antisyndicale ou de violation des droits de négociation collective. En outre, bien que la loi sur les conflits de travail prévoie que des poursuites peuvent être engagées contre la direction des entreprises coupables de pratiques déloyales du travail au titre de ladite loi, y compris certains actes de discrimination antisyndicale, et les punit par des amendes, les tribunaux ne peuvent être saisis d’un délit punissable en vertu de cette loi que si une plainte à cet effet est déposée par le, ou sous l’autorité du, gouvernement. En résumé, les poursuites pour pratiques déloyales du travail au titre de cette loi ne peuvent être engagées qu’à l’initiative du gouvernement. Dans la pratique, le gouvernement du Tamil Nadu a rarement poursuivi les employeurs pour des actes de discrimination antisyndicale. La partie plaignante affirme que le Département du travail du gouvernement du Tamil Nadu est aux mains de la direction de MRF Limited. En particulier, le fait que le Département du travail du gouvernement n’ait pas renvoyé les conflits collectifs du syndicat concernant sa liste de revendications et l’«accord» du 22 décembre 2004 à l’arbitrage au titre du premier paragraphe de l’article 10 de la loi sur les conflits de travail montre qu’il est hautement improbable que le gouvernement fasse droit aux demandes de l’organisation plaignante à l’effet de traduire en justice l’entreprise pour des pratiques déloyales du travail.
- 876. Il n’existe aucune loi, ni au niveau central ni au niveau de la législation du Tamil Nadu, relative à la reconnaissance des syndicats. Par conséquent, dans la plupart des Etats de l’Inde, y compris dans le Tamil Nadu, les employeurs ne sont pas statutairement tenus de reconnaître les syndicats représentant la majorité des travailleurs. Cependant, un Code de discipline non statutaire, adopté en 1961 par certaines fédérations d’employeurs et de travailleurs, a établi les procédures de reconnaissance des syndicats. En vertu de ce code, un syndicat qui satisfait aux conditions de reconnaissance prescrites par ledit code peut demander une aide aux autorités pertinentes d’application, à savoir les autorités centrales ou d’Etat en matière de travail, lorsque sa demande de reconnaissance n’est pas acceptée par l’employeur. Le Code de discipline établit en outre une procédure de vérification des membres affiliés à un syndicat qui permet de déterminer la représentativité de celui-ci par le nombre de ses membres. Le Code de discipline ne contient pas de disposition prévoyant qu’un vote à bulletin secret peut être organisé pour déterminer le caractère représentatif d’un syndicat dans le cas où plusieurs organisations demandent à bénéficier d’un statut représentatif aux fins de la négociation collective. Le Code de discipline, qui a un caractère volontaire et de recommandation, ne prévoit pas de sanctions légales en cas de non-respect d’une de ses recommandations.
- 877. L’organisation plaignante considère que la vérification objective du caractère représentatif de l’organisation plaignante et des autres syndicats de l’usine d’Arakonam ne peut être effectuée que par des élections à bulletin secret pour les raisons suivantes: la direction de l’entreprise a retiré une partie du salaire des membres de l’organisation plaignante qu’elle a versées à l’Association des employés de l’unité de pneumatiques pour deux roues de MRF et, par la suite, au Syndicat de protection des travailleurs de MRF d’Arakonam; la direction a également exercé des pressions sur les membres de l’organisation plaignante afin qu’ils signent des documents attestant qu’ils l’avaient quittée. Il ressort à tort de ces documents que les membres de l’organisation plaignante n’étaient plus affiliés à cette dernière alors qu’elle représente 909 des 1 170 travailleurs permanents de l’usine d’Arakonam. La direction affirme au contraire que plus de 900 travailleurs permanents sont membres du Syndicat de protection des travailleurs de MRF d’Arakonam et que 72 travailleurs permanents sont membres de l’Association des employés de l’unité de pneumatiques pour deux roues de MRF. On peut en déduire qu’un grand nombre de travailleurs ont été forcés d’adhérer à deux, voire trois syndicats contre leur gré. Par conséquent, l’organisation plaignante considère que seules des élections à bulletin secret organisées par un organe impartial en présence d’observateurs indépendants permettraient de garantir que les travailleurs expriment leur soutien au syndicat qui a véritablement leur préférence pour les représenter, sans craindre de représailles de la part de la direction.
- 878. En vertu de la loi sur les conflits de travail, l’arbitrage des conflits collectifs du travail après l’échec des procédures de conciliation ne peut être effectué que si le gouvernement invoque le premier paragraphe de l’article 10 de la loi. Le gouvernement met souvent des mois à décider s’il renvoie ou non un conflit à l’arbitrage et refuse très souvent d’invoquer ledit article, contraignant les travailleurs à s’engager dans des années de procédures. Dans le cas d’espèce, après la publication le 20 juin 2005 du rapport d’échec de la conciliation concernant le conflit du travail relatif à la liste de revendications présentée par l’organisation plaignante, le gouvernement n’a toujours pas rendu sa décision. Dans ces circonstances, l’organisation plaignante a été contrainte de saisir la Haute Cour afin de s’assurer que le gouvernement prendra une décision. Cependant, même en supposant que l’organisation plaignante réussisse à obtenir une telle injonction de la Haute Cour, le gouvernement pourrait décider de ne pas renvoyer les différends à l’arbitrage. Par ailleurs, même si les conflits étaient soumis à l’arbitrage, compte tenu du fait que le système judiciaire indien est engorgé, plusieurs années pourraient s’écouler avant qu’un arbitrage soit rendu sur les différends et que d’autres procédures d’appel parviennent à leur terme.
- 879. L’organisation plaignante souhaite qu’il soit demandé au gouvernement de l’Inde et au gouvernement provincial du Tamil Nadu de prendre les mesures appropriées pour garantir: que la direction de l’entreprise ne commette plus d’actes de discrimination antisyndicale contre les dirigeants et membres de l’organisation plaignante; que ses membres licenciés en raison de leurs activités syndicales soient réintégrés à leur poste et reçoivent toutes les indemnités auxquelles ils ont droit, y compris le paiement intégral des salaires non perçus; que ses membres suspendus en raison de leurs activités syndicales soient autorisés à reprendre le travail et reçoivent toutes les indemnités auxquelles ils ont droit, y compris les salaires non perçus; que toutes les procédures disciplinaires en cours engagées contre ses membres en raison de leurs activités syndicales soient abandonnées; que toutes les fausses accusations pénales formées contre ses membres soient levées et que les travailleurs concernés soient dûment indemnisés; que les membres du syndicat qui ont été transférés après la création de l’organisation plaignante soient autorisés à revenir à leur précédent poste de travail; que ses membres ne soient plus victimes de discrimination en termes de salaires et d’autres indemnités; que ses membres ne soient pas affectés de manière discriminatoire dans l’unité des précomposites chimiques de la zone Banbury de l’usine d’Arakonam; que le caractère représentatif de l’organisation plaignante et des autres syndicats de l’usine soit déterminé rapidement au moyen d’un vote à bulletin secret organisé par un organe impartial en présence d’observateurs indépendants; et que la direction respecte le droit de négociation collective des travailleurs de l’usine d’Arakonam en participant à la négociation collective avec le syndicat qui aura été déclaré majoritaire.
- B. Réponse du gouvernement
- 880. Dans sa communication en date du 14 septembre 2007, le gouvernement indique que ce cas relève de la juridiction du gouvernement d’Etat du Tamil Nadu. Les questions soulevées dans cette affaire ont été examinées par le commissaire adjoint au travail du gouvernement d’Etat qui avait reçu pour instruction de se renseigner auprès de la direction de l’entreprise et de l’organisation plaignante afin de régler les questions soulevées dans la plainte. Le gouvernement transmet au comité les informations communiquées par le gouvernement du Tamil Nadu. Le gouvernement souligne également que l’Inde dispose de mécanismes de conciliation bien établis, tant au niveau de l’Etat central qu’au niveau des Etats, qui permettent de régler les griefs des partenaires sociaux. Or l’organisation plaignante n’a pas saisi les institutions établies à cet effet à plusieurs niveaux avant de transmettre sa plainte au comité. Le gouvernement s’interroge par conséquent sur le point de savoir si le comité doit examiner la présente plainte.
- 881. Selon les informations transmises par le gouvernement du Tamil Nadu, l’entreprise compte trois syndicats: l’organisation plaignante, le Syndicat des travailleurs unis de MRF; le Syndicat de protection des travailleurs de MRF d’Arakonam; et l’Association des employés de l’unité de pneumatiques pour deux roues de MRF.
- 882. Le gouvernement reconnaît que, en vertu de l’accord bipartite conclu le 22 décembre 2004 par la direction et l’Association des employés de l’unité de pneumatiques pour deux roues de MRF, les travailleurs sont rémunérés sur la base du rendement. L’accord est de nature contraignante pour les parties. Or l’organisation plaignante n’est pas partie à cet accord. La législation n’interdit pas de rémunérer les travailleurs sur cette base. Cependant, si l’organisation plaignante s’estime lésée par l’accord bipartite, elle peut porter le différend devant le conciliateur. Si le conflit n’est pas réglé par la conciliation, il peut être renvoyé à l’arbitrage.
- 883. S’agissant de l’allégation selon laquelle la direction de l’entreprise a créé un syndicat fantoche, désigné les dirigeants de ce dernier, déduit des cotisations syndicales du salaire de tous les travailleurs permanents pour les verser sur le compte du syndicat fantoche, imposé unilatéralement les termes et conditions de travail aux travailleurs par le biais d’«accords» conclus avec ce syndicat fantoche, le gouvernement indique que, si des cotisations syndicales sont déduites du salaire des travailleurs sans leur consentement, ces derniers peuvent déposer plainte en vertu de la loi sur le paiement des salaires aux fins de la restitution des sommes illégalement déduites. Aucun travailleur n’a déposé de plainte pour déduction illégale de salaire. En outre, si le syndicat des travailleurs s’estime lésé par l’accord bipartite, il peut invoquer un conflit professionnel collectif en vertu de la loi sur les conflits de travail.
- 884. S’agissant de la reconnaissance des syndicats, le gouvernement explique que dans l’Etat du Tamil Nadu la reconnaissance d’un syndicat n’est ni un droit statutaire octroyé aux syndicats ni une obligation statutaire incombant à la direction des entreprises. En réalité, au Tamil Nadu, il n’existe pas de législation relative à la reconnaissance d’un syndicat en tant que syndicat majoritaire ou agent négociateur. Si l’organisation plaignante s’estime lésée par le refus de la direction de le reconnaître, l’organisation peut saisir le Comité d’Etat d’évaluation et d’application, un organe tripartite qui est chargé d’évaluer le nombre de membres affiliés à un syndicat dans une industrie ou une entreprise donnée en vérifiant les archives de ces derniers et de recommander à l’employeur de reconnaître l’un d’entre eux. Le gouvernement indique en outre que les membres affiliés au syndicat, l’inscription au registre de ce dernier et le formulaire E, soumis par l’organisation plaignante en vertu de la loi de 1926 sur les syndicats, ont été vérifiés. L’affirmation de l’organisation plaignante selon laquelle 945 travailleurs (représentant 70,66 pour cent du total de la main-d’œuvre permanente de l’entreprise) appartiennent au syndicat est confirmée par ces documents. L’organisation plaignante aurait pu s’adresser au Comité d’Etat d’évaluation et d’application en vue d’obtenir sa reconnaissance.
- 885. S’agissant de l’allégation selon laquelle 56 dirigeants et membres syndicaux ont été mutés et que six d’entre eux ont été affectés à un nouveau poste de travail moins bien rémunéré, le gouvernement indique que la direction de l’entreprise admet avoir effectué des transferts inter et intradépartementaux et explique que ces transferts sont autorisés si le règlement intérieur en vigueur ou les termes du contrat des intéressés le permettent. En soi, les transferts de poste ne sont pas illégaux, sauf s’ils sont contraires aux dispositions du règlement intérieur en vigueur ou aux termes du contrat applicable au travailleur concerné. Les travailleurs qui s’estiment lésés par les ordres de transfert peuvent soulever le conflit via des mécanismes de conciliation. Si le différend n’est pas réglé par cette voie, il peut être soumis à une instance judiciaire établie au titre de la loi sur les conflits de travail.
- 886. Le gouvernement prend note des allégations de l’organisation plaignante selon lesquelles plusieurs membres du syndicat ont reçu des lettres et des mémos d’avertissement pour des raisons futiles et des avis d’exposé des motifs précédant les procédures disciplinaires engagées en vue de leur licenciement afin de ternir leurs états de service; 30 dirigeants, y compris M. G. Shankar, secrétaire général, et d’autres membres du syndicat ont été suspendus pour de faux motifs; 28 membres du syndicats ont été sanctionnés par une suspension ayant entraîné une perte de salaire; 22 membres du syndicat ont été licenciés; les dirigeants et les membres du syndicat ont été visés par de fausses accusations pénales. A cet égard, le gouvernement indique que, bien que l’organisation plaignante ait soumis des documents qui permettent d’établir que les travailleurs ont été fréquemment transférés, rétrogradés et suspendus et ont reçu des mémos et des lettres d’avertissement après avoir adhéré au syndicat, elle n’est pas parvenue à démontrer que les mesures prises par la direction de l’entreprise étaient intentionnelles et déloyales. Il existe des mécanismes institutionnels, tels que les mécanismes de conciliation, les tribunaux du travail et les tribunaux industriels auxquels les travailleurs peuvent s’adresser pour obtenir réparation. Plus particulièrement, si un quelconque acte de discrimination a été commis par la direction, comme le prétend le syndicat, ce dernier peut saisir le conciliateur en vertu de l’article 2, alinéa k), de la loi sur les conflits de travail.
- 887. S’agissant des accusations pénales, seules les autorités compétentes et les tribunaux peuvent déterminer si les accusations formées sont fondées. A cet égard, les affaires relatives aux fausses accusations pénales font toujours l’objet d’une enquête de police. Plus particulièrement, en ce qui concerne les fausses accusations qui auraient été portées contre M. B.M. Baskaran, lequel a par la suite été suspendu, et contre M. D. Christopher, licencié, le gouvernement indique que seul un organe judiciaire est habilité à déterminer si les mesures prises à l’encontre de ces deux syndicalistes sont contraires à la législation. Le gouvernement indique qu’en l’espèce les relations tendues entre ces deux personnes et la direction de l’entreprise ne peuvent être écartées.
- 888. Le gouvernement prend également note de la déclaration de l’organisation plaignante selon laquelle, bien que la loi sur les conflits de travail permette de traduire en justice et de sanctionner les dirigeants d’entreprise pour «pratiques déloyales du travail», les tribunaux ne peuvent en réalité connaître de cette infraction que si le gouvernement les saisit à cet effet. Il note également que selon l’organisation plaignante le conflit professionnel relatif à la liste de demandes de l’organisation plaignante est toujours en instance attendu que le gouvernement n’a pas pris la décision de renvoyer cette affaire devant la justice, bien qu’un rapport sur l’échec de la conciliation ait été rendu le 20 juin 2005. A cet égard, le gouvernement indique que, le 28 mars 2007, le Département du travail et de l’emploi a rendu une décision. Il explique en outre qu’un employeur ne peut être poursuivi pour «pratiques déloyales du travail» que si le tribunal du travail ou le tribunal industriel établi en vertu de la loi sur les conflits de travail considère qu’une mesure spécifique prise par l’employeur constitue une pratique déloyale du travail au sens de ladite loi. Ce n’est qu’alors que des poursuites peuvent être engagées pour «pratiques déloyales du travail». Le gouvernement ne peut pas, suo moto, parvenir à la conclusion qu’une mesure spécifique prise par l’employeur constitue une «pratique déloyale du travail».
- 889. S’agissant des cas allégués de suspension, le gouvernement déclare que l’organisation plaignante n’est pas parvenue à spécifier si les mesures de suspension correspondent à des sanctions ou si elles ont été simplement prises en attendant la fin de l’enquête visant les intéressés. Le gouvernement explique que les mesures de suspension prises avant la conclusion des enquêtes sont habituellement liées à des actions disciplinaires engagées contre des travailleurs, auquel cas ces derniers doivent attendre l’expiration de la mesure disciplinaire. En vertu de la législation du travail, aucun différend ne peut être soulevé avant la fin de l’enquête. Si la suspension a été ordonnée pour sanctionner une mauvaise conduite, l’employeur doit obligatoirement suivre la procédure établie par la législation avant d’imposer une telle sanction. Le travailleur concerné peut contester la mesure de suspension dont il fait l’objet en vertu de la loi sur les conflits de travail. Si la question n’est pas réglée à l’amiable, elle peut être renvoyée au tribunal de travail pour arbitrage.
- 890. Le gouvernement indique en outre que l’organisation plaignante n’est pas parvenue à démontrer que la direction de l’entreprise a menacé ses sympathisants. S’agissant des lettres d’avertissement adressées aux membres de cette dernière après le dépôt de la présente plainte en août 2006, le gouvernement indique que, bien qu’il soit exact que des lettres d’avertissement ont été adressées aux membres du syndicat, cela ne constitue pas, en soi, une infraction à la législation du travail ou une violation des droits des travailleurs.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité- 891. Le comité note que l’organisation plaignante, le Syndicat des travailleurs unis de MRF, allègue que ses membres ont été victimes d’actes de discrimination antisyndicale de la part de la direction de l’entreprise MRF Limited. En particulier, l’organisation plaignante évoque l’envoi de notes et de mémos d’avertissement et d’avis d’exposé des motifs, le licenciement, la suspension et le transfert de membres actifs de l’organisation, les réductions arbitraires de salaires et plusieurs actes de harcèlement et d’intimidation. Elle affirme en outre que l’employeur s’est ingéré dans ses affaires en créant des syndicats fantoches et que l’employeur ne reconnaît pas l’organisation plaignante aux fins de la négociation collective et refuse de négocier collectivement avec elle, lui préférant son syndicat fantoche. Enfin, l’organisation plaignante affirme que le système juridique du pays ne garantit pas de protection suffisante des droits syndicaux.
- 892. Le comité prend note de la communication du gouvernement par laquelle il transmet les observations du gouvernement du Tamil Nadu et soulève également la question de la recevabilité de la plainte. Selon le gouvernement, l’organisation plaignante n’a pas épuisé tous les mécanismes disponibles au niveau de l’Etat et au niveau national pour régler les questions posées dans le présent cas. A cet égard, bien que le recours aux procédures judiciaires internes, quel qu’en soit le résultat, soit sans conteste un facteur à prendre en considération, le comité a toujours estimé, étant donné la nature de ses responsabilités, que sa compétence pour examiner les allégations n’est pas subordonnée à l’épuisement des procédures nationales de recours. [Voir les Procédures en vigueur pour l’examen des plaintes en violation de la liberté syndicale, paragr. 30.]
- Discrimination antisyndicale
- 893. Le comité prend note des informations détaillées et complètes (étayées par des documents) présentées par l’organisation plaignante au sujet des allégations d’actes de discrimination antisyndicale commis par la direction de MRF Limited. Le comité relève avec préoccupation que les efforts déployés par l’organisation plaignante pour attirer l’attention des autorités sur la violation des droits syndicaux dans l’usine d’Arakonam, soit par le biais de manifestations, soit par le biais d’appels aux autorités pertinentes du gouvernement du Tamil Nadu, en particulier à l’inspecteur des usines, à l’inspecteur du travail, aux autorités établies en vertu de la loi sur le paiement des salaires et même à la police, semblent n’avoir eu aucun effet et que le gouvernement du Tamil Nadu n’a non seulement pas examiné pleinement les allégations de l’organisation plaignante mais n’a pas renvoyé les conflits du travail en instance à l’arbitrage.
- 894. Le comité prend note de la déclaration du gouvernement selon laquelle, bien que l’organisation plaignante ait fourni des documents qui permettent d’établir que les travailleurs ont été fréquemment transférés, rétrogradés et suspendus, qu’ils ont reçu des mémos et des lettres d’avertissement et ont été licenciés après avoir adhéré au syndicat, cette dernière n’est pas parvenue à établir que ces mesures prises par la direction de l’entreprise étaient intentionnelles et déloyales ou constituaient une discrimination antisyndicale. Le gouvernement indique en outre que l’organisation ou les travailleurs auraient pu saisir les institutions existantes établies au titre de la loi sur les conflits de travail pour obtenir réparation des actes commis à leur encontre.
- 895. Le comité rappelle que la discrimination antisyndicale est une des violations les plus graves de la liberté syndicale puisqu’elle peut compromettre l’existence même des syndicats. Nul ne doit faire l’objet d’une discrimination ou subir un préjudice dans l’emploi en raison de son affiliation ou de ses activités syndicales légitimes, et les responsables de tels actes doivent être punis. Il rappelle en outre qu’un des principes fondamentaux de la liberté syndicale est que les travailleurs doivent bénéficier d’une protection adéquate contre tous actes de discrimination tendant à porter atteinte à la liberté syndicale en matière d’emploi – licenciement, transfert, rétrogradation et autres actes préjudiciables –, et que cette protection est particulièrement souhaitable en ce qui concerne les délégués syndicaux, étant donné que, pour pouvoir remplir leurs fonctions syndicales en pleine indépendance, ceux-ci doivent avoir la garantie qu’ils ne subiront pas de préjudice en raison du mandat syndical qu’ils détiennent. Le comité a estimé que la garantie de semblable protection dans le cas de dirigeants syndicaux est en outre nécessaire pour assurer le respect du principe fondamental selon lequel les organisations de travailleurs ont le droit d’élire librement leurs représentants. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, paragr. 769, 772 et 799.]
- 896. Le comité rappelle que, lorsqu’elles sont saisies de plaintes en discrimination antisyndicale, les instances compétentes doivent mener immédiatement une enquête et prendre les mesures nécessaires pour remédier aux conséquences des actes de discrimination antisyndicale qui ont été constatés. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 835.] Le comité considère que, tant que la protection contre les actes de discrimination antisyndicale est effectivement assurée, les méthodes adoptées pour garantir celle-ci aux travailleurs peuvent varier d’un Etat à l’autre, mais, si des actes de discrimination se produisent, le gouvernement intéressé doit, quelles que soient les méthodes utilisées normalement, prendre toutes les mesures qui s’avèrent nécessaires pour remédier à cette situation. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 816.] Le comité note que tout au long de sa réponse le gouvernement indique que, bien que l’organisation plaignante ait fourni des preuves documentaires sur l’existence des transferts, suspensions, licenciements, mémos, avis d’avertissement et d’exposé des motifs, elle n’est pas parvenue à démontrer que ces mesures prises par la direction de l’entreprise contre des dirigeants syndicaux et des membres constituent une discrimination antisyndicale. Le comité considère que, puisqu’il est souvent difficile, voire impossible, pour le travailleur de prouver qu’il ou elle a été victime d’actes de discrimination antisyndicale, la législation ou la pratique et les procédures devraient prévoir des moyens de remédier rapidement à ces difficultés. Le comité note que la plupart des cas relatifs au licenciement de travailleurs permanents et d’autres travailleurs au cours de la période 2004-2006 sont toujours en instance auprès de l’inspecteur du travail ou du tribunal du travail. Dans ces circonstances, le comité demande à l’autorité compétente en matière de travail et à l’autorité judiciaire, afin d’éviter un déni de justice, de se prononcer sur les licenciements sans retard et souligne qu’une nouvelle prolongation indue de la procédure pourrait justifier en elle-même la réintégration de ces personnes dans leur poste de travail. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 827.]
- 897. Le comité note avec préoccupation que, outre le licenciement de 22 syndicalistes ces dernières années, l’usine a récemment licencié M. G. Shankar, secrétaire général de l’organisation plaignante (février 2007) et M. D. Christopher, membre de son comité exécutif (avril 2007). Le comité demande instamment au gouvernement de mener sans retard une enquête indépendante sur les actes allégués de discrimination antisyndicale dont ont été victimes les dirigeants et les membres du Syndicat des travailleurs unis de MRF et, si ces allégations s’avèrent exactes, d’offrir aux intéressés une réparation pour les préjudices subis. En particulier, le comité demande au gouvernement de veiller à ce que tous les travailleurs licenciés en raison de leurs activités syndicales soient réintégrés et reçoivent toutes les indemnités auxquelles ils ont droit, y compris l’intégralité des salaires non perçus sous réserve de preuves solides et/ou d’informations démontrant le contraire; que tous les travailleurs suspendus en raison de leurs activités syndicales soient autorisés à reprendre le travail et reçoivent toutes les indemnités auxquelles ils ont droit, y compris les arriérés de salaires; que toutes les procédures disciplinaires en cours engagées au motif de l’affiliation syndicale et des activités syndicales des intéressés soient abandonnées; que les fausses accusations pénales dont font l’objet les membres du syndicat soient levées et que les travailleurs concernés soient indemnisés; que les membres du syndicat transférés en raison de leur appartenance au syndicat ou de leurs activités syndicales soient autorisés à réintégrer leur précédent poste de travail. Le comité demande en outre au gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir que les membres de l’organisation plaignante ne soient pas victimes de discrimination en termes de salaires et d’autres indemnités et qu’ils ne soient pas affectés de manière discriminatoire dans l’unité des précomposites chimiques de la zone Banbury de l’usine d’Arakonam. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard.
- Ingérence dans les affaires du syndicat
- 898. Le comité prend note des allégations de l’organisation plaignante concernant l’ingérence de l’employeur dans ses affaires internes par le biais de la création de syndicats fantoches et de tactiques antisyndicales exercées sous la forme de menaces, de pressions, de formation de fausses accusations, de présentation aux travailleurs d’attestations d’appartenance au syndicat fantoche et d’incitations financières pour encourager les travailleurs à changer d’affiliation syndicale. Le comité prend note de la déclaration du gouvernement selon laquelle les travailleurs lésés ou le syndicat peuvent saisir les organes compétents en vertu de la loi sur les conflits de travail afin d’obtenir réparation des actes commis à leur encontre. Une fois encore, le comité regrette l’inaction du gouvernement du Tamil Nadu face aux nombreuses allégations détaillées formulées par l’organisation plaignante. Il exhorte par conséquent le gouvernement à mener sans retard une enquête indépendante sur les allégations d’ingérence de la direction de l’usine dans les affaires internes du syndicat et, si les allégations de la partie plaignante s’avèrent exactes, à prendre toutes les mesures nécessaires pour veiller à ce que des sanctions suffisamment dissuasives soient imposées de manière à ce que la direction de l’entreprise s’abstienne à l’avenir de recourir à des actes de cette nature de manière à protéger l’indépendance de toutes les organisations de travailleurs dans l’usine et, en particulier, à veiller à ce que l’organisation plaignante puisse mener ses activités librement.
- Protection insuffisante des droits syndicaux
- 899. Le comité prend note de l’allégation de l’organisation plaignante selon laquelle ni la législation nationale ni la législation des Etats ne prévoient de protection suffisante contre les actes de discrimination antisyndicale et d’ingérence dans les affaires internes des syndicats et que les procédures légales en vigueur sont longues et harassantes. Le comité rappelle que le gouvernement a la responsabilité de prévenir tous actes de discrimination antisyndicale et doit veiller à ce que les plaintes pour des pratiques discriminatoires de cette nature soient examinées dans le cadre d’une procédure qui doit être prompte, impartiale et considérée comme telle par les parties intéressées. Il considère qu’il est nécessaire que la législation établisse d’une manière expresse des recours et des sanctions contre les actes de discrimination antisyndicale. Il rappelle en outre qu’il est nécessaire que la législation établisse d’une manière expresse des recours et des sanctions suffisamment dissuasives contre les actes d’ingérence des employeurs à l’égard des travailleurs et des organisations de travailleurs. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 813, 817 et 862.] Le comité demande donc au gouvernement d’examiner activement, par des consultations approfondies et franches avec les partenaires sociaux, les dispositions législatives permettant de sanctionner expressément la violation des droits syndicaux et prévoyant des sanctions suffisamment dissuasives contre les actes de discrimination antisyndicale et d’ingérence dans les affaires internes des syndicats. Il demande au gouvernement de le tenir informé des mesures prises ou envisagées à cet égard.
- 900. Le comité prend également note de l’allégation de l’organisation plaignante selon laquelle le droit des travailleurs et des syndicats de se pourvoir en justice est conditionné à la recommandation de renvoi à l’arbitrage par les autorités compétentes. Le comité rappelle que, dans ses conclusions relatives au cas no 2228, il avait constaté, premièrement, que le droit de se pourvoir en justice directement, sans être recommandé par le gouvernement d’Etat, n’est pas conféré aux travailleurs suspendus et, deuxièmement, qu’un tel droit n’est toujours pas conféré aux syndicats et avait demandé au gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires, dont la modification de la loi de 1947 sur les conflits de travail, pour que les travailleurs suspendus et les syndicats puissent se pourvoir en justice directement. [Voir 338e rapport, paragr. 200.] Le comité demande instamment au gouvernement, en consultation avec les partenaires sociaux, d’amender les dispositions pertinentes de la loi sur les conflits de travail de manière à garantir que les travailleurs et les syndicats puissent se pourvoir en justice directement sans être recommandés par le gouvernement d’Etat et de le tenir informé des mesures prises ou envisagées à cet égard.
- Négociation collective
- 901. Le comité prend note de l’allégation de l’organisation plaignante selon laquelle la direction de l’entreprise refuse de reconnaître son caractère majoritaire et, par conséquent, de la reconnaître en tant qu’agent négociateur, préférant fixer les conditions de travail au moyen d’«accords» conclus avec un syndicat fantoche. Il prend en outre note de l’allégation selon laquelle, à l’exception du Code de discipline non contraignant adopté en 1961, ni la législation nationale ni celle du Tamil Nadu ne prévoient de procédure de reconnaissance des syndicats. Par ailleurs, ledit code ne prévoit pas non plus la possibilité de déterminer le caractère majoritaire d’un syndicat lorsque plusieurs syndicats demandent la reconnaissance de leur statut représentatif aux fins de la négociation collective au moyen d’un vote à bulletin secret.
- 902. Le comité note que, selon le gouvernement, il n’existe pas dans l’Etat du Tamil Nadu de législation relative à la reconnaissance d’un syndicat en tant que syndicat majoritaire ou en tant qu’agent négociateur. Si l’organisation plaignante s’estime lésée par le refus de la direction de l’entreprise de le reconnaître, elle peut saisir le Comité d’Etat d’évaluation et d’application, un organe tripartite qui est chargé d’évaluer le nombre de membres affiliés à un syndicat dans une industrie ou une entreprise donnée en vérifiant les archives de ces derniers et de recommander à l’employeur de reconnaître l’un d’entre eux.
- 903. Premièrement, s’agissant des principes énoncés ci-dessus concernant la protection contre les actes de discrimination antisyndicale et d’ingérence dans les affaires internes des syndicats, le comité rappelle l’importance de l’autonomie des parties à la négociation collective et souligne que les négociations ne devraient pas être menées au nom des travailleurs ou de leurs organisations par des agents négociateurs nommés ou dominés par les employeurs ou leurs organisations. La participation à la négociation collective et la signature des conventions qui en découlent impliquent nécessairement l’indépendance des organisations signataires vis-à-vis de l’employeur ou des organisations d’employeurs ainsi que des autorités publiques. Ce n’est que lorsque ce caractère d’indépendance est avéré que la négociation peut être ouverte aux organisations syndicales. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 868 et 966.]
- 904. Le comité considère, en outre, que les employeurs devraient reconnaître, aux fins de la négociation collective, les organisations représentatives des travailleurs qu’ils emploient. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 952 et 953.] Afin d’encourager le développement harmonieux des négociations collectives et d’éviter les conflits, on devrait toujours appliquer, lorsqu’elles existent, les procédures destinées à désigner les syndicats les plus représentatifs aux fins de la négociation collective quand on ne sait pas clairement par quels syndicats les travailleurs désirent être représentés. Au cas où ces procédures feraient défaut, les autorités devraient, le cas échéant, examiner la possibilité d’instituer des règles objectives à cet égard. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 971.] A cet égard, le comité considère que la détermination des organisations susceptibles de signer seules des conventions collectives devrait être établie sur la base d’un double critère, celui de la représentativité et celui de l’indépendance. Les organisations répondant à ces critères devraient être déterminées par un organisme présentant toutes garanties d’indépendance et d’objectivité. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 967.] Le comité considère que, dans le cas d’espèce, compte tenu des informations communiquées par l’organisation plaignante, de l’historique de ce cas ainsi que des allégations formulées, la détermination du syndicat le plus représentatif par un vote à bulletin secret constitue non seulement un moyen acceptable mais un moyen souhaitable de s’assurer que les travailleurs exercent leur droit de choisir l’organisation qui sera chargée de les représenter dans la négociation collective. Le comité demande par conséquent au gouvernement de veiller à ce qu’une vérification objective de l’affirmation du Syndicat des travailleurs unis de MRF qu’il représente la majorité des travailleurs de l’usine d’Arakonam soit effectuée sans tarder et, si ce syndicat s’avère être le syndicat majoritaire, il demande au gouvernement de prendre toutes les mesures appropriées pour faire en sorte que l’employeur reconnaisse ce syndicat aux fins de la négociation collective.
- 905. Enfin, le comité demande au gouvernement d’obtenir des informations des organisations d’employeurs concernées ainsi que des organisations de l’entreprise visée, afin de connaître leurs vues sur les questions en instance.
Recommandations du comité
Recommandations du comité - 906. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Le comité demande instamment au gouvernement de mener sans retard une enquête indépendante sur les actes allégués de discrimination antisyndicale dont ont été victimes les dirigeants et les membres du Syndicat des travailleurs unis de MRF et, si ces allégations s’avèrent exactes, d’offrir aux intéressés une réparation pour les préjudices subis. En particulier, le comité demande au gouvernement de veiller à ce que:
- – tous les travailleurs licenciés en raison de leurs activités syndicales soient réintégrés et reçoivent toutes les indemnités auxquelles ils ont droit, y compris l’intégralité des salaires non perçus sous réserve de preuves solides et/ou d’informations démontrant le contraire;
- – tous les travailleurs suspendus en raison de leurs activités syndicales soient autorisés à reprendre le travail et reçoivent toutes les indemnités auxquelles ils ont droit, y compris les arriérés de salaires;
- – toutes les procédures disciplinaires en cours engagées au motif de l’affiliation syndicale et des activités syndicales des intéressés soient abandonnées;
- – les fausses accusations pénales dont font l’objet les membres du syndicat soient levées et les travailleurs concernés soient indemnisés;
- – les membres du syndicat transférés en raison de leur appartenance au syndicat ou de leurs activités syndicales soient autorisés à réintégrer leur précédent poste de travail.
- Le comité demande en outre au gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir que les membres de l’organisation plaignante ne soient pas victimes de discrimination en termes de salaires et d’autres indemnités et qu’ils ne soient pas affectés de manière discriminatoire dans l’unité des précomposites chimiques de la zone Banbury de l’usine d’Arakonam. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé du résultat des enquêtes effectuées.
- b) Le comité demande à l’autorité compétente en matière de travail et à l’autorité judiciaire, afin d’éviter un déni de justice, de se prononcer sur les licenciements sans retard et souligne qu’une nouvelle prolongation indue de la procédure pourrait justifier en elle-même la réintégration de ces personnes dans leur poste de travail.
- c) Le comité exhorte le gouvernement à mener sans retard une enquête indépendante sur les allégations d’ingérence de la direction de l’usine dans les affaires internes du syndicat et, si les allégations de l’organisation plaignante s’avèrent exactes, à prendre toutes les mesures nécessaires pour veiller à ce que des sanctions suffisamment dissuasives soient imposées de manière à ce que la direction de l’entreprise s’abstienne à l’avenir de recourir à des actes de cette nature de manière à protéger l’indépendance de toutes les organisations de travailleurs dans l’usine et, en particulier, à veiller à ce que l’organisation plaignante puisse mener ses activités librement. Il demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard.
- d) Le comité demande au gouvernement d’examiner activement, par des consultations approfondies et franches avec les partenaires sociaux, les dispositions législatives permettant de sanctionner expressément la violation des droits syndicaux et prévoyant des sanctions suffisamment dissuasives contre les actes de discrimination antisyndicale et d’ingérence dans les affaires internes des syndicats.
- e) Le comité demande instamment au gouvernement, en consultation avec les partenaires sociaux, d’amender les dispositions pertinentes de la loi sur les conflits de travail de manière à garantir que les travailleurs suspendus et les syndicats puissent se pourvoir en justice directement sans être recommandés par le gouvernement d’Etat.
- f) Le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que soit reconnu le Syndicat des travailleurs unis de MRF aux fins de la négociation collective. Il demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard.
- g) Le comité demande au gouvernement d’envisager de mettre au point des règles objectives pour la désignation du syndicat le plus représentatif aux fins de négociation collective, lorsqu’il n’apparaît pas clairement par quel syndicat les travailleurs souhaitent être représentés. Il demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard.
- h) Le comité demande au gouvernement d’obtenir des informations des organisations d’employeurs concernées ainsi que des organisations de l’entreprise visée afin de connaître leurs vues sur les questions en instance.