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- 165. La plainte figure dans une communication en date du 20 février 2009 présentée par le Syndicat des services des communications, de l’électricité, de l’électronique, de l’énergie, de l’information, des postes, de la plomberie et des services connexes d’Australie (CEPU). L’organisation plaignante a présenté un complément d’information à l’appui de sa plainte dans des communications en date du 16 et du 28 avril 2009.
- 166. Le gouvernement a présenté ses observations dans une communication en date du 15 janvier 2010.
- 167. L’Australie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l’organisation plaignante
A. Allégations de l’organisation plaignante- 168. Dans ses communications en date des 20 février et 28 avril 2009, l’organisation plaignante déclare que, en novembre 2008, le projet de loi sur le travail équitable (Fair Work Bill 2008) a été déposé au parlement. Il a ensuite été débattu et adopté avec des amendements par les deux chambres du parlement. Le projet – désormais devenu la loi sur le travail équitable (Fair Work Act (FWA)), 2009, a reçu la sanction royale.
- 169. L’organisation plaignante indique que, depuis 1999, la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations de l’OIT (CEACR) a, dans ses commentaires, signalé plusieurs dispositions de la législation antérieure – la loi sur les relations professionnelles (WRA) de 1996, abrogée depuis – qui n’étaient pas en conformité avec les conventions nos 87 et 98. La FWA reprend un grand nombre des dispositions contrevenantes renfermées dans la WRA et introduit deux nouvelles possibilités de violation des principes de la liberté syndicale. En particulier, la FWA continue d’enfreindre le droit de la liberté syndicale en: 1) donnant la primauté aux accords conclus au niveau de l’entreprise et en limitant le niveau auquel une négociation peut être engagée; 2) limitant la teneur des accords; 3) offrant une protection insuffisante aux travailleurs syndiqués qui entreprennent une action revendicative à l’appui de leurs droits au titre des conventions; 4) limitant le droit d’organisation; 5) restreignant le droit de grève au-delà des limites autorisées par les conventions et en supprimant la protection accordée à plusieurs types d’action revendicative, notamment les grèves de solidarité et celles menées en soutien à des accords multientreprises, la «négociation encadrée», les questions qui ne sont pas «autorisées» et le paiement du salaire en cas de grève; 6) interdisant l’action revendicative dans des situations de «préjudice économique» et de danger pour l’économie, y compris par la mise en place d’un arbitrage obligatoire à l’initiative du ministre; et 7) imposant des pénalités pour s’être lancé dans une action revendicative «non protégée» et en mettant en place une procédure de vote à bulletin secret. L’organisation plaignante soutient par ailleurs que l’agencement du projet de loi exige que les employeurs court-circuitent les syndicats pour rédiger et obtenir des accords directement avec les salariés, même lorsqu’un syndicat existe sur le lieu de travail.
- 170. S’agissant des accords d’entreprise, l’organisation plaignante déclare que la FWA soulève trois préoccupations particulières. En premier lieu, les accords ne sont plus élaborés avec les organisations de travailleurs, c’est-à-dire avec les syndicats. Alors que la WRA prévoyait la mise en place d’accords entre employeurs et syndicats – accords qui seraient ensuite soumis au vote des salariés –, la FWA ne prévoit aucune disposition de ce type. Au lieu de cela, seuls des accords d’entreprise sont établis lorsque, après avoir été soumis par l’employeur au vote des salariés, de tels accords sont adoptés par ces derniers (art. 182(1)). Cette intention est confirmée par l’article 183 de la FWA. L’implication d’une organisation de travailleurs n’est pas nécessaire à la conclusion d’un accord, pas plus qu’elle n’est exigée avant de soumettre un accord au vote des salariés. Selon l’organisation plaignante, cette conception du rôle des organisations de travailleurs est purement et simplement contraire à la lettre et à l’esprit de l’article 4 de la convention no 98, qui prévoit clairement que des mesures soient prises pour encourager les syndicats à préparer et à conclure des conventions, tout en dissuadant les employeurs d’entreprendre une négociation collective directe avec les travailleurs lorsqu’un syndicat est présent. En outre, le projet de loi exclut les organisations de travailleurs des parties à toute convention obtenue, ce qui constitue une autre rupture radicale avec l’histoire et la législation du travail antérieures au gouvernement précédent.
- 171. L’organisation plaignante déclare que la dévalorisation inadmissible du rôle des organisations de travailleurs transparaissait dans les objets de la WRA. Toutefois, alors que, avant le gouvernement précédent, l’un des objets de la WRA était «d’encourager l’organisation d’instances représentatives des employeurs et des salariés et leur enregistrement en vertu de la présente loi», la FWA ne fait aucune mention des organisations dans ses nouveaux objets. Ainsi, alors que la WRA mettait de manière inadmissible sur un pied d’égalité les conventions syndicales et les conventions non syndicales, la FWA ne prévoit tout bonnement aucun rôle pour les organisations dans l’élaboration et l’adoption des conventions. Afin de se conformer à la convention no 98, des amendements importants sont exigés pour traduire le fait que les conventions sont, ou devraient être, conclues entre des organisations représentatives et des employeurs et que les organisations ont un rôle légitime à jouer dans le cadre des dispositions de la FWA relatives à la négociation d’une convention.
- 172. L’organisation plaignante indique que les nouvelles dispositions de la FWA relatives à la négociation (partie 2-4, sections 3 et 8), tout en étant les bienvenues, n’exigent en fait aucune convention avec le syndicat dans les cas où il en existe un, mais permettront plutôt à l’employeur de négocier des conventions non syndicales même lorsqu’un syndicat existe sur un lieu de travail.
- 173. En outre, les dispositions individuelles «à prendre ou à laisser» ne sont pas interdites par la législation. La FWA prévoit des dispositions individuelles permettant à un employeur de négocier directement avec un salarié, ou avec un salarié potentiel, des conditions qui s’écartent de la convention (art. 144) ou de l’accord d’entreprise (art. 202) concerné. L’organisation plaignante ajoute qu’il est effectivement obligatoire d’inclure dans chaque accord d’entreprise une clause autorisant des variations individuelles (art. 202). Qui plus est, la FWA n’interdit pas que de telles dispositions individuelles soient proposées avant le démarrage d’un contrat de travail; mais il interdit effectivement tout accord avec une tierce partie (c’est-à-dire un syndicat) avant la conclusion de telles dispositions (art. 144(5) et 203(5)). L’article 203(4) de la FWA impose un examen de «situation générale plus favorable» pour tout accord de ce type, mais cet examen n’est soumis à aucune évaluation par une quelconque tierce partie avant la conclusion de l’accord. Il n’existe pas non plus d’obligation de soumettre tout accord signé de ce type à la vérification d’une tierce partie. Par ailleurs, le test de «situation générale plus favorable» implique par définition la compensation d’un avantage de certaines clauses (par exemple le montant des amendes) par un autre avantage (par exemple un tarif horaire supérieur), ce qui signifie que chaque clause particulière d’un accord cesse d’avoir une base législative solide mais peut à la place être modifiée.
- 174. L’organisation plaignante déclare qu’un employeur pourrait donc, en particulier dans les milieux non réglementés par des conventions syndicales, continuer à utiliser son pouvoir de négociation disproportionné pour conclure avec des salariés des conditions qui s’écartent des normes minimales prévues par la législation. Il n’existe par ailleurs aucune interdiction de proposer ces «dispositifs de flexibilité» comme une condition d’emploi. Bien que des contrats individuels statutaires (AWA) ne soient plus disponibles, la FWA met à la disposition des employeurs toute une série de mesures permettant de proposer aux futurs salariés des contrats individuels «à prendre ou à laisser» qui s’écartent du minimum prévu par la législation. Même si l’une quelconque de ces dispositions est contraire à l’accord ou à la convention car elle ne répond pas au critère de l’examen de «situation générale plus favorable», étant donné la nature privée de la transaction, rien ne garantit qu’un tel manquement ne sera jamais découvert. A moins que l’approche «à prendre ou à laisser» soit interdite, la négociation collective ne sera pas encouragée, contrairement aux termes de la convention no 98, et les salaires minima pourront être modifiés.
- Dispositions donnant la primauté aux accords conclus au niveau de l’entreprise et restreignant le niveau auquel la négociation peut intervenir
- 175. L’organisation plaignante indique que l’un des objets de la FWA, conformément à l’article 3(f), est de parvenir à la «productivité et à la justice en mettant l’accent sur la négociation collective au niveau de l’entreprise étayée par de simples obligations de négocier de bonne foi et des règles claires régissant l’action revendicative». L’article 171 privilégie de même la négociation collective au niveau de l’entreprise; la FWA établit une nette préférence pour la négociation au niveau de l’entreprise par rapport aux négociations à d’autres niveaux, en violation de la convention no 98. La préférence donnée à la négociation au niveau de l’entreprise se traduit également par le fait que, en vertu de l’article 413 de la FWA, l’action revendicative en soutien à des accords multientreprises n’est pas protégée. De plus, puisque l’article 413 ne protège pas l’action revendicative en soutien à des accords multientreprises, l’adoption de ces derniers peut potentiellement être refusée en vertu de l’article 186(2)(b), qui dispose que «Travail équitable Australie», l’organisme mandaté pour faire appliquer la FWA, peut refuser d’homologuer des accords s’il n’est pas totalement convaincu que personne n’a contraint, ou n’a menacé de contraindre, l’un quelconque des employeurs à établir l’accord. L’organisation plaignante indique que, en vertu de l’article 229 de la FWA, les demandes d’ordonnance enjoignant l’employeur de négocier présentées à «Travail équitable Australie» sont interdites pour les accords multiemployeurs, à moins qu’une autorisation de faible rémunération soit en vigueur en relation avec l’accord concerné.
- 176. Concernant la négociation encadrée, l’organisation plaignante indique que les articles 408 et 409 de la FWA excluent de la sphère des actions protégées l’action revendicative en soutien à une négociation encadrée. Qui plus est, en vertu de l’article 422 de la FWA, des injonctions contre une telle action peuvent être obtenues de la Cour fédérale ou de la Cour fédérale des magistrats.
- Dispositions limitant la teneur des conventions
- 177. L’organisation plaignante indique que la FWA impose des restrictions à la teneur des conventions collectives, en violation de la convention no 98. L’article 172 dispose que les conventions collectives peuvent porter sur des «questions autorisées» et il adopte un examen des «questions ayant trait aux relations entre le ou les employeur(s) et la ou les organisation(s) de salariés» comme le fondement permettant de déterminer si une question est ou non autorisée. L’organisation plaignante soutient qu’un tel examen ne permettra pas d’autoriser des «questions non syndicales» sur lesquelles des travailleurs peuvent légitimement souhaiter négocier et qu’il exclura très probablement les questions suivantes: les conditions relatives aux pratiques environnementales d’un employeur; les programmes qui réglementent la composition des effectifs de manière à augmenter le nombre de femmes; les clauses prescrivant un nombre minimum d’apprentis ou prescrivant qu’un certain nombre d’apprentis devra être recruté parmi des Australiens autochtones; et les restrictions imposées à la proportion de prestataires utilisés dans une entreprise.
- 178. L’organisation plaignante indique que l’article 194 énonce plusieurs conditions d’une convention censée être «illégale», qui constituent des motifs de refus d’homologation d’une convention par l’organisme «Travail équitable Australie» en vertu de l’article 186. L’article 194 interdit de plus certaines conditions relatives à des frais de négociation de conventions collectives, tandis que l’article 470 interdit de soumettre à négociation la question du paiement des jours de grève. Ces dispositions interdisent par ailleurs la négociation de normes «meilleures que le minimum prévu par la législation» dans les domaines suivants: 1) droit d’accès; 2) action revendicative; et 3) licenciement abusif
- – dans la mesure où les périodes d’essai sont concernées. L’organisation plaignante ajoute que la négociation sur des questions non autorisées n’est pas protégée par la loi, est soumise aux ordonnances de «Travail équitable Australie» et, pour finir, aux décisions et aux pénalités des tribunaux, et que les dispositions antidiscriminatoires de la FWA ne s’étendent pas à une personne ayant été licenciée ou ayant subi tout autre préjudice pour avoir pris part à une action revendicative en soutien à des questions non autorisées.
- Dispositions imposant des limitations au droit d’accès des syndicats aux lieux de travail
- 179. Selon l’organisation plaignante, les articles 512 et 513 de la FWA limitent le droit des représentants syndicaux d’avoir accès aux lieux de travail en imposant un système de permis géré par «Travail équitable Australie», au titre duquel les permis sont délivrés sur la base d’un test de «capacité et légitimité de la personne». De plus, en vertu de l’article 513, les représentants syndicaux courent le risque de se voir interdire à vie l’accès aux lieux de travail pour infraction au droit du travail.
- Dispositions limitant le droit de grève
- 180. L’organisation plaignante soutient que le droit de grève est limité de plusieurs façons en vertu de la FWA. L’action revendicative en soutien à des accords multiemployeurs et à la négociation encadrée n’est pas protégée, pas plus que ne le sont d’une manière générale les boycotts secondaires et les grèves de solidarité. De même, l’action revendicative en soutien à des négociations relatives à des questions censées être interdites en vertu de la FWA est elle-même interdite.
- 181. Selon l’organisation plaignante, les articles 424 et 426 de la FWA habilitent «Travail équitable Australie» à suspendre ou à mettre fin à une action revendicative protégée en soutien à une proposition d’accord d’entreprise si elle est convaincue que ladite action a menacé, menace ou pourrait causer un préjudice significatif à l’économie ou à une partie importante de celle-ci, ou encore à une tierce partie. Qui plus est, en vertu de l’article 423, «Travail équitable Australie» peut suspendre ou résilier une action revendicative protégée menée en soutien à une proposition de convention collective lorsqu’il existe une menace de préjudice économique important pour l’employeur ou pour l’un quelconque des salariés qui seront couverts par la convention en question. L’organisation plaignante affirme que l’article 423, tel qu’il est rédigé, semble susceptible de rendre illégales toutes les actions revendicatives efficaces – en violation des principes de la liberté syndicale. En outre, l’article 431 permet au ministre de faire une déclaration publique pour mettre fin à une action revendicative s’il a la conviction qu’une telle action menace ou pourrait éventuellement menacer de causer un préjudice significatif à l’économie nationale ou à une partie importante de celle-ci.
- 182. L’organisation plaignante indique par ailleurs que la partie 3-3, section 8, de la FWA, renferme des dispositions réglementant les procédures de vote à bulletin secret pour l’appel à une grève. Les dispositions contenues dans la partie 3-3 prévoient la suppression du statut d’action protégée en l’absence d’un vote à bulletin secret (art. 445), exigent de «nombreuses étapes» avant de pouvoir organiser un scrutin (sous-sections B-C) et exigent une majorité, non du nombre de voix ayant effectivement pris part au vote, mais des voix ayant le droit de voter pour qu’une action revendicative protégée puisse être autorisée; ces dispositions, affirme l’organisation plaignante, sont inutilement fastidieuses et compliquées et elles violent les principes de la liberté syndicale. Enfin, l’organisation plaignante déclare que cet article 470 de la FWA limite l’action revendicative en soutien au paiement du salaire en cas de grève.
- 183. Enfin, l’organisation plaignante déclare que la partie 4-1 de la FWA concernant les recours fixe de lourdes sanctions pour la participation à une action revendicative non protégée et pour l’exercice de droits autorisés en vertu des conventions de l’OIT correspondantes. Les travailleurs et leurs syndicats restent exposés à: 1) des injonctions de l’organisme «Travail équitable Australie» et des sanctions et pénalités en cas de manquement à celle-ci; 2) des décisions du tribunal et leur mise à exécution; et 3) des amendes importantes. Selon l’organisation plaignante, ces sanctions équivalent à des limitations indues des droits à la liberté syndicale.
- 184. L’organisation plaignante joint un certain nombre de documents à l’appui de sa plainte, notamment: une déclaration du 22 avril 2009 de M. Dean Mighell, vice-président national du secteur de l’électricité de l’organisation plaignante, portant sur les effets sur les syndicats des dispositions du projet de loi sur le travail équitable de 2008 et des décisions prises dans le passé par la cour et les tribunaux; des documents présentant les propositions d’amendements au projet de loi sur le travail équitable de 2008 avant son adoption en tant que loi sur le travail équitable (FWA); une copie du projet de loi sur le travail équitable de 2009; et un récapitulatif de plusieurs décisions correspondantes de cours et tribunaux en Australie interprétant certaines dispositions de la WRA de 1996 qui ont été reprises dans la FWA.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement- 185. Dans sa communication en date du 15 janvier 2010, le gouvernement déclare que la FWA est entrée en vigueur le 1er juillet 2009 et a été pleinement mise en œuvre le 1er janvier 2010, lorsque les dispositions relatives aux nouvelles normes minimales légales (appelées Normes nationales de l’emploi) et les accords modernes ont pris effet. Le gouvernement affirme qu’il prend au sérieux ses engagements au titre des normes internationales du travail et qu’il appuie avec force l’OIT dans son objectif de promotion du travail décent pour tous et d’une amélioration des normes sociales et du travail. Ce faisant, il a cherché à traduire dans les faits sa ferme conviction qu’une protection juste et décente des salariés peut, et devrait effectivement, être une caractéristique des économies modernes basées sur les principes de compétitivité et de prospérité. La FWA est une expression de cet engagement et, de ce fait, une attention particulière a été donnée aux obligations internationales de l’Australie lors de la rédaction de la nouvelle législation. Le gouvernement est convaincu que cette dernière concrétise les engagements incombant à l’Australie au titre des conventions de l’OIT qu’elle a ratifiées.
- 186. Le gouvernement rejette l’affirmation de l’organisation plaignante selon laquelle la FWA est en contradiction avec les obligations incombant à l’Australie au titre des conventions nos 87 et 98 de l’OIT et n’est pas en accord avec les avis consultatifs de l’OIT. Il déclare que le nouveau système des relations professionnelles établi en vertu de la FWA représente un changement important tournant délibérément le dos aux éléments fondamentaux du régime de la loi sur les choix en matière de travail du précédent gouvernement, qui avait fait l’objet des critiques de la CEACR ces dernières années. La FWA a mis en place des réformes importantes sur les lieux de travail, qui placent la négociation collective au niveau de l’entreprise au cœur du dispositif des relations professionnelles et ne limitent pas la possibilité, pour plusieurs employeurs, de négocier volontairement en vue de parvenir à un accord multientreprises.
- 187. Selon le gouvernement, la FWA élargit le domaine des éléments qui peuvent être intégrés dans des accords d’entreprise et, partant, la gamme des questions sur lesquelles peut porter une action revendicative protégée. Les salariés continueront d’avoir le droit de mener des actions revendicatives pour soutenir ou présenter des plaintes pendant une négociation collective. Ce droit est compensé par des règles claires sur la conduite d’actions revendicatives, notamment l’exigence d’un vote à bulletin secret pour autoriser une action revendicative protégée hors de toute menace de sanctions légales. Enfin, les dispositions de la FWA relatives au droit d’accès créent un équilibre entre le droit des salariés d’être représentés par leur syndicat et le droit des employeurs de diriger leurs entreprises avec un minimum de perturbations.
- 188. Le gouvernement déclare qu’il a adopté un programme étendu de consultation à chaque stade de l’élaboration et de la mise en œuvre de la nouvelle législation, en s’assurant que les employeurs, les syndicats, les administrations étatiques et territoriales et les parties prenantes aient eu la possibilité de faire valoir leurs préoccupations et que celles-ci soient abordées avant que le projet de loi ne soit débattu devant le parlement et adopté sous sa forme amendée. Il s’agissait de la consultation la plus exhaustive jamais entreprise en Australie en matière de relations professionnelles. Le principal objet des nouvelles lois est d’offrir un cadre équilibré pour des relations professionnelles coopératives et productives qui favorisent la prospérité économique nationale et l’intégration sociale pour tous les Australiens.
- 189. Le gouvernement indique que la FWA met également en place deux nouvelles institutions indépendantes de droit public pour mener des enquêtes et faire respecter les nouvelles lois: 1) «Travail équitable Australie» est un tribunal indépendant ayant à sa tête un fonctionnaire de l’ordre judiciaire habilité à exercer toute une série de fonctions en relation avec les accords modernes, les salaires minima, les conventions collectives, les plaintes pour licenciement abusif, la négociation de bonne foi et l’action revendicative, et à aider les salariés et les employeurs à résoudre les conflits sur les lieux de travail; et 2) le bureau de l’ombudsman du travail équitable est un bureau officiel indépendant ayant notamment pour fonctions de favoriser des relations professionnelles harmonieuses, productives et coopératives et de veiller à la conformité avec les lois du Commonwealth relatives aux lieux de travail, par exemple au moyen d’inspections.
- 190. Le gouvernement estime que les préoccupations de l’organisation plaignante sont pour une bonne part de nature technique et ne concernent pas la politique de fond. En mettant en exergue un nombre restreint de dispositions du projet de législation, l’organisation plaignante omet de prendre acte de la teneur, de l’intention et de l’impact de la nouvelle législation dans son ensemble et de la réforme historique qu’elle représente en Australie. Il importe également de noter que la FWA se trouve actuellement dans la phase initiale de sa mise en œuvre et que le gouvernement surveillera de très près son application pour veiller à ce qu’elle soit conforme aux intentions politiques exposées dans le présent rapport.
- 191. Le gouvernement déclare que l’allégation de l’organisation plaignante selon laquelle la FWA permet d’établir des accords individuels «à prendre ou à laisser» et les syndicats n’ont plus aucun rôle à jouer dans le processus de négociation collective donne une image fausse de la législation. En vertu de la législation de transition entrée en vigueur en mars 2008, aucun nouvel accord d’emploi individuel (AWA) ne pouvait être conclu au titre de la loi fédérale sur les relations professionnelles. Dans certains cas limités, des accords d’emploi individuels de transition (ITEA) peuvent être conclus s’ils réussissent un test de «non-désavantage» par rapport à l’accord ou à la convention collective correspondant(e) qui aurait été appliqué(e). En d’autres termes, les ITEA ne sauraient être un moyen de saper la négociation collective et, en tout état de cause, ils ne pouvaient être conclus que jusqu’au 31 décembre 2009. En outre, le volet de la FWA relatif aux protections générales interdit à un employeur de prendre des «mesures défavorables» à l’encontre d’un salarié en relation avec la passation ou la résiliation de dispositions de flexibilité individuelle. La FWA prévoit des sanctions pour les employeurs qui contraignent ou exercent une pression morale sur un salarié pour qu’il accepte des dispositions de flexibilité individuelle (art. 343 et 344). De même, un salarié peut intenter une action en réparation et dommages-intérêts pour rupture d’une convention ou d’un accord d’entreprise si une disposition de flexibilité individuelle défavorise le salarié en question.
- 192. Selon le gouvernement, la FWA ne prévoit aucun type d’accords individuels statutaires. De fait, la FWA a notamment pour objet: «de veiller à ce que la protection sociale garantie des conditions et des salaires minima correspondants et équitables ayant force exécutoire et ne puisse plus être mise en péril par la conclusion de tous types de contrats de travail individuels statutaires, étant donné que de tels accords ne peuvent jamais faire partie d’un système de relations professionnelles équitables». La FWA place également la négociation collective au niveau de l’entreprise au cœur de son nouveau système des relations professionnelles et reconnaît les droits légitimes des salariés d’être représentés sur le lieu de travail et de négocier collectivement, notamment par de nouvelles conditions requises en matière de négociation de bonne foi. Qui plus est, la FWA permet aux employeurs et aux salariés individuels de négocier des dispositions susceptibles de convenir le mieux tant à eux-mêmes qu’à leur lieu de travail (par exemple des dispositions favorables à la famille), par des arrangements individuels en termes de flexibilité, mais ces dispositions sont très différentes des accords statutaires individuels (ou AWA) du précédent gouvernement. En particulier, ils ne peuvent pas être une condition d’emploi, sont limités à certaines questions, peuvent être résiliés par l’une ou l’autre partie avec un préavis de 28 jours et, fait important, ne peuvent mettre en péril ni les conditions de protection sociale du contrat de travail ni les dispositions d’une convention collective, dans la mesure où un salarié doit être, en vertu des arrangements en question, dans une «situation générale plus favorable». De plus, la FWA ne limite pas la faculté des syndicats d’être impliqués dans le processus de négociation collective. En fait, il les autorise à être automatiquement reconnus comme étant délégués à la négociation par leurs membres sur le lieu de travail; à être couverts par des conventions collectives sur les lieux de travail où ils ont des membres; et à chercher à obtenir réparation si des employeurs refusent de négocier avec eux de bonne foi.
- 193. Le gouvernement déclare que, même si la FWA supprime la distinction entre conventions syndicales et non syndicales, il ne limite en aucune façon la faculté des syndicats d’être impliqués dans le processus de négociation collective. Au contraire, la FWA renforce le droit fondamental des salariés à être représentés dans des négociations par un syndicat. Les employeurs doivent informer les salariés de ce droit avant le début de la négociation, et les représentants délégués à la négociation (y compris les employeurs) sont tenus de se conformer aux conditions requises en matière de négociation de bonne foi (art. 228), notamment à une obligation de reconnaître et de négocier avec les autres représentants délégués à la négociation. «Travail équitable Australie» a le pouvoir d’établir des ordonnances enjoignant les employeurs à négocier si les exigences de négociation de bonne foi ne sont pas respectées.
- 194. Concernant l’allégation de l’organisation plaignante selon laquelle la FWA donne une préférence à la négociation au niveau de l’entreprise plutôt qu’aux accords multientreprises en n’autorisant pas les parties à choisir le niveau auquel elles veulent négocier, en ne prévoyant pas l’action revendicative protégée en soutien à des accords multientreprises ou à la «négociation encadrée»; et en ne protégeant pas les salariés engagés dans la négociation d’accords multientreprises, le gouvernement déclare que la FWA place la négociation collective au niveau de l’entreprise au cœur du système des relations professionnelles et qu’elle permet aussi de manière spécifique la négociation multiemployeurs volontaire en vue de parvenir à un accord multientreprises. La FWA supprime la condition requise en vertu des lois antérieures exigeant que les employeurs obtiennent une autorisation préalable pour pouvoir négocier ensemble. De plus, des employeurs uniques et des employeurs à intérêt unique, tels que des employeurs qui sont des personnes morales liées entre elles ou engagées dans une entreprise commune, par exemple des franchises, sont à présent à même de négocier ensemble avec leurs salariés en vue d’un accord d’entreprise unique. Dans ce cas, l’action revendicative est protégée. La FWA comprend également des dispositions visant à aider les salariés faiblement rémunérés et leurs employeurs à avoir accès aux avantages de la négociation collective grâce à une négociation multiemployeurs facilitée; cette série de dispositions spéciales de facilitation de la négociation est destinée à aider les travailleurs qui n’avaient auparavant pas pu avoir accès aux avantages de la négociation.
- 195. Pour s’assurer néanmoins que la négociation multiemployeurs demeure volontaire, le gouvernement indique que l’action revendicative protégée n’est pas disponible en soutien à des revendications pour un accord multientreprises. De même, une action entreprise en soutien à une «négociation encadrée» n’est pas une action revendicative protégée (c’est-à-dire hors d’atteinte de toute action en justice telle que des actions en responsabilité civile ou contractuelle) en vertu de la FWA. Toutefois, la présentation de revendications communes à plusieurs lieux de travail n’est pas considérée comme une négociation encadrée, à condition que le représentant chargé de la négociation tente réellement de parvenir à un accord et soit disposé à négocier ces revendications dans chaque entreprise (art. 412(2)).
- 196. Concernant les allégations relatives aux restrictions imposées quant à la teneur des conventions collectives, le gouvernement soutient que, par rapport aux lois sur les relations professionnelles du précédent gouvernement, la FWA élargit la gamme des questions qui peuvent être incluses dans ces conventions. Ainsi, par exemple, elle autorise dans les accords d’entreprise des dispositions sur le congé payé pour participer à des réunions ou à des formations syndicales. Elle oblige aussi les employeurs à consulter les syndicats avant d’opérer tout changement important sur le lieu de travail; et donne aux syndicats la possibilité de s’impliquer dans les procédures de règlement des conflits. De telles dispositions n’étaient pas autorisées dans la législation précédente. La FWA dispose que les conventions collectives peuvent traiter des sujets tels que les «questions relevant des relations de travail», notamment des relations entre l’employeur et ses salariés; des relations entre l’employeur et la ou les organisation(s) de travailleurs devant être couverts par la convention; des retenues sur salaire autorisées pour toute raison par un salarié; et des modalités de mise en œuvre de l’accord. Le gouvernement déclare qu’il s’agit là d’un paramètre pertinent pour s’assurer que les conventions traitent de questions portant effectivement sur le travail effectué et sur les droits des salariés sur le lieu de travail.
- 197. En ce qui concerne les allégations relatives aux restrictions imposées à la négociation sur le paiement du salaire en cas de grève, le gouvernement déclare que, conformément à la règle générale de la jurisprudence voulant que les salariés n’aient pas le droit d’être payés pour des prestations professionnelles qu’ils ne réalisent pas, il est illégal pour un employeur de payer ou pour un salarié de demander ou d’exiger un salaire en cas de grève. Toutefois, la FWA offre aux employeurs des options plus justes et plus proportionnées que la précédente législation pour répondre à une action revendicative des salariés. Le nouveau système de relations professionnelles établit une distinction entre les retenues sur salaire pendant la durée d’une action revendicative protégée ou non protégée et il prévoit des règles spéciales pour les arrêts de travail partiels protégés. En cas d’action revendicative protégée, il n’y aura plus de déduction minimale obligatoire de quatre heures de paie (connue sous le nom de «règle des quatre heures» au titre de la précédente législation sur les relations professionnelles). L’employeur devra seulement déduire la durée effective de l’action revendicative menée par le salarié. La «règle des quatre heures» continue de s’appliquer aux actions revendicatives non protégées, pour tenir compte du fait que les grèves et arrêts de travail sans préavis peuvent avoir des effets graves et préjudiciables sur les entreprises. Pour une action revendicative non protégée durant moins de quatre heures, les employeurs sont tenus de déduire quatre heures de paie. Pour une action revendicative non protégée de plus de quatre heures, la paie est déduite pour toute la durée de l’action. Une déduction minimale de la paie entend avoir un effet dissuasif de mener une action revendicative non protégée.
- 198. La FWA a également prévu des options supplémentaires pour renforcer l’équilibre et l’impartialité de la gestion et de la réponse à une action revendicative protégée menée sous la forme d’arrêts de travail partiels. Après en avoir averti les travailleurs, les employeurs pourront déduire les montants du salaire proportionnel aux tâches non effectuées. «Travail équitable Australie» est à même de résoudre tous différends concernant les montants qu’un employeur propose de déduire du salaire. Auparavant, tout paiement de salaire en cas de toute forme d’arrêt de travail (aussi minime soit-il) était considéré comme un paiement illégal du salaire en cas de grève. Le gouvernement est convaincu que les dispositions de la FWA régissant le paiement du salaire en cas de grève sont raisonnables et adaptées à la situation australienne et n’imposent aucune restriction abusive à la liberté syndicale. Le gouvernement surveillera de très près l’application de ces dispositions pour veiller à ce qu’elles fonctionnent comme prévu.
- 199. Concernant les allégations de limitations du droit d’accès aux lieux de travail, le gouvernement déclare que la FWA permet aux syndicats de pénétrer dans les lieux de travail pour mener des enquêtes sur des violations présumées de la loi, d’un accord, d’une convention ou de la législation étatique sur la santé et la sécurité au travail; et pour tenir des discussions avec les membres (ou avec les salariés qui sont éligibles pour être membres) du syndicat. Dans le cas du droit d’accès dans l’objectif de tenir des discussions, il n’est plus exigé que les salariés soient couverts par un contrat ou une convention liant le syndicat; et il n’est plus nécessaire que le syndicat soit effectivement couvert par un acte juridique en vigueur dans l’entreprise. Il n’existe pas non plus de restrictions quant aux sujets pouvant faire l’objet de discussions. De plus, même si l’employeur peut décider du lieu où les discussions peuvent se tenir dans les locaux, la FWA donne à présent des indications sur ce qui pourrait constituer un lieu déraisonnable.
- 200. Selon le gouvernement, les dispositions de la FWA garantissent que seules les «personnes ayant la capacité et la légitimité» sont à même de détenir un permis leur donnant le droit d’accès. Les éléments à prendre en considération pour en décider sont énumérés dans l’article 513 et portent notamment sur le fait de savoir si le représentant a fait ou non l’objet d’une quelconque condamnation antérieure au titre de la législation du travail ou pour certains délits pénaux. Fait important, eu égard à la nature vulnérable de l’industrie, la FWA comporte également de nouvelles dispositions du droit d’accès spécifiquement conçues pour s’appliquer aux travailleurs à façon de l’industrie du textile, de l’habillement et de la chaussure (TCF). En vertu des dispositions en question, le titulaire d’un permis peut pénétrer dans les locaux pour inspecter des documents en rapport avec une allégation d’infraction impliquant des travailleurs à façon du TCF, même si ceux-ci ne travaillent pas dans les locaux où les documents sont conservés. De plus, aucune notification préalable d’accès n’est exigée pour qu’un titulaire d’un permis pénètre dans tous locaux pour enquêter sur des infractions présumées se rapportant à des travailleurs à façon du TCF. Le gouvernement indique qu’il considère que le nouveau système reconnaît en bonne et due forme les droits des salariés de se réunir avec leur syndicat dans leur lieu de travail, tout en évitant dans le même temps des comportements déraisonnables.
- 201. Concernant les allégations relatives aux limitations imposées aux boycotts secondaires et aux grèves de solidarité, le gouvernement déclare que la référence de l’organisation plaignante à la limitation énoncée dans l’article 438 semble concerner l’ancienne loi sur les relations professionnelles (WRA), qui disposait que l’action revendicative n’était pas protégée si elle était menée «en coopération» avec des personnes n’étant pas des «personnes protégées». Cette disposition ne figure pas dans la FWA, qui dispose au contraire que l’action revendicative est dorénavant protégée si elle est organisée ou menée par un délégué à la négociation d’un salarié couvert par la convention, ou par des salariés spécifiés dans la décision de voter sur l’action protégée.
- 202. Les boycotts secondaires demeurent réglementés par la loi sur les pratiques commerciales (Trade Practices Act). Ces dispositions interdisent à une personne de s’associer avec une deuxième personne pour freiner ou empêcher une troisième personne (qui n’est employée ni par la première ni par la deuxième personne) de livrer ou de recevoir des biens et des services d’une quatrième personne (qui n’est pas non plus employée par la première ou la deuxième personne), ce qui a pour effet de causer une perte ou un préjudice important(e) à la quatrième personne (art. 45D) ou de causer une diminution non négligeable de la concurrence sur tout marché (art. 45DA). La même loi interdit également à une personne de s’associer avec une deuxième personne pour empêcher ou entraver substantiellement une troisième personne (qui n’est pas employée par la première personne) de se lancer dans les affaires et le commerce (art. 45DB). Toutefois, l’article 45DD de ladite loi dispose qu’une personne n’enfreint pas les articles 45D-45DB si la raison principale qui a motivé cette conduite est pour l’essentiel liée à la rémunération, aux conditions d’emploi, à la durée ou aux conditions de travail de la personne concernée ou d’un autre salarié également employé par l’employeur de la personne en question.
- 203. Quant aux limitations du droit de grève pendant la durée d’existence d’un accord, le gouvernement indique qu’il ne convient pas qu’une action revendicative protégée soit disponible tant qu’un contrat est en vigueur étant donné que, dès lors que les parties ont signé un accord d’entreprise, elles sont censées se conformer à ses termes. Selon le gouvernement, il s’agit là d’une exigence raisonnable, d’autant que le nouveau cadre de négociation et de passation des accords au titre de la FWA facilite la conclusion d’accords d’entreprise justes et raisonnables, par exemple en permettant aux salariés d’être représentés dans les négociations et en exigeant que les parties négocient de bonne foi. De plus, «Travail équitable Australie» n’homologuera un accord que s’il est convaincu qu’il a été sincèrement accepté et qu’il a passé avec succès le test de «situation générale plus favorable» par rapport à la nouvelle protection sociale. Par ailleurs, les accords d’entreprise doivent inclure une clause exigeant que les employeurs consultent les salariés au sujet des principaux changements devant survenir sur le lieu de travail et autorisant la représentation des salariés.
- 204. Concernant les interdictions d’actions revendicatives pour cause de préjudice économique, le gouvernement déclare que les seuils auxquels il est possible de suspendre et/ou résilier une action revendicative protégée sont suffisamment élevés et établissent un juste équilibre entre les droits des salariés de mener une action protégée et la nécessité de protéger l’intérêt général en veillant à la stabilité économique. Une action revendicative protégée menaçant l’activité professionnelle ou le commerce n’est pas interdite en vertu de la FWA, qui ne prévoit la suspension ou la résiliation d’une telle action que dans des cas très limités. «Travail équitable Australie» ne devra ainsi suspendre ou résilier une action revendicative protégée que lorsqu’il est convaincu que l’action en question cause ou menace de causer un préjudice significatif à l’économie australienne ou à une part non négligeable de celle-ci, ou met en danger la vie, la sécurité personnelle, la santé ou le bien-être de l’ensemble ou d’une partie de la population.
- 205. Sous réserve d’un certain nombre de restrictions, «Travail équitable Australie» doit suspendre temporairement une action revendicative protégée s’il est convaincu que l’action en question a des effets négatifs sur les participants à une négociation et menace de causer un préjudice important à une tierce partie. «Travail équitable Australie» doit également être convaincu que la suspension de l’action revendicative est opportune, en tenant compte de ce qui pourrait rendre une telle suspension contraire à l’intérêt général ainsi que de tous autres éléments pertinents. Le préjudice à des tiers doit être important, c’est-à-dire d’une nature plus grave qu’un(e) simple perte, gêne ou retard subi(e). Il peut s’agir par exemple de cas dans lesquels une action revendicative dans un secteur affecte de manière non négligeable une autre entreprise jusqu’à mettre cette dernière en danger de cessation de paiement. «Travail équitable Australie» a également le pouvoir discrétionnaire de suspendre ou résilier une action revendicative protégée lorsqu’elle cause un préjudice économique significatif aux parties elles-mêmes. Là encore, «Travail équitable Australie» est tenu d’examiner certains éléments tels que l’origine, la nature et le degré du préjudice subi, ou susceptible d’être subi, la probabilité de la survenue ou de la prolongation du préjudice dans le temps, et la capacité de la personne à le supporter. Si l’action menace de causer un préjudice économique important, «Travail équitable Australie» devra être persuadé de l’imminence de ce préjudice.
- 206. Le gouvernement indique que «Travail équitable Australie» doit également suspendre une action revendicative protégée lorsqu’il est convaincu qu’un «délai de réflexion» serait opportun et aiderait à résoudre les questions litigieuses. «Travail équitable Australie» est tenu de prendre en considération divers éléments, notamment en se demandant si la suspension pourrait aider les délégués à la négociation à parvenir à un accord; la durée de l’action revendicative protégée; et si la suspension pourrait être contraire à l’intérêt général ou incompatible avec les objets de la loi.
- 207. Qui plus est, dans les cas où une action revendicative est résiliée parce qu’elle causait ou menaçait de causer un préjudice économique important à l’employeur et aux salariés ou parce qu’elle mettait en danger la vie, la sécurité ou la santé des personnes ou le bien-être de l’ensemble ou d’une partie de la population, ou causait un dommage significatif à l’économie australienne ou à une part importante de celle-ci, «Travail équitable Australie» devra alors, après une période de négociation de 21 jours, prendre une décision d’ordre professionnel (c’est-à-dire arbitrer une issue aux questions encore en litige à la fin de la période de négociation). «Travail équitable Australie» devra étendre la période de négociation à 42 jours si la totalité des délégués à la négociation en font ensemble la demande. «Travail équitable Australie» pourra continuer à utiliser son pouvoir d’aider les délégués à la négociation à parvenir à un accord pendant la période de négociation. Le gouvernement est fermement convaincu que les seuils fixés pour la suspension ou la résiliation d’une action revendicative protégée pour chacun des motifs susmentionnés en vertu de la FWA sont suffisamment élevés pour équilibrer les droits des salariés de mener une action revendicative visant à obtenir un accord et les responsabilités du gouvernement de protéger l’économie nationale, la sécurité, la santé et le bien-être de la population et les intérêts légitimes des autres parties concernées.
- 208. Concernant les limitations du droit de grève par l’obligation imposée d’un arbitrage impératif du ministre, le gouvernement déclare que les seuils fixés pour que le ministre fasse une telle déclaration sont suffisamment élevés lorsqu’ils sont contrebalancés par les droits des salariés de mener une action protégée en vertu de la FWA. Fait important, aux termes de ces dispositions, le préjudice causé à l’économie doit être estimé important et d’une nature plus grave qu’un(e) simple perte, gêne ou retard. La ministre de l’Emploi et des Relations professionnelles a dernièrement déclaré qu’elle n’interviendrait dans des conflits du travail qu’en dernier ressort, faisant également remarquer que le résultat d’une intervention ministérielle serait un arbitrage par «Travail équitable Australie». Le pouvoir de la ministre de faire une telle déclaration, qui figurait également dans la WRA, n’a encore à ce jour jamais été exercé.
- 209. Concernant les allégations relatives aux dispositions de la FWA sur le vote à bulletin secret, le gouvernement indique que ces dispositions, conçues dans un souci d’impartialité, ont été simplifiées par rapport aux précédentes lois sur les relations professionnelles. Elles ne visent ni à faire échouer ni à retarder l’organisation d’une action revendicative. La soumission d’une action protégée à un vote garantit que les salariés éligibles choisissent librement d’autoriser ou non le recours à l’action revendicative. Il s’agit d’un simple mécanisme pour veiller à ce que l’avis des salariés sur l’organisation d’une action revendicative protégée soit recueilli dans le cadre d’un processus démocratique contrôlé par le gouvernement. La FWA prévoit également la possibilité pour des salariés de mener une action protégée en réaction à une action revendicative organisée par des employeurs sans qu’un vote à bulletin secret soit nécessaire.
- 210. Le gouvernement déclare que, à ce stade précoce, les dispositions de la FWA relatives au vote d’une action protégée fonctionnent d’une manière générale comme prévu. A partir des données recueillies au cours des six premiers mois de mise en œuvre de la FWA, on constate que, sur les 615 demandes de scrutin présentées pour des actions protégées, «Travail équitable Australie» a rendu 529 injonctions de vote, soit une réponse favorable à 86 pour cent des requêtes. Les demandes restantes comprennent celles qui ont été rejetées pour non-conformité avec les conditions requises en matière de vote pour une action protégée ou pour des erreurs techniques, et celles qui ont été retirées pour des raisons telles que l’obtention d’un accord par les délégués à une négociation. A ce stade, le gouvernement est d’avis que les parties mettent actuellement à l’épreuve les paramètres des nouvelles lois et que, au fil du temps, le pourcentage de scrutins accordés pour des actions protégées devrait augmenter à mesure que les décisions de «Travail équitable Australie» établiront un corpus jurisprudentiel en relation avec l’idée de tenter sincèrement de parvenir à un accord, qui représente une condition requise essentielle pour l’obtention d’une décision favorable en matière de vote pour une action protégée.
- 211. Le gouvernement déclare que les retards inutiles dans le processus de scrutin ont été réduits au minimum, puisque les décisions sur les demandes de scrutin protégé sont désormais prises, dans toute la mesure possible, dans les deux jours faisant suite à la demande. L’analyse des 105 demandes de scrutin protégé présentées en septembre 2009 et soumises à l’audition de «Travail équitable Australie» montre que 84 demandes ont été entendues dans les deux jours, 17 dans les trois jours, deux dans les quatre jours, une dans les cinq jours et une dans les six jours. Le gouvernement ajoute qu’il continuera à superviser attentivement l’application des dispositions pour s’assurer que celles relatives au vote à bulletin secret fonctionnent comme prévu.
- 212. Enfin, concernant les allégations de l’organisation plaignante relatives à de lourdes sanctions en cas d’action revendicative non protégée, le gouvernement déclare qu’il est nécessaire de recourir à des moyens de dissuasion, notamment à des sanctions pécuniaires, contre des personnes menant une action revendicative non protégée sur le lieu de travail. La Cour fédérale conserve le pouvoir discrétionnaire de déterminer le niveau de sanction approprié, compte tenu des circonstances de l’affaire.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité- 213. Le comité note que le présent cas concerne des allégations de violation de la liberté syndicale reconnue par la FWA, notamment de limitations du droit de prendre part à une négociation collective et du droit de grève.
- 214. Le comité note tout d’abord les allégations de l’organisation plaignante selon lesquelles la FWA met en péril la négociation collective en permettant à un employeur de négocier directement avec un salarié, ou avec un salarié potentiel, des conditions qui s’écartent de l’accord d’entreprise concerné. Le comité note ensuite que, selon le gouvernement, la FWA ne prévoit aucun type d’accords individuels statutaires, mais que l’un de ses objets est de «veiller à ce que la protection sociale garantie des conditions et des salaires minima correspondants et équitables ayant force exécutoire et ne puisse plus être mise en péril par la conclusion de tous types de contrats de travail individuels statutaires, étant donné que de tels accords ne peuvent jamais faire partie d’un système de relations professionnelles équitables». Qui plus est, selon le gouvernement, des arrangements individuels en matière de flexibilité ne peuvent mettre en péril ni les conditions de protection sociale du contrat de travail ni les dispositions d’une convention collective dans la mesure où un salarié doit être dans une «situation générale plus favorable» en vertu de ces dispositions. Le comité note par ailleurs que l’article 202(3) dispose qu’un arrangement individuel en matière de flexibilité au titre d’une clause de flexibilité dans un accord d’entreprise ne modifie pas l’effet dudit accord en relation avec l’employeur ou avec tout autre salarié, et n’a aucun autre effet que celui d’une clause de l’accord. Observant que les dispositions relatives aux arrangements individuels en matière de flexibilité ont été rédigées avec soin et, selon le gouvernement ne sapent pas les conventions collectives, étant donné que leur impact dépend en grande partie de leur application par l’organisme «Travail équitable Australie», le comité demande au gouvernement de le tenir informé de l’application de ces dispositions dans la pratique.
- 215. Concernant l’allégation de l’organisation plaignante selon laquelle la FWA permet aux employeurs de passer des accords directement avec les salariés, même lorsqu’un syndicat existe, le comité prend note de l’indication du gouvernement déclarant que la FWA renforce les droits fondamentaux des salariés d’être représentés par un syndicat dans les négociations: les employeurs doivent informer les salariés qu’ils disposent de ce droit lorsqu’une négociation démarre et, en vertu de l’article 228, les délégués à la négociation, y compris les employeurs, sont tenus de se conformer aux conditions requises en matière de négociation de bonne foi. Sur cette question, le comité ajoute que l’article 172 prévoit que, dans les cas d’accords greenfield – accords relatifs à une «authentique nouvelle entreprise» –, les employeurs sont tenus de conclure des accords avec une organisation de travailleurs ou plus. En outre, l’article 173 dispose qu’un employeur qui sera couvert par un accord d’entreprise proposé doit prendre toutes les mesures raisonnables pour informer chaque salarié qui sera couvert par l’accord en question de son droit d’être représenté par un délégué à la négociation.
- 216. Le comité note également toutefois que l’article 172 pourrait placer les salariés et les organisations de salariés sur un pied d’égalité pour ce qui concerne la conclusion d’accords qui ne sont pas des accords pour sites nouveaux («greenfield agreement») – et ce qu’une organisation de salariés existe ou non. Rappelant que la recommandation (no 91) sur les conventions collectives, 1951, met l’accent sur le rôle des organisations de travailleurs en tant qu’une des parties à la négociation collective et que la négociation directe conduite entre l’entreprise et son personnel, en feignant d’ignorer les organisations représentatives existantes, pourrait, dans certains cas, être contraire au principe selon lequel il faut encourager et promouvoir la négociation collective entre les employeurs et les organisations de travailleurs [voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 945], le comité demande au gouvernement de veiller au respect de ce principe et de fournir des informations détaillées sur l’application de l’article 172 de la FWA dans la pratique, de manière à lui permettre de déterminer l’impact de cette disposition sur la promotion de négociations entre employeurs et organisations de travailleurs.
- 217. Le comité note l’allégation de l’organisation plaignante selon laquelle, par l’énoncé de ses objets et plusieurs de ses dispositions, la FWA privilégie la négociation au niveau de l’entreprise par rapport aux négociations à d’autres niveaux – en particulier la négociation multiemployeurs ou «négociation encadrée». A cet égard, le comité note que l’un des objets déclarés de la FWA, tel qu’énoncé dans l’article 3(f), est de «parvenir à la productivité et à la justice en mettant l’accent sur la négociation collective au niveau de l’entreprise étayée par de simples obligations de négocier de bonne foi et des règles claires régissant l’action revendicative». De même, l’un des objets déclarés de la partie 24 de la FWA, qui concerne les accords d’entreprise, est de «fournir un cadre simple, flexible et juste permettant la négociation collective de bonne foi, en particulier au niveau de l’entreprise, pour parvenir à des accords d’entreprise favorisant la productivité» (art. 171(a)). En outre, le comité note que l’article 186(2)(ii) de la FWA exige, pour un accord multientreprises, que «Travail équitable Australie» soit convaincu que le ou les employeur(s) concerné(s) n’ai(en)t pas été «contraint(s)» à conclure l’accord; et que l’article 229(2) interdit les demandes d’injonction de négociation faites en relation avec des propositions d’accords multientreprises – à moins qu’une «autorisation de faible rémunération» soit en vigueur en relation avec l’accord concerné.
- 218. Le comité observe de plus que l’action revendicative menée pour une négociation multientreprises ou «négociation encadrée» est exclue de la définition de l’action revendicative protégée en vertu des articles 408-413 de la FWA; l’article 409(4) dispose que, pour qu’une action de revendication des salariés prise en charge par un délégué à la négociation puisse être reconnue comme une action revendicative protégée, le délégué en question ne doit pas être engagé dans une négociation encadrée en relation avec l’accord proposé à moins que, comme le prévoit l’article 412(2), ledit délégué «tente réellement de parvenir à un accord avec l’employeur»; et l’article 413, qui énonce les conditions requises qui s’appliquent habituellement pour qu’une action revendicative soit protégée, stipule que l’action revendicative ne doit pas porter sur un accord d’entreprise proposé concernant un site nouveau («greenfield agreement») ou un accord multientreprises (sous-alinéa 2). Le comité note par ailleurs que l’article 409(1)(b), en limitant les actions revendicatives protégées des salariés à celles menées «contre un employeur devant être couvert par l’accord», semblerait exclure les grèves de solidarité et les boycotts secondaires généraux du champ d’application de l’action revendicative protégée.
- 219. Le comité prend note de l’indication du gouvernement concernant la négociation multientreprises. Il note en particulier que la FWA place la négociation collective au niveau de l’entreprise au cœur du système des relations professionnelles et que la négociation multientreprises est facilitée par: 1) la suppression de la condition requise en vertu de la législation antérieure que les employeurs obtiennent une autorisation préalable avant de pouvoir négocier ensemble; et 2) la facilitation de la négociation multiemployeurs dans les secteurs à faible rémunération. Néanmoins, le gouvernement confirme également que, pour garantir la nature volontaire de la négociation multiemployeurs, une action revendicative protégée n’est disponible ni en soutien à des revendications pour un accord multientreprises, ni en soutien à une «négociation encadrée» – même si, en vertu de l’article 412(2), la présentation de revendications communes à plusieurs lieux de travail n’est pas considérée comme une «action encadrée», à condition que le représentant chargé de la négociation tente réellement de parvenir à un accord et soit disposé à négocier ces revendications dans chaque entreprise.
- 220. A cet égard, le comité rappelle que, selon le principe de négociation libre et volontaire de conventions collectives énoncé à l’article 4 de la convention no 98, la détermination du niveau de négociation collective devrait dépendre essentiellement de la volonté des parties et, par conséquent, ce niveau ne devrait pas être imposé en vertu de la législation d’une décision de l’autorité administrative ou de la jurisprudence de l’autorité administrative du travail. De plus, les travailleurs et leurs organisations devraient être en mesure de recourir à des actions collectives (grèves) pour obtenir des contrats (collectifs) liant plusieurs employeurs en soutien. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 988 et 540.] Le comité rappelle par ailleurs que, dans un cas antérieur concernant l’Australie, et en se référant à la loi de 2005 introduisant certaines améliorations dans le secteur du bâtiment et des travaux publics, il était déjà parvenu à la conclusion qu’une interdiction générale des grèves de solidarité et des boycotts secondaires pouvait conduire à des abus et que les travailleurs devraient avoir le droit de mener ce type d’actions à condition que la grève initiale qu’ils appuient soit elle-même légale. [Voir cas no 2326, 320e rapport, paragr. 445.] Eu égard à ce qui précède, le comité considère que les sous-alinéas (1)(b) et (4) de l’article 409 et l’article 413(2), en excluant les grèves de solidarité, les boycotts secondaires et les actions revendicatives en soutien à des accords multientreprises du champ d’application de l’action revendicative protégée, pourraient avoir un effet négatif sur le droit des organisations à chercher à obtenir et à négocier des accords multiemployeurs et limiteraient par ailleurs de manière abusive le droit de grève. Compte tenu des conclusions sur les mêmes questions qu’il a formulées dans des cas précédents concernant l’Australie, il demande donc au gouvernement de réexaminer ces articles, en étroite consultation avec les partenaires sociaux concernés, de manière à les rendre pleinement conformes aux principes de la liberté syndicale.
- 221. Le comité note que l’article 409 renferme également d’autres limitations au droit de grève. L’article 409(1)(a) dispose que l’action revendicative n’est protégée que dans la mesure où elle est «organisée ou menée dans le but de soutenir ou de faire avancer des revendications en relation avec l’accord qui portent uniquement sur, ou qui sont raisonnablement censées porter sur, des questions autorisées». (Les questions autorisées sont définies en vertu de l’article 172(1) comme des questions relevant: 1) des relations entre l’employeur ou les employeurs et les salariés, ou le(s) organisation(s) de salariés, qui seront couverts par l’accord; 2) des retenues sur salaire autorisées pour toute raison par un salarié qui sera couvert par l’accord; et 3) des modalités de mise en œuvre de l’accord.) En outre, l’article 409(3) exclut du champ d’application des actions revendicatives protégées les actions en soutien de l’inclusion de conditions «illégales», portant notamment sur: l’extension des avantages accordés en cas de licenciement abusif à des travailleurs qui ne sont pas encore employés pour la période statutaire; le versement du salaire en cas de grève; le paiement de frais de négociation à un syndicat; et la création d’un droit d’accès d’un syndicat pour se conformer à des objectifs différents ou supérieurs à ceux prévus par la loi précitée.
- 222. Qui plus est, le comité note que d’autres dispositions de la FWA prévoient la suspension ou la résiliation de l’action revendicative protégée si: 1) elle cause ou pourrait causer un préjudice significatif à l’économie (art. 423); et 2) elle a menacé, menace ou pourrait menacer de causer un préjudice significatif à l’économie ou à une partie importante de celle-ci (art. 424(1)(d)). L’article 431 permet au ministre de résilier une action revendicative protégée en soutien à une proposition d’accord si une telle action porte un préjudice significatif à l’économie ou à une partie de celle-ci; et l’article 426 dispose que «Travail équitable Australie» doit suspendre ou résilier les actions revendicatives qui menacent de causer un préjudice significatif à une tierce partie. Enfin, le comité note que l’article 417 interdit d’entreprendre des actions revendicatives avant la date d’expiration officielle d’un accord.
- 223. Au sujet de ces dispositions, le comité note que, selon le gouvernement: 1) les seuils auxquels il est possible de suspendre et/ou résilier une action revendicative protégée sont suffisamment élevés et établissent un juste équilibre entre les droits des salariés de mener une action protégée et la nécessité de protéger l’intérêt général en veillant à la stabilité économique; 2) la FWA ne prévoit la suspension ou la résiliation d’une action revendicative protégée que dans des cas très limités; et 3) le préjudice à l’économie doit être considéré comme important et d’une nature plus grave qu’un(e) simple perte, gêne ou retard – le pouvoir du ministre de faire une telle déclaration n’a jusqu’ici encore jamais été exercé. Le gouvernement ajoute qu’il est fermement convaincu que les seuils fixés pour la suspension ou la résiliation d’une action revendicative protégée pour chacun des motifs susmentionnés en vertu de la FWA sont suffisamment élevés pour équilibrer les droits des salariés de mener une action revendicative visant à obtenir un accord et les responsabilités du gouvernement de protéger l’économie nationale, la sécurité, la santé et le bien-être de la population et les intérêts légitimes des autres parties concernées.
- 224. Nonobstant ces indications, le comité, pour ce qui concerne le droit de grève, doit rappeler que les intérêts professionnels et économiques que les travailleurs défendent par le droit de grève se rapportent non seulement à l’obtention de meilleures conditions de travail ou aux revendications collectives d’ordre professionnel, mais englobent également la recherche de solutions aux questions de politique économique et sociale et aux problèmes qui se posent à l’entreprise, et qui intéressent directement les travailleurs. Qui plus est, le droit de grève peut être restreint, voire interdit: 1) dans la fonction publique uniquement pour les fonctionnaires qui exercent des fonctions d’autorité au nom de l’Etat; ou 2) dans les services essentiels au sens strict du terme (c’est-à-dire les services dont l’interruption mettrait en danger, dans l’ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne). [Voir Recueil, op. cit., paragr. 526 et 576.] A la lumière des principes susmentionnés, le comité demande au gouvernement de fournir des informations détaillées sur l’application de ces dispositions et de les réexaminer, en consultation avec les partenaires sociaux, en vue de leur révision, s’il y a lieu.
- 225. Concernant l’allégation de l’organisation plaignante selon laquelle les dispositions de la partie 3-3, section 8, de la FWA réglementant les procédures de vote à bulletin secret pour l’appel à une grève sont inutilement fastidieuses et compliquées, le comité note que, selon le gouvernement, lesdites procédures sont conçues dans un souci d’impartialité et ont été simplifiées par rapport aux lois antérieures sur les relations professionnelles, et qu’elles ne visent ni à faire échouer ni à retarder l’organisation d’une action revendicative. A ce sujet, le comité rappelle que les conditions posées par la législation pour qu’une grève soit considérée comme un acte licite doivent être raisonnables et, en tout cas, ne pas être telles qu’elles constituent une limitation importante aux possibilités d’action des organisations syndicales. En outre, le fait que la décision de déclarer une grève doive être approuvée par plus de la moitié de tous les travailleurs concernés est une exigence trop élevée qui pourrait par trop limiter la possibilité de faire grève, surtout dans les grandes entreprises. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 547 et 556.] Le comité demande au gouvernement de veiller au respect de ces principes dans la pratique et de fournir des informations détaillées sur l’application dans la pratique des dispositions relatives à la procédure de vote à bulletin secret.
- 226. Le comité note que la FWA comprend plusieurs dispositions relatives à la teneur des conventions collectives. Ainsi qu’il a été précédemment noté, l’article 172 dispose qu’un accord peut être conclu sur des questions relevant des relations de travail, des retenues sur salaire et des modalités de mise en œuvre de l’accord. L’article 186(4) exige en outre qu’un accord ne renferme aucune «condition illicite», ce qui, comme le définit l’article 194, inclut des conditions portant sur: l’extension des avantages accordés en cas de licenciement abusif à des travailleurs qui ne sont pas encore employés pour la période statutaire; le versement du salaire en cas de grève; le paiement de frais de négociation à un syndicat; et la création d’un droit d’accès d’un syndicat pour se conformer à des objectifs différents ou supérieurs à ceux prévus par la loi précitée. De plus, l’article 470 exclut la disposition relative au paiement du salaire en cas de grève; dans cet ordre d’idée, le gouvernement confirme que les négociations portant sur le paiement du salaire en cas de grève sont elles aussi interdites.
- 227. Le comité note que, selon le gouvernement, «les questions relevant des relations de travail» incluent des questions telles que les retenues sur salaire autorisées pour toute raison par un salarié, ainsi que les modalités de mise en œuvre d’un accord. En dépit de cette clarification, le comité observe que la portée exacte de l’expression «questions relevant des relations de travail» demeure floue. Rappelant par ailleurs que les mesures prises unilatéralement par les autorités pour restreindre l’étendue des sujets négociables sont souvent incompatibles avec la convention no 98, des discussions tripartites visant à élaborer sur une base volontaire des lignes directrices en matière de négociation collective constituent une méthode particulièrement appropriée pour y remédier. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 912.] Le comité demande au gouvernement de fournir davantage de précision sur l’application des articles 172 et 194 de la FWA et de réexaminer ces articles, en étroite consultation avec les partenaires sociaux, pour les rendre conformes au principe susmentionné.
- 228. Le comité note que, en vertu des articles 512 et 513 de la FWA, les représentants syndicaux doivent se voir délivrer un permis par l’organisme «Travail équitable Australie» pour pouvoir avoir accès au lieu de travail et que ces permis sont délivrés sur la base d’un examen de «capacité et légitimité de la personne», au titre duquel les éléments à examiner portent notamment sur: le fait de savoir si le représentant n’a jamais été condamné pour un acte délictueux consistant à pénétrer dans des locaux ou à faire intentionnellement usage de violence contre une autre personne ou à causer de manière préméditée un dommage ou une destruction de biens; ou encore si le représentant, ou toute autre personne, n’a jamais eu à payer une amende au titre de cette loi, ou de toute autre loi du travail, en relation avec une action menée par le représentant en question. A ce sujet, le comité rappelle que les représentants des travailleurs devraient disposer des facilités nécessaires à l’exercice de leurs fonctions, y compris le droit de pénétrer dans les lieux de travail; et de plus que les représentants des travailleurs devraient avoir accès à tous les lieux de travail dans l’entreprise lorsque leur accès à ces lieux est nécessaire pour leur permettre de remplir leurs fonctions de représentation. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 1102 et 1104.] Eu égard aux principes susmentionnés, le comité demande au gouvernement de fournir des informations sur l’application, dans la pratique, de l’article 513, y compris toutes statistiques y afférentes, afin de lui permettre d’évaluer l’impact de cet article sur le droit des représentants des travailleurs d’avoir accès au lieu de travail.
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 229. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Le comité souhaite, de manière linéaire, reconnaître les efforts faits par le gouvernement lors de l’élaboration de la loi sur le travail équitable pour consulter les partenaires sociaux avec l’objectif d’aboutir à une loi rédigée avec attention qui assure un équilibre entre de nombreux intérêts importants dans le domaine des relations professionnelles. Il encourage le gouvernement, dans son examen de l’application de la FWA, à procéder de la même manière.
- b) Le comité demande au gouvernement de le tenir informé de l’application des dispositions de la FWA relatives aux arrangements en matière de flexibilité individuelle dans la pratique.
- c) Rappelant que la recommandation (no 91) sur les conventions collectives, 1951, met l’accent sur le rôle des organisations de travailleurs en tant qu’une des parties à la négociation collective et que la négociation directe conduite entre l’entreprise et son personnel, en feignant d’ignorer les organisations représentatives existantes, peut, dans certains cas, être contraire au principe selon lequel il faut encourager et promouvoir la négociation collective entre les employeurs et les organisations de travailleurs, le comité demande au gouvernement de veiller au respect de ce principe et de fournir des informations détaillées sur l’application de l’article 172 de la FWA dans la pratique, de manière à lui permettre de déterminer l’impact de cette disposition sur la promotion de la négociation entre employeurs et organisations de travailleurs.
- d) Compte tenu des conclusions sur les mêmes questions qu’il a déjà formulées lors de l’examen de cas précédents concernant l’Australie, le comité demande au gouvernement de réexaminer les articles 409(1)(b), 409(4) et 413(2) de la FWA, en étroite consultation avec les partenaires sociaux concernés.
- e) Le comité demande au gouvernement de fournir des informations détaillées sur l’application des articles 409(1)(a), 409(3), 423, 424, 426 et 431 de la FWA et de réexaminer ces dispositions, en consultation avec les partenaires sociaux, en vue de leur révision, s’il y a lieu.
- f) Le comité demande au gouvernement de fournir des informations détaillées sur l’application dans la pratique des dispositions de la partie 3-3, section 8, de la FWA concernant les scrutins portant sur les actions protégées.
- g) Le comité demande au gouvernement de fournir davantage de précision sur l’application des articles 172 et 194 de la FWA concernant les sujets relatifs à la négociation collective et de réexaminer ces articles, en étroite consultation avec les partenaires sociaux, pour les rendre conformes aux principes mentionnés dans ses conclusions.
- h) Le comité demande au gouvernement de fournir des informations détaillées sur l’application dans la pratique de l’article 513 de la FWA, y compris toutes statistiques y afférentes, afin de lui permettre d’évaluer l’impact de cet article sur le droit des représentants des travailleurs d’avoir accès au lieu de travail.
- i) Le comité attire l’attention de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations sur les aspects législatifs de ce cas.