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Rapport où le comité demande à être informé de l’évolution de la situation - Rapport No. 368, Juin 2013

Cas no 2942 (Argentine) - Date de la plainte: 23-AVR. -12 - Clos

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Allégations: Les organisations plaignantes allèguent que, dans le cadre de plusieurs conflits faisant suite à des revendications salariales présentées par le Cercle de l’enseignement secondaire et supérieur de Santiago (CISADEMS) entre 2009 et 2011, les autorités de la province de Santiago del Estero – qui sont partie au conflit – ont adopté des décisions ordonnant l’ouverture de procédures de conciliation obligatoire dans le seul but d’empêcher l’exercice du droit de grève

  1. 177. La plainte figure dans une communication de la Confédération des éducateurs argentins (CEA) et du Cercle de l’enseignement secondaire et supérieur de Santiago (CISADEMS) d’avril 2012. La CEA et le CISADEMS ont fait parvenir de nouvelles allégations relatives à la plainte dans une communication de juin 2012.
  2. 178. Le gouvernement a fait parvenir ses observations dans une communication de février 2013.
  3. 179. L’Argentine a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

A. Allégations des organisations plaignantes

A. Allégations des organisations plaignantes
  1. 180. Dans sa communication d’avril 2012, la Confédération des éducateurs argentins (CEA) et le Cercle de l’enseignement secondaire et supérieur de Santiago (CISADEMS) indiquent que cette dernière organisation a réclamé une réévaluation salariale et qu’il soit remédié aux retards dans le versement des sommes dues devant le Sous-secrétariat au travail de la province de Santiago del Estero. Les organisations indiquent que les différentes audiences préliminaires devant empêcher le conflit sont restées sans effet, que des appels à la grève ont été lancés, et que le Sous-secrétariat au travail a alors rendu plusieurs décisions demandant une conciliation obligatoire. Selon les organisations plaignantes, pour tous les conflits, la conciliation a été convoquée à la demande du ministre de l’Education, les audiences de conciliation obligatoire ont toujours été fixées dans un délai de dix à quinze jours après la grève lancée par l’organisation syndicale et, lorsque les actions revendicatives se sont concrétisées, elles ont été déclarées illégales; de plus, aucun accord n’a jamais pu être atteint, faute de propositions de l’employeur. En outre, les procédures de conciliation obligatoire n’ont jamais été considérées comme épuisées (les organisations plaignantes citent différentes procédures administratives depuis 2009). Les organisations plaignantes dénoncent une pratique déloyale, estimant que l’exercice des droits syndicaux est empêché par une utilisation abusive des pouvoirs prévus par la loi no 14786 relative à la conciliation obligatoire, et elles allèguent en outre que le Sous-secrétariat au travail est à la fois juge et partie puisqu’il se prononce sur un conflit qui implique une institution relevant du pouvoir exécutif provincial, ce qui porte atteinte au droit à une procédure équitable et, par là même, aux conventions internationales qui consacrent le droit de la défense et le droit d’être jugé par le juge compétent (principe du juez natural).
  2. 181. Les organisations plaignantes ajoutent que, conformément à la loi nationale no 26075 (loi relative au financement de l’éducation, qui fixe avec le décret no 457/07 la convention-cadre applicable à la négociation collective dans le secteur de l’enseignement), une instance de négociation collective a rassemblé en février 2011 des représentants de l’Etat fédéral, soit de l’ensemble des autorités éducatives au niveau provincial (province de Santiago del Estero y compris), ainsi que les autorités nationales compétentes et les syndicats, en l’espèce des associations du personnel enseignant jouissant du statut syndical spécial (personería gremial) ayant compétence pour l’ensemble du territoire argentin (le CISADEMS étant représenté par la CEA). Les organisations plaignantes indiquent que cette instance est convenue d’établir un salaire minimum pour le personnel enseignant en précisant que celui-ci ne devrait pas être inférieur à 50 pour cent du salaire minimum fixé dans le domaine au niveau national.
  3. 182. Dans leur communication de juin 2012, les organisations plaignantes font état de cas de procédures de conciliation obligatoire dans le secteur en 2011 et 2012.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 183. Dans sa communication de février 2013, le gouvernement réfute toute ingérence des autorités provinciales et toute violation par elles des droits syndicaux. Il déclare que cette affirmation est attestée par les informations fournies par le Secrétariat au travail de la province, qui fait état de la création d’une instance de concertation et affirme la volonté constante des autorités de la province de se rapprocher des organisations syndicales. Le gouvernement ajoute que, selon l’autorité provinciale, un groupe de travail chargé exclusivement des questions relatives au système éducatif provincial a été constitué, instance réorganisée par la suite, conformément à la loi, en plusieurs espaces institutionnels spécialisés, dont une cellule de concertation sur l’enseignement. Selon les renseignements fournis par l’autorité provinciale, le CISADEMS est resté en marge de cette instance, et ce de sa propre initiative.
  2. 184. En outre, le gouvernement transmet une communication du Secrétariat au travail du gouvernement de la province de Santiago del Estero relative à la plainte. L’autorité provinciale indique que, suite à une modification de la loi relative aux ministères, le Secrétariat au travail a été élevé au rang de ministère. Elle affirme en outre qu’il n’y a dans la province aucun conflit collectif avec une organisation syndicale donnée, que ce soit sur des questions salariales ou sur un autre problème propre à altérer le dialogue et la paix sociale, et elle ajoute que la province a connu une évolution sur tous les plans – industrie, production, politiques d’insertion sociale – et qu’elle s’est efforcée dans ce cadre de créer des espaces institutionnels axés sur la concertation et la recherche du consensus. Les instruments prévus par la loi ont été mis en place en conséquence; des instances de concertation rassemblant des représentants des organisations affiliées à la Confédération générale du travail (CGT) et des syndicats indépendants de cette centrale (personnel enseignant, organisations paysannes et conseils de sécurité) ont ainsi vu le jour. En 2005, dans l’idée de répondre dûment aux problèmes du personnel enseignant, un groupe de travail chargé exclusivement de l’examen des questions intéressant le système éducatif provincial a été créé. Cette instance devait veiller au traitement adéquat des problèmes relatifs au monde de l’éducation, et tous les syndicats constitués conformément à la loi ont rejoint ses rangs. Le CISADEMS est la seule organisation restée en marge de ce cercle de débat et de négociation sur les questions syndicales, sociales et législatives relatives au secteur. L’autorité provinciale déclare avoir travaillé avec les autres organismes dans l’intérêt de tous les travailleurs et élèves de la province, une action dont l’organisation plaignante a aussi tiré profit, alors même qu’elle n’avait pas pris part au débat ni soumis d’idées constructives. L’autorité ajoute que, dans ce processus de concertation, il est apparu nécessaire d’élargir la portée de la discussion; par conséquent, le pouvoir exécutif provincial a ordonné par le décret no 770 l’élargissement de l’instance à d’autres corps du secteur public et privé; il a été décidé dans ce cadre de réorganiser les cercles de discussion et de négociation. A la demande expresse de la CGT (délégation de Santiago del Estero), la loi no 7054 a été promulguée. Ce texte institutionnalise l’instance de concertation et de travail et prévoit, pour un traitement plus adéquat des problèmes intéressant chacun des secteurs professionnels, la constitution de plusieurs cercles comme suit au service de la politique institutionnelle de concertation: a) l’instance de concertation et de travail; b) l’instance de concertation sur l’enseignement; c) l’instance de concertation sur la terre et la production; et d) le conseil économique et social. L’autorité provinciale ajoute que le pouvoir exécutif de la province a donné aux syndicats affiliés à la CGT et au chef de cabinet un mandat de coordination, les chargeant de fixer les modalités d’application de la loi; à ce jour, l’instance de l’enseignement et l’instance des agents de l’Etat ont adopté leur règlement. L’autorité provinciale indique que les textes adoptés prévoient la participation d’organisations sans appartenance politique ou syndicale comme les associations qui défendent des intérêts sociaux (terre, paysannerie, etc.) et les associations confessionnelles. L’autorité provinciale indique que, dans la province, les syndicats sont affiliés à une même confédération, la CGT, section de Santiago del Estero, qui rassemble 85 organisations au total. L’autorité provinciale déclare en outre que l’organisation plaignante – le CISADEMS – est restée en marge des instances de concertation, et ce de sa propre initiative.
  3. 185. L’autorité provinciale indique que l’organe compétent pour examiner les conflits collectifs dans la province de Santiago del Estero est le Sous-secrétariat au travail. Ce sous-secrétariat a rédigé un rapport sur la plainte (dans lequel il fait le point sur les démarches effectuées par l’organisation plaignante – le CISADEMS – devant l’autorité administrative de la province pour demander des audiences avec le gouvernement provincial aux fins de l’examen de revendications relatives à des hausses salariales et d’autres questions intéressant ses membres, sur la date des appels à la grève lancés par le CISADEMS et sur les décisions demandant l’ouverture de procédures de conciliation obligatoire). L’autorité provinciale ajoute que, en ce qui concerne le défaut de compétence allégué du Secrétariat au travail de la province pour l’examen des affaires faisant l’objet de la plainte, il convient de souligner que la province de Santiago del Estero a signé avec le gouvernement national un accord prévoyant l’organisation conjointe, par les autorités nationales et provinciales, de la prestation des services administratifs dans le domaine du travail, et ce d’une façon coordonnée et cohérente. L’objectif en la matière était d’assurer et promouvoir un fonctionnement autonome des administrations provinciales pour le plein exercice de leur pouvoir de police dans le domaine du travail, mandat qui comprend le contrôle de la bonne application de la législation du travail en ce qui concerne les conditions et le milieu de travail ainsi que le règlement des conflits individuels et collectifs. L’autorité provinciale indique en outre que les provinces de l’Argentine font partie du Conseil fédéral du travail, qui se prononce sur tous les aspects relatifs au travail dans le pays.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 186. Le comité observe que, dans le cas à l’examen, les organisations plaignantes allèguent que, dans le cadre de plusieurs conflits faisant suite à des revendications salariales présentées par le Cercle de l’enseignement secondaire et supérieur de Santiago (CISADEMS) entre 2009 et 2011, les autorités de la province de Santiago del Estero – qui sont partie au conflit – ont adopté des décisions demandant l’ouverture de procédures de conciliation obligatoire dans le seul but d’empêcher l’exercice du droit de grève, sans que les autorités aient formulé de propositions en vue de l’examen de conventions.
  2. 187. Le comité note que le gouvernement réfute toute ingérence des autorités provinciales et toute violation par elles des droits syndicaux. De même, le comité relève que le gouvernement transmet une communication du Secrétariat au travail du gouvernement de la province de Santiago del Estero, dont il ressort ce qui suit: 1) il n’y a dans la province aucun conflit collectif avec une organisation syndicale donnée, que ce soit sur des questions salariales ou sur un autre problème propre à altérer le dialogue et la paix sociale; 2) la province a connu une évolution sur différents plans – industrie, production et politiques d’insertion sociale – et s’est efforcée dans ce cadre de créer des espaces institutionnels axés sur la concertation et la recherche du consensus; 3) à cette occasion, des instances de concertation ont été créées avec les organisations affiliées à la Confédération générale du travail (CGT) et des syndicats indépendants de cette centrale (personnel enseignant, organisations paysannes et conseils de sécurité) et, en 2005, dans l’idée de répondre dûment aux problèmes du personnel enseignant, un groupe de travail chargé exclusivement de l’examen des questions intéressant le système éducatif provincial a été créé; 4) cette instance devait veiller au traitement adéquat des problèmes relatifs au monde de l’éducation, et tous les syndicats constitués conformément à la loi ont rejoint ses rangs; le CISADEMS est la seule organisation restée en marge de ce cercle de débat et de négociation sur les questions syndicales, sociales et législatives relatives au secteur; 5) les autorités ont travaillé avec les autres organismes dans l’intérêt de tous les travailleurs et élèves de la province, une action dont l’organisation plaignante a aussi tiré profit, alors même qu’elle n’avait pas pris part au débat ni soumis d’idées constructives; 6) à la demande expresse de la CGT (délégation de Santiago del Estero) – qui rassemble selon le gouvernement provincial 85 syndicats de la province –, la loi no 7054 a été promulguée; ce texte institutionnalise l’instance de concertation et de travail et crée entre autres une instance de concertation sur l’enseignement; 7) l’organisation plaignante – le CISADEMS – est restée en marge des instances de concertation, et ce de sa propre initiative; 8) l’autorité compétente pour l’examen des conflits collectifs dans la province de Santiago del Estero est le Sous-secrétariat au travail, qui a rédigé un rapport sur la plainte (dans lequel il fait le point sur les démarches effectuées par l’organisation plaignante – le CISADEMS – devant l’autorité administrative de la province pour demander des audiences avec le gouvernement provincial aux fins de l’examen de revendications relatives à des hausses salariales et d’autres questions intéressant ses membres, sur la date des appels à la grève lancés par le CISADEMS et sur les décisions demandant l’ouverture d’une procédure de conciliation obligatoire); et 9) en ce qui concerne le défaut de compétence allégué du Secrétariat au travail de la province pour l’examen des affaires faisant l’objet de la plainte, il convient de souligner que la province de Santiago del Estero a signé avec le gouvernement national un accord prévoyant l’organisation conjointe, par les autorités nationales et provinciales, de la prestation de services administratifs dans le domaine du travail, et ce d’une façon coordonnée et cohérente, mandat qui comprend le contrôle de la bonne application de la législation du travail en ce qui concerne les conditions et le milieu de travail et le règlement des conflits individuels et collectifs. Le comité note cependant que l’organisation plaignante affirme avoir participé – par le truchement de la CEA – aux travaux de l’instance de négociation collective entre l’Etat fédéral et la délégation syndicale qui ont débouché sur la fixation d’un salaire minimum pour le personnel enseignant. Cependant, compte tenu de la déclaration du gouvernement selon laquelle l’organisation plaignante – le CISADEMS – est restée en marge des instances de concertation mises en place dans la province, et ce de sa propre initiative, le comité invite l’organisation plaignante à envisager de rejoindre les espaces en question, notamment l’instance de concertation sur l’enseignement.
  3. 188. Par ailleurs, s’agissant de la conciliation obligatoire, le comité rappelle qu’il a été saisi de plusieurs cas relatifs à l’Argentine dans lesquels le plaignant dénonce la convocation de procédures de conciliation obligatoire des parties en conflit dans l’enseignement public par l’autorité administrative alors que celle-ci est elle-même partie au conflit. A cet égard, le comité rappelle que la simple intervention d’un tiers neutre, indépendant et recueillant la confiance des parties suffit souvent à débloquer une situation que les parties ne pourraient régler par elles-mêmes dans le cadre d’un conflit collectif et il réitère qu’il est «nécessaire que la décision d’entreprendre la procédure de conciliation […] dans les conflits collectifs soit confiée à un organe indépendant des parties en conflit». [Voir 349e rapport, cas no 2535, paragr. 351; 342e rapport, cas no 2420, paragr. 221; et 338e rapport, cas no 2377, paragr. 403.] Le comité prie à nouveau le gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires – y compris, si besoin est, des mesures législatives – dans ce sens et ainsi de mettre la législation et la pratique en conformité avec les conventions nos 87 et 98. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à ce sujet.

Recommandations du comité

Recommandations du comité
  1. 189. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) Le comité réitère qu’il est nécessaire que la décision d’entreprendre la procédure de conciliation dans les conflits collectifs soit confiée à un organe indépendant des parties en conflit, et il prie à nouveau le gouvernement de prendre des mesures nécessaires – y compris, si besoin est, des mesures législatives – dans ce sens et ainsi de mettre la législation et la pratique en conformité avec les conventions nos 87 et 98. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé à ce sujet.
    • b) Le comité invite l’organisation plaignante – le CISADEMS – à envisager de rejoindre les espaces de concertation mis en place dans la province de Santiago del Estero, notamment l’instance de concertation sur l’enseignement.
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