Allégations: Les organisations plaignantes allèguent des actes répétés de
répression de la part des autorités et de l’employeur contre le Syndicat de la compagnie de
bus de Téhéran, y compris le harcèlement de syndicalistes et de militants; des attaques
violentes lors de la réunion fondatrice du syndicat; l’interruption violente, à deux
reprises, de l’assemblée générale du syndicat; l’arrestation et la détention d’un grand
nombre de syndicalistes et de dirigeants syndicaux sous de faux prétextes (troubles à
l’ordre public, activités syndicales illégales)
- 354. Le comité a déjà examiné le présent cas quant au fond à huit
occasions, la dernière fois lors de sa réunion de mars 2014, au cours de laquelle il a
présenté un rapport intérimaire au Conseil d’administration. [Voir 371e rapport,
paragr. 550-569, approuvé par le Conseil d’administration à sa 320e session (mars
2014).]
- 355. Le gouvernement a envoyé ses observations dans des communications en
date du 18 mars 2014 et du 10 mars 2015.
- 356. La République islamique d’Iran n’a ratifié ni la convention (no 87)
sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ni la convention
(no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.
A. Examen antérieur du cas
A. Examen antérieur du cas- 357. A sa réunion de mars 2014, le comité a formulé les recommandations
suivantes [voir 371e rapport, paragr. 569]:
- a) Le comité espère
que le gouvernement sera en mesure de faire rapport dans les plus brefs délais sur
les conclusions des enquêtes indépendantes diligentées qui ont été ouvertes sur les
allégations de mauvais traitements auxquels M. Ebrahim Madadi, vice-président du
Syndicat de la compagnie d’autobus de Téhéran Vahed (SVATH), et M. Reza Shahabi,
trésorier du Syndicat des travailleurs de la compagnie d’autobus de Téhéran et de sa
banlieue, auraient été soumis pendant leur détention. Le comité espère en outre que,
si ces allégations s’avèrent fondées, les deux dirigeants syndicaux recevront des
compensations en conséquence. Enfin, encouragé par la nouvelle attitude du
gouvernement à l’encontre de la détention des militants sociaux et syndicaux, le
comité prie instamment le gouvernement de s’assurer du pardon et de la libération
immédiate de M. Shahabi sans délai supplémentaire, de l’abandon du reste des charges
retenues contre lui, de la restauration de ses droits et du versement d’une
compensation pour les préjudices subis. Le comité prie le gouvernement de le tenir
informé à cet égard.
- b) Sans attendre la mise en œuvre des
réformes législatives, le comité prie instamment le gouvernement d’indiquer les
mesures concrètes qu’il a prises concernant la reconnaissance de facto du SVATH,
indépendamment du fait que ce syndicat n’est pas affilié à la Confédération des
syndicats iraniens de travailleurs.
- c) Le comité demande
une fois encore au gouvernement de transmettre un rapport détaillé sur les
conclusions de l’Organisation de l’inspection générale de l’Etat (SGIO) et du Comité
pour la protection des droits humains sur les allégations de harcèlement au travail
pendant la période de formation du syndicat, de mars à juin 2005. Le comité prie à
nouveau le gouvernement de prendre, au vu des informations que ces enquêtes auront
révélées, les mesures nécessaires pour garantir que tous les employés de la
compagnie sont effectivement protégés contre toute forme de discrimination liée à
leur appartenance à un syndicat ou à leurs activités syndicales. Le comité prie le
gouvernement de le tenir informé à cet égard et de communiquer, dès qu’il sera
rendu, le jugement du tribunal concernant les poursuites engagées par le syndicat à
propos des agressions commises lors des réunions syndicales de mai et de juin
2005.
- d) Le comité accueille favorablement la demande du
gouvernement pour la coopération technique du BIT en vue de former ses forces de
l’ordre à la bonne gestion des manifestations de travailleurs, et il s’attend à ce
que le gouvernement travaille avec le Bureau sans délai à cet égard. Le comité prie
le gouvernement de le tenir informé des progrès accomplis à cet égard.
- e) Le comité attire spécialement l’attention du Conseil
d’administration sur le caractère extrêmement grave et urgent du présent
cas.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement- 358. Dans ses communications datées du 18 mars 2014 et du 10 mars 2015,
le gouvernement réaffirme sa volonté de coopérer avec le Département des normes
internationales du travail et fournit les informations ci-après. Pour ce qui est des
allégations relatives aux actes de torture dont aurait été victime M. Ebrahim Madadi au
cours de sa détention, le gouvernement indique que le ministère des Coopératives, du
Travail et du Bien-être social a saisi le Conseil supérieur des droits de l’homme à cet
égard. Ledit conseil a estimé que M. Madadi n’avait pas subi de mauvais traitements de
ce type au cours de sa détention, étant donné que la torture est interdite par la
Constitution. Le gouvernement indique en outre que M. Madadi a pris sa retraite, après
trente ans de service au sein de la compagnie d’autobus de Téhéran et de sa banlieue. En
ce qui concerne les recommandations répétées du comité relatives à la libération de
M. Reza Shahabi, le gouvernement fait savoir que ce dernier s’est vu octroyer par les
autorités judiciaires une libération conditionnelle et qu’il est actuellement libre et a
repris le travail.
- 359. Le gouvernement mentionne en outre la visite effectuée par une
mission de haut niveau du BIT en mai 2014. Selon le gouvernement, la mission a rencontré
des représentants du gouvernement et des partenaires sociaux et a eu l’occasion de
constater que les organisations de travailleurs et d’employeurs pouvaient exercer leur
droit à la liberté syndicale. La mission a été informée de la contribution spécifique de
ces organisations au processus national de prise de décision. Le gouvernement réaffirme
par ailleurs que les amendements au Code du travail ont été élaborés en consultation
avec les partenaires sociaux et sont actuellement examinés par le Parlement en vue de
leur adoption.
- 360. Enfin, le gouvernement indique que, pendant la 103e session de la
Conférence internationale du Travail, il a signé un accord de coopération avec le Centre
international de formation de l’OIT (CIF-OIT), dont les experts se sont réunis avec des
représentants du gouvernement et des autorités judiciaires. La possibilité d’organiser
une formation à l’intention des magistrats iraniens est en cours d’étude.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité- 361. Le comité rappelle que ce cas, présenté à l’origine en juillet 2006,
concerne des actes répétés de répression contre le syndicat local de la compagnie
d’autobus, notamment: le harcèlement de syndicalistes et de militants; les agressions
violentes lors de la réunion fondatrice du syndicat; l’interruption violente, à deux
reprises, de l’assemblée générale du syndicat; l’arrestation et la détention d’un grand
nombre de syndicalistes et de dirigeants syndicaux sous de faux prétextes (troubles à
l’ordre public, activités syndicales illégales).
- 362. Le comité note les informations communiquées par le gouvernement
concernant ses efforts pour appliquer la recommandation a) du comité. Il note en
particulier que, pour ce qui est des allégations relatives à des actes de torture dont
aurait été victime M. Madadi (vice-président du Syndicat de la compagnie d’autobus de
Téhéran Vahed (SVATH)), le gouvernement indique que le Conseil supérieur des droits de
l’homme a estimé que, étant donné que la torture était interdite par la Constitution,
M. Madadi n’avait pas subi de mauvais traitement de ce type au cours de sa détention. Le
gouvernement fait en outre savoir que M. Madadi a pris sa retraite, après trente années
de service au sein de la compagnie d’autobus de Téhéran et de sa banlieue. Pour ce qui
est des recommandations répétées du comité appelant à une libération de M. Reza Shahabi,
le gouvernement indique que ce dernier s’est vu octroyer par les autorités judiciaires
une libération conditionnelle et qu’il est actuellement libre et a repris le
travail.
- 363. Le comité regrette l’absence apparente d’une enquête concernant
l’allégation de mauvais traitements subis par M. Madadi pendant sa détention; il semble,
d’après la réponse du gouvernement, que le Conseil supérieur des droits de l’homme ait
tout simplement jugé que, étant donné que la torture était interdite par la
Constitution, M. Madadi n’avait pas pu être torturé. Le comité souligne que, dans les
cas allégués de torture ou de mauvais traitements de prisonniers, les gouvernements
devraient mener des enquêtes approfondies et indépendantes sur les plaintes de cette
nature. Il regrette en outre de n’avoir reçu aucune information sur le résultat de
l’enquête indépendante relative aux allégations de même nature concernant M. Reza
Shahabi (trésorier du Syndicat de la compagnie d’autobus de Téhéran et de sa banlieue).
Par conséquent, le comité prie instamment le gouvernement de diligenter des enquêtes
indépendantes sur les allégations de mauvais traitements dont auraient été victimes
MM. Madadi et Shahabi au cours de leur détention. Le comité s’attend en outre, si ces
allégations s’avèrent fondées, à ce que les deux dirigeants syndicaux soient dédommagés
en conséquence. Il s’attend également à ce que le gouvernement soit en mesure de lui
communiquer dans les plus brefs délais les conclusions de ces enquêtes.
- 364. Tout en saluant l’indication du gouvernement selon laquelle
M. Shahabi est actuellement en liberté conditionnelle et a repris le travail, le comité
prie instamment le gouvernement de s’assurer sans délai supplémentaire de la libération
définitive de M. Shahabi, par un pardon ou par d’autres moyens, de l’abandon du reste
des charges retenues contre lui, de la restauration de ses droits et du versement d’une
compensation pour les préjudices subis. Le comité prie instamment le gouvernement de le
tenir informé à cet égard.
- 365. Le comité prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle
les amendements au Code du travail ont été élaborés en consultation avec les partenaires
sociaux et sont actuellement examinés par le Parlement en vue de leur adoption. Il
rappelle qu’il a pris connaissance des projets d’amendements au Code du travail dans le
cadre du cas no 2807. [Voir 371e rapport, paragr. 570-579, mars 2014.] A cette occasion,
tout en accueillant favorablement le fait que le gouvernement fasse part de son
intention de veiller à ce que les amendements au Code du travail soient conformes aux
instruments pertinents de l’OIT, le comité a estimé qu’il était difficile de savoir, en
l’état actuel des choses, dans quelle mesure le Code du travail et les règlements qui
l’accompagnent garantiront, en droit et en fait, le droit des travailleurs de se réunir
et de constituer, de manière indépendante, les organisations de leur choix,
organisations dont la structure doit permettre à leurs membres d’élire leurs propres
dirigeants, d’élaborer et d’adopter leurs propres statuts, d’organiser leur
administration et leurs activités et de formuler leur programme, sans ingérence de la
part des autorités publiques, en vue de défendre les intérêts des travailleurs.
- 366. A cet égard, le comité note la référence que fait le gouvernement à
la visite d’une mission de haut niveau du BIT en mai 2014. Il rappelle que l’objectif
d’une mission, diligentée par la Commission de l’application des normes de la Conférence
internationale du Travail, est d’évaluer la situation au regard des questions soulevées
au titre de la convention (no 111) concernant la discrimination (emploi et profession),
1958, et observe que la mission a eu l’occasion de discuter des dernières évolutions en
matière de liberté syndicale dans le pays et de solutions pour aller de l’avant avec le
gouvernement et les partenaires sociaux. La mission a salué la volonté exprimée par les
représentants du gouvernement, à différents niveaux, d’amender le Code du travail de
manière à le rendre pleinement conforme aux principes de l’OIT en matière de liberté
syndicale et, à cet égard, a constaté que les amendements au Code du travail présentés
au Bureau en octobre 2013 et examinés par le comité en mars 2014 n’étaient pas les plus
récents. Le comité comprend par ailleurs qu’une récente résolution de la Conférence
nationale du travail demande que les initiatives nécessaires soient prises pour ratifier
les conventions nos 87, 98 et 138.
- 367. Notant que les amendements au Code du travail proposés sont
actuellement examinés par le Parlement, le comité s’attend à ce que la législation et la
réglementation du travail soient effectivement modifiées sans délai de manière à être
pleinement conformes aux principes de la liberté syndicale et permettent notamment le
pluralisme syndical à tous les niveaux. A cette fin, il encourage le gouvernement à
accepter l’assistance technique du Bureau et, dans ce cadre, à lui transmettre la
dernière version des projets d’amendements, en vue de s’assurer de leur pleine
conformité avec les principes de liberté syndicale tels qu’énoncés dans la Constitution
de l’OIT et les conventions applicables. Le comité propose de poursuivre l’étude de cet
aspect du présent cas dans le cadre de son examen du suivi des recommandations qu’il a
formulées dans le cas no 2807.
- 368. Le comité regrette profondément qu’aucune information n’ait été
fournie par le gouvernement sur les mesures prises pour traiter les autres
recommandations en suspens. Concernant l’enregistrement du syndicat SVATH, le comité
rappelle que l’obstacle juridique dont il est question dans le présent cas est
l’inscription dans le Code du travail en vigueur d’un monopole syndical qui rend
impossible l’enregistrement des organisations à l’extérieur des structures existantes.
Sans attendre la mise en œuvre des réformes législatives, le comité prie de nouveau
instamment le gouvernement d’indiquer les mesures concrètes qu’il a prises pour garantir
la reconnaissance de facto du SVATH, indépendamment du fait que ce syndicat n’est pas
affilié à la Confédération des syndicats iraniens de travailleurs.
- 369. En outre, le comité prie à nouveau le gouvernement de fournir un
rapport détaillé sur les conclusions de l’Organisation de l’inspection générale de
l’Etat (SGIO) et du Comité pour la protection des droits humains sur les allégations de
harcèlement au travail pendant la période de formation du syndicat, de mars à juin 2005.
Le comité prie à nouveau le gouvernement de prendre, au vu des informations que ces
enquêtes auront révélées, les mesures nécessaires pour garantir que tous les employés de
la compagnie sont effectivement protégés contre toute forme de discrimination liée à
leur appartenance à un syndicat ou à leurs activités syndicales. Le comité prie le
gouvernement de le tenir informé de la situation à cet égard et de lui communiquer le
jugement concernant les poursuites engagées par le syndicat à propos des agressions
survenues lors des réunions du syndicat en mai et juin 2005.
- 370. Le comité rappelle qu’il avait précédemment salué la demande
formulée par le gouvernement pour bénéficier de la coopération technique du BIT en vue
de former ses forces de l’ordre à la bonne gestion des manifestations de travailleurs,
et s’attend à ce que le gouvernement travaille avec le Bureau sans délai à cet égard. Il
note par ailleurs que le gouvernement a fait part de son intérêt concernant
l’organisation, en collaboration avec le CIF-OIT, d’une formation sur les normes
internationales du travail à l’intention des magistrats du pays et demande au
gouvernement de le tenir informé des progrès accomplis à cet égard.
Recommandations du comité
Recommandations du comité- 371. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite
le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Le
comité prie instamment le gouvernement de mener des enquêtes indépendantes sur les
allégations de mauvais traitements auxquels M. Ebrahim Madadi, vice-président du
Syndicat de la compagnie d’autobus de Téhéran Vahed (SVATH), et M. Reza Shahabi,
trésorier du Syndicat des travailleurs de la compagnie d’autobus de Téhéran et de sa
banlieue, auraient été soumis pendant leur détention. Le comité espère en outre que,
si ces allégations s’avèrent fondées, les deux dirigeants syndicaux seront
dédommagés en conséquence. Le comité s’attend à ce que le gouvernement soit en
mesure de lui faire connaître sans délai le résultat de ces enquêtes.
- b) Le
comité prie instamment le gouvernement de s’assurer sans délai supplémentaire de la
libération définitive de M. Shahabi, par un pardon ou par d’autres moyens, de
l’abandon du reste des charges retenues contre lui, de la restauration de ses droits
et du versement d’une compensation pour les préjudices subis. Le comité prie
instamment le gouvernement de le tenir informé à cet égard.
- c) Le comité
s’attend à ce que la législation et la réglementation du travail soient
effectivement modifiées sans délai de manière à être pleinement conformes aux
principes de la liberté syndicale et permettent notamment le pluralisme syndical à
tous les niveaux. A cette fin, il encourage le gouvernement à accepter l’assistance
technique du Bureau et, dans ce cadre, à lui transmettre la dernière version des
projets d’amendements, en vue de s’assurer de leur pleine conformité avec les
principes de liberté syndicale tels qu’énoncés dans la Constitution de l’OIT et dans
les conventions applicables.
- d) Sans attendre la mise en œuvre des réformes
législatives, le comité prie de nouveau instamment le gouvernement d’indiquer les
mesures concrètes qu’il a prises pour garantir la reconnaissance de facto du SVATH,
indépendamment du fait que ce syndicat n’est pas affilié à la Confédération des
syndicats iraniens de travailleurs.
- e) Le comité prie à nouveau le
gouvernement de lui fournir un rapport détaillé sur les conclusions de
l’Organisation de l’inspection générale de l’Etat (SGIO) et du Comité pour la
protection des droits humains sur les allégations de harcèlement au travail pendant
la période de formation du syndicat, de mars à juin 2005. Le comité prie à nouveau
le gouvernement de prendre, au vu des informations que ces enquêtes auront révélées,
les mesures nécessaires pour garantir que tous les employés de la compagnie sont
effectivement protégés contre toute forme de discrimination liée à leur appartenance
à un syndicat ou à leurs activités syndicales. Le comité prie le gouvernement de le
tenir informé de la situation à cet égard et de lui communiquer, dès qu’il sera
rendu, le jugement concernant les poursuites engagées par le syndicat à propos des
agressions survenues lors des réunions du syndicat en mai et juin 2005.
- f)
Rappelant qu’il avait précédemment salué la demande formulée par le gouvernement
pour bénéficier de la coopération technique du BIT en vue de former ses forces de
l’ordre à la bonne gestion des manifestations de travailleurs, le comité s’attend à
ce que le gouvernement travaille avec le Bureau sans délai à cet égard. Il note par
ailleurs que le gouvernement a fait part de son intérêt concernant l’organisation,
en collaboration avec le CIF OIT, d’une formation sur les normes internationales du
travail à l’intention des magistrats du pays et demande au gouvernement de le tenir
informé des progrès accomplis à cet égard.
- g) Le comité attire spécialement
l’attention du Conseil d’administration sur le caractère extrêmement grave et urgent
du présent cas.