Allégations: L’organisation plaignante allègue la violation du droit de
négociation collective d’un syndicat de travailleurs de l’économie informelle, ainsi que la
perpétration d’actes antisyndicaux par une entreprise du secteur de la pêche. Elle dénonce
en outre l’arrestation de dirigeants syndicaux ayant participé à une manifestation et leur
condamnation à des peines d’emprisonnement
- 593. La plainte figure dans des communications de la Centrale autonome
des travailleurs du Pérou datées du 8 septembre 2017 et du 19 février 2018.
- 594. Le gouvernement a répondu aux allégations dans des communications
datées du 23 août, du 2 octobre et du 22 novembre 2018, ainsi que du 22 janvier et du
5 avril 2019.
- 595. Le Pérou a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et
la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit
d’organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l’organisation plaignante
A. Allégations de l’organisation plaignante- 596. Dans sa communication du 8 septembre 2017, l’organisation plaignante
indique qu’en novembre 2013 des dockers du secteur de l’économie informelle et
travaillant sur le marché de Villa María del Triunfo ont fondé le Syndicat des
travailleurs de la manutention, de la vente de produits de la mer et d’autres domaines
d’activité connexes de Villa María Del Triunfo - Lima (ci-après «le syndicat») pour
améliorer leur situation d’emploi précaire. L’organisation plaignante fait valoir que le
syndicat a été reconnu et enregistré par le ministère du Travail et de la Promotion de
l’emploi (ci-après «le MTPE») par voie d’inscription automatique en date du 13 janvier
2014.
- 597. L’organisation plaignante affirme que l’entreprise Servicios
Industriales Pesqueros S.A. (ci après «l’entreprise»), propriétaire du marché
susmentionné sur lequel plusieurs propriétaires de véhicules viennent vendre des
produits de la mer en gros et au détail, a refusé de reconnaître le syndicat au motif
que toutes les demandes étaient traitées individuellement.
- 598. L’organisation plaignante indique qu’en juillet 2014 le syndicat a
soumis à l’entreprise un cahier de revendications dans lequel: i) il faisait
essentiellement référence aux conditions de travail liées au fonctionnement du marché
(par exemple, la gestion des situations d’urgence sur le marché, l’élaboration d’un
règlement interne prévoyant une signalisation adéquate pour la circulation piétonne au
sein du marché, le stationnement adéquat des camions afin qu’ils ne bloquent pas les
accès d’entrée et de sortie, des installations sanitaires en bon état, etc.), dans le
but de garantir le respect des normes minimales énoncées dans la loi no 29783 sur la
sécurité et la santé au travail; et ii) il demandait que les travailleurs n’aient pas à
s’acquitter d’une contribution journalière pour pouvoir accéder au marché.
- 599. L’organisation plaignante déclare que: i) en septembre 2014,
l’entreprise a formé un recours devant le MTPE pour contester la recevabilité du cahier
de revendications susmentionné; ii) en dépit de ce qui précède, le syndicat a pu engager
des négociations directes avec les propriétaires de l’entreprise; et iii) le
1er octobre 2014, les parties n’ayant pas réussi à trouver un accord et l’entreprise
ayant refusé de faire une contre-proposition, le syndicat a informé cette dernière, par
lettre notariée, que s’il ne recevait pas ses propositions dans un délai de
soixante-douze heures, il soumettrait une demande de conciliation au MTPE.
- 600. L’organisation plaignante affirme que l’entreprise, au lieu de
chercher une solution par la voie du dialogue, a commencé à se livrer à des pratiques
antisyndicales. Elle soutient que l’entreprise a fait pression sur les propriétaires des
véhicules (qui sont ceux qui contractent directement les services d’arrimage et de
désarrimage) afin qu’ils licencient les dirigeants du syndicat, et se réfère au cas de
M. Anthony Ilasaca Zuasnabar, secrétaire général adjoint du syndicat, qui a dénoncé ces
agissements auprès du MTPE et du commissariat de Villa María del Triunfo. L’organisation
plaignante affirme en outre que l’entreprise a refusé aux propriétaires des camions le
droit d’accéder au marché pour y décharger et y vendre leurs produits de la mer, et que
la direction du syndicat a dû intervenir et insister pour que l’accès leur soit
finalement accordé. Selon l’organisation plaignante, ces actes avaient pour but
d’empêcher les syndicalistes de travailler et d’intimider non seulement les travailleurs
mais aussi les propriétaires des produits, neutralisant ainsi toute tentative
d’organisation.
- 601. L’organisation plaignante indique que le syndicat a tenu le
14 octobre 2014 une réunion d’information consacrée aux mesures qu’il convenait de
prendre pour prévenir les pratiques abusives de l’entreprise, réunion qui a été suivie,
le 15 octobre 2014, d’une manifestation publique et pacifique. Elle indique que cette
manifestation a entraîné une interruption du travail d’une durée d’environ trois
heures.
- 602. L’organisation plaignante affirme qu’à la suite de cette
manifestation l’entreprise a porté plainte auprès du ministère public contre les sept
dirigeants du syndicat (M. Ilasaca Zuasnabar, cité plus haut, et MM. Carlos López
Ramírez, Carlos López Castillo, Hilmer López Pajares, Daniel Flores Ruesta, Carlos
Minaya Panamá et John Zavala Panduro), les accusant d’avoir commis de multiples
infractions (vandalisme, atteintes à la liberté individuelle, dégradation de biens,
troubles à l’ordre public, etc.). Selon l’organisation plaignante, cette plainte fait
partie d’une stratégie criminelle au moyen de laquelle l’entreprise cherche à décourager
la syndicalisation par la peur et à éliminer les dirigeants.
- 603. L’organisation plaignante soutient que le minsitère public a statué
sur la plainte avec une rapidité inhabituelle, concluant malencontreusement que
l’affaire était complexe, et l’a transmise au premier parquet pénal de Villa María del
Triunfo. Elle affirme en outre que M. Ilasaca Zuasnabar a été arrêté sans notification
préalable adressée à son domicile puis conduit, menotté, dans une cellule pour faire une
déposition.
- 604. L’organisation plaignante indique que le 13 mars 2017 le premier
tribunal pénal spécialisé de Villa María del Triunfo a condamné les dirigeants du
syndicat à six ans d’emprisonnement effectif pour délits contre la paix et la
tranquillité publiques, ainsi que pour troubles au détriment de l’entreprise. Elle
signale que les dirigeants syndicaux ont dû entrer dans la clandestinité pour éviter de
purger ces peines injustes.
- 605. L’organisation plaignante indique en outre que dans une décision du
26 décembre 2014 (arrêté directorial no 524-2014-MTPE/1/20.2), le MTPE a déclaré que le
recours formé par l’entreprise pour contester la recevabilité du cahier de
revendications présenté par le syndicat était fondé et a ordonné l’abandon de son projet
de convention collective.
- 606. L’organisation plaignante souligne que la législation nationale
contient des règles qui régissent le travail des débardeurs terrestres et protègent
leurs droits. Elle indique que la loi no 25047 et son règlement d’application (décret
suprême no 010-2011-TR), qui leur confèrent certains avantages, établissent une relation
entre ces travailleurs et les entreprises qui gèrent les marchés, terminaux terrestres
ou établissements analogues où ils travaillent, afin de faciliter leur application.
- 607. Selon l’organisation plaignante, l’État péruvien n’a pas pris les
mesures appropriées pour assurer le respect de ses obligations en matière de négociation
collective, en particulier dans le secteur de l’économie informelle, et que le
gouvernement n’a pas appliqué les mesures préconisées à cet égard par la recommandation
(no 204) sur la transition de l’économie informelle vers l’économie formelle, 2015.
- 608. Dans sa communication du 19 février 2018, l’organisation plaignante
indique que le 18 septembre 2017 la Cour supérieure de justice de Lima Sud a déclaré
fondé un recours en appel formé par les dirigeants syndicaux contre le jugement du
13 mars 2017. L’organisation plaignante signale que, suite à cette décision, M. Minaya
Panamá, qui avait été incarcéré, a été libéré. Elle affirme toutefois que l’entreprise
utilise la procédure pénale susmentionnée comme prétexte pour refuser l’accès au marché
aux dirigeants syndicaux.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement- 609. Dans sa communication du 23 août 2018, le gouvernement transmet en
premier lieu les observations de l’entreprise au sujet des allégations du présent cas.
L’entreprise déclare qu’elle est propriétaire du marché de gros Terminal Pesquero de
Villa María del Triunfo, où grossistes et détaillants vendent chaque jour des produits
de la mer.
- 610. L’entreprise indique qu’en août 2014 le syndicat a demandé
l’ouverture d’une négociation collective et qu’en septembre 2014 la sous-direction du
MTPE chargée des négociations collectives a décidé de donner suite à la requête et en a
informé les parties afin qu’elles lancent le processus de négociation. L’entreprise
déclare qu’elle a contesté la recevabilité des revendications présentées par le
syndicat, faisant valoir que le préalable à la négociation collective était qu’il existe
un lien entre l’organisation syndicale et l’entreprise.
- 611. L’entreprise indique que le 26 décembre 2014 le MTPE, par arrêté
directorial no 524 2014 MTPE/1/20.2: i) a conclu que son recours en irrecevabilité était
fondé, en raison du fait qu’aucun travailleur de l’entreprise n’était membre du
syndicat; ii) a noté que les membres du syndicat s’acquittaient d’une contribution
journalière pour pouvoir travailler dans le terminal; et iii) a confirmé le droit des
parties de recourir à d’autres mécanismes pour régler leur différend de manière
mutuellement satisfaisante.
- 612. L’entreprise souligne en outre que: i) le syndicat n’a formé aucun
recours contre la décision susmentionnée; ii) l’arrêté directorial no 007-2012-MTPE/2/14
du MTPE prévoit que les syndicats de branche doivent obligatoirement prouver qu’ils sont
suffisamment représentés au sein d’une entreprise pour engager une négociation
collective au niveau de cette entreprise; et iii) il ressort de l’article 41 de la loi
sur les relations collectives du travail qu’une négociation collective ne peut être
engagée que si l’organisation syndicale concernée est légitime.
- 613. Pour ce qui est des pratiques antisyndicales auxquelles elle se
serait livrée, l’entreprise rejette l’allégation selon laquelle elle aurait fait
pression sur les propriétaires des véhicules pour qu’ils licencient les dirigeants
syndicaux, et fait valoir que l’organisation plaignante n’a apporté aucune preuve à ce
sujet. Elle rejette également l’allégation selon laquelle elle n’aurait pas permis aux
propriétaires des camions d’accéder au marché. L’entreprise affirme que, puisque le
syndicat n’affilie aucun de ses travailleurs, il n’y a aucune raison ou justification
pour une quelconque conduite ou pratique antisyndicale.
- 614. En ce qui concerne l’arrestation et la condamnation de dirigeants
syndicaux, l’entreprise nie avoir planifié une stratégie criminelle visant à décourager
la syndicalisation et à éliminer les dirigeants. Elle affirme qu’elle a porté plainte
contre seulement deux dirigeants du syndicat (MM. Ilasaca Zuasnabar et López Pajares) en
lien avec les faits survenus le 15 octobre 2014 et que, ce faisant, elle a exercé
légitimement son droit d’informer le ministère public qu’une infraction pénale avait été
commise.
- 615. Dans des communications du 23 août, du 2 octobre et du 22 novembre
2018, ainsi que du 22 janvier et du 5 avril 2019, le gouvernement a fait parvenir ses
propres observations concernant la plainte. Pour ce qui est du cahier de revendications
présenté par le syndicat, le gouvernement confirme que l’arrêté directorial
no 524-2014-MTPE/1/20.02 du 26 décembre 2014 a déclaré fondé le recours en
irrecevabilité formé par l’entreprise contre ledit cahier car le syndicat n’avait pas la
légitimité pour solliciter l’ouverture d’une négociation collective. Le gouvernement
indique que l’arrêté susmentionné est un acte administratif définitif, puisqu’il n’est
pas noté que le syndicat l’ait contesté devant le pouvoir judiciaire. Par conséquent, le
projet de négociation collective correspondant a été abandonné.
- 616. En ce qui concerne les allégations relatives à la procédure pénale
engagée à la suite de la plainte déposée par l’entreprise, le gouvernement confirme que
le 13 mars 2017, le premier tribunal pénal spécialisé de Villa María del Triunfo a
condamné les dirigeants syndicaux à des peines effectives pour délit contre la
tranquillité publique, délits contre la paix publique, ainsi que pour troubles contre
l’entreprise, et que, le 18 septembre 2017, ce jugement a été annulé par la Cour
supérieure de justice de Lima Sud.
- 617. Le gouvernement indique en outre qu’un recours en nullité formé par
l’entreprise contre le jugement du 18 septembre 2017 a été déclaré irrecevable par
décision du 17 octobre 2017, et qu’une plainte exceptionnelle présentée par l’entreprise
contre cette décision a été déclarée sans fondement par la Cour suprême de la République
le 2 octobre 2018. Par conséquent, en l’absence de violation des droits du syndicat, le
gouvernement demande au comité de procéder, s’il le juge approprié, à la clôture
définitive du présent cas.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité- 618. Le comité note que, dans le présent cas, l’organisation plaignante
allègue qu’il y a eu violation du droit de négociation collective d’un syndicat de
dockers de l’économie informelle, et que l’entreprise propriétaire du marché de produits
de la mer de la ville concernée a commis des actes antisyndicaux afin d’obtenir le
licenciement des dirigeants dudit syndicat. Il note que l’organisation plaignante
dénonce en outre l’arrestation de dirigeants syndicaux et leur condamnation à des peines
d’emprisonnement à la suite d’une plainte déposée par l’entreprise susmentionnée après
une manifestation du syndicat. Le comité note que l’entreprise rejette ces allégations
et que le gouvernement affirme qu’il n’y a pas eu de violation des droits du
syndicat.
- 619. Le comité prend note de la chronologie des événements fournie par
l’organisation plaignante, le gouvernement et l’entreprise, à savoir: i) en novembre
2013, les dockers du secteur de l’économie informelle du marché de Villa María del
Triunfo ont fondé le syndicat; ii) le 13 janvier 2014, le syndicat a été reconnu et
enregistré par le MTPE; iii) en juillet 2014, le syndicat a présenté un cahier de
revendications à l’entreprise; iv) en août 2014, le syndicat a saisi le MTPE d’une
demande visant à ce que soit ouverte une négociation collective entre les parties; v) en
septembre 2014, l’entreprise a contesté la recevabilité du cahier de revendications du
syndicat auprès du MTPE, ce qui n’a pas empêché l’ouverture de négociations directes
entre les parties; vi) le 1er octobre 2014, après l’échec de ces négociations, le
syndicat a informé l’entreprise de son intention de soumettre une demande de
conciliation au MTPE; vii) le 14 octobre 2014, le syndicat a tenu une réunion
d’information consacrée aux mesures à prendre pour prévenir les pratiques abusives de
l’entreprise; viii) le 15 octobre 2014, faisant suite à la réunion d’information tenue
la veille, le syndicat a organisé une manifestation qui a entraîné une interruption du
travail d’une durée d’environ trois heures; ix) à la suite de cette manifestation,
l’entreprise a déposé une plainte pénale auprès du ministère public contre les sept
dirigeants du syndicat; x) le 26 décembre 2014, le MTPE a déclaré que le recours en
irrecevabilité formé par l’entreprise contre les revendications présentées par le
syndicat était fondé (arrêté directorial no 524-2014 MTPE/1/20.2); xi) le 13 mars 2017,
le premier tribunal pénal spécialisé de Villa María del Triunfo a condamné les
dirigeants du syndicat à six ans d’emprisonnement pour délit contre la tranquillité
publique, délits contre la paix publique et troubles au détriment de l’entreprise;
xii) le 18 septembre 2017, ce jugement a été annulé par une décision de la Cour
supérieure de justice de Lima Sud; et xiii) le 17 octobre 2017, un recours en nullité
formé par l’entreprise contre la décision susmentionnée a été déclaré irrecevable par
résolution, et le 2 octobre 2018, une plainte exceptionnelle déposée par l’entreprise
contre ladite résolution a été déclarée sans fondement par la Cour suprême de la
République.
- 620. En ce qui concerne la violation alléguée du droit de négociation
collective du syndicat, le comité observe que, dans l’arrêté directorial
no 524-2014-MTPE/1/20.2, dont l’organisation plaignante et le gouvernement ont fourni
des copies, le MTPE: i) a déclaré que le recours en irrecevabilité formé par
l’entreprise contre les revendications du syndicat était fondé, sur la base, entre
autres, des affirmations de l’entreprise qu’elle n’a pas d’emplois de manutention et que
le syndicat n’affilie aucun de ses travailleurs, ainsi que sur le fait que les membres
du syndicat s’acquittent d’une contribution journalière pour pouvoir travailler au
terminal; et ii) a confirmé le droit des parties de recourir à d’autres mécanismes pour
régler leur différend de manière mutuellement satisfaisante. Par ailleurs, le comité
comprend que le syndicat a considéré que l’entreprise était l’interlocuteur approprié
pour engager une négociation collective car: i) le cahier de revendications portait
principalement sur les conditions de travail liées au fonctionnement du marché, qui
appartient à l’entreprise, et demandait l’élimination de la contribution journalière
pour y accéder; et ii) la loi no 25047 et son règlement d’application, qui confèrent
certains avantages aux dockers, établissent une relation entre ces travailleurs et les
entreprises qui gèrent les marchés. Le comité prend note du fait que les dockers sont
employés directement par les propriétaires des véhicules qui opèrent sur le marché
susmentionné. Le comité rappelle avoir prié un gouvernement de prendre les mesures
nécessaires pour garantir que les travailleurs indépendants peuvent jouir pleinement de
leurs droits syndicaux pour promouvoir et défendre leurs intérêts, y compris par le
biais de la négociation collective, et de déterminer, en consultation avec les
partenaires sociaux concernés, les particularités des travailleurs indépendants qui ont
une incidence sur la négociation collective afin d’établir des mécanismes spécifiques de
négociation collective pour les travailleurs indépendants, le cas échéant. [Voir
Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, paragr. 1285.] Eu égard à
ce qui précède, le comité prie le gouvernement de créer un environnement propice pour
que les travailleurs de l’économie informelle, y compris les travailleurs portuaires du
marché de Villa María del Triunfo, puissent exercer leurs droits d’organisation et de
négociation collective ainsi que celui de participer au dialogue social dans le cadre de
la transition vers l’économie formelle. Le comité invite le gouvernement à se prévaloir
de l’assistance technique du Bureau à cet égard.
- 621. En ce qui concerne les allégations imputant à l’entreprise des
pratiques antisyndicales, le comité note que l’organisation plaignante allègue que: i) à
la suite de négociations infructueuses entre les parties, l’entreprise a fait pression
sur les propriétaires des véhicules (qui contractent les services d’arrimage et de
désarrimage) afin qu’ils licencient les dirigeants du syndicat, ce qui a conduit
M. Ilasaca Zuasnabar à porter plainte auprès du MTPE et du commissariat de Villa María
del Triunfo; et ii) l’entreprise a refusé l’accès au marché aux propriétaires qui
continuaient à contracter les services des membres du syndicat, et la direction du
syndicat a dû intervenir pour remédier à cette situation. Par ailleurs, le comité prend
note de la réponse de l’entreprise communiquée par le gouvernement, dans laquelle
celle-ci: i) rejette les allégations; ii) indique que le syndicat n’a fourni aucune
preuve des pressions alléguées; et iii) affirme qu’elle n’a aucune raison de commettre
de tels actes étant donné qu’aucun de ses travailleurs n’est membre du syndicat. Tout en
prenant dûment note des positions divergentes de l’organisation plaignante et de
l’entreprise, le comité rappelle que nul ne doit faire l’objet de mesures préjudiciables
en raison de l’exercice d’activités syndicales légitimes et que les affaires de
discrimination antisyndicale devraient être traitées de manière rapide et efficace par
les institutions compétentes. [Voir Compilation, paragr. 1077.] Eu égard à ce qui
précède, le comité veut croire que le gouvernement s’est assuré qu’aucun membre du
syndicat n’a vu son accès à l’emploi entravé par ses activités syndicales légitimes et
que les enquêtes pertinentes ont été menées sur les plaintes déposées par M. Ilasaca
Zuasnabar auprès du MTPE et du commissariat de Villa María del Triunfo.
- 622. Pour ce qui est des allégations relatives à l’arrestation et à la
condamnation des dirigeants syndicaux, le comité note que l’organisation plaignante
affirme que: i) la plainte déposée par l’entreprise à la suite de la manifestation du
syndicat fait partie d’une stratégie criminelle par laquelle l’entreprise cherche à
décourager la syndicalisation et à éliminer les dirigeants; ii) à la suite du jugement
rendu le 13 mars 2017 par le premier tribunal pénal spécialisé de Villa María del
Triunfo, M. Minaya Panamá a été incarcéré et les autres dirigeants syndicaux ont dû
entrer dans la clandestinité pour éviter de purger leurs peines respectives; et
iii) après l’annulation de ce jugement, l’entreprise a utilisé la procédure pénale
contre les dirigeants syndicaux comme prétexte pour les empêcher d’accéder au marché. Le
comité note en outre que l’entreprise affirme qu’elle a porté plainte contre seulement
deux dirigeants syndicaux en lien avec la manifestation du syndicat, et qu’elle a ce
faisant exercé légitimement son droit d’informer le ministère public qu’une infraction
pénale avait été commise. Le comité observe que: i) aux termes du jugement du 13 mars
2017, les dirigeants syndicaux avaient été initialement condamnés à six ans
d’emprisonnement pour «délit contre la tranquillité publique», «délits contre la paix
publique» et «troubles» contre l’entreprise; et ii) ce jugement a été annulé par la Cour
supérieure de justice de Lima Sud, qui a considéré qu’il n’avait pas été établi que les
travailleurs avaient fait usage de la violence contre des personnes ou des biens publics
ou privés en profitant de la formation d’un rassemblement émeutier. Le comité prend
dûment note de cette décision et de sa confirmation par la Cour suprême. Le comité
rappelle à cet égard que les travailleurs doivent pouvoir jouir du droit de
manifestation pacifique pour défendre leurs intérêts professionnels. [Voir Compilation,
paragr. 208.] Le comité espère que le gouvernement sera en mesure d’accorder des
indemnisations adéquates aux travailleurs qui ont été emprisonnés et qui ont été libérés
à la suite des jugements de la Cour supérieure de justice de Lima et de la Cour
suprême.
Recommandations du comité
Recommandations du comité- 623. Compte tenu des conclusions qui précèdent, le comité invite le
Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Le comité
prie le gouvernement de créer un environnement propice pour que les travailleurs de
l’économie informelle, y compris les travailleurs portuaires du marché de Villa
María del Triunfo, puissent exercer leurs droits d’organisation et de négociation
collective ainsi que celui de participer au dialogue social dans le cadre de la
transition vers l’économie formelle. Le comité invite le gouvernement à se prévaloir
de l’assistance technique du Bureau à cet égard.
- b) Le comité invite le
gouvernement à se prévaloir de l’assistance technique du Bureau à cet
égard.
- c) Le comité espère que le gouvernement sera en mesure d’accorder des
indemnisations adéquates aux travailleurs qui ont été emprisonnés et qui ont été
libérés à la suite des jugements de la Cour supérieure de justice de Lima et de la
Cour suprême.
- d) Le comité considère que ce cas est clos et ne requiert pas un
examen plus approfondi.