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- 287. Par lettre en date du 17 mars 1966, adressée directement à l'O.I.T, la Fédération latino-américaine des travailleurs agricoles a signalé, en termes généraux et sans fournir plus de précisions, que des représailles violentes avaient eu lieu au Pérou contre les dirigeants du Mouvement syndical agricole, affilié à l'organisation plaignante, et que M. Dario Cabrera Trillo avait fait l'objet d'une agression dont la nature n'était pas clairement indiquée dans cette communication.
- 288. Avant de transmettre la plainte au gouvernement péruvien, le Directeur général a fait savoir à l'organisation mentionnée, par lettre du 1er avril 1966, que toute information complémentaire que celle-ci désirerait soumettre à l'appui de sa plainte devait être envoyée dans le délai d'un mois. Les plaignants n'ont fait parvenir aucune communication contenant des informations supplémentaires dans le délai mentionné.
- 289. Par une autre communication datée du 11 mai 1966, la Fédération latino-américaine des travailleurs agricoles a formulé des allégations concrètes relatives à l'arrestation de ce même dirigeant syndical. Par lettre du 19 mai 1966, cette communication a été transmise au gouvernement, qui a répondu par une communication de la délégation permanente du Pérou à Genève, en date du 21 juin 1966.
- 290. Le Pérou a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. A. Allégations des organisations plaignantes
A. A. Allégations des organisations plaignantes
- 291. Dans sa communication du 11 mai 1966, les plaignants déclarent que le dirigeant rural péruvien Darío Cabrera Trillo a été arrêté le 2 mai 1966 par le Service de la sûreté militaire du Pérou, alors qu'il se dirigeait vers l'aéroport pour se rendre au Mexique afin de participer à une réunion de la Fédération latino-américaine des travailleurs agricoles. Selon les plaignants, M. Cabrera Trillo est resté à la Division du contrôle et de la sécurité de l'Etat dudit service jusqu'au 6 mai, sans que communication en soit faite. Ce n'est pas la première fois que le dirigeant syndical en question fait l'objet de persécutions de la part de la police puisque, antérieurement déjà, il avait été désigné dans les périodiques comme un « dirigeant communiste qui sème la discorde entre les paysans ». Le véritable motif de ces persécutions résiderait dans l'activité énergique de l'intéressé pour l'organisation et la défense des droits des paysans péruviens. Les plaignants demandent au B.I.T d'intervenir auprès du gouvernement péruvien afin d'obtenir la libération de ce dirigeant.
- 292. Dans sa réponse du 21 juin 1966, le gouvernement exprime tout d'abord des considérations d'ordre général sur le fait que l'état de droit garanti par la Constitution est en vigueur au Pérou. Il déclare que le régime juridique interne garantit l'exercice plein et normal des droits constitutionnels, parmi lesquels se trouvent les droits de pétition, de réunion et de circulation, ainsi que le recours de l'habeas corpus lorsqu'un de ces droits est violé. Ce système règne dans le cadre d'un ordre organisé dans lequel les individus et les institutions exercent leurs droits et observent les obligations que la vie civilisée impose, ainsi que le respect que mérite la personnalité de l'Etat. L'application de ce régime garantit notamment à toute personne soumise à l'action de la justice pénale le droit d'être jugée conformément aux lois en vigueur, ainsi que le droit de défense.
- 293. Dans le cas concret concernant le dirigeant rural Dario Cabrera Trillo, les enquêtes effectuées par le gouvernement ont établi nettement ses activités tenaces d'agitation dans la région du Satipo et sa participation au Mouvement de la gauche révolutionnaire, qui a commencé la guérilla dans le pays, motif pour lequel il a été mis à la disposition de la seconde zone judiciaire de police, organisme fonctionnant conformément à un code en vigueur depuis de longues années et qui garantit largement le droit de défense.
B. B. Conclusions du comité
B. B. Conclusions du comité
- 294. Le Comité rappelle que, dans de nombreux cas antérieurs, où les plaignants alléguaient que des dirigeants syndicaux ou des travailleurs avaient été arrêtés en raison de leurs activités syndicales et où les gouvernements intéressés avaient répondu que ces personnes avaient été arrêtées, en réalité, pour des activités subversives, des raisons de sécurité intérieure ou des délits de droit commun, le Comité a toujours suivi la règle consistant à demander aux gouvernements intéressés de fournir des informations complémentaires aussi précises que possible au sujet des arrestations en question et de leurs motifs exacts. Si, dans certains cas, le Comité a décidé que les allégations relatives à l'arrestation ou à la détention de militants syndicaux n'exigeaient pas un examen plus approfondi, c'est qu'il avait reçu des gouvernements mis en cause certaines informations prouvant d'une manière suffisamment évidente et précise que ces arrestations ou détentions n'avaient rien à voir avec les activités syndicales de ceux qui en étaient l'objet, mais qu'elles résultaient uniquement d'activités n'ayant aucun rapport avec la question syndicale, nuisibles à l'ordre public ou de caractère politique.
- 295. D'autre part, le Comité rappelle que pour tous les cas où une question avait été soumise à un tribunal national, comme il pensait que les jugements pourraient lui fournir des éléments d'information utiles pour apprécier le bien-fondé ou le mal-fondé des allégations formulées, il a demandé aux gouvernements de lui envoyer le texte de ces jugements, avec leurs considérants respectifs.
- 296. Enfin, le Comité a insisté, dans tous les cas où des syndicalistes avaient été arrêtés pour des délits politiques ou des délits de droit commun, sur l'importance qu'il accorde à ce que ces personnes soient jugées dans le plus bref délai possible par une autorité judiciaire impartiale et indépendante.
- 297. Dans le présent cas, les plaignants allèguent que M. Cabrera Trillo a été arrêté pour ses activités syndicales, tandis que le gouvernement répond que les motifs de l'arrestation ont rapport à des activités de perturbation de l'ordre public et de subversion armée, cette personne ayant fait l'objet de poursuites devant la seconde zone judiciaire de police, dont les règles de procédure garantissent le droit de défense.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 298. Dans ces conditions, le Comité recommande au Conseil d'administration:
- a) de prendre note de la déclaration du gouvernement en date du 21 juin 1966, d'où il ressort que le dirigeant syndical Dario Cabrera Trillo, qui, selon les plaignants, avait été arrêté le 2 mai 1966, a été mis à la disposition de la seconde zone judiciaire de police, car on lui imputait des actes d'agitation ainsi que sa participation à un mouvement de guérilla;
- b) de demander au gouvernement de bien vouloir préciser, dans le plus bref délai possible, la nature exacte des délits imputés à M. Cabrera Trillo et de l'informer de l'état de la cause en lui faisant parvenir le texte du jugement, lorsqu'il sera rendu, ainsi que les considérants de ce jugement;
- c) d'attirer l'attention du gouvernement sur l'importance que le Conseil d'administration a toujours attachée à ce que les syndicalistes arrêtés pour des délits politiques ou des délits de droit commun soient jugés, dans le plus bref délai possible, par une autorité judiciaire impartiale et indépendante.
- d) de demander au gouvernement, compte tenu du principe énoncé à l'alinéa précédent, de bien vouloir préciser à quelles règles de procédure sont soumises les poursuites devant la seconde zone judiciaire de police;
- e) de prendre note du présent rapport intérimaire, étant entendu que le Comité soumettra un nouveau rapport lorsqu'il aura reçu les informations complémentaires demandées au gouvernement dans les alinéas b) et d) du présent paragraphe.