Afficher en : Anglais - Espagnol
- 221. La plainte de la Fédération syndicale mondiale figure dans un télégramme du 3 novembre 1975. La FSM a présenté des informations complémentaires ainsi que de nouvelles allégations par des communications des 7 et 24 novembre 1975, 30 janvier 1976 et 19 janvier 1977. La Centrale latino-américaine de travailleurs (CLAT) a également déposé une plainte par une lettre du 16 décembre 1975. Dans une communication du 31 décembre 1975, la Confédération mondiale du travail a déclaré qu'elle faisait siennes les allégations de la CLAT.
- 222. Ces plaintes et les informations complémentaires ont été transmises au gouvernement qui a envoyé ses observations par des lettres des 21 septembre et 5 novembre 1976, 14 février et 19 août 1977.
- 223. Le Brésil n'a pas ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948; il a ratifié la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations des plaignants
A. Allégations des plaignants
- 224. La FSM présente, dans sa première communication, les allégations suivantes: Joao Massena Melo, ancien secrétaire du Syndicat des métallurgistes de Rio de Janeiro, aurait été arrêté; Osvaldo Pacheco, ancien secrétaire du Syndicat des travailleurs du port de Sao Paulo, aurait été torturé; Vladimir Herzog, journaliste à la télévision culturelle de Sao Paulo, aurait été tué; Manoel Conceiçao dos Santos, président du Syndicat des travailleurs ruraux de Maranhao, déjà blessé en 1968, aurait été à nouveau torturé le 28 octobre 1975. Le plaignant ajoute, dans son télégramme du 7 novembre 1975, que Manoel Constantino et José Cerreiro (voir ci-dessous) auraient été arrêtés arbitrairement avec d'autres dirigeants syndicaux.
- 225. La FSM déclare, dans sa lettre du 24 novembre 1975, que les parents des personnes arrêtées ignorent où celles-ci se trouvent et soupçonnent qu'elles aient été tuées en prison. Le plaignant cite à nouveau les noms de Joao Massena Melo, arrêté dans les premiers mois de 1974 et d'Osvaldo Pacheco (qui fut également président de la Fédération nationale des arrimeurs); ce dernier aurait été arrêté le 14 février 1975 et victime de tortures telles qu'il en perdit la raison; le plaignant joint une lettre publique de son épouse dénonçant ces violences. Il revient également sur le meurtre de Vladimir Herzog, directeur du département des journalistes de la deuxième chaîne de la télévision culturelle de Sao Paulo.
- 226. Le mouvement syndical brésilien, poursuit le plaignant, est depuis 1964 l'objet d'une incessante répression et d'interventions de la part des autorités. Il cite les déclarations faites à la presse par plusieurs dirigeants syndicaux de Sao Paulo sur les carences de la protection des droits syndicaux et celle faite par le Secrétaire à la sécurité publique de Sao Paulo, selon laquelle les mesures répressives prises seraient dues à l'état de guerre où vit le pays. La FSM mentionne à nouveau l'arrestation, parmi d'autres, de Manoel Constantino et José Cerreiro, président et vice-président du Syndicat des métallurgistes de Sao Caeteno. Les salaires, ajoute-t-elle, sont fixés par le ministère du Travail sans aucune intervention des syndicats, et ces derniers sont privés du droit fondamental de défendre les droits et de soutenir les revendications des travailleurs, au mépris des lois et des accords internationaux signés par le Brésil.
- 227. Dans sa plainte du 16 décembre 1975 que la CMT a déclaré faire sienne, la CLAT indique que Manoel Conceiçao dos Santos, dirigeant syndical paysan, fut incarcéré il y a quatre ans. Après deux ans d'emprisonnement au cours desquels il fut, selon les plaignants, soumis à des tortures, il fut remis en liberté dans un état grave. Le Cardinal de Sao Paulo dut intervenir pour qu'il soit admis dans un hôpital où l'intéressé subit une opération chirurgicale et un traitement ambulatoire. Il fut, poursuit la CLAT, à nouveau incarcéré le 28 octobre 1975 à Osasco (dans la zone industrielle de Sao Paulo) et l'on ignore où il se trouve actuellement, ce qui fait craindre pour sa vie. La CLAT communique également une série de documents à l'appui de ses allégations.
- 228. La FSM déclare encore, dans son télégramme du 30 janvier 1976, que José Manoel Fiel Filho, militant syndical métallurgiste, a été tué le 17 janvier 1976 après son incarcération par les forces armées. Elle allègue enfin, dans sa lettre du 19 janvier 1977, que José Duarte, dirigeant syndical dans les chemins de fer du nord-est du pays, se trouve en détention sans jugement depuis 1972. D'après la FSM, l'intéressé aurait subi de mauvais traitements lorsqu'il se trouvait à la prison de l'état de Bahia et il est aujourd'hui à la prison de l'Institut pénal Paulo Sarasarte, dans l'état de Cearà. Agé de 65 ans, il aurait eu une crise cardiaque à la suite de ces mauvais traitements.
B. Observations du gouvernement
B. Observations du gouvernement
- 229. Dans une communication du 21 septembre 1976, le gouvernement a signalé que Manoel Conceiçao dos Santos avait été condamné à trois ans de prison en vertu de l'article 14 du décret-loi no 892/69 définissant les crimes contre la sécurité nationale, l'ordre politique et social. L'intéressé purgea sa peine et fut libéré le 28 mai 1975. Il fut à nouveau arrêté le 10 novembre 1975 à des fins d'investigations et libéré le 10 décembre 1975. Dans sa lettre du 5 novembre 1976, le gouvernement a déclaré que le comité n'est pas compétent pour examiner le cas car il ne s'agit pas de dirigeants ou de militants syndicaux: d'après lui, les personnes citées par les plaignants n'exercent aucune fonction dans l'administration d'un syndicat, elles ne sont pas des militants syndicaux et elles n'ont, en aucun moment, été arrêtées pour une activité syndicale.
- 230. Le gouvernement a indiqué, dans une lettre ultérieure du 14 février 1977, les raisons pour lesquelles il n'avait pas encore pu envoyer les informations qui lui étaient demandées. Il a déclaré que, dans le système constitutionnel brésilien, les pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire sont indépendants les uns à l'égard des autres; selon la procédure judiciaire, le pouvoir exécutif engage le procès. Des poursuites avaient été entamées, à l'encontre des personnes citées par la FSM, devant les tribunaux de différents Etats du pays et ceux-ci avaient suspendu leurs travaux pendant les vacances judiciaires (qui se situaient entre la 201e - novembre 1976 - et la 202e - mars 1977 - sessions du Conseil d'administration.
- 231. Dans sa lettre très détaillée du 19 août 1977, le gouvernement signale qu'il a toujours exprimé son adhésion à la défense des droits de l'homme, parmi lesquels figurent les droits syndicaux. Le respect rigoureux des principes découlant de la Déclaration universelle des droits de l'homme, de la Charte des Nations Unies et de la Constitution de l'OIT qui sont en cause ici, ajoute-t-il, ne s'oppose toutefois pas au respect d'autres principes essentiels de la coexistence internationale qui interdisent l'ingérence dans les affaires intérieurs d'un Etat et celles relevant de sa souveraineté. Les informations qu'il fournit, poursuit le gouvernement, doivent être examinées à la lumière des positions de principe défendues par le Brésil à la Commission des droits de l'homme et divers autres organismes où ces questions, sous leurs nombreux aspects, sont débattues. Il a envoyé ces informations, animé du désir de maintenir un dialogue constructif avec le comité, de resserrer encore davantage ses liens avec l'OIT et convaincu que ces renseignements constituent un démenti complet et définitif des allégations déposées.
- 232. Il existe au Brésil, continue le gouvernement, une justice ordinaire qui est organisée selon les normes de la Constitution et dont les règles de compétence obéissent au principe universel du juge naturel. Il n'y a ni privilèges de juridiction, ni tribunaux d'exception; les actions pénales relèvent d'un tribunal et d'un juge déterminés en fonction de l'objet du litige et non des personnes inculpées; chacun a également la possibilité de faire appel d'un jugement prononcé contre lui. Les droits de la défense sont entièrement garantis.
- 233. La Constitution fédérale protège d'autre part, ajoute-t-il, les libertés d'association et d'expression ainsi que le droit d'avoir des convictions politiques et philosophiques. Elle interdit en même temps toute propagande en faveur de la guerre ou de la subversion ainsi que les actes qui visent à inculper ou à renforcer les préjugés de discriminations fondés sur la religion, la race ou la classe. Les infractions à la loi sur la sécurité nationale (décret-loi no 898/69) sont également traitées selon une procédure régulière, moyennant les garanties précitées. La condition essentielle à toute condamnation fondée sur cette loi est l'existence d'un dol spécifique, l'intention de porter atteinte à la sécurité intérieure ou extérieure de l'Etat ou la léser. Le gouvernement a l'obligation, déclare-t-il, de maintenir l'ordre indispensable au bien-être général, en veillant au développement du pays, à la sécurité et à la tranquillité de la collectivité; il est indispensable de prévenir et, le cas échéant, de punir les actes visant à renverser l'ordre établi, à détruire les institutions politiques ou à nuire au progrès et à la paix on recourt donc aux lois pénales et à l'appareil policier qu'elles impliquent nécessairement lorsque des délits sont commis ou que l'Etat, se fondant sur des faits solidement établis, suppose que des délits ont été commis.
- 234. Le gouvernement dément qu'il existe au Brésil des détenus politiques appartenant au mouvement syndical: parmi les personnes citées par les plaignants, celles qui font l'objet d'une procédure criminelle ont été dénoncées pour s'être livrées à des pratiques subversives; certaines ont été acquittées, et les autres condamnées après avoir été reconnues coupables d'infractions à la loi sur la sécurité nationale. Elles ont été jugées par un tribunal ordinaire, en jouissant des garanties universellement consacrées par la procédure pénale. L'intégrité et l'impartialité des juges sont prouvées à l'évidence par les acquittements prononcés pour insuffisance de preuves légales et non en raison de l'innocence des accusés dont la conduite subversive est notoire. A deux exceptions près, souligne-t-il, les personnes citées dans les plaintes n'étaient même pas liées au mouvement syndical lorsqu'elles se sont livrées aux actes illicites qui ont entraîné leur détention pour enquête ou leur incarcération sur décision de justice; les plaignants ont dénaturé les faits et les ont présentés comme s'ils relevaient du domaine des droits syndicaux, ce qui est faux. Le gouvernement communique de plus en annexe les déclarations de confédérations d'employeurs et de travailleurs, certifiant qu'à leur connaissance personne n'a été condamné au Brésil pour des activités syndicales.
- 235. En ce qui concerne Manoel Conceiçao dos Santos, le gouvernement signale que celui-ci a été jugé une première fois pour avoir enrégimenté des travailleurs de plusieurs districts à des fins politiques, en vue de pénétrer dans des propriétés agricoles, de prendre les terres et d'y installer par la force des familles de paysans. Le mouvement visait tous les propriétaires qui possédaient dans la région des terres clôturées. Les clôtures devaient être arrachées et détruites; les occupants devaient y établir des cultures collectives et les propriétaires se voir interdire le passage sur leurs propres terres. Au cas où ces derniers auraient réagi, ils devaient être assassinés par les agriculteurs. Un groupe de ceux-ci, liés à la ligue paysanne, organisation illégale, a détruit plusieurs clôtures de domaines agricoles sous la direction de Manoel Conceiçao dos Santos.
- 236. D'après le gouvernement, l'intéressé se livrait, en 1967, dans la vallée du Pindare-Mirim, à des activités clandestines comprenant un entraînement à la guérilla; en 1968, il fut blessé au cours d'un engagement avec la police et hospitalisé au Centre médical de l'Etat de Maranhao. Activiste militant, il a suivi des cours de guérilla à l'étranger; sans occupation quelconque depuis longtemps, il a souvent été arrêté pour être interrogé dans plusieurs Etats où il s'était rendu. Il n'a aucune attache syndicale et vit dans la clandestinité; le gouvernement a été informé de quelques-uns de ses déplacements à l'étranger effectués avec de faux passeports. Le gouvernement rappelle qu'il a été libéré en mai 1975, puis, arrêté de nouveau à Sao Paulo le 10 décembre 1975 pour être interrogé, il a été libéré le jour suivant. Il souligne que cette personne est le type même de l'agent subversif qui n'exerce plus depuis longtemps aucune activité professionnelle et n'a donc aucun lien avec la vie syndicale.
- 237. Joao Massena Melo, continue le gouvernement, a cessé depuis près de 15 ans d'exercer des fonctions syndicales et n'a plus, depuis 1964, de liens avec quelque syndicat que ce soit: il s'adonne exclusivement au terrorisme, comme il l'a fait toute sa vie, puisqu'en 1936 déjà il avait été arrêté et condamné pour des activités interdites. En 1964, il passa en jugement pour subversion; il avait agi à l'encontre des buts de la vie syndicale et notamment de l'article 521 de la consolidation de la législation du travail (conditions mises au fonctionnement des syndicats).
- 238. Le Syndicat des travailleurs de la métallurgie a été, explique le gouvernement, transformé à une certaine époque en centre d'agitation subversive, bien que la propagande politique et idéologique fût interdite dans des organisations de cette nature. La subversion avait atteint un tel point au sein de ce syndicat que la "mutinerie des marins" y avait installé son quartier général. Ses dirigeants appelaient à l'indiscipline, à la rébellion et à la lutte armée du personnel de la marine de guerre. La "mutinerie des marins" qui déclencha presqu'une guerre civile dans le pays réunissait au siège du syndicat quelques dizaines de marins mutinés qui en furent finalement délogés par l'armée en 1964. Les intéressés passèrent en jugement, comme ceux qui s'étaient associés à eux, dont des dirigeants du syndicat. L'affaire fut jugée par l'auditorat de la marine, s'agissant de crime contre la sécurité nationale. Les atteintes à la vie syndicale ont eu une telle répercussion au sein dudit syndicat que le ministère du Travail fut obligé de mettre celui-ci sous tutelle; un procès pénal fut aussi ouvert contre les anciens dirigeants, agents de la subversion, responsables de malversations et d'atteintes au patrimoine syndical; les finances syndicales avaient été à ce point compromises que l'organisation ne pût reprendre une existence normale qu'après une longue période, une fois la situation remise en ordre par les soins du représentant du ministère du Travail.
- 239. Joao Massena Melo, poursuit le gouvernement, a poursuivi ses activités subversives dans la clandestinité en tant que dirigeant d'un parti politique interdit. En 1966, il a été condamné à cinq ans de réclusion, mais n'a pas purgé sa peine qui a été prescrite. En 1969, il a été à nouveau condamné à deux ans de prison à la suite d'un autre procès pour lequel il était en détention préventive. Il a fait l'objet d'un nouveau procès pénal en 1971, mais vit actuellement dans la clandestinité; sa résidence est inconnue.
- 240. Selon le gouvernement, Osvaldo Pacheco da Silva est l'un des plus anciens et des plus actifs dirigeants de la subversion au Brésil; recherché par la police au cours des années 1940, il avait déjà cessé à l'époque toute activité syndicale et avait été rayé des registres des arrimeurs. Il réussit ensuite à obtenir sa réinscription et à se faire élire président de la Fédération nationale des travailleurs portuaires. En 1948, il fut poursuivi pour des activités subversives: il avait fomenté une centaine de grèves politiques dans des services essentiels (ports, transports, énergie électrique), malgré l'interdiction légale. Il passa en jugement en 1953 pour activités subversives, notamment pour avoir encouragé les travailleurs des ports à refuser tout service sur les navires américains mouillés dans le port de Santos. On lui attribua en 1955 de grandes activités dans les zones rurales auprès des ligues paysannes. Lié à L'Union des cultivateurs et travailleurs agricoles du Brésil, organisation illégale qui patronnait l'occupation des propriétés rurales et prônait d'autres violences encore, Osvaldo Pacheco réussissait en même temps à constituer dans les villes une autre organisation clandestine, le Commandement général des travailleurs, dont l'existence en tant qu'organisation syndicale n'a jamais été autorisée par la loi. En 1964, l'intéressé fut acquitté pour prescription de la peine dans un procès où il était accusé d'infraction à la loi sur la sécurité et il quitta le pays. Il a été condamné le 27 mai 1966 à neuf ans de prison pour violation des articles 10 et 13 de la loi alors en vigueur sur la sécurité nationale (loi no 1802/53). Rentré en 1968 au Brésil sous une fausse identité, il exerça des activités dans l'Etat du Rio Grande do Sul; le 26 juin 1973, il a été condamné à quatre ans de réclusion dans un procès pour violation de l'article 43 du décret-loi no 898/69 (réorganisation d'une association dissoute, suspendue ou nuisible à la sécurité nationale). Le gouvernement souligne que l'intéressé n'a plus exercé aucune activité syndicale depuis 1964, notamment parce qu'il n'est plus inscrit au registre des arrimeurs. La plainte en violation de la liberté syndicale ou à propos des "tortures" supposées n'a aucun fondement.
- 241. Manoel José Constantino a été, déclare le gouvernement, président du syndicat des travailleurs de la métallurgie, des industries mécaniques et des constructions électriques à Sao Caetano do Sul; il a démissionné pour prendre sa retraite. Le gouvernement cite aussi José Ferreira da Silva - et non José Cerreiro -, vice-président du même syndicat. Ces deux personnes ont été arrêtées pour enquête, leur participation à des groupes subversifs ayant été prouvée. Manoel José Constantino a été détenu du 5 au 29 octobre 1975 pour interrogatoire, puis libéré. José Ferreira da Silva, qui était chargé d'organiser des groupes subversifs dans les usines, a été arrêté le 4 octobre 1975 et libéré le 18 décembre suivant. Les résultats de l'enquête ont été transmis aux tribunaux qui ont acquitté ces deux personnes pour insuffisance de preuves. Le gouvernement souligne que leur détention et leur procès n'avaient aucun rapport avec leurs activités syndicales.
- 242. José Duarte, signale le gouvernement, a dès 1936 manifesté son militantisme dans des activités subversives à l'intérieur de l'Etat de Sao Paulo. En 1948, il fut arrêté pour avoir dirigé des mouvements favorisant la réorganisation d'une association interdite par la loi. En 1948, il fut identifié, sous un faux nom, comme agitateur dans plusieurs villes de l'Etat de Sao Paulo. Il fut repéré en 1963 dans des réunions faisant l'apologie de la révolution armée et du renversement de l'ordre établi. Il fut condamné en 1967 à une année de réclusion. Il a enfin été inculpé en 1973 dans une enquête ouverte dans l'Etat de Ceará au sujet d'activités subversives menées dans cet Etat. Il est actuellement en fuite. Le gouvernement signale que l'intéressé n'exerce plus depuis longtemps aucune activité professionnelle et qu'il a été condamné non pour ses activités syndicales, mais pour des infractions à la loi sur la sécurité nationale.
- 243. Le gouvernement déclare à plusieurs reprises que ces affaires ne sont pas liées à des activités syndicales et ne sont donc pas de la compétence du comité. Il ajoute que le Brésil ne soumet pas ses lois et ses décisions judiciaires à un examen, à une appréciation, mais, pour maintenir la position de principe déjà exposée, il mentionne les normes légales et fournit des données concernant les personnes citées par les plaignants: il accepte le dialogue, mais refuse toute ingérence indue dans ses affaires intérieures; comme la prétention de faire examiner par une organisation internationale ayant une compétence limitée une question sortant du cadre de cette compétence. Dans l'exercice complet de sa souveraineté, poursuit le gouvernement, le Brésil fait en sorte que soient respectées sa constitution et ses autres lois; en cela, il ne diffère d'aucun autre pays.
- 244. Les personnes citées par les plaignants, continue-t-il, n'ont nul besoin d'être défendues ou protégées contre quelque danger que ce soit; elles n'ont pas été victimes d'atteintes à leurs droits et libertés: trois d'entre elles ont été condamnées après un procès régulier où les droits de la défense, la publicité intégrale de la procédure et le droit de recours ont été assurés (Joao Massena Melo, Osvaldo Pacheco da Silva, José Duarte); les trois autres ont été acquittés (Manoel Conceiçao Dos Santos, Manoel José Constantino, José Ferreira da Silva). Les détentions pour interrogatoire ont été effectuées selon les procédures policières légitimes et ont été communiquées immédiatement au juge compétent. Ces détentions étaient nécessaires pour vérifier la responsabilité de personnes engagées dans des activités illégales visant à renverser les institutions politiques établies. Les conclusions des enquêtes effectuées par les autorités de police ont été remises au ministère public pour qu'il les examine et les transmette le cas échéant au pouvoir judiciaire. Sur les six personnes citées, deux seulement (Manoel José Constantino et José Ferreira da Silva) étaient membres d'un syndicat lors de leur brève détention; elles ont été acquittées. Le gouvernement répète qu'il n'existe aucun lien entre les faits qui font l'objet de la plainte et le domaine des droits syndicaux.
- 245. Le gouvernement en vient ensuite aux allégations relatives à la mort de Vladimir Herzog et Manoel Fiel Filho pendant leur détention pour interrogatoire sur des activités subversives. Il décrit en détail les enquêtes effectuées après ces deux décès et indique que les experts sont arrivés à la conclusion que les intéressés s'étaient suicidés en prison sans y avoir été incités ni aidés. Ces conclusions ont été remises au pouvoir judiciaire qui a ordonné le classement de ces affaires. Vladimir Herzog, ajoute le gouvernement, bien qu'affilié à un syndicat, n'a jamais exercé d'activités syndicales; il a été arrêté pour des activités contraires à la sécurité nationale; quant à la détention de Manoel Fiel Filho, elle n'avait aucun rapport avec l'exercice des droits syndicaux.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
- 246. D'après le gouvernement, les personnes citées dans les plaintes, à l'exception de Manoel José Constantino et de José Ferreira da Silva, n'avaient aucun rapport avec le mouvement syndical au moment de leur arrestation ou de leur condamnation; ces personnes n'exerçaient alors aucune fonction dans l'administration des syndicats, n'étaient pas des militants syndicaux et n'ont pas été détenues pour des activités syndicales. Par conséquent, le gouvernement considère que le comité n'est pas appelé à examiner ces questions puisque sa compétence porte seulement sur des problèmes précis de violation de la liberté syndicale.
- 247. Le comité tient à signaler à ce propos qu'il a souvent examiné des plaintes relatives à la détention d'anciens dirigeants syndicaux, notamment afin de déterminer, sur la base de toutes les informations disponibles, si les mesures prises contre eux n'étaient pas liées à leurs activités syndicales passées. En l'occurrence, plusieurs des personnes mentionnées ont par le passé occupé des fonctions syndicales. D'un autre côté, le comité a toujours estimé que là où des personnes sont condamnées pour des raisons étrangères à l'exercice des droits syndicaux, l'affaire échappe à sa compétence. Il lui appartient toutefois de vérifier lui-même, sur la base de toutes les informations disponibles, si ces personnes ont été condamnées pour des actes qui relèvent du droit pénal ou pour leurs activités syndicales.
- 248. En l'espèce, le comité a relevé en particulier les éléments suivants: Manoel José Constantino et José Ferreira da Silva ont été acquittés par les tribunaux pour insuffisance de preuve après avoir subi plusieurs semaines de détention au cours du dernier trimestre de 1975.
- 249. Quant à Joao Massena Melo et Osvaldo Pacheco, il semble bien qu'ils ne remplissaient plus depuis longtemps de fonctions syndicales. Pour ce qui est de Manoel Conceiçao dos Santos, il ressort des informations disponibles qu'il avait constitué, dans le nord-est du pays, une organisation de paysans comptant 50.000 membres environ, qui avait notamment participé à des opérations d'occupation de terres; à sa sortie de prison en 1975, il a cherché à se réintégrer dans la société en travaillant comme menuisier dans le sud du pays. Il participa à un séminaire sur la non-violence active et fut arrêté peu après cette réunion. Les renseignements disponibles ne permettent pas de conclure par ailleurs que Vladimir Herzog et Manoel Fiel Filho ont exercé des activités ou rempli des fonctions syndicales. Il ne semble donc pas ressortir des éléments en la possession du comité que les personnes citées dans le présent paragraphe aient été détenues ou condamnées pour des activités syndicales.
- 250. A propos de José Duarte enfin, le comité constate que le gouvernement ne répond pas aux allégations des plaignants selon lesquelles l'intéressé aurait été un dirigeant syndical dans les chemins de fer du nord-est du pays.
- 251. Le comité doit aussi relever qu'il se trouve en présence d'allégations et d'informations rendues publiques selon lesquelles certaines personnes citées dans les plaintes auraient subi de mauvais traitements. Il note que la réponse détaillée du gouvernement à cet égard se limite aux allégations relatives à la mort de Vladimir Herzog et de Manoel Fiel Filho. Le comité a en outre constaté certaines contradictions entre les informations fournies par les plaignants et par le gouvernement. En particulier, Joao Massena Melo et José Duarte seraient, au dire des plaignants, détenus respectivement depuis les premiers mois de 1974 et depuis 1972 (dans ce dernier cas, la FSM a même précisé la prison où l'intéressé est détenu), mais seraient dans la clandestinité ou en fuite selon le gouvernement.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 252. En ce qui concerne le cas dans son ensemble, le comité recommande au conseil d'administration:
- a) de noter avec intérêt que Manoel José Constantino et José Ferreira da Silva ont été acquittés par les tribunaux;
- b) de décider, pour les raisons exposées au paragraphe 249, qu'il n'y a pas lieu de poursuivre l'examen des allégations relatives à Joao Massena Melo, Osvaldo Pacheco, Manoel Conceiçao dos Santos, Vladimir Herzog et Manoel Fiel Filho;
- c) de prier le gouvernement de fournir des renseignements sur les faits qui ont conduit à l'inculpation de José Duarte en 1973;
- d) de noter ce rapport intérimaire.