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- 20. Le comité a déjà examiné ce cas à sa session de février 1978 et il a présenté à cette occasion ses conclusions définitives, exprimées dans les paragraphes 139 à 174 de son 177e rapport, approuvé par le Conseil d'administration à sa 205e session (février-mars 1978). Le Syndicat guyanais des travailleurs agricoles et autres (GAWU) a présenté de nouvelles allégations dans une lettre datée du 9 août 1978, et des informations complémentaires dans une lettre du 14 décembre 1978. Le gouvernement a transmis des informations sur le cas dans une lettre du 29 mars 1978, et ses observations sur les nouvelles allégations dans des lettres du 5 octobre 1978 et du 9 février 1979.
- 21. La Guyane a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, et la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Examen antérieur du cas
A. Examen antérieur du cas
- 22. A sa session de février 1978, ayant examiné les allégations du plaignant et la réponse du gouvernement, le comité a noté que cette affaire avait principalement trait à une grève déclarée en août 1977 dans l'industrie sucrière par le syndicat plaignant à la suite d'un différend sur l'application d'un système de participation aux bénéfices; d'après le plaignant, une taxe sur le sucre aurait réduit ou supprimé ces bénéfices.
- 23. Le gouvernement tenait la grève pour politique, considérant notamment qu'elle était dirigée contre une loi fiscale adoptée par le Parlement et que le GAWU était étroitement lié à une faction politique opposante qui cherchait à créer une tension qui lui permettrait de reprendre le pouvoir. Le gouvernement relevait que la grève avait été déclarée dans une industrie qui est vitale pour l'économie du pays, et estimait que le syndicat ne s'était pas conformé aux procédures de règlement des différends stipulées par la convention collective en vigueur. Le syndicat disait, pour sa part, avoir donné les 72 heures de préavis de grève stipulées par la convention, après que les négociations entreprises plus tôt aient échoué; il avait demandé, en vertu d'une résolution adoptée à la Conférence du Congrès des syndicats (TUC), que la part de bénéfices des travailleurs soit calculée d'après les chiffres antérieurs à la taxation. Le syndicat accusait le gouvernement de rendre les travailleurs responsables de tous les maux du pays.
- 24. Le comité notait que la taxe sur le sucre datait de 1974, tandis que la grève n'avait été déclarée qu'en 1977 à un moment où les divergences s'accentuaient entre le gouvernement et l'opposition, dont les dirigeants tenaient des postes élevés au GAWU. Bien que fondée sur des motifs professionnels, cette grève paraissait donc avoir des implications politiques très prononcées. De toute manière, elle n'avait pas été interdite, même si le gouvernement avait adopté diverses mesures pour la briser.
- 25. Le comité ajoutait qu'il n'avait pas à se prononcer sur les côtés politiques de ce conflit. Pour ce qui était de ses aspects professionnels, il constatait que la taxe appliquée sur le prix du sucre constituait un élément nouveau qui venait modifier profondément le système de participation aux bénéfices existant dans l'industrie sucrière. Un gouvernement peut évidemment adopter des mesures fiscales dans le cadre de sa politique économique nationale. En l'espèce, l'application de cette taxe avait toutefois posé un problème important aux travailleurs du secteur, dont la participation aux bénéfices avait été réduite à néant. Un tribunal d'arbitrage avait déjà relevé ce fait en 1975, suggérant que des mesures soient prises à cet égard. D'autres syndicats, y compris le TUC, s'étaient prononcés dans le même sens. Ce problème nouveau ne pouvait, de l'avis du comité, se résoudre par les procédures conventionnelles de solution des conflits, normalement destinées à régler les questions d'application des accords existants. Des négociations devaient par conséquent avoir lieu à ce sujet.
- 26. Si des discussions avaient bien eu lieu, le gouvernement avait adopté une fois la grève déclenchée une série de mesures dont certaines pouvaient mettre en cause les principes de la liberté syndicale. De toute manière, le gouvernement signalait que le syndicat avait maintenant demandé au TUC de négocier avec l'entreprise les conditions de la reprise du travail. Le comité exprimait l'espoir que le problème ferait l'objet de négociations approfondies entre les principaux intéressés et que les discussions aboutiraient à un accord tenant pleinement compte des points de vue des différentes parties.
- 27. A sa 205e session (février-mars 1978), le conseil d'administration a pris les décisions suivantes, selon la recommandation faite par le comité au paragraphe 174 de son 177e rapport: attirer l'attention du gouvernement et du syndicat plaignant sur les considérations exposées dans le paragraphe qui précède et prier le gouvernement de tenir le comité informé des développements du conflit du travail qui faisait l'objet de la plainte. A sa réunion de mai 1978, le comité avait noté avec intérêt les informations communiquées par le gouvernement et selon lesquelles l'ordre de grève avait été rapporté à dater du 6 janvier 1978, l'accord s'étant fait sur la reprise du travail et la situation dans l'industrie sucrière étant revenue à la normale.
B. Nouvelles allégations des plaignants
B. Nouvelles allégations des plaignants
- 28. Dans sa communication du 9 août 1978, le plaignant allègue que les travailleurs permanents qui avaient pris part à la grève étaient brimés par un refus d'emploi pendant la morte-saison, que les "jaunes" recrutés pendant la grève avaient reçu un emploi permanent alors qu'il y avait déjà excédent de main-d'oeuvre dans l'industrie sucrière, et que de nouveaux travailleurs étaient recrutés pour un emploi régulier en un moment où des milliers de travailleurs de plus de vingt années d'ancienneté Se voyaient refuser un emploi.
- 29. Dans sa communication du 14 décembre 1978, le plaignant donne de nouveaux détails sur ces allégations, déclarant que, pendant la grève, 6.132 "jaunes" avaient été recrutés contrairement à un accord passé entre la Société sucrière guyanaise (GUYSUCO) et le syndicat et selon lequel seuls pouvaient recevoir un emploi permanent les travailleurs remplissant certaines conditions. Le plaignant indique que la semaine de travail a été indûment raccourcie. De plus, bien qu'une sentence arbitrale de 1975 (modifiée en 1977) ait établi entre autres critères de recrutement et de prestations en morte-saison le fait d'avoir été précédemment employé pendant trois saisons de récolte, la GUYSUCO aurait, selon les plaignants, offert des emplois à des travailleurs qui ne remplissaient pas cette condition. Le plaignant déclare que le gouvernement part du principe, confirmé par la GUYSUCO, qu'il y a assez de travail et pour les employés réguliers pendant la récolte et en morte-saison, et pour les travailleurs recrutés pendant la grève; cependant, poursuit le syndicat, les travailleurs permanents qui avaient fait grève se trouveraient réduits à la condition d'occasionnels, auraient perdu la qualification susdite et se verraient refuser l'emploi et les prestations hors saison, tandis que ceux recrutés pendant la grève auraient trouvé des emplois hors saison; les travailleurs sont donc, selon le GAWU, réduits à une mendicité qui se prolongera du fait qu'ils ne rempliront plus les conditions voulues pour être recrutés pendant la prochaine morte-saison. Le plaignant ajoute que, depuis la fin de la grève, il a à plusieurs reprises vainement essayé de tenir des conversations sur les questions qui avaient mené à la grève générale.
C. Réponse du gouvernement
C. Réponse du gouvernement
- 30. Dans sa lettre du 5 octobre 1978, le gouvernement guyanais nie que les travailleurs permanents qui avaient fait grève aient été victimes d'un refus d'emploi hors saison; la GUYSUCO aurait pris l'engagement, ordinaire en pareil cas, de ne pas user de représailles une fois la grève terminée et le gouvernement indique que le plaignant ne lui a signalé, non plus qu'à la GUYSUCO, aucun cas de contravention aux critères de prestations hors saison il relève que la situation économique, les difficultés financières de l'industrie et le mauvais temps ont affecté l'emploi en morte-saison, et il souligne que l'industrie du sucre a en fait toujours eu peine à conserver une main-d'oeuvre assez nombreuse. Le gouvernement rejette aussi l'allégation selon laquelle des travailleurs recrutés perdant la grève auraient reçu un emploi permanent au détriment des grévistes, car on recrute toujours de nouveaux travailleurs pendant la récolte et la GUYSUCO élargit et diversifie ses activités agricoles; cette affirmation est accompagnée de statistiques. Le gouvernement ajoute que les nouveaux travailleurs devraient accumuler, de saison en saison, l'ancienneté qui permettrait de maintenir la permanence de l'emploi; sa politique d'emploi (dite de bonne répartition de la main-d'oeuvre) assurerait le redéploiement des excédents de main-d'oeuvre là où le besoin est le plus grand, comme dans l'industrie sucrière; il nie que, comme l'allègue le plaignant, on aurait recruté de nouvelles personnes pour des emplois réguliers en refusant l'emploi à des milliers de travailleurs de plus de vingt années d'ancienneté. La politique d'emploi du gouvernement permet aux travailleurs du secteur public de conserver leur statut de permanents une fois redéployés en d'autres entreprises du secteur public comme la GUYSUCO, qui n'a recruté personne autrement que pour remplacer un poste vacant et a offert à tous ses travailleurs permanents un emploi pour la saison de récolte en cours.
- 31. Dans sa lettre du 9 février 1979, le gouvernement juge que ce n'est pas contre lui qu'il convient de porter plainte, puisque la question concerne les relations entre le GAWU et la GUYSUCO, qui est une société publique juridiquement et administrativement distincte du gouvernement. Le gouvernement déclare qu'il formule néanmoins ses observations sur les allégations par courtoisie et pour montrer son désir de coopération. Il rappelle que les possibilités d'emploi dépendent de facteurs imprévisibles tels que la météorologie, les arrêts de production dus aux pannes et à l'entretien du matériel ou aux grèves et autres formes de conflits sociaux. Il ajoute que le raccourcissement de la semaine de travail était justifié par les pluies particulièrement abondantes de janvier à juin 1978 et par de nombreuses avaries, et fournit des statistiques à l'appui. Quant à l'allégation que les travailleurs auraient été réduits à la mendicité, le gouvernement déclare que la GUYSUCO a signé un nouvel accord salarial avec effet rétroactif à compter du let janvier 1976, et relève que les travailleurs du sucre reçoivent de substantielles prestations complémentaires. Enfin, le gouvernement répète que le GAWU est étroitement lié et inféodé à une faction politique opposante qui cherche à user des mécontentements professionnels pour la campagne électorale de cette année:
D. Conclusions du comité
D. Conclusions du comité
- 32. Dans un certain nombre de cas précédents, le comité a considéré qu'il ne pouvait rouvrir un cas qu'il avait déjà examiné quant au fond et sur lequel il avait présenté des recommandations définitives au Conseil d'administration que si de nouvelles preuves étaient recueillies et portées à sa connaissance. Dans le cas présent, le plaignant allègue de nouveaux faits découlant du conflit antérieur.
- 33. Comme lors du précédent examen du cas, la version du gouvernement et celle du plaignant diffèrent considérablement. Selon les nouvelles allégations du plaignant, depuis la fin de la grève déclarée par le GAWU dans l'industrie sucrière, la direction aurait usé de représailles contre les anciens grévistes en leur refusant des emplois hors saison, et de favoritisme à l'égard des travailleurs recrutés pendant la grève et de nouveaux travailleurs, et elle aurait délibérément réduit les activités. Il avance aussi que les efforts du syndicat pour avoir des conversations sur les questions qui avaient abouti à la grève seraient restés vains. Le gouvernement donne pour sa part des informations d'où il ressort notamment qu'il y aurait du travail sans discrimination contre les anciens grévistes; il nie que les activités aient été délibérément réduites et relève qu'aucune plainte pour discrimination antisyndicale n'a été portée à son attention ni à celle de la direction.
- 34. Le comité a déjà eu l'occasion de rappeler que la Commission d'investigation et de conciliation en matière de liberté syndicale avait souligné combien il importe de veiller à ce qu'il existe, pour l'examen des griefs, des moyens expéditifs, peu coûteux et tout à fait impartiaux; elle a attiré l'attention sur l'opportunité de régler dans toute la mesure possible les plaintes au moyen de discussions sans que le processus soit considéré comme une forme de litige; toutefois, concluait la commission, dans les cas où il existerait des divergences d'opinions ou de points de vue procédant d'une entière bonne foi, on devrait avoir recours à des tribunaux ou à des individus impartiaux, ce recours représentant l'étape finale de la procédure de plainte.
- 35. Le comité rappelle que, lors de son précédent examen du cas, le gouvernement avait expliqué, les procédures normales de règlement des conflits professionnels, qui étaient également prévues dans la convention collective passée entre le syndicat et la GUYSUCO. En ce qui concerne le fond des nouvelles allégations du plaignant, le comité tient à rappeler que des représailles contre les travailleurs en raison de leurs activités syndicales seraient contraires au principe de la liberté syndicale. Sous réserve du rappel de ce principe, et notant qu'il ressort des informations soumises par le gouvernement que des emplois ont été attribués aux travailleurs intéressés sans discrimination, et qu'aucune plainte pour discrimination antisyndicale n'a été portée à l'attention du gouvernement ou de la direction, le comité considère qu'il n'y a pas lieu d'examiner plus avant lesdites allégations.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 36. Dans ces conditions, le comité recommande au Conseil d'administration d'attirer l'attention des parties sur les principes et considérations énoncés aux paragraphes 34 et 35 précédents, et de décider que ce cas n'appelle pas un examen plus approfondi.