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- 24. La plainte figure dans une communication conjointe de la Plénière intersyndicale des travailleurs - Convention nationale des travailleurs (PIT-CNT), du Syndicat des ouvriers, des employés et des agents de maîtrise de la Fabrique uruguayenne de pneus SA (syndicat de FUNSA) et de la Fédération du caoutchouc de l'Uruguay (F.C.U.), en date du 27 février 1992. Par la suite, ces organisations ont présenté des informations complémentaires dans une communication datée de juillet 1992. Le gouvernement a envoyé ses observations dans une communication du 14 janvier 1993.
- 25. L'Uruguay a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations des organisations plaignantes
A. Allégations des organisations plaignantes
- 26. Dans leur communication datée du 27 février 1992, les organisations plaignantes allèguent que la politique de libéralisation, récemment adoptée par le gouvernement, qui prévoit la suppression de la protection accordée à l'industrie nationale et l'entrée de l'Uruguay dans le Marché commun du Sud (MERCOSUR), comporte la mise en route de programmes de restructuration de la production et de reconversion industrielle et la conclusion probable d'accords régionaux avec des sociétés multinationales. En application de cette politique, la Fabrique uruguayenne de pneus SA a dénoncé, le 30 avril 1991, la convention collective en vigueur, donnant lieu à un conflit collectif qui a entraîné l'inscription à l'assurance chômage des travailleurs et une grève ultérieure qui s'est accompagnée d'une occupation des locaux. Le conflit a été résolu au moyen d'un accord provisoire jusqu'à la fin de l'année 1991. Les organisations plaignantes ajoutent que le refus de réintégrer les travailleurs inscrits au chômage, les obstacles mis à la négociation sur la coopérative des travailleurs du secteur de la chaussure et le refus de négocier une convention collective ont provoqué un nouveau conflit qui s'est matérialisé par des grèves tournantes et par l'inscription à l'assurance chômage de l'ensemble du personnel ouvrier. Après l'occupation de l'usine par les travailleurs et leur expulsion par la police, l'entreprise a licencié, en janvier 1992, 73 travailleurs, dont 21 dirigeants syndicaux, qui étaient encore inscrits à l'assurance chômage en décembre 1991.
- 27. Les organisations plaignantes signalent que le gouvernement a présenté une proposition de solution du conflit que le syndicat a rejetée du fait qu'elle admettait le licenciement des 73 travailleurs (dont les 21 dirigeants syndicaux) sans tenir compte du privilège syndical. Elles ajoutent que le gouvernement n'a pas effectué d'enquête administrative en vue d'élucider les faits et de déterminer s'il y a eu violation de la liberté syndicale.
- 28. Dans leur communication de juillet 1992, les organisations plaignantes indiquent qu'un accord a finalement été conclu avec l'entreprise, prévoyant la réintégration d'une partie des dirigeants syndicaux licenciés, et que le gouvernement a pris une part active aux négociations qui ont abouti à l'accord final. Toutefois, elles critiquent l'attitude du gouvernement, qui persiste à ne pas entamer d'enquête et à ne pas se prononcer sur les faits qui ont été à l'origine du licenciement des dirigeants syndicaux; elles soutiennent en outre que ces licenciements obéissaient à des objectifs de persécution syndicale. Enfin, les organisations plaignantes affirment que le conflit qui s'est produit dans l'entreprise FUNSA démontre les lacunes du droit positif uruguayen en matière de protection des dirigeants syndicaux.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement
- 29. Dans sa communication du 14 janvier 1993, le gouvernement déclare qu'au vu du conflit existant entre l'entreprise FUNSA et son personnel le ministère du Travail et de la Sécurité sociale a engagé de longues et intenses négociations avec les deux parties (ce que fait ressortir la documentation annexée par le gouvernement: le ministère a ainsi organisé de nombreuses réunions, présenté des formules de règlement, demandé à l'entreprise de lui fournir des informations et inspecté les conditions de vie et de travail dans cette entreprise), afin de parvenir à un accord et qu'il a participé de façon décisive à l'accord final conclu le 18 mars 1992.
- 30. Le gouvernement signale que l'accord final a été le résultat d'une formule élaborée par les trois parties et il nie que le ministère du Travail ait accepté le licenciement de dirigeants syndicaux pendant le déroulement des négociations. De l'avis du gouvernement, les parties ont admis que les licenciements étaient dus à un excédent de main-d'oeuvre et il a considéré qu'il n'avait pas à se prononcer ni à entamer une enquête à cet égard, vu que des négociations étaient en cours entre les parties, qu'elles avaient abouti à un accord et qu'il ne lui appartenait donc pas de court-circuiter la volonté des parties. Le gouvernement déclare que, selon le rapport présenté par l'entreprise FUNSA à la demande du ministère du Travail sur sa situation et ses perspectives (que le gouvernement a annexé à sa communication), celle-ci est aux prises avec de graves difficultés d'adaptation aux marchés national et international (récession interne, importations de pneus à bas prix, baisse des exportations, etc.) qui l'ont amenée à réduire ses effectifs.
- 31. Enfin, le gouvernement signale qu'il faut tenir compte de la particularité du système uruguayen de relations professionnelles dans lequel il n'existe pas de normes en matière de droit syndical, d'où la nécessité d'établir des règles claires concernant la protection des dirigeants syndicaux, ainsi que le gouvernement l'a d'ailleurs envisagé dans les projets de loi qu'il a présentés au Parlement.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
- 32. En ce qui concerne les allégations relatives aux carences législatives de l'Uruguay en matière de protection contre la discrimination antisyndicale, le comité renvoie aux conclusions qu'il a formulées à ce sujet à sa session de mai 1992 dans le cadre du cas no 1596 relatif à l'Uruguay, qui étaient rédigées dans les termes suivants (voir 283e rapport, paragr. 372 et 373):
- En ce qui concerne l'allégation relative à l'absence de garanties législatives contre la discrimination antisyndicale, le comité a estimé à sa session de février 1990 que le système de protection contre les actes de discrimination antisyndicale actuellement en vigueur (amendes très lourdes en cas de licenciements antisyndicaux, ordre donné par l'administration à l'entreprise de réintégrer les travailleurs et possibilité de fermeture de l'entreprise), bien qu'il ne porte pas atteinte à la convention no 98, pourrait être amélioré en ce qui concerne l'accélération de la procédure. (Voir 270e rapport, cas no 1460 (Uruguay), paragr. 60.)
- Le comité a noté les raisons pour lesquelles le gouvernement juge opportun et nécessaire de soumettre à des règles claires et précises les différents aspects du droit collectif du travail qui ne font actuellement l'objet que de très rares normes législatives. A cet égard, le comité tient à signaler que son mandat consiste à déterminer si, concrètement, telle ou telle législation ou pratique est conforme aux principes de la liberté syndicale et de la négociation collective énoncés dans les conventions portant sur ces sujets, et qu'il ne lui appartient pas de se prononcer sur le modèle ou les caractéristiques - y compris le degré de réglementation légale - que doit suivre le système de relations professionnelles dans tel ou tel pays. Le comité demande au gouvernement de soumettre à la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations tout projet de loi sur la liberté syndicale et la négociation collective afin que la commission l'examine à la lumière des conventions nos 87 et 98.
- 33. Le comité observe que les autres allégations se rapportent au licenciement antisyndical de 52 travailleurs et de 21 dirigeants syndicaux de l'entreprise FUNSA, à la suite de diverses grèves accompagnées d'une occupation de l'usine dans le cadre d'un conflit collectif qui aurait commencé en avril 1991, ainsi qu'au refus du gouvernement d'entamer une enquête ou de se prononcer sur les faits qui auraient été à l'origine de ces licenciements de caractère antisyndical.
- 34. Le comité note que les organisations plaignantes (dans leur dernière communication) et le gouvernement s'accordent à affirmer que le ministère du Travail a pris une part active et décisive à la recherche d'une solution au conflit, ce qui a permis aux parties d'aboutir à un accord. A ce sujet, le comité note que, selon le gouvernement, les parties ont admis que les licenciements étaient dus à un excédent de main-d'oeuvre, et il a considéré qu'il n'avait pas à se prononcer ni à engager une enquête à ce sujet, vu que des négociations étaient en cours entre les parties, qu'elles avaient abouti à un accord et qu'il ne lui appartenait donc pas de court-circuiter la volonté des parties.
- 35. Le comité observe que l'accord signé par les parties prévoit la réintégration à leur poste de six dirigeants syndicaux, la création d'une coopérative (équipée d'un matériel cédé par l'entreprise) occupant 26 des travailleurs licenciés et l'indemnisation des autres travailleurs licenciés.
- 36. Dans ces conditions, les parties étant parvenues à un accord au sujet des licenciements qui a mis fin au conflit, le comité considère que cette plainte n'appelle pas un examen plus approfondi.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 37. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à décider que le présent cas n'appelle pas un examen plus approfondi.