139. Dans une communication en date du 23 août 1996, le Congrès du travail du Canada (CTC) a présenté une plainte en violation de la liberté syndicale contre le gouvernement du Canada (Ontario).
- 139. Dans une communication en date du 23 août 1996, le Congrès du travail du Canada (CTC) a présenté une plainte en violation de la liberté syndicale contre le gouvernement du Canada (Ontario).
- 140. Dans une communication en date du 12 septembre 1997, le gouvernement fédéral a transmis une réponse intérimaire du gouvernement de la province de l'Ontario.
- 141. Le Canada a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948. En revanche, il n'a ratifié ni la convention (no 11) sur le droit d'association (agriculture), 1921, ni la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, ni la convention (no 141) sur les organisations de travailleurs ruraux, 1975, ni la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978, ni la convention (no 154) sur la négociation collective, 1981.
A. Allégations de l'organisation plaignante
A. Allégations de l'organisation plaignante
- 142. Dans sa communication en date du 23 août 1996, le Congrès du travail du Canada, au nom de son organisation affiliée l'Union internationale des employés des services (SEIU), allègue que la loi de 1995 modifiant des lois sur les relations de travail et de l'emploi de l'Ontario (projet de loi 7) et la loi de 1995 sur les relations de travail (annexe A au projet de loi 7) violent les normes et les principes de l'OIT en matière de liberté syndicale et de négociation collective. L'organisation plaignante allègue en particulier que, selon la loi 7, les travailleurs agricoles, les travailleurs domestiques et ceux de certaines professions libérales (architectes, dentistes, arpenteurs-géomètres, avocats et médecins) se voient refuser l'accès à la négociation collective et au droit de grève. En outre, il a été mis fin aux droits d'organisation existants de ces travailleurs, leurs conventions collectives en vigueur ont été annulées, et les mesures de protection contre la discrimination antisyndicale ont été supprimées. Enfin, l'organisation plaignante ajoute que la loi 7 supprime les obligations de l'employeur (obligations du successeur) acquéreur d'une entreprise et des droits corollaires à l'égard des employés de la Couronne de l'Ontario et supprime la protection des travailleurs contre l'employeur successeur dans le secteur des services de la construction.
- 143. L'organisation plaignante affirme que ces mesures violent les termes précis de la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949, la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la convention (no 11) sur le droit d'association (agriculture), 1921, la convention (no 141) sur les organisations de travailleurs ruraux, 1975, la convention (no 154) sur la négociation collective, 1981, et la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978.
- 144. L'organisation plaignante précise que les droits des travailleurs à la négociation collective avec les employeurs de la province de l'Ontario découlent de la loi sur les relations de travail de l'Ontario ainsi que des autres lois réglementant la négociation collective pour les travailleurs de certains secteurs. La loi sur les relations de travail fixe les règles et procédures concernant la reconnaissance des syndicats en tant qu'agents négociateurs des travailleurs et la révocation de celle-ci, l'obligation des employeurs de négocier de bonne foi avec ces agents négociateurs en ce qui concerne les conditions d'emploi et diverses formes de protection, à savoir: l'interdiction pour l'employeur de s'ingérer dans les affaires des organisations syndicales; l'interdiction pour l'employeur de recourir à des actes d'intimidation et de coercition des travailleurs, y compris leur licenciement pour activités syndicales; la protection des droits à la négociation et des conventions collectives en cas de vente de l'entreprise; et d'autres protections importantes.
- 145. Les travailleurs non couverts par la loi sur les relations de travail ni par une autre loi réglementant la négociation collective sont exclus de la protection et du champ de la législation concernant la négociation collective et relèvent plutôt de la common law. Selon l'organisation plaignante, l'accès légal à la négociation collective vise à surmonter l'attitude hostile adoptée par certains tribunaux à l'encontre d'activités visant à organiser les syndicats et de tentatives de s'engager dans la négociation collective.
- 146. En vertu de la loi canadienne, sans la protection légale du droit d'organisation, de négociation collective et de grève offerte par la loi sur les relations de travail, y compris le mécanisme administratif de mise en oeuvre de ces droits, les travailleurs sont exposés à des sanctions (y compris au licenciement), aux poursuites légales dirigées contre eux pour divers actes de coalition (y compris pour le délit consistant à inciter directement ou indirectement à la rupture de contrat et pour conspiration tendant à inciter directement ou indirectement à une rupture de contrat). Les employeurs n'ont plus d'obligation légale de négocier avec les employés leurs conditions d'emploi. De surcroît, la common law ne reconnaît pas la force obligatoire des conventions collectives.
- 147. En conséquence, se voir refuser l'accès au mécanisme légal de la négociation collective revient à se voir refuser l'accès à une négociation collective digne de ce nom. En résumé, en écartant du champ du mécanisme légal une catégorie de travailleurs, celle-ci se voit refuser l'accès au droit d'organisation et à la négociation collective, à la protection contre les représailles de l'employeur dans les cas d'activité syndicale protégée et, enfin, au droit à établir des conventions collectives ayant force exécutoire.
- Travailleurs de l'agriculture et de l'horticulture, travailleurs domestiques et travailleurs de certaines professions
- 148. Le 10 novembre 1995, le gouvernement de l'Ontario a promulgué la loi de 1995 modifiant des lois sur les relations de travail et l'emploi (projet de loi 7). L'article 1, alinéa 2, de la loi 7 a abrogé la loi sur les relations de travail en vigueur et l'article 1, alinéa 1, a adopté le texte législatif qui la remplace, la loi de 1995 sur les relations de travail (comprise dans l'annexe A de la loi 7).
- 149. Le gouvernement antérieur de l'Ontario avait élargi la définition des travailleurs protégés par la loi sur les relations professionnelles pour y inclure les spécialistes de certaines professions libérales et les travailleurs domestiques par la loi 40 amendant la loi sur les relations de travail qui était entrée en vigueur le 1er janvier 1993.
- 150. Avec l'adoption de la loi sur les relations de travail dans l'agriculture, 1994 (loi 91), qui était entrée en vigueur le 23 juin 1994, un accès limité aux négociations collectives avait été accordé aux travailleurs de l'agriculture et de l'horticulture.
- 151. Selon l'organisation plaignante, les travailleurs agricoles et domestiques sont reconnus comme deux des groupes de travailleurs les plus vulnérables dans la province de l'Ontario. Durant la période écoulée entre l'adoption de la loi 40 en 1993 et de la loi 91 en 1994 et l'entrée en vigueur de la loi 7 en 1995, le droit d'organisation dans le secteur agricole de l'Ontario avait commencé dans le cadre de la loi sur les relations de travail dans l'agriculture. L'inclusion des travailleurs domestiques avait eu moins d'effets pratiques (en partie parce que la loi 40 contenait une disposition exigeant qu'une unité de négociation soit composée d'au moins deux travailleurs et n'avait adopté aucun mécanisme pour l'établissement de la négociation collective sectorielle). Les travailleurs des professions libérales tels que les avocats avaient commencé à s'organiser dans certains lieux de travail dans le cadre de la loi 40. En particulier, les avocats employés par le gouvernement de l'Ontario, par l'intermédiaire de leur agent de négociation, l'Association des juristes de la Couronne (ALOC), étaient devenus parties à une convention collective en mars 1995. Cependant, à la suite de l'adoption de la loi 7 et de la loi de 1995 sur les relations de travail par le gouvernement actuellement au pouvoir, l'accès des travailleurs agricoles, des travailleurs domestiques et des travailleurs de certaines professions libérales à la négociation collective est maintenant retiré, et les conventions collectives relatives à ces travailleurs ont été annulées.
- 152. L'article 3 a), b) et c) de la loi sur les relations de travail prévoit que la loi ne s'applique pas au domestique employé dans un foyer privé, à la personne qui est employée dans l'agriculture, à la chasse ou au piégeage (sauf si elle est au service d'une municipalité ou employée en sylviculture), à la personne qui est employée dans l'horticulture par un employeur dont l'entreprise principale est l'agriculture ou l'horticulture. L'article 1(3) a) prévoit que, pour l'application de la loi, nul n'est réputé employé s'il est architecte, dentiste, arpenteur-géomètre, avocat ou médecin habilité à exercer sa profession en Ontario et employé en cette qualité.
- 153. En outre, pour les travailleurs pour lesquels la loi de 1994 sur les relations de travail dans l'agriculture s'appliquait, l'article 80 de la loi 7 supprime aux agents négociateurs leurs droits à la négociation existants, annule toute convention collective existant pour ces travailleurs et met fin à toute procédure entamée au titre de la loi sur les relations de travail dans l'agriculture. De la même façon, l'article 7 de la loi 7 supprime légalement la reconnaissance dans les unités de négociation des organisations de travailleurs des professions libérales: architectes, dentistes, arpenteurs-géomètres, avocats ou médecins, et annule tout accord s'appliquant à ces travailleurs. L'article 7 a déjà eu pour effet: a) d'annuler les droits de négociation des avocats employés par le gouvernement de l'Ontario et de leur agent de négociation, l'ALOC, et b) d'annuler la convention collective conclue entre l'ALOC et le gouvernement de l'Ontario. Dans le cas des travailleurs domestiques, il n'existait pas encore de convention collective, de sorte qu'il n'a pas été nécessaire de mettre fin aux conventions collectives existantes comme dans le cas des travailleurs de l'agriculture et des professions libérales.
- 154. L'organisation plaignante déclare que l'exclusion des travailleurs de l'agriculture et de l'horticulture, des travailleurs domestiques et de certains membres des professions libérales du champ de la loi de 1995 sur les relations de travail, et l'annulation des droits existants à la négociation collective de ces travailleurs constitue un acte de discrimination sur la base de l'emploi de ces travailleurs et des exigences de la convention no 98. En outre, l'exclusion des travailleurs de l'agriculture empêche d'assurer à toutes les personnes engagées dans l'agriculture les mêmes droits d'association qu'aux travailleurs de l'industrie tels qu'ils découlent de la convention no 11.
- 155. L'organisation plaignante souligne qu'à la suite des amendements à la loi sur les relations de travail contenus dans la loi 7 les travailleurs de l'agriculture et de l'horticulture, les travailleurs domestiques et certains membres des professions libérales n'ont plus accès aux mécanismes et aux procédures établis par la loi pour faciliter la négociation collective. Les syndicats ne peuvent plus être accrédités comme agents négociateurs de ces travailleurs. A vrai dire, les dispositions transitoires des articles 7 et 80 de la loi 7 annulent les droits à la négociation existants des agents négociateurs en faveur de ces travailleurs. Les employeurs n'ont plus l'obligation légale de négocier avec les syndicats représentant les travailleurs en question ni, encore moins, de s'engager dans une négociation collective quelconque concernant les conditions d'emploi. L'organisation plaignante conclut que ces mesures violent les normes et principes de l'OIT concernant le droit d'organisation et la promotion du mécanisme de négociation collective.
- 156. Qui plus est, non seulement les travailleurs de l'agriculture, les travailleurs domestiques et les membres des professions libérales touchés sont exclus de la protection de la loi de 1995 sur les relations de travail, mais ils se voient refuser la protection contre la discrimination antisyndicale prévue par la loi. En outre, toute organisation de travailleurs constituée par des travailleurs exclus est dépourvue de protection contre les actes d'ingérence des employeurs, protection par ailleurs prévue dans la loi.
- 157. Les travailleurs exclus de la protection de la loi de 1995 sur les relations de travail n'ont pas le droit de grève et ne sont pas protégés contre les sanctions ou le licenciement en cas de grève. Selon l'organisation plaignante, la loi sur les relations de travail représente la seule garantie du maintien dans l'emploi des travailleurs en grève et, aux termes de la common law, les travailleurs ne sont pas protégés.
- 158. L'organisation plaignante déclare que le retrait du droit de grève aux travailleurs en les excluant de la protection de la loi sur les relations de travail n'est pas conforme aux principes de l'OIT régissant le droit de grève. En outre, le retrait du droit de grève n'a pas été accompagné d'un mécanisme approprié ou impartial de règlement des différends, tel que l'arbitrage.
- Obligations de l'employeur successeur envers les employés de la Couronne et les services de construction
- 159. Sur un autre point, l'organisation plaignante indique que, depuis plus de trente ans, la législation de l'Ontario relative aux relations de travail prévoit le maintien des droits de négociation d'un syndicat en cas de vente d'une entreprise (obligations du successeur) ou de restructuration de l'entreprise. Selon l'article 69(2) de la loi de 1995 sur les relations de travail, si une entreprise est vendue, le syndicat qui a été reconnu comme agent négociateur ou a donné ou est en droit de donner un avis demeure, jusqu'à déclaration contraire de la Commission des relations de travail, l'agent négociateur des employés de l'acheteur. La convention collective conclue entre les employés et l'employeur d'origine conserve sa force exécutoire pour l'employeur qui succède, et l'acheteur reste dans la situation du vendeur en ce qui concerne tous droits ou obligations conférés par la convention, y compris les droits à l'ancienneté et autres droits des employés.
- 160. La Commission des relations de travail de l'Ontario a décrit le raisonnement de cette disposition dans les termes suivants:
- L'article 69(2) reconnaît que les droits à la négociation collective une fois obtenus doivent avoir un certain caractère de permanence. Les droits créés soit par la loi soit par les conventions collectives ne peuvent disparaître avec un simple changement d'employeur. Afin de garantir une certaine permanence, les obligations découlant de ces droits ne sont pas attachées à un employeur en particulier, mais le deviennent à l'entreprise. Tant que l'entreprise fonctionne, les obligations la suivent indépendamment du changement de propriétaire.
- 161. Par ailleurs, en vertu de l'article 1(4) de la loi, la Commission des relations de travail a autorité pour considérer des employeurs liés ou associés comme un seul employeur pour l'application de la loi lorsque leurs activités sont exercées sous un contrôle ou une direction conjointe. Selon l'organisation plaignante, cette section a été adoptée pour éviter un effritement des droits à la négociation lorsque les entreprises ont une relation étroite.
- 162. En 1993, le précédent gouvernement de l'Ontario a adopté la loi sur la négociation collective des employés de la Couronne (LNCEC). L'article 10 de la LNCEC prévoyait que l'article 64, maintenant article 69(2) de la loi sur les relations de travail, s'appliquait aux employés de la Couronne en cas de transfert d'une entreprise, d'un employeur dont les employés étaient des employés de la Couronne et à qui la loi s'appliquait, à un autre employeur dont les employés n'étaient pas des employés de la Couronne; ou en cas de transfert d'une entreprise entre employeurs dont les employés sont des employés de la Couronne et qui relèvent de la loi. L'article 3 de la LNCEC prévoit que l'article 1(4) de la loi sur les relations de travail s'applique aux employés de la Couronne. Ces dispositions constituent d'une manière générale le maintien des dispositions relatives à la succession et aux questions connexes qui concernaient les employés de la Couronne depuis le début de l'adoption de la législation relative à la négociation collective des employés de la Couronne en Ontario en 1972.
- 163. L'actuel gouvernement de l'Ontario a maintenant supprimé les obligations de l'employeur acheteur pour les employés de la Couronne. Selon la loi 7, les articles 69 et 1(4) de la loi de 1995 sur les relations de travail ne s'appliquent plus aux employés de la Couronne. La loi 7 dispense la Couronne de l'application des dispositions concernant les successeurs lorsque la Couronne vend ou achète une entreprise à un autre employeur.
- 164. L'ancien gouvernement avait aussi modifié la loi sur les relations de travail en 1993 afin de prévoir la succession en faveur des employés du secteur des services de la construction. Les employés du secteur des services de la construction, tels que ceux affectés au nettoyage, à l'alimentation et aux services de sécurité des bâtiments, sont généralement employés par des sous-traitants qui offrent des services sur la base d'une soumission pour adjudication. Une fois que les employés d'un chantier déterminé se sont syndiqués, sans protection en cas de changement d'employeur, ils risquent de voir leur sécurité de l'emploi et leurs droits à la négociation sapés en cas de changement de fournisseur de services. Si les employés de l'entreprise d'origine sont nombreux sur le chantier, l'employeur original peut ne pas être en mesure de tous les intégrer ailleurs et peut donc les licencier. En outre, l'entreprise peut avoir à sa tête un nouvel employeur n'appartenant à aucune organisation.
- 165. Le gouvernement antérieur avait tenté de remédier à la situation en modifiant la loi de 1993 sur les relations de travail en y incluant un article 64(2) qui s'appliquait aux services fournis directement ou indirectement à un propriétaire ou à un gérant d'immeubles et ayant trait au nettoyage, à l'alimentation et aux services de sécurité, et qui prévoyait que la vente, avec toute la protection qui en découle pour les employés et l'agent négociateur, était considérée comme ayant eu lieu:
- a) si les employés accomplissaient des services dans des locaux qui sont leur lieu de travail principal;
- b) si leur employeur cessait en tout ou en partie d'assurer les services dans ces locaux; et
- c) si des services largement similaires étaient en conséquence fournis dans les locaux sous la direction d'un autre employeur.
- 166. Le but de cet article avait été résumé par la Commission des relations de travail de l'Ontario comme suit:
- a) Dans les entreprises qui dépendent des appels d'offres pour acquérir et conserver leur activité commerciale et où les services sont effectués chez le client, l'article 64(2) est conçu pour surmonter la perte de la préférence des employés pour un agent négociateur et, dans une certaine mesure, leur attachement à un lieu de travail particulier en préservant des aspects du statu quo en cas de cessation de contrat. Le soumissionnaire nouveau qui réussit sera tenu de reconnaître le droit des syndicats à la négociation sur le lieu de travail et d'appliquer les conditions d'emploi convenues par contrat.
- 167. L'actuel gouvernement de l'Ontario a maintenant supprimé la protection due au travailleur par l'employeur successeur dans le secteur des services de la construction en annulant expressément cet article à partir du 4 octobre 1995.
- 168. L'organisation plaignante affirme que les amendements à la LNCEC, qui suppriment l'application aux employés de la Couronne des dispositions de la loi sur les relations de travail relatives aux employeurs successeurs, auront pour effet de faire perdre complètement aux employés de la Couronne la protection conférée à la fois par les droits à la négociation collective et les droits aux conventions collectives en cas de vente, par la Couronne, de l'entreprise au secteur privé ou en cas de création d'un organisme lié à la Couronne chargé de réaliser des travaux effectués antérieurement par la Couronne. Il en est de même pour les travailleurs employés dans le secteur des services de la construction en cas de changement d'entrepreneurs.
- 169. L'organisation plaignante affirme que l'abrogation des dispositions relatives aux changements d'employeurs au sein d'une entreprise, afin que les travailleurs perdent la protection conférée à la fois par les droits à la négociation et les conventions collectives existantes, constitue une mesure incompatible avec les principes et les normes de la liberté syndicale et de la négociation collective.
- 170. En conclusion, l'organisation plaignante affirme que les mesures adoptées par le gouvernement de l'Ontario dans la loi de 1995 modifiant des lois en ce qui concerne les relations de travail et l'emploi et dans la loi de 1995 sur les relations de travail méconnaissent gravement les principes et les normes de l'OIT en matière de liberté syndicale et de négociation collective.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement
- 171. Dans sa communication en date du 12 septembre 1997, le gouvernement rappelle en premier lieu que le Syndicat international des travailleurs unis de l'alimentation et du commerce (SITUAC) a introduit un recours devant le tribunal de l'Ontario (division générale) afin de faire déclarer inconstitutionnelle la loi 7 au motif qu'elle viole la Charte canadienne des droits et libertés. Ce recours devrait être examiné les 21 et 23 octobre 1997. Le gouvernement estime que la portée et l'application du concept de liberté syndicale sont au c ur à la fois de la remise en question de la constitutionnalité sur le plan national et de la plainte déposée auprès de l'OIT. En outre, la question de l'égalité des droits soulève celle de savoir si un régime légal de relations professionnelles peut établir une distinction entre des groupes professionnels. De plus, le gouvernement est d'avis qu'étant donné que la plainte porte sur des droits accordés par la Constitution canadienne il convient qu'un tribunal ait la possibilité d'examiner les questions soulevées d'abord dans le cadre juridique national. Enfin, le gouvernement indique qu'il est possible que les preuves présentées durant la procédure judiciaire et les délibérations du tribunal fournissent des informations qui pourraient se révéler utiles au comité. Pour les raisons susmentionnées, le gouvernement souhaite que le comité reporte une nouvelle fois l'examen de la présente plainte jusqu'à ce que la Cour de l'Ontario se prononce sur ce cas. Il fournit toutefois les informations suivantes sous forme d'une réponse intérimaire en attendant les résultats de l'examen du cas constitutionnel soulevé par le SITUAC.
- 172. Le gouvernement indique ensuite qu'au vu de ce qui précède il n'a pas l'intention d'exposer sa position en détail, mais donne un aperçu des principes à l'origine des changements intervenus dans la loi 7. En ce qui concerne l'abrogation de la loi de 1994 sur les relations de travail dans l'agriculture, le gouvernement indique que l'agriculture en Ontario est largement dominée par des exploitations familiales. Ce secteur est donc caractérisé par des marges bénéficiaires extrêmement faibles et des relations de travail non structurées, hautement personnalisées qui rendent un régime légal de relations de travail (et le mécanisme de résolution des conflits ayant trait à la négociation collective en particulier) inapproprié. Les autres aspects de la loi 7 ayant fait l'objet de critiques sont le retour à certaines exclusions du champ d'application de la législation concernant les relations professionnelles sur la base de la profession et la suppression de l'application des dispositions relatives à la vente d'une entreprise dans laquelle intervient la Couronne et certaines transactions dans l'industrie de la construction. Sur le premier point, le gouvernement estime que la législation du travail conçue à l'origine pour les entreprises industrielles n'est pas toujours adaptée aux lieux de travail ne relevant pas de l'industrie, tels que les domiciles privés et les bureaux des professions libérales, où les tâches et les obligations professionnelles peuvent ne pas être compatibles avec les conditions d'emploi de nature formalisée, et tout du moins avec la nature antagoniste des relations qui caractérisent un milieu syndicalisé.
- 173. Le gouvernement confirme son attachement à la liberté de négociation collective. La loi 7 est conçue pour assurer un juste équilibre des pouvoirs entre les syndicats et les employeurs et pour favoriser les droits démocratiques des employés d'être représentés par un syndicat de leur choix. Cependant, le gouvernement indique que ce qui peut être acceptable, ou même ce qui peut être considéré comme une conséquence bénéfique de la syndicalisation dans un contexte industriel, peut se révéler contraire à l'intérêt public dans d'autres circonstances.
- 174. En ce qui concerne l'application des dispositions de la loi de 1995 sur les relations de travail de l'Ontario relatives à la vente d'une entreprise, le gouvernement fait remarquer que l'exclusion des employés de la Couronne (qui résulte du fait que la loi de 1993 sur la négociation collective des employés de la Couronne n'incorpore pas ces dispositions) ne leur retire en aucune manière le droit de se syndiquer et de créer une relation de négociation collective avec le nouvel employeur à la suite d'une vente. En outre, le gouvernement a prévu certaines obligations visant à protéger les droits des anciens employés de la Couronne en cas de vente. En ce qui concerne les transactions relatives à l'industrie des services de construction, qui étaient brièvement abordées par l'ancienne législation sur les relations de travail, ces transactions n'avaient pas historiquement été considérées comme constituant la vente d'une entreprise en premier lieu. Par ailleurs, de la même manière que pour les employés de la Couronne, rien n'empêche les anciens employés d'un entrepreneur de services de construction de se syndiquer et d'instaurer des droits à la négociation collective avec le nouvel entrepreneur. Ces employés ne sont pas exclus du droit de négocier collectivement.
- 175. Le gouvernement conclut en espérant que ces informations aideront le comité à formuler des conclusions intérimaires dans l'attente d'un nouvel examen, une fois que le recours en inconstitutionnalité de la loi déposé par le SITUAC sera rendu.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
- 176. Le comité note que le présent cas porte sur l'exclusion de travailleurs de l'agriculture, d'employés domestiques et de certains membres de professions libérales (architectes, dentistes, arpenteurs-géomètres, avocats et médecins) de la négociation collective et du droit de grève par l'intermédiaire de l'adoption de la loi de 1995 modifiant des lois en ce qui concerne les relations de travail et d'emploi de l'Ontario (la loi 7) et de la loi de 1995 sur les relations de travail de l'Ontario. L'organisation plaignante allègue en outre qu'avec l'adoption de la loi 7 les droits d'organisation existants de ces travailleurs ont été supprimés, les conventions collectives en vigueur ont été annulées et les mesures légales de protection contre la discrimination antisyndicale et l'ingérence de l'employeur ont été abrogées. Enfin, l'organisation plaignante allègue que la loi 7 supprime les obligations de l'employeur acquéreur d'une entreprise (obligations du successeur) pour les employés de la Couronne de l'Ontario et élimine les obligations de l'employeur successeur pour les travailleurs des services de la construction.
- 177. Premièrement, en ce qui concerne l'indication du gouvernement selon laquelle l'examen du présent cas devrait être reporté dans l'attente du résultat du recours en inconstitutionnalité présenté par le Syndicat international des travailleurs unis de l'alimentation et du commerce (SITUAC) devant la Cour de l'Ontario, le comité rappelle que, si le recours à la procédure judiciaire interne, quel qu'en soit le résultat, constitue un élément qui doit, certes, être pris en considération, le comité a toujours estimé, étant donné la nature de ses responsabilités, que sa compétence pour examiner les allégations n'est pas subordonnée à l'épuisement des procédures nationales de recours. (Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, annexe I, paragr. 33.) En outre, tout en étant sensible aux arguments du gouvernement, le comité estime, au contraire, qu'en examinant le cas (fondé sur une plainte d'août 1996) sur la base des principes internationaux de la liberté syndicale établis de longue date il peut faciliter un examen au plan national de la question à la lumière de ces principes.
- Travailleurs de l'agriculture, employés domestiques et membres de certaines professions libérales
- 178. Premièrement, le comité note que la loi de 1995 sur les relations de travail (LRT) ne s'applique pas aux travailleurs domestiques, aux personnes employées dans l'agriculture, la chasse ou le piégeage et aux personnes employées dans l'horticulture par un employeur dont l'entreprise principale est l'agriculture ou l'horticulture (art. 3 a), b) et c)). Les architectes, les dentistes, les arpenteurs-géomètres, les avocats et les médecins sont également exclus de la définition d'un "employé" aux fins de la LRT à l'article 1(3) a). Avant les amendements de 1995 apportés à la LRT par la loi 7, les travailleurs domestiques et les membres de professions libérales étaient protégés par la loi, et les travailleurs de l'agriculture et de l'horticulture étaient protégés par la LRT grâce à une référence à cette protection dans la loi de 1994 sur les relations de travail dans l'agriculture. Cette dernière a été abrogée par l'article 80 de la loi 7.
- 179. Le comité note que la LRT fixe les règles et procédures concernant la reconnaissance ou la non-reconnaissance des syndicats en tant qu'agents négociateurs pour les travailleurs, l'obligation pour les employeurs de négocier de bonne foi et diverses protections dont les suivantes: l'interdiction pour les employeurs de s'ingérer dans les activités syndicales et de prendre des mesures de discrimination antisyndicale, y compris le licenciement; le maintien des droits de négociation et de la validité des conventions collectives dans le cas de la vente d'une entreprise. En outre, les employés qui ne sont pas protégés par la LRT ou par une autre loi sont exclus de la protection et de la portée de la législation sur la négociation collective. Ils sont au contraire protégés par la common law qui, selon l'organisation plaignante, est défavorable pour les activités syndicales et la négociation collective et n'a pas reconnu la nature contraignante ou exécutoire des conventions collectives.
- 180. Au-delà de l'exclusion de la catégorie de travailleurs susmentionnée des diverses formes de protection accordées par la LRT, le comité note aussi que les articles 7 et 80 de la loi 7 mettent fin aux droits de négociation des agents négociateurs existants et annulent les conventions collectives en vigueur pour ces groupes. Selon l'organisation plaignante, les travailleurs du secteur agricole et certains membres des professions libérales avaient commencé à s'organiser, et certaines conventions collectives étaient entrées en vigueur durant la courte période s'étendant entre l'octroi des droits à la liberté syndicale et à la négociation collective à ces travailleurs et le retrait de ces droits par la loi 7.
- 181. Le comité note que le gouvernement, pour sa part, estime qu'un régime légal de relations de travail et des mécanismes de résolution des différends collectifs ne sont pas appropriés aux travaux agricoles et aux lieux de travail non industriels en raison des faibles marges bénéficiaires et des relations de travail non structurées et hautement personnalisées, dans un cas, et des obligations professionnelles, dans l'autre, qui peuvent ne pas être compatibles avec les conditions d'emploi formalisées et la nature quelque peu antagoniste des relations caractéristiques d'un milieu syndicalisé.
- 182. Le comité rappelle en premier lieu que l'article 2 de la convention no 87 (ratifiée par le Canada) consacre le principe de la non-discrimination en matière syndicale, et la formule "sans distinction d'aucune sorte" contenue dans cet article signifie que la liberté syndicale est reconnue sans discrimination d'aucune sorte tenant à la profession, etc. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 205.) En outre, en vertu des principes de la liberté syndicale, tous les travailleurs - à la seule exception des membres des forces armées et de la police - devraient avoir le droit de constituer des organisations de leur choix ainsi que celui de s'affilier à ces organisations. En ce qui concerne les travailleurs domestiques, le comité rappelle la position de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, selon laquelle, étant donné que ces travailleurs ne sont pas exclus de l'application de la convention no 87, ils doivent donc tous bénéficier des garanties offertes par la convention et avoir le droit de constituer des organisations professionnelles et de s'y affilier. (Voir Etude d'ensemble, liberté syndicale et négociation collective, 1994, paragr. 59.)
- 183. En outre, notant que l'exclusion des travailleurs de l'agriculture et des travailleurs domestiques et de certains membres de professions libérales signifie aussi que ces travailleurs ne sont pas protégés par les dispositions de la LRT accordant et protégeant le droit de grève, le comité rappelle qu'il a toujours reconnu aux travailleurs et à leurs organisations le droit de grève comme moyen légitime de défense de leurs intérêts économiques et sociaux. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 474.) Le droit de grève peut cependant être restreint, voire interdit: 1) dans la fonction publique uniquement pour les fonctionnaires qui exercent des fonctions d'autorité au nom de l'Etat; ou 2) dans les services essentiels au sens strict du terme (c'est-à-dire les services dont l'interruption mettrait en danger, dans l'ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne). (Voir Recueil, op. cit., paragr. 526.) Le comité a toujours été d'avis que les activités agricoles ne constituent pas des services essentiels. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 545.) En ce qui concerne la nature des "garanties appropriées" en cas de restriction de la grève dans les services essentiels et dans la fonction publique, la limitation du droit de grève devrait s'accompagner de procédures de conciliation et d'arbitrage appropriées, impartiales et expéditives, aux diverses étapes desquelles les intéressés devraient pouvoir participer, et dans lesquelles les sentences rendues devraient être appliquées entièrement et rapidement. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 547.)
- 184. Au vu des principes susmentionnés, le comité, se référant aussi aux commentaires adressés au gouvernement par la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations, invite le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour que les travailleurs de l'agriculture et de l'horticulture, les travailleurs domestiques, les architectes, les dentistes, les arpenteurs-géomètres, les avocats et les médecins bénéficient tous de la protection nécessaire, soit par l'intermédiaire de la LRT, soit par le moyen de règlements professionnels spécifiques pour pouvoir constituer des organisations de leur choix et s'y affilier. Il demande aussi au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte que le droit de grève ne soit pas refusé aux travailleurs de l'agriculture et de l'horticulture, aux travailleurs domestiques, aux architectes, aux arpenteurs-géomètres et aux avocats, et d'assurer des garanties compensatoires adéquates au cas où ce droit serait limité dans la profession médicale.
- 185. En ce qui concerne l'exclusion de ces travailleurs du mécanisme de la négociation collective établi par la LRT, le comité note l'affirmation de l'organisation plaignante selon laquelle les employeurs concernés ne sont plus dans aucune obligation légale de négocier avec les syndicats représentant les travailleurs concernés ni de s'engager dans une négociation quelconque concernant les conditions d'emploi. Par ailleurs, l'organisation plaignante allègue que ces travailleurs n'ont pas droit à la protection contre la discrimination antisyndicale et l'ingérence de l'employeur accordée par la LRT.
- 186. Sans négliger l'importance qu'il accorde à la nature volontaire de la négociation collective, le comité rappelle que des mesures devraient être prises pour encourager et promouvoir le développement et l'utilisation les plus larges de procédures de négociation volontaire de conventions collectives entre les employeurs et les organisations d'employeurs, d'une part, et les organisations de travailleurs, d'autre part, en vue de régler par ces moyens les conditions d'emploi. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 781.) En outre, les travaux préliminaires à l'adoption de la convention no 87 indiquent clairement que "l'un des buts principaux de la garantie de la liberté syndicale est de permettre aux employeurs et aux salariés de s'unir en organisations indépendantes des pouvoirs publics, capables de régler, par voie de conventions collectives librement conclues, les salaires et autres conditions d'emploi". (Voir Recueil, op. cit., paragr. 799.) En ce qui concerne la protection contre la discrimination antisyndicale, le comité note que l'article 81(1) de la loi 7 protège les travailleurs de l'agriculture contre la discrimination dans l'emploi uniquement si cette personne était membre d'un syndicat ou qu'elle avait exercé ou tenté d'exercer des droits prévus par la loi de 1994 sur les relations de travail dans l'agriculture qui a été par la suite abrogée par la loi de 1995. Il apparaît donc que toute activité syndicale menée par des travailleurs de l'agriculture après l'entrée en vigueur de la loi 7 ne serait plus protégée légalement pas plus que ne le seraient de telles activités menées par d'autres groupes de travailleurs non couverts par la disposition protectrice de la LRT. Le comité rappelle à cet égard la nécessité de garantir, par des dispositions précises accompagnées de garanties en matière civile et de sanctions suffisamment dissuasives, la protection des travailleurs contre les actes de discrimination antisyndicale émanant de l'employeur.
- 187. Le comité estime donc que l'absence d'un mécanisme légal de promotion de la négociation collective et l'absence de mesures précises de protection contre la discrimination antisyndicale et l'ingérence de l'employeur dans les activités syndicales constituent un obstacle à l'un des principaux objectifs visés en garantissant la liberté syndicale, à savoir la constitution d'organisations indépendantes capables de conclure des conventions collectives. Le comité demande au gouvernement de prendre toutes les mesures nécessaires pour que les travailleurs de l'agriculture et de l'horticulture, les travailleurs domestiques, les architectes, les dentistes, les arpenteurs-géomètres, les avocats et les médecins aient accès à un mécanisme et à des procédures qui facilitent la négociation collective et de faire en sorte que ces travailleurs jouissent effectivement d'une protection contre la discrimination antisyndicale et l'ingérence de l'employeur.
- 188. Notant en outre l'allégation de l'organisation plaignante, selon laquelle les organisations qui avaient déjà été créées et reconnues en tant qu'agents négociateurs dans le secteur de l'agriculture et parmi les membres des professions libérales (à la suite des amendements qui ont étendu l'application de la LRT à ces travailleurs) ont été privées de leur certificat et les conventions collectives annulées en vertu des articles 7(2) et 80(3) de la loi 7, le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte que leur reconnaissance soit garantie et de tenir le comité informé de l'évolution en la matière.
- 189. Enfin, notant que les conventions collectives relatives aux travailleurs de l'agriculture et aux membres de professions libérales qui étaient entrées en vigueur en vertu de la LRT d'avant 1995 ont été annulées en application des articles 7(3) et 80(2) de la loi 7, le comité rappelle que la suspension ou la dérogation - par voie de décret, sans l'accord des parties - de conventions collectives librement conclues est contraire aux principes de la libre négociation collective volontaire. (Voir Recueil, op. cit., paragr. 876.) Le comité demande donc au gouvernement de rétablir la validité des conventions collectives en question et de le tenir informé de l'évolution de la situation en la matière.
- Employés de la Couronne et services de construction
- 190. Le comité note que les articles 15 et 23 de la loi 7 abrogent les dispositions de la loi sur la négociation collective des employés de la Couronne (LNCEC) qui incorporaient certaines dispositions de la LRT en ce qui concerne les obligations de l'employeur acquéreur d'une entreprise (obligations du successeur). De la même façon, l'application des dispositions concernant les obligations du successeur aux services de construction est abrogée par la loi 7. Le comité prend dûment note de l'indication du gouvernement selon laquelle l'absence de dispositions applicables concernant les obligations du successeur n'enlève en rien le droit des employés de se syndiquer et de constituer une relation de négociation collective avec le nouvel employeur à la suite d'une vente, et que le gouvernement s'est engagé à protéger les droits des anciens employés de la Couronne en cas de vente.
- 191. En ce qui concerne les employés de la Couronne, tout en prenant note de l'indication du gouvernement selon laquelle ces employés, malgré l'absence de dispositions applicables à l'acquéreur d'une entreprise, continuent à jouir du droit syndical et de négociation collective avec le nouvel employeur après la vente de l'entreprise ou un changement d'entrepreneur, le comité remarque que de tels changements, en l'absence de garanties de protection suffisantes, peuvent occasionner une grave instabilité dans les relations de travail et constituer un danger pour l'exercice effectif du droit syndical. Le comité se félicite donc de l'indication du gouvernement selon laquelle il s'est engagé à protéger les droits des anciens employés de la Couronne en cas de vente.
- 192. Pour ce qui est des travailleurs de la construction et de la suppression des dispositions applicables en matière d'obligation du successeur, le comité prend note de l'indication du gouvernement selon laquelle les travailleurs des services de la construction conservent leurs droits d'organisation et de négociation collective. Cependant, le comité considère qu'en l'absence de mesures protectrices suffisantes, un nouvel entrepreneur pourrait prendre des mesures qui pourraient mettre en péril le droit d'organisation ainsi que les droits de négociation collective. Le comité prie donc le gouvernement de prendre des mesures pour assurer la protection adéquate de ces droits dans les services de la construction et de le tenir informé à cet égard.
- 193. Enfin, le comité attire l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations sur les aspects législatifs de ce cas.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 194. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) En ce qui concerne le déni du droit syndical aux travailleurs de l'agriculture et de l'horticulture, aux travailleurs domestiques, aux architectes, aux dentistes, aux arpenteurs-géomètres, aux avocats et aux médecins, le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte que ces travailleurs bénéficient tous de la protection nécessaire soit par l'intermédiaire de la LRT, soit par l'intermédiaire de règlements professionnels spécifiques pour pouvoir constituer des organisations de leur choix et de s'y affilier.
- b) En ce qui concerne le déni du droit de grève, le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte que ce droit ne soit pas refusé aux travailleurs de l'agriculture et de l'horticulture, aux travailleurs domestiques, aux architectes, aux arpenteurs-géomètres et aux avocats, et d'assurer des garanties compensatoires adéquates au cas où ce droit serait limité dans la profession médicale.
- c) En ce qui concerne le refus d'un mécanisme de négociation collective et l'absence de dispositions de protection contre la discrimination antisyndicale et l'ingérence de l'employeur pour les travailleurs de l'agriculture et de l'horticulture, les travailleurs domestiques, les architectes, les dentistes, les arpenteurs-géomètres, les avocats et les médecins, le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour garantir l'accès de ces travailleurs au mécanisme et aux procédures facilitant la négociation collective et de s'assurer que ces travailleurs jouissent effectivement d'une protection contre la discrimination antisyndicale et l'ingérence de l'employeur.
- d) En ce qui concerne la suppression de la reconnaissance des organisations des travailleurs de l'agriculture et de certaines professions spécifiées, en vertu des articles 7(2) et 80(3) de la loi 7, le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte que ces organisations retrouvent leur reconnaissance et de tenir le comité informé de l'évolution de la situation en la matière.
- e) En ce qui concerne l'annulation législative des conventions collectives, le comité demande au gouvernement de rétablir la validité des conventions collectives concernant les travailleurs de l'agriculture et les membres de professions libérales, qui étaient entrées en vigueur en vertu de la LRT avant 1995 et qui ont été par la suite annulées en application des articles 7(3) et 80(2) de la de loi 7 et de le tenir informé de l'évolution de la situation en la matière.
- f) Le comité demande au gouvernement de prendre des mesures en vue d'assurer la protection adéquate du droit d'organisation et des droits de négociation collective dans les services de la construction et de le tenir informé à cet égard.
- g) Le comité attire l'attention de la Commission d'experts pour l'application des conventions et recommandations sur les aspects législatifs de ce cas.