340. La plainte qui fait l'objet du présent cas figure dans une communication de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) datée du 11 mai 1998. Par une communication du 23 juillet 1998, la CISL a envoyé des informations supplémentaires. Le gouvernement a envoyé ses observations par une communication du 20 août 1998.
- 340. La plainte qui fait l'objet du présent cas figure dans une communication de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) datée du 11 mai 1998. Par une communication du 23 juillet 1998, la CISL a envoyé des informations supplémentaires. Le gouvernement a envoyé ses observations par une communication du 20 août 1998.
- 341. Le Costa Rica a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations de l'organisation plaignante
A. Allégations de l'organisation plaignante
- 342. Dans sa communication du 11 mai 1998, la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) fait savoir que, depuis plusieurs années, les institutions relatives au droit du travail sont progressivement démantelées au Costa Rica, au grand désarroi des travailleurs. La CISL indique que cette situation est devenue manifeste dans plusieurs entreprises comme, par exemple, l'entreprise Fertilizantes de Centroamérica SA (FERTICA), où la convention collective en vigueur a été violée et où les membres de la direction du syndicat ont tous été licenciés. La CISL ajoute qu'elle a présenté, à propos de ces actes commis au sein de l'entreprise FERTICA en 1995, une plainte contre le gouvernement du Costa Rica en 1996, plainte qui a été examinée par le comité lors de sa réunion de novembre 1996. (Voir 305e rapport, cas no 1879 (Costa Rica), paragr. 183 à 205.) L'organisation plaignante indique que le comité avait alors prié le gouvernement d'effectuer de nouvelles démarches auprès des parties en cause afin que soit rapidement résolu le conflit entre l'Association des travailleurs de FERTICA SA et l'entreprise elle-même, par voie de négociation et compte dûment tenu des dispositions des conventions nos 98 et 135, ratifiées par le Costa Rica. En particulier, le comité avait demandé la réintégration dans leurs postes de travail des travailleurs licenciés en raison de leur fonction ou affiliation syndicale, ainsi que le respect de la convention collective. La CISL allègue que ces recommandations du comité ont été dédaignées et négligées par le gouvernement du Costa Rica et par l'entreprise FERTICA SA.
- 343. L'organisation plaignante déclare que, outre le fait de ne pas avoir respecté les recommandations formulées par le comité lors de l'examen du cas susmentionné, l'entreprise FERTICA SA a commis de nouveaux actes de violation des droits syndicaux. Concrètement, la CISL allègue les actes antisyndicaux suivants:
- -- les dirigeants syndicaux ne peuvent accéder aux installations de l'entreprise; il leur est interdit de mener des actions de mobilisation et de tenir les réunions et assemblées du syndicat dans les locaux habituels, ainsi que de diffuser circulaires, brochures et convocations; de plus, les tableaux d'affichage du syndicat lui ont été retirés. Au vu de cette situation, le syndicat a envoyé des télégrammes aux travailleurs pour les convier à une assemblée extraordinaire destinée à réformer les statuts du syndicat. Mais l'entreprise a ouvert les télégrammes et ordonné leur renvoi, empêchant ainsi qu'ils parviennent à leurs destinataires. De même, persistant dans cette attitude consistant à bloquer et à rejeter toute communication émanant du syndicat, l'entreprise a refusé de recevoir le communiqué indiquant la composition du comité directeur de l'Association des travailleurs du secteur des engrais (ATFe);
- -- les autorités administratives n'ont pas donné suite au recours en appel relatif à l'applicabilité de la convention collective;
- -- le syndicat ATFe s'est adressé aux autorités judiciaires de Puntarenas à la suite d'un conflit à caractère économico-social survenu dans l'entreprise. Bien qu'une décision judiciaire ait donné l'ordre de ne pas effectuer de licenciements, l'entreprise a licencié les travailleurs en grève;
- -- l'entreprise a refusé de remettre à l'ATFe les cotisations syndicales de ses membres, retenues depuis mai 1996;
- -- l'entreprise a encouragé la création d'un comité directeur parallèle à celui de l'ATFe et lui a remis le montant des cotisations syndicales. L'organisation plaignante indique en outre que l'entreprise a encouragé, en son sein, la création d'une organisation syndicale dénommée "Syndicat des travailleurs de FERTICA" (SITRAFER), dont la direction est composée par les membres du comité directeur parallèle à celui de l'ATFe;
- -- l'entreprise a établi des listes noires où figurent les noms des membres du syndicat;
- -- elle a fait disparaître les fonds de pension qui avaient été créés par la convention collective et qui étaient la propriété des travailleurs, par suite de l'éviction des représentants des travailleurs, de l'administration des fonds, et de la mauvaise utilisation du capital.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement
- 344. Dans une communication datée du 20 août 1998, le gouvernement fait savoir, en ce qui concerne les allégations portant sur la non-application des recommandations du Comité de la liberté syndicale dans le cas no 1879 et sur les nouveaux faits constituant le présent cas no 1966, qu'il déplore l'attitude de l'organisation plaignante, laquelle a provoqué, en pleine transition gouvernementale, le réexamen du cas no 1879 par le comité, alors que ce cas avait déjà fait l'objet d'un rapport définitif de la part de cet organe de contrôle et avait reçu toute l'attention des autorités nationales. Selon le gouvernement, la simple lecture des prétendus faits nouveaux figurant dans la présente plainte examinée fait ressortir de manière évidente et manifeste la similitude de cause, d'objet et de parties que dans le cas no 1879. Pour cette raison, au vu de l'incohérence de la situation et soucieux d'informer le comité de la vérité des faits, le gouvernement tient à invoquer "l'exception de la chose jugée", compte tenu de ce que le Comité de la liberté syndicale avait déjà formulé des conclusions définitives, raison pour laquelle cette affaire avait été classée.
- 345. Le gouvernement indique que le Costa Rica, en tant qu'Etat de droit, est tenu pour un modèle de démocratie et de paix pour avoir accompli, au fil des ans, des mutations substantielles qui ont éliminé, entre autres, des obstacles juridiques au plein exercice des droits en matière de travail. Des efforts sont effectués au Costa Rica pour garantir le libre exercice des droits de l'homme fondamentaux et celui des droits des travailleurs reconnus au niveau international.
- 346. Le gouvernement fait savoir qu'il ignore les raisons pour lesquelles le secteur syndical, largement représenté au sein du Forum national de concertation (créé par décision présidentielle), ne s'est pas tenu à l'attitude de dialogue à laquelle il s'était engagé auprès de cette institution. En effet, ni les registres du Forum de concertation, ni les registres tenus par le ministère du Travail et de la Sécurité sociale ne font état d'une plainte analogue à celle qui a été présentée au comité, même s'il s'agissait d'une "chose jugée". Le gouvernement ajoute qu'il convient de souligner que, depuis son entrée en fonctions le 8 mai 1998, le ministre du Travail et de la Sécurité sociale a traité toutes les affaires à caractère social qui ont été portées à sa connaissance, et que les autorités administratives sont demeurées ouvertes au dialogue et à la concertation, de même que tous les secteurs de la société, en vue d'atteindre la paix sociale. Selon le gouvernement, le cas no 1879 et les prétendus "faits nouveaux" ont toujours été traités dans le cadre de l'Etat de droit, en observant fidèlement l'ordre juridique en vigueur et la pratique en matière de travail; c'est pourquoi on ne peut raisonnablement affirmer qu'il y ait violation ou non-respect des droits des travailleurs.
- 347. En ce qui concerne l'allégation relative à la non-application des recommandations formulées par le comité dans le cas no 1879, le gouvernement fait savoir que les autorités ont observé dans le détail et avec diligence les recommandations figurant dans le 305e rapport du comité. Concrètement, en ce qui concerne la recommandation faite au gouvernement d'effectuer de nouvelles démarches auprès des parties afin que soit rapidement résolu le conflit entre l'Association des travailleurs de FERTICA SA et l'entreprise elle-même, par voie de négociation et compte dûment tenu des dispositions des conventions nos 98 et 135, ratifiées par le Costa Rica, et en particulier que soient réintégrés dans leurs postes de travail tous les travailleurs licenciés en raison de leur fonction ou affiliation syndicale, ainsi que le respect de la convention collective, le gouvernement indique que le ministère du Travail, après avoir constaté les pratiques antisyndicales et la violation de la convention collective par l'entreprise dénoncée, a renvoyé l'affaire devant les tribunaux pour qu'il soit statué définitivement, en demandant que soient imposées à l'entreprise des sanctions et la réparation des torts qu'elle a causés, en sus de la réintégration immédiate des travailleurs licenciés, du versement des salaires en souffrance et du rétablissement des droits qui ont été violés. Le gouvernement ajoute que, selon l'ordre juridique du Costa Rica, il appartient aux tribunaux d'ordonner, dans le cas d'espèce, la réintégration des travailleurs. Dans le présent cas, le gouvernement a fait fonction de médiateur, faisant droit aux recommandations du comité et insistant auprès des parties pour qu'elles les appliquent, ainsi qu'il l'a démontré par les démarches de conciliation effectuées au ministère. Cependant, le gouvernement s'abstient lorsqu'il s'agit d'imposer des mesures relevant des tribunaux.
- 348. Le gouvernement manifeste son attachement aux principes de l'OIT. Afin de poursuivre sa contribution à la solution du conflit, le pouvoir exécutif a demandé à la Direction des affaires du travail du ministère du Travail et de la Sécurité sociale, par la note no DM-006-97 du 6 janvier 1997, d'effectuer les démarches pertinentes afin d'amener les parties à une conciliation et de tenter d'obtenir la réintégration dans leurs postes de travail de tous les travailleurs licenciés en raison de leur fonction ou affiliation syndicale, ainsi que le respect de la convention collective, compte dûment tenu des dispositions des conventions nos 98 et 135, ratifiées par le Costa Rica. En application de ce qui précède, une réunion s'est tenue le 9 janvier 1997 au ministère du Travail et de la Sécurité sociale, avec la participation de représentants du ministère et de représentants des travailleurs. Il ressort du compte rendu de la réunion que la direction de l'entreprise, bien qu'elle n'ait pas, sur le moment, envoyé de représentants, a envoyé au ministère la note no GG-013-97, datée du 8 janvier 1997, pour solliciter un report à une date ultérieure afin de préparer ses arguments Sa demande n'avait pas pour but de refuser d'assister à la réunion susmentionnée mais d'éclaircir certains éléments essentiels à l'examen de cette affaire. La nouvelle comparution a également eu lieu au ministère. Les parties patronale (représentée par M. le directeur général) et syndicale, après avoir remercié le ministère pour sa médiation dans cette affaire, se sont donné pour tâche de trouver une solution. Le gouvernement déclare que la diligence dont ont fait preuve les autorités administratives tout au long de la procédure est, une fois de plus, démontrée.
- 349. Selon le gouvernement, la Direction nationale de l'inspection du travail a été le principal organe qui, en vertu d'une délégation juridique, a procédé, par les voies légales pertinentes, aux enquêtes et aux démarches relatives aux actes de violation examinés ici; cependant, l'organisation plaignante prétend faire valoir ses droits par deux voies, une voie nationale et une voie internationale, sans avoir épuisé les voies de recours pertinentes, ignorant de manière évidente l'Etat de droit en vigueur au Costa Rica.
- 350. Le gouvernement indique que nombre des faits examinés, considérés cas par cas, ont été analysés par voie administrative, judiciaire et internationale, ou seulement administrative, et qu'ils prétendent être connus seulement par voie internationale, comme c'est le cas de la présente plainte, sans qu'aient été épuisées les voies proposées par l'ordre juridique du Costa Rica pour résoudre les litiges. Le gouvernement déclare qu'en effet, lors de l'examen du cas no 1879, le comité avait déjà pris connaissance et s'était prononcé sur les suites données par les autorités nationales compétentes aux plaintes déposées par l'ATFe aux mois d'août, septembre et octobre 1995, ainsi que sur le rapport qu'avaient rendu à cet effet les inspecteurs mandatés par la Direction nationale de l'inspection du travail, organe du ministère du Travail et de la Sécurité sociale, en date du 20 novembre 1995, et sur l'action judiciaire pertinente entamée par les autorités administratives susmentionnées contre l'entreprise FERTICA, en date du 30 août 1996. A cet égard, le gouvernement résume brièvement les actes judiciaires les plus importants rendus par les tribunaux dans cette affaire. Le gouvernement informe en détail des procédures pénales introduites contre l'entreprise FERTICA SA pour infraction aux lois du travail et de la sécurité sociale, et des actions qu'il a finalement prescrites.
- 351. Le gouvernement indique qu'en date du 5 septembre 1996 l'ATFe a présenté à la Direction nationale de l'inspection du travail une nouvelle plainte contre l'entreprise FERTICA SA pour pratiques déloyales en matière de travail, et que l'inspectrice du travail chargée de l'enquête sur infraction alléguée aux lois du travail et de la sécurité sociale dans l'entreprise a indiqué ce qui suit dans son rapport:
- 1) "Le 8 avril 1996, des employés de l'entreprise se trouvant dans la loge des gardiens ont refusé de recevoir, de la part des employés des postes et télécommunications, les télégrammes envoyés par l'ATFe pour convoquer l'assemblée des membres de celle-ci qui travaillent dans l'entreprise"; 2) conformément aux témoignages et aux pièces déposées, on peut établir que l'entreprise FERTICA a permis que les travailleurs membres de l'ATFe participassent à une assemblée pour élire un nouveau comité directeur, bien qu'il existât un comité directeur en fonctions, enregistré auprès du Service des organisations sociales et, par conséquent, doté de la personnalité juridique; 3) selon les déclarations de certains employés de l'entreprise, ce nouveau comité est légitime pour FERTICA et, de ce fait, c'est en sa faveur que sont virés les chèques correspondant aux cotisations des membres du syndicat et à d'autres rubriques; 4) il a pu être établi que l'entreprise FERTICA refuse de reconnaître le comité directeur de l'ATFe actuellement en fonctions, bien qu'elle ait la personnalité juridique et que M. Marcos Guzmán Rodriguez soit son secrétaire général, ce qui lui a été communiqué plusieurs fois par écrit; 5) il a pu être établi que bien que l'organisation syndicale légalement constituée ait demandé plusieurs fois à l'entreprise qu'elle lui remette les chèques correspondant aux cotisations syndicales, l'entreprise a refusé de le faire et a remis le montant de ces cotisations à un autre groupe qui n'est pas légalement enregistré; 6) du fait que l'entreprise persiste à reconnaître le comité directeur parallèle, le syndicat ATFe se voit lésé par le manque de revenus et la difficulté à être identifié, de plus il se trouve dans l'impossibilité de remplir ses obligations légales, par exemple lorsqu'il s'agit de faire rapport sur ses activités financières. Par conséquent, l'enquête étant conclue, et compte tenu des preuves écrites et des témoignages présentés par les parties, les éléments fournis amènent à établir que l'entreprise FERTICA s'est livrée à des pratiques déloyales, comme le fait d'avoir favorisé la création d'un comité directeur parallèle à celui déjà en fonctions, de même que le refus injustifié de procéder à la négociation collective conformément et en application des procédures légales en vigueur et, enfin, le fait de retenir les cotisations ordinaires des membres du syndicat et de les remettre à un autre groupe ou comité directeur non reconnu sur le plan juridique.
- (Le gouvernement joint à sa réponse copie de l'enquête administrative).
- 352. Le gouvernement signale que ce rapport a été transmis aux deux parties et que l'entreprise FERTICA SA a déposé à son encontre un recours en annulation et un recours en appel. Par une décision du 3 novembre 1996, la Direction nationale de l'inspection du travail a décidé, "en application du vote constitutionnel no 4298-97 du 23 juillet 1997, à 16 h 45, lequel est erga omnes, et après examen du rapport de l'inspectrice du travail, de poursuivre l'entreprise pour pratiques déloyales en matière de travail (refus de restituer les cotisations syndicales et entraves à l'activité syndicale)..." En désaccord avec cette décision, le représentant de FERTICA SA a déposé à son encontre un recours en annulation. La Direction nationale de l'inspection du travail, par une décision de décembre 1997, a rejeté en bloc les recours déposés. En désaccord avec le contenu de cette deuxième décision, le représentant de l'entreprise a présenté un recours en annulation absolue à son encontre et à l'encontre de toutes les actions entreprises jusqu'alors, et a déposé des recours par lesquels il demande l'annulation des deux décisions susmentionnées en reprenant les arguments indiqués antérieurement. Par une décision du 5 décembre 1997, la Direction nationale de l'inspection du travail a enjoint la partie patronale de s'en tenir aux décisions prises quant aux recours susmentionnés. Par la décision no 077-98 du 23 mars 1998, le cabinet du ministre du Travail et de la Sécurité sociale a rejeté les recours en annulation concomitants déposés par la direction de l'entreprise à l'encontre des résolutions nos DNI-1894-97 et DNI-2095-97 susmentionnées de la Direction nationale de l'inspection du travail.
- 353. En ce qui concerne les prétendus "faits nouveaux" allégués, le gouvernement déclare ce qui suit:
- -- en ce qui concerne l'absence de décision, de la part des autorités administratives, sur le recours relatif à l'applicabilité de la convention collective, l'Association des travailleurs de FERTICA (ATFe) a présenté au ministère du Travail et de la Sécurité sociale, le 6 août 1996, copie d'une "dénonciation avec demande de prorogation" de la convention collective de travail, en demandant qu'elle soit homologuée. Une fois effectuées les démarches de conciliation entre les parties et au vu du manque d'intérêt de l'entreprise FERTICA SA pour une nouvelle convention, le Département des relations professionnelles a répondu à la demande initiale par la décision du 7 mai 1997 rejetant la demande du syndicat. Cependant, par la suite, le même département a révoqué la dénonciation en question par une nouvelle décision, datée du 21 mai 1997, et a considéré que la convention collective de travail en question était prorogée. Devant cette nouvelle décision, l'entreprise FERTICA SA a déposé des recours en révocation, en appel et en annulation, qui ont été rejetés le 23 mars 1998 par décision du ministre du Travail et de la Sécurité sociale confirmant la prorogation de la convention collective de travail. Par conséquent, le gouvernement affirme que le ministère du Travail et de la Sécurité sociale a confirmé que la convention collective conclue le 15 septembre 1994 entre FERTICA et l'ATFe était toujours en vigueur;
- -- en ce qui concerne les licenciements qui ont fait suite à un conflit économico-social malgré l'existence d'un ordre judiciaire interdisant leur exécution, le gouvernement signale -- sans aller jusqu'à vérifier la réalité des faits, étant donné que l'organisation plaignante a choisi d'élucider l'affaire auprès de l'OIT sans en référer au préalable aux instances nationales compétentes pour que soit appliquée la procédure relative à l'ensemble des accusations -- que ce fait concerne une désobéissance supposée, de la part de la direction de l'entreprise, à un ordre judiciaire. Le gouvernement considère que l'organisation plaignante doit, pour se défendre contre ces prétendus actes anormaux, recourir aux voies légales proposées par l'ordre juridique national, dans les délais et de la manière prévus par les normes en vigueur;
- -- en ce qui concerne les allégations relatives à l'interdiction faite aux dirigeants syndicaux de l'ATFe d'accéder aux installations de l'entreprise, à l'interdiction de mener des actions de mobilisation et de tenir les réunions et assemblées du syndicat dans les locaux habituels, au retrait des tableaux d'affichage et à l'interdiction de diffuser les circulaires et brochures du syndicat, à l'ouverture des télégrammes adressés aux membres de l'ATFe, au refus de recevoir le communiqué relatif à la composition du comité directeur de l'ATFe et à la retenue des cotisations syndicales de l'ATFe, le gouvernement indique que l'organisation plaignante abonde en considérations subjectives sur les faits constatés par le rapport de l'Inspection du travail susmentionné;
- -- quant à la création d'un comité directeur parallèle à celui de l'ATFe, le gouvernement indique qu'il procède à l'évaluation de certains éléments analysés par le rapport susmentionné de l'Inspection du travail;
- -- quant à la création du syndicat SITRAFER, que l'organisation plaignante qualifie de "syndicat jaune", le gouvernement s'abstient de se prononcer étant donné qu'il s'agit d'une organisation dûment enregistrée et qui, à ce jour, n'a fait l'objet d'aucune procédure administrative visant à vérifier la réalité des faits dénoncés;
- -- en ce qui concerne l'allégation relative à l'établissement de listes noires, le gouvernement signale qu'il n'en a pas la certitude et qu'il s'agit d'un "fait non prouvé", selon les indications du rapport de l'Inspection du travail;
- -- quant aux allégations relatives à la disparition des fonds de pension des travailleurs, le gouvernement précise qu'il s'agit de charges émises à l'encontre de l'entreprise FERTICA SA et sur lesquelles le gouvernement s'abstient de se prononcer, car, pour ce faire, il est nécessaire au préalable que soit instituée une procédure visant à établir la véracité des faits allégués, garantissant aux parties impliquées le droit à une bonne administration de la justice et à la légitime défense.
- 354. En dernier lieu, le gouvernement estime avoir démontré que l'organisation plaignante méconnaît de manière évidente et manifeste l'Etat de droit et, en particulier, les voies de résolution des litiges, aussi bien administratives que judiciaires, garanties par l'ordre juridique national. Quoi qu'il en soit, le gouvernement estime qu'il a démontré son attachement constant à la recherche de solutions pour atteindre la paix sociale par le dialogue social et la concertation, et rejette l'ensemble de la plainte relative à la non-application des recommandations du Comité de la liberté syndicale lors de l'examen du cas no 1879. Il en va de même pour l'existence supposée de "faits nouveaux", dont certains pourraient éventuellement avoir eu lieu, mais dont le gouvernement n'a pas la certitude car il se trouve sans défense à cause de l'utilisation, par les plaignants, d'une "double voie" (nationale et internationale) pour élucider l'affaire.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité
- 355. Le comité note que, dans le présent cas, l'organisation plaignante allègue que le gouvernement n'a pas appliqué les recommandations formulées par le comité lorsque celui-ci a examiné une plainte déposée précédemment contre le gouvernement du Costa Rica, où figuraient des allégations de licenciements antisyndicaux et de violation de convention collective par l'entreprise FERTICA SA. (Voir 305e rapport, cas no 1879, paragr. 183 à 205.) De même, le comité note que l'organisation plaignante allègue de nouveaux actes de violation des droits syndicaux au sein de l'entreprise FERTICA SA. Selon ces nouvelles allégations, la direction de l'entreprise: 1) empêche l'accès des dirigeants syndicaux de l'ATFe aux installations de l'entreprise et interdit au syndicat de mener des actions de mobilisation et de tenir ses réunions et assemblées; 2) a retiré les tableaux d'affichage du syndicat et empêché la diffusion des circulaires, brochures et convocations; 3) a empêché que les télégrammes destinés aux membres de l'ATFe soient remis à leurs destinataires; 4) a refusé de recevoir le communiqué relatif à la composition du comité directeur de l'ATFe; 5) a licencié des travailleurs en grève malgré une décision de justice contraire; 6) a refusé de remettre à l'ATFe les cotisations syndicales de ses membres; 7) a privilégié la constitution d'un comité directeur parallèle à celui de l'ATFe et la création d'une organisation syndicale dénommée "Syndicat des travailleurs de FERTICA" (SITRAFER); 8) a établi des listes noires où figurent les noms des membres du syndicat; 9) a fait disparaître les fonds de pension des travailleurs qui avaient été créés par la convention collective. Enfin, le comité note que l'organisation plaignante allègue que les autorités administratives ne procèdent pas à la résolution du recours en appel portant sur l'application de la convention collective dans l'entreprise FERTICA SA.
- Non-application des recommandations du comité dans le cas no 1879
- 356. En ce qui concerne l'allégation relative à la non-application des recommandations formulées lors de l'examen du cas no 1879, le comité rappelle qu'à cette occasion, après avoir déploré l'existence de diverses pratiques déloyales et actions antisyndicales (qui avaient été constatées par l'Inspection du travail), il avait prié le gouvernement "d'effectuer de nouvelles démarches auprès des parties en cause afin que soit rapidement résolu le conflit entre l'Association des travailleurs de FERTICA SA et l'entreprise elle-même, par voie de négociation et compte dûment tenu des dispositions des conventions nos 98 et 135, ratifiées par le Costa Rica. En particulier, le comité avait demandé la réintégration dans leurs postes de travail des travailleurs licenciés en raison de leur fonction ou affiliation syndicale (les licenciements avaient touché tous les membres du comité directeur de l'Association des travailleurs et 265 affiliés), ainsi que le respect de la convention collective." (Voir 305e rapport, paragr. 205 a).)
- 357. Le comité note que le gouvernement déclare à ce sujet qu'il a observé dans le détail et avec diligence les recommandations formulées par le comité, et qu'il a pris, à cet effet, les mesures suivantes: i) après avoir constaté les pratiques antisyndicales et la violation de la convention collective par l'entreprise dénoncée, il a renvoyé l'affaire aux autorités judiciaires, en demandant que soient imposées à l'entreprise des sanctions et la réparation des torts qu'elle a causés, en sus de la réintégration immédiate des travailleurs licenciés, du versement des salaires en souffrance et du rétablissement des droits qui ont été violés (le gouvernement indique que, selon l'ordre juridique du Costa Rica, il appartient aux tribunaux d'ordonner, dans le cas d'espèce, la réintégration des travailleurs en question); ii) le pouvoir exécutif a demandé à la Direction des affaires du travail du ministère du Travail et de la Sécurité sociale d'effectuer les démarches pertinentes afin d'amener les parties à une conciliation et a tenté d'obtenir la réintégration des travailleurs licenciés, de même que le respect de la convention collective; c'est ainsi que les parties ont été convoquées à une réunion destinée à trouver une solution au conflit.
- 358. A cet égard, le comité note que, malgré les tentatives effectuées par les autorités administratives pour rapprocher les parties, aucun des membres du comité directeur de l'ATFe ou des 265 membres du syndicat licenciés pour leurs activités syndicales en septembre 1995 (voir 305e rapport, paragr. 200) n'a été réintégré à son poste de travail, la convention collective de travail n'a pas été appliquée, les démarches effectuées auprès de l'entreprise n'ont pas donné de résultat et la procédure judiciaire visant au rétablissement des droits violés n'a pas été conclue. Dans ces conditions, le comité demande instamment au gouvernement de prendre de nouvelles mesures pour appliquer sans retard les conclusions et les recommandations formulées lors de la réunion de novembre 1996 et de le tenir informé à cet égard. De même, le comité se doit de signaler qu'il se trouve, une fois de plus, devant un cas de retard dans l'administration de la justice, étant donné que les faits dénoncés par l'organisation plaignante datent de 1995. Par conséquent, le comité rappelle, comme il l'a fait lors du premier examen de ces allégations (voir 305e rapport, paragr. 200), que "les affaires soulevant des questions de discrimination antisyndicale contraire à la convention no 98 devraient être examinées promptement afin que les mesures correctives nécessaires puissent être réellement efficaces. Une lenteur excessive dans le traitement des cas de discrimination antisyndicale et, en particulier, l'absence de jugement pendant un long délai dans les procès relatifs à la réintégration des dirigeants syndicaux licenciés équivalent à un déni de justice et, par conséquent, à une violation des droits syndicaux des intéressés." A cette occasion, le comité avait également exprimé sa préoccupation, vu la lenteur et le peu d'efficacité des procédures dans un nombre de cas considérable, et prié le gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour garantir que ces procédures soient rapidement diligentées.
- Allégations relatives à de nouvelles violations des droits syndicaux au sein de l'entreprise FERTICA SA
- 359. En ce qui concerne les allégations relatives à de nouveaux actes de violation des droits syndicaux qui auraient été commis dans l'entreprise FERTICA SA après l'examen du cas no 1879, le comité note que l'organisation plaignante et le gouvernement s'accordent sur l'existence de certains de ces actes (selon ce qui ressort de la réponse du gouvernement, à laquelle est jointe copie d'une enquête administrative menée par l'Inspection générale du travail, où il est établi que l'entreprise FERTICA SA s'est livrée à des pratiques déloyales vu que: 1) des employés de l'entreprise n'ont pas pu recevoir les télégrammes envoyés par l'ATFe pour convoquer l'assemblée de ses membres; 2) l'entreprise a refusé de reconnaître le comité directeur en fonctions; 3) l'entreprise a favorisé la création d'un autre comité directeur, parallèle au comité susmentionné; 4) l'entreprise a refusé de manière injustifiée de procéder à une négociation collective conformément aux procédures légales instituées).
- 360. Le comité déplore vivement que les rapports entre le syndicat et l'entreprise se soient encore davantage détériorés, des pratiques antisyndicales ayant, une fois de plus, été constatées. Dans ces conditions, le comité demande instamment au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que soit reconnu le comité directeur de l'ATFe en fonctions et pour que les cotisations syndicales de tous ses membres lui soient remises. De même, le comité signale à l'attention du gouvernement que l'intervention d'un employeur dans le but d'encourager la création d'un comité directeur syndical, ainsi que l'interférence de l'employeur dans la correspondance d'un syndicat, constituent des actes qui violent gravement les principes de la liberté syndicale. Le comité demande donc au gouvernement de prendre des mesures pour que de tels actes ne se reproduisent pas à l'avenir et pour garantir les droits syndicaux du comité directeur en fonctions.
- 361. Quant à l'allégation relative au fait que les autorités administratives ne donnent pas suite au recours portant sur l'application de la convention collective dans l'entreprise FERTICA SA, le comité note que le gouvernement indique que: i) en août 1996, l'ATFe a présenté au ministère du Travail et de la Sécurité sociale copie de la "dénonciation avec demande de prorogation" de la convention collective en vue de son homologation; le comité est conscient de ce que le terme "homologation" a une signification différente selon les pays, mais il souligne que l'approbation des conventions collectives par les autorités devrait se limiter au contrôle du respect des normes minima prévues dans la législation; ii) une fois effectuées les démarches de conciliation entre les parties et au vu du manque d'intérêt de l'entreprise, le Département des relations professionnelles a, le 7 mai 1997, rejeté la demande du syndicat; iii) par la suite, le 21 mai 1997, le même département a pris une décision révoquant ce rejet et a considéré que la convention collective en question était prorogée; iv) l'entreprise a déposé des recours en révocation, appel et annulation contre cette décision; v) le 23 mars 1998, les autorités administratives ont rejeté les recours déposés par l'entreprise, et le ministre du Travail a confirmé la prorogation de la convention collective conclue le 15 septembre 1994. Dans ces conditions, le comité demande au gouvernement de veiller à ce que l'entreprise respecte la convention collective.
- 362. De même, le comité note qu'il ressort du rapport de l'Inspection du travail susmentionné que l'existence de listes noires où figurent les noms des travailleurs ayant participé à des grèves ou autres activités syndicales n'a pas été prouvée, et que le fait que "les représentants de l'entreprise soient responsables de l'élimination et de la destruction des affiches et communiqués élaborés et placés dans l'entreprise par le syndicat ATFe" n'a pas davantage été prouvé. Enfin, le comité note que l'entreprise FERTICA SA a déposé contre le rapport de l'Inspection du travail divers recours administratifs, qui ont été rejetés.
- 363. En ce qui concerne les autres allégations présentées, le comité note ce qui suit:
- -- pour ce qui est de l'interdiction faite aux dirigeants syndicaux de l'ATFe d'accéder aux installations de l'entreprise, ainsi que de l'interdiction de mener des actions de mobilisation et de tenir réunions et assemblées dans les locaux habituels, le comité note que l'enquête effectuée par l'Inspection du travail ne fait pas référence à ces allégations;
- -- pour ce qui est de l'allégation relative à de nouveaux licenciements qui auraient été commis par l'entreprise FERTICA SA à la suite d'un conflit économico-social, malgré une décision de justice lui ordonnant de ne pas licencier, le comité note que le gouvernement déclare que ce fait concerne un refus d'obéissance supposée, de la part de la direction de l'entreprise, à une décision de justice et que l'organisation plaignante devrait, pour se défendre des conséquences de ces actes anormaux, recourir aux voies légales de l'ordre juridique national. Le comité demande au gouvernement d'assurer que cette décision de justice est appliquée;
- -- pour ce qui est de la grave allégation relative à l'encouragement de la création de l'organisation syndicale SITRAFER au sein de l'entreprise FERTICA SA, le comité note que le gouvernement s'abstient de se prononcer, au motif qu'il s'agit d'une organisation dûment enregistrée et qui, à ce jour, n'a fait l'objet d'aucune procédure administrative de vérification de la réalité des allégations déposées;
- -- pour ce qui est de l'allégation selon laquelle l'entreprise FERTICA SA aurait fait disparaître les fonds de pension qui avaient été créés par la convention collective et qui étaient la propriété des travailleurs, le comité note que le gouvernement se contente de signaler qu'il ne formulera pas de commentaires à ce sujet car, pour ce faire, il est nécessaire au préalable qu'une procédure visant à déterminer la véracité des faits soit instituée.
- Dans ces conditions, le comité regrette que le gouvernement n'ait envoyé que des observations très générales sur ces allégations et lui demande de prendre les mesures nécessaires pour que soient diligentées sans délai des enquêtes détaillées afin de vérifier la véracité des faits allégués. Le comité demande également au gouvernement de le tenir informé du résultat de ces enquêtes.
- 364. Enfin, en ce qui concerne les affirmations du gouvernement selon lesquelles les plaignants auraient dû épuiser les procédures nationales, le comité rappelle que, si le recours à la procédure judiciaire interne, quel qu'en soit le résultat, constitue un élément qui doit, certes, être pris en considération, il a toujours estimé étant donné la nature de ses responsabilités que sa compétence pour examiner les allégations n'est pas subordonnée à l'épuisement des procédures nationales de recours.
Recommandation du comité
Recommandation du comité
- 365. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d'administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Le comité demande instamment au gouvernement de prendre de nouvelles mesures pour que soient appliquées sans retard les conclusions et recommandations formulées lors de la réunion de novembre 1996 relatives au cas no 1879 concernant l'entreprise FERTICA SA. Il demande au gouvernement de réintégrer dans leurs postes de travail des travailleurs licenciés en raison de leur fonction ou affiliation syndicale (les licenciements avaient touché tous les membres du comité directeur de l'Association des travailleurs et 265 affiliés), ainsi que de respecter la convention collective. (Voir 305e rapport, paragr. 205 a).) Le comité demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard.
- b) Le comité exprime sa préoccupation face à la lenteur et à l'absence de décision de justice pendant une longue période, ce qui équivaut à un déni de justice, et au peu d'efficacité, dans un nombre de cas considérable, des procédures relatives à des actes de discrimination antisyndicale. Il demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour garantir que ces procédures soient rapidement diligentées.
- c) Le comité déplore vivement que l'entreprise FERTICA SA se soit livrée, une fois de plus, à des pratiques antisyndicales et demande instamment au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que soit reconnu le comité directeur de l'ATFe en fonctions et que les cotisations syndicales de tous ses membres lui soient remises. De même, rappelant que l'intervention d'un employeur dans le but d'encourager la création d'un comité directeur syndical et l'interférence dans la correspondance d'un syndicat constituent des actes qui violent gravement les principes de la liberté syndicale, le comité demande au gouvernement de prendre des mesures pour que de tels actes ne se reproduisent pas à l'avenir, et de garantir l'exercice des droits syndicaux du comité directeur en fonctions.
- d) Notant que les autorités administratives ont confirmé en 1998 la prorogation de la convention collective en vigueur, le comité demande au gouvernement de veiller à ce que l'entreprise respecte la convention collective en vigueur.
- e) En ce qui concerne les allégations relatives aux faits suivants: interdiction aux dirigeants syndicaux de l'ATFe d'accéder aux installations de l'entreprise et interdiction de mener des actions de mobilisation et de tenir des réunions et assemblées dans les locaux habituels, licenciements effectués par l'entreprise FERTICA SA à la suite d'un conflit économico-social malgré une décision de justice en sens contraire, encouragement de la création de l'organisation syndicale SITRAFER au sein de l'entreprise FERTICA SA, disparition du fonds de pension créé par la convention collective et qui était la propriété des travailleurs, le comité demande au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que soient diligentées sans délai des enquêtes détaillées sur l'ensemble de ces allégations afin que soit appliquée la décision de justice ordonnant que les licenciements dans l'entreprise FERTICA SA n'aient pas lieu et de le tenir informé du résultat de ces enquêtes.