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- 617. La plainte figure dans une communication de l’Association départementale des employés et ouvriers municipaux de Canelones (ADEOM) en date du 16 juin 2001 qui, dans un second temps, a envoyé d’autres documents pour étayer cette plainte. Le gouvernement a fait parvenir ses observations dans une communication en date du 23 août 2001.
- 618. L’Uruguay a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, et la convention (nº 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978.
A. Allégations du plaignant
A. Allégations du plaignant- 619. Dans sa communication du 16 juin 2001, l’ADEOM allègue que la Direction des services municipaux de Canelones (IMC) qui, depuis les années cinquante, retenait la cotisation syndicale de la paie de ses agents, a émis le 9 juin 2000 la directive no 562/2000 adressée à la Direction générale des finances qui se lit comme suit: «Eu égard au besoin de rationalisation des retenues faites sur le salaire des agents, je vous prie de cesser le prélèvement automatique des cotisations syndicales, sans exception aucune, à partir du versement des salaires du mois de juin de cette année.» Le plaignant affirme que cette modification nuit gravement au syndicat (la Direction des services municipaux compte 200 lieux de travail) et à ses adhérents qui bénéficient de services sociaux et sanitaires, de conseils juridiques, de formation, etc. Les tribunaux de première et de deuxième instance ont jugé cet ordre contraire à la Constitution nationale et aux conventions nos 87, 98 et 151, toutefois il n’a toujours pas été suspendu.
- 620. Le jugement de première instance, à la suite d’un recours en amparo, précise que «l’IMC -- des services municipaux -- ont manifestement agi de façon arbitraire», il «ordonne à l’IMC de continuer à prélever les cotisations syndicales, et prescrit «la suspension définitive de la mise en oeuvre ou de l’exécution de la décision contestée (directive no 562/2000)». En deuxième instance, l’autorité judiciaire juge cette directive «manifestement illégale car elle limite l’exercice [...] d’un droit reconnu par la Constitution de la République (art. 57) sans motivation suffisante [...]»; «cette directive [...] influe négativement sur le financement de l’activité propre de l’[...] ADEOM [...] et constitue une ingérence dans son organisation administrative qui viole la garantie consacrée par l’article 3 de la convention no 87 de l’OIT et l’article 2 de la convention no 98 de l’OIT [...] et par la convention no 151 de l’OIT»; [la suspension de la décision administrative contestée sera temporaire tant que les voies de recours administratif ne seront pas épuisées et que, le cas échéant, le Tribunal du contentieux administratif n’aura pas statué.
- 621. Postérieurement, l’organisation plaignante a présenté un autre recours en amparo devant l’autorité judiciaire contre une nouvelle directive (no 3866 du 31 juillet 2001) de l’IMC qui interdisait à nouveau la retenue syndicale (et d’autres retenues à partir du 1er avril 2002) malgré un décret du conseil provincial (no 16/2001 du 9 mars 2001) ordonnant de retenir la cotisation syndicale de la façon suivante: «les agents des services municipaux émargeant au budget, les bénéficiaires de contrats de durée déterminée ou les ouvriers agricoles qui sont affiliés ou s’affilieront à l’ADEOM peuvent demander, par écrit, à la Direction générale des finances que soit prélevée mensuellement une somme au titre de leur cotisation à ce syndicat. [...] Dès réception de la demande signée par l’agent, la Direction générale des finances sera tenue de prélever un montant correspondant à la cotisation à l’ADEOM sur le salaire du mois au cours duquel a été présentée la demande. [...] Cette autorisation de prélèvement sera considérée comme valable tant que la Direction générale des finances n’en aura pas été informée autrement que par écrit par l’intéressé.» Dans un jugement en date du 17 septembre 2001, l’autorité judiciaire a fait droit à la demande en amparo de l’ADEOM (organisation plaignante) et critiqué sévèrement la conduite des services municipaux et:
- ...ordonné à l’IMC (en la personne de son chef) de rétablir dans les trois (3) jours, sans exception, la retenue de la cotisation syndicale des agents municipaux affiliés à l’ADEOM de Canelones et de remettre ce montant à la partie intéressée, en respectant les conditions déjà prescrites par le décret du conseil provincial de Canelones no 16/2001 (fs. 7-8). S’agissant de la résolution no 3866/2001 de l’IMC dont la demande en amparo est acceptée, l’administration défenderesse devra s’abstenir de l’exécuter pour ce qui est des retenues des cotisations syndicales des membres de l’ADEOM de Canelones et décréter sa suspension préventive et conditionnelle jusqu’à ce que la question soit tranchée par le Tribunal du contentieux administratif.
- 622. Enfin, l’organisation plaignante allègue que le 27 octobre 2000, la Direction générale du personnel et des ressources humaines de l’IMC a publié la directive no 007/2000 qui se lit comme suit:
- Dans le cadre du réaménagement en cours et de la réaffectation des fonctions, la Direction générale du personnel et des ressources humaines estime souhaitable de faciliter au plan administratif la situation des dirigeants de l’ADEOM de façon qu’ils puissent exercer librement leurs activités syndicales.
- Il est donc communiqué à toutes les directions générales, aux conseils locaux et aux services annexes locaux, que l’obligation d’attestation d’activités syndicales est supprimée, et que sont dispensés de faire constater leur présence les seuls participants à la commission provinciale de l’ADEOM ou leur suppléant, lorsque le titulaire demande l’autorisation de ne pas s’acquitter de ses activités syndicales à la présente direction générale.
- Cette décision montre que seuls les neuf participants du comité directeur de l’ADEOM sont autorisés à exercer une activité syndicale (l’IMC compte au total 1 750 travailleurs répartis dans 200 endroits). Les autres syndicalistes se trouvent donc dans l’impossibilité de se livrer à une action syndicale.
- B. Réponse du gouvernement
- 623. Dans sa communication datée du 23 août 2001, le gouvernement déclare que l’IMC réfute les allégations dans un document qui précise que la décision administrative, qui a mis fin à la retenue automatique des cotisations syndicales, n’émane pas du secrétariat général mais bien de l’IMC qui a compétence juridique pour ce type d’acte, que le secrétariat général ne fait que contresigner et diffuser. L’IMC affirme que la loi no 13100 autorise le trésorier à effectuer des retenues après accord des intéressés, qui n’a pas été donné par ceux-ci mais bien par le syndicat dont l’autorisation est jugée insuffisante; il ajoute que ce genre de prélèvement constitue une faculté et non une obligation pour l’organe. Pour justifier la suppression de ce prélèvement automatique, l’IMC invoque le caractère insaisissable des salaires et la créance qu’il représente pour le salarié en vertu des articles 8 et 10 de la convention internationale du travail no 95. Quant au comportement de l’IMC, s’agissant de l’application des décisions figurant dans les deux jugements dont les photocopies sont jointes à la plainte, une documentation digne de foi montre que, le 11 octobre 2000, l’IMC a respecté la décision de première instance en remettant au représentant du syndicat le montant des cotisations déduites des salaires des mois de juillet et août 2000 et que, le 25 du même mois, il a remis le montant de la cotisation correspondant au mois de septembre. Le syndicat n’a pas présenté de recours administratif contre la décision de l’IMC relative à la suppression du prélèvement automatique de la cotisation qui, de ce fait, est devenu un acte administratif définitif et applicable. En l’absence de recours, il est impossible d’épuiser les possibilités offertes par la voie administrative pour saisir le Tribunal du contentieux administratif, juridiction compétente et susceptible d’annuler la décision. Des recours, dont aucune copie ne figure dans le dossier, ont été présentés par des personnes physiques, MM. Juan del Hoyo del Puerto, Daniel Roberto Ferreri, Juan José et Alfredo Cabrera, demandeurs de l’action en amparo étudiée en première instance. Par conséquent, l’IMC applique effectivement le jugement émis en deuxième instance par la Cour d’appel et retient, provisoirement, les quotes-parts syndicales des quatre personnes précitées pour les remettre au syndicat, en attendant l’aboutissement du recours présenté devant l’administration et éventuellement devant le Tribunal du contentieux administratif.
- 624. Dans la phase actuelle du recours administratif, il va être demandé au plaignant et au défendeur de fournir les preuves qu’ils détiennent ou que détiennent des tiers.
- 625. S’agissant du fond de la question, le gouvernement déclare que l’IMC est l’organe exécutif du gouvernement provincial de Canelones, l’une des 19 juridictions politico-administratives de la République orientale de l’Uruguay. Canelones se trouve au Nord-Est de Montevideo. Il s’agit de la deuxième province la plus peuplée du pays qui dispose effectivement, comme l’indique la plainte, de conseils locaux disséminés sur le territoire de la province ayant compétence en matière d’administration.
- 626. En tant que gouvernement provincial, le conseil provincial de Canelones a édicté des actes législatifs prévus par la Constitution de la République ou par la loi organique municipale, qui a force de loi dans sa juridiction, et il n’est pas visé par les lois du Parlement national qui sortent de ce champ de compétences.
- 627. En tant qu’organe faisant partie de l’administration centrale, le ministère du Travail et de la Sécurité sociale n’a pas compétence pour surveiller ou sanctionner les gouvernements provinciaux au cas où ils ne satisferaient pas à leurs obligations vis-à-vis de leurs agents. Toute contestation de leurs décisions doit se faire par le biais des recours administratifs, des moyens de protection qu’offre leur statut, à savoir l’amparo, et, éventuellement, d’une demande d’annulation judiciaire lorsque les recours ne produisent pas d’effet. Indépendamment de cela, la figure internationale de l’Etat et le poids des valeurs politiques et sociales en jeu justifient que l’intervention active réalisée par ce ministère soit portée à la connaissance du comité.
- 628. Dans la juridiction de Canelones, aucun des décrets provinciaux, dispositions ayant force de loi émanant du conseil provincial, ne traite des cotisations syndicales des employés ou ouvriers de l’IMC. Les dispositions légales exceptionnelles émanant du Parlement national ne sont pas applicables au gouvernement provincial; à titre d’information, le texte fusionné et révisé de l’article 1 de la loi no 13100 du 18 juin 1962 et l’article 52 de la loi no 13349 du 29 juin 1965, qui ont donné l’article 173 du règlement de la fonction publique (TOFUP), décret du pouvoir exécutif no 200/997 du 18 juin 1997 dispose que: «Autorisation légale. Le Département des finances, des approvisionnements et de la comptabilité du ministère de l’Elevage, de l’Agriculture et le la Pêche, est autorisé à retenir et à verser mensuellement à l’association des fonctionnaires de cet organisme, après approbation de la part de l’adhérent, le montant de sa cotisation. Cette disposition vaut pour toutes les organisations de fonctionnaires de l’Etat qui ont, ou obtiendront, la personnalité juridique et sera respectée par les bureaux ou sections intéressés qui représentent les institutions.»
- 629. Dans le même sens, l’article 368 du TOFUP dispose que: «Retenues de la cotisation syndicale. Toutes les organisations de fonctionnaires de l’Etat qui ont, ou obtiendront, la personnalité juridique pourront faire retenir un montant correspondant à la cotisation syndicale sur le salaire de leurs adhérents, conformément à ce que stipule l’article 173 de ce même texte.»
- 630. L’application discutable, par analogie, de ces dispositions au gouvernement provincial de Canelones, donne raison à ce dernier à deux titres: en premier lieu, il est nécessaire d’obtenir l’accord de l’adhérent avant de prélever la cotisation syndicale, une demande faite ou émanant du syndicat ne suffisant pas; en deuxième lieu, l’organisation est autorisée mais non obligée à effectuer le prélèvement et le versement de la cotisation syndicale.
- 631. Outre les lois de la République visant à protéger le salaire, il est également pertinent, comme le fait l’IMC, de citer les articles 8 et 10 de la convention internationale du travail no 95, selon lesquels des retenues sur des salaires ne seront autorisées que dans des conditions et limites prescrites par la législation nationale ou fixées par une convention collective ou une sentence arbitrale et que le salaire ne pourra faire l’objet de saisie ou de cession que selon les modalités et dans les limites prescrites par la législation nationale. Il convient de noter qu’il n’existe pas de convention collective entre l’IMC et l’ADEOM de Canelones.
- 632. L’article 144 du TOFUP établit que: «Autorisation légale. Il est établi comme principe général que les retenues sur salaire n’auront lieu qu’à condition qu’il existe une disposition légale les autorisant expressément.»
- 633. Contrairement à l’organisation plaignante, qui s’est fondée sur les articles 2 et 3 de la convention internationale du travail no 87, 1 et 2 de la convention internationale du travail no 98 et 4, 5 et 9 de la convention internationale du travail no 151, le gouvernement n’estime pas illégal l’acte administratif qui a porté à la suppression du prélèvement de la cotisation syndicale
- 634. Cet acte d’administration ne limite ni n’entrave l’organisation des travailleurs dans son droit d’élaborer ses statuts, d’élire librement ses représentants, d’organiser sa gestion et ses activités et de formuler son programme d’action (article 3 de la convention no 87).
- 635. Il ne s’agit pas non plus d’un acte de discrimination tendant à porter atteinte à la liberté syndicale en matière d’emploi, pas plus que d’un acte d’ingérence dans la formation, le fonctionnement ou l’administration de l’organisation des travailleurs (articles 1 et 2 de la convention no 98, 4 et 5 de la convention no 151), ni d’une entrave aux droits politiques et civils essentiels pour l’exercice normal de l’activité syndicale (article 9 de la convention no 151).
- 636. La difficulté que peut éprouver l’organisation de travailleurs à recouvrer les cotisations d’adhérents dispersés dans la province est compréhensible, quoique surmontable, et l’acte de l’IMC ne constitue pas une ingérence indue dans l’organisation, tout comme il ne saurait être assimilé au gel du compte du syndicat, puisque l’IMC n’a gardé aucun avoir appartenant au syndicat.
- 637. Quant à savoir si la suppression de la possibilité de la retenue est susceptible de causer des difficultés financières aux organisations syndicales et nuit à l’instauration de relations professionnelles harmonieuses, le gouvernement convient qu’il serait souhaitable d’éviter semblable modification. Toutefois, il n’est pas moins certain que, dans le cas présent, aucune loi ou convention collective ne rend obligatoire cette pratique coutumière observée jusqu’à l’année passée.
- 638. De l’examen du dossier administratif il n’apparaît nullement que les adhérents au syndicat aient demandé, avant la décision de l’IMC, le prélèvement et le virement de leur cotisation à l’organisation syndicale ni que l’administration avait refusé de réaliser ces opérations si elle avait disposé d’une autorisation écrite expresse.
- 639. L’interruption du prélèvement de la cotisation syndicale va dans le sens de la rationalisation de l’administration et de la gestion financière voulues par le gouvernement provincial: sans aval express du travailleur, il est impossible d’effectuer ce prélèvement, qu’il soit ou non demandé par le syndicat; il s’agirait d’un acte illégal susceptible de faire l’objet d’une plainte de la part de l’employé lésé et d’engager la responsabilité financière de l’administration. C’est pourquoi, tant au plan du droit que des méthodes de gestion financière, la retenue de la cotisation syndicale doit se faire exclusivement avec l’accord express du travailleur intéressé.
- 640. S’agissant des allégations relatives à la directive no 007/2000, qui dispense de faire constater leur présence, les seuls participants à la commission provinciale d’ADEOM ou leurs remplaçants, lorsque les titulaires ne peuvent s’acquitter de leurs fonctions syndicales, il s’agit d’une question en suspens en attendant l’étude des preuves et la conclusion de l’enquête administrative; le gouvernement enverra périodiquement des informations à ce sujet ainsi qu’au sujet des mesures qu’il aura prises. Par ailleurs, le gouvernement rappelle au comité que l’Uruguay ne dispose pas d’une législation nationale sur le droit syndical.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité- 641. S’agissant de l’allégation concernant l’arrêt du prélèvement sur les salaires des cotisations syndicales de l’organisation plaignante (pratiqué depuis les années cinquante), par suite de différentes décisions des services municipaux de Canelones, en date des 9 juin 2000 et 31 juillet 2001, le comité prend note des observations des services municipaux relatives aux allégations (pour l’an 2000), selon lesquelles: 1) l’accord des intéressés est nécessaire (une communication du syndicat ne suffit pas); 2) le prélèvement est contraire à la convention (nº 95) sur la protection du salaire, 1949; 3) les services municipaux ont respecté le jugement de première instance relatif au paiement des cotisations syndicales et versé les montants correspondant aux mois de juillet, août et septembre 2000; 4) l’organisation plaignante n’a pas présenté de recours administratif contre la décision des services municipaux, et l’acte administratif a acquis un caractère définitif; 5) s’agissant du jugement de deuxième instance, les services municipaux remettent au syndicat, à titre temporaire, les cotisations des quatre personnes qui ont adressé un recours administratif et se sont mises sous le couvert de l’action en amparo, demandée en première instance, jusqu’à ce que soit résolue la question par la voie administrative ou, éventuellement, par le Tribunal du contentieux administratif.
- 642. Le comité prend note des observations du gouvernement selon lesquelles: 1) les questions du ressort du conseil provincial de Canelones ne relèvent pas de la législation émanant du Parlement national; 2) dans la juridiction de Canelones, il n’existe pas de disposition ayant force de loi («décrets provinciaux») relative aux cotisations syndicales des agents des services publics; 3) certaines dispositions (exceptionnelles) émanant du Parlement national, qui ont trait aux cotisations, ne s’appliquent pas à l’échelon provincial; de toute façon, selon ces dispositions, il est indispensable d’obtenir l’accord des adhérents avant de prélever une cotisation syndicale (une demande ou une autorisation du syndicat ne suffit pas), et l’organe en question a la faculté, et non l’obligation, d’exécuter ce prélèvement et virement de la cotisation syndicale; 4) en vertu de la convention (nº 95) sur la protection du salaire, 1949, les retenues sur les salaires ne sont autorisées que dans les limites prescrites par la législation nationale ou fixées par une convention collective ou une sentence arbitrale (ce qui ne concerne pas le présent cas puisque, jusqu’à l’an passé, cette pratique tenait de la coutume); 5) les pièces figurant dans le dossier de l’administration ne montrent pas, qu’avant la décision des services municipaux, les adhérents au syndicat avaient demandé de prélever et de verser leur cotisation à un représentant de l’organisation syndicale ni que les services municipaux aient refusé d’avance de l’effectuer, avec l’accord écrit express des intéressés. Pour cette raison, le gouvernement estime que l’acte administratif portant cessation de la retenue de la cotisation syndicale n’est pas illégal et ne constitue pas un acte de discrimination antisyndicale (le prélèvement peut se faire par d’autres moyens). Tout en reconnaissant la spécificité de la structure politique et de l’organisation des différents pays, le comité tient à rappeler que, lorsqu’un Etat décide d’adhérer à l’OIT, le gouvernement a l’obligation de s’assurer que les principes de la liberté syndicale sont pleinement respectés.
- 643. Le comité souligne que l’opinion du gouvernement ne coïncide pas avec celle de l’autorité judiciaire dont les jugements ont ordonné aux services municipaux de réaliser les prélèvements et virements des cotisations syndicales, critiqué sévèrement la cessation de ces services la qualifiant d’illégale, et décrété la suspension, à titre préventif et conditionnel, des décisions administratives (interdisant le prélèvement des cotisations syndicales), jusqu’à ce que se soit prononcé le Tribunal du contentieux administratif.
- 644. Le comité observe que la décision des services municipaux de Canelones de refuser le prélèvement des cotisations syndicales ne semble pas avoir été prise en consultation avec l’organisation syndicale. Le comité observe également que les jugements postérieurs de l’autorité judiciaire ordonnent la poursuite de ces prélèvements jusqu’à nouvel ordre. Cette pratique existait depuis les années cinquante et, lorsque l’autorité judiciaire a critiqué la première décision administrative interdisant la retenue, les services municipaux en ont adopté une seconde allant dans le même sens que la première. Qui plus est, au sujet de l’observation faite par le gouvernement qu’«il n’est pas établi -- que les adhérents au syndicat aient demandé le prélèvement ...» «... et qu’une demande ou une autorisation émanant du syndicat ne suffit pas», il convient de faire remarquer qu’effectivement l’accord des adhérents est une condition préalable au prélèvement des cotisations syndicales mentionnées explicitement dans la directive du conseil provincial no 16/2001, qui n’a toutefois pas été appliquée par les services municipaux dans leur décision no 3866. Plutôt que de chercher une solution avec l’organisation plaignante et de vérifier l’existence d’un accord des adhérents, les services municipaux ont pris des décisions administratives empêchant de retenir les cotisations syndicales. A ce sujet, le comité a signalé, lors d’occasions antérieures, que «la suppression de la possibilité de retenir les cotisations à la source, qui pourrait déboucher sur des difficultés financières pour les organisations syndicales, n’est pas propice à l’instauration de relations professionnelles harmonieuses et devrait donc être évitée». [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 435.]
- 645. Dans ces conditions, le comité conclut que les services municipaux de Canelones ont eu une conduite antisyndicale en cessant unilatéralement et arbitrairement de retenir les cotisations syndicales de l’organisation plaignante, et les invite instamment, tout comme l’a fait l’autorité judiciaire, à prélever les cotisations syndicales du salaire des adhérents ayant marqué, d’une façon ou d’une autre, leur accord. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé de tout nouveau jugement prononcé à ce sujet.
- 646. Par ailleurs, s’agissant de la directive no 007/2000, qui autorise les seuls participants de l’organisation plaignante à la commission provinciale, ou leurs suppléants, à se livrer à des activités syndicales, le comité prend note que le gouvernement fournira des informations à ce sujet et au sujet des mesures qu’il prendra une fois terminée l’étude du dossier administratif. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé à ce sujet.
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 647. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Le comité conclut que les services municipaux de Canelones ont eu une conduite antisyndicale en cessant, de façon unilatérale et arbitraire, de prélever les cotisations syndicales de l’organisation plaignante, et les invite à retenir la cotisation syndicale du salaire des adhérents qui ont exprimé leur accord, d’une façon ou d’une autre, à ce sujet. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé de tout nouveau jugement prononcé à ce propos.
- b) S’agissant de la directive no 007/2000, qui n’autorise que les seuls participants de l’organisation plaignante à la commission provinciale, ou leurs suppléants, à s’absenter pour raison syndicale, le comité prend note que le gouvernement donnera des informations à ce sujet et au sujet des mesures prises une fois terminé l’examen du dossier administratif. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé à ce sujet.