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- 477. La plainte faisant l’objet du présent cas figure dans des communications de la Confédération démocratique du travail (CDT) en date des 3 et 28 décembre 2001.
- 478. Le gouvernement a fait parvenir ses observations dans une communication du 5 février 2002.
- 479. Le Maroc a ratifié la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949; en revanche, il n’a pas ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948.
A. Allégations de l’organisation plaignante
A. Allégations de l’organisation plaignante- 480. Dans une communication du 3 décembre 2001, la CDT explique que la Caisse nationale du Crédit agricole (CNCA) est un établissement public régi par la loi no 1-60-106 du 4 décembre 1961 et dont le conseil d’administration est composé de représentants de l’administration et d’agriculteurs. Sa vocation première est le financement de l’agriculture et la promotion du monde rural. La CNCA emploie environ 3 500 personnes et la CDT est le seul syndicat en son sein. En effet, suite à des élections syndicales en janvier 2001, un bureau syndical de 29 membres a été élu et reconnu par la direction de la CNCA.
- 481. La CDT explique par la suite quelle a été l’évolution du conflit social à la CNCA. En date du 6 avril 2001, lors de la première rencontre entre le syndicat et la direction de la CNCA, cette dernière aurait proposé un projet d’accord en deçà des revendications contenues dans le cahier revendicatif, projet qui n’a donc pas été validé par les salariés de la CNCA. Le jeudi 12 avril 2001, une grève a été déclenchée par le syndicat. La CDT allègue que dès le lendemain, soit le 13 avril, 34 agents temporaires ont été victimes d’expulsions ou de suspensions pour avoir participé à la grève du 12 avril. Parmi ces 34 agents se trouvaient deux membres du bureau syndical, MM. Karim Rachid et Aziz Youssef. En outre, M. Chatri Abdelkader, également membre du bureau syndical, aurait été suspendu suite à un dossier disciplinaire fabriqué de toutes pièces contre lui. Le 18 avril, le bureau syndical a annoncé une grève de 48 heures, grève qui a été reportée suite à une promesse de dialogue de la part de la direction. Toutefois, la réunion qui s’est tenue n’a eu aucune suite favorable, la direction ayant refusé de discuter le cas des 34 agents expulsés et suspendus. Suite au refus de négocier de la direction, une nouvelle grève de 48 heures a été déclenchée les 13 et 14 juin 2001.
- 482. Enfin, la CDT allègue que, suite à ces grèves, diverses sanctions ont été infligées aux travailleurs grévistes, et notamment des mutations abusives à l’encontre des responsables syndicaux suivants: MM. Kamar Bensalem, Faiçal Balafrej, Jawad El Amrani, Jamal Boudina, Ahmed Arrout, Abdessamad Mammad, Mustapha Hafidi, Mustapha Kounech, Mahjoube Ennaji, Said Benjamae, Lahcem Chkha et Mmes Naja Mimouni et Ouafae Chmaou. La CDT affirme que son bureau exécutif ainsi que le bureau syndical des travailleurs de la CNCA ont déployé des efforts pour renouer le dialogue avec la direction, notamment à travers de multiples lettres aux responsables de la CNCA et au ministère de l’Agriculture, mais sans succès.
- 483. Dans une communication ultérieure du 28 décembre 2001, la CDT indique que M. Chatri Abdelkader, membre du bureau syndical qui avait été initialement suspendu le 13 avril 2001, a été révoqué et rayé définitivement des cadres de la CNCA le 7 décembre 2001. Par ailleurs, M. Kamar Bensalem, secrétaire général du bureau syndical, a été convoqué le 25 décembre 2001 au commissariat de police, suite à une plainte déposée par la direction de la CNCA l’accusant d’avoir appelé à une grève illégale sous prétexte que cette grève n’avait pas reçu l’aval du Syndicat national des banques (SNB).
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement- 484. Dans sa communication du 5 février 2002, le gouvernement a fait parvenir la réponse de la Caisse nationale du Crédit agricole concernant la plainte de la CDT. En premier lieu, les représentants de la CNCA indiquent que toutes les décisions prises par cette dernière sont en accord avec les lois et règlements en vigueur et s’étonnent des allégations de l’organisation plaignante. La CNCA affirme qu’on lui demande de dialoguer avec des prétendus représentants du personnel (en l’occurrence MM. Kamer Bensalem et Faiçal Balafrej), alors que ces deux individus ont été explicitement exclus par la CDT. En effet, dans une communication du 25 avril 2001 de la CDT adressée à la CNCA, la CDT précise que «ces deux personnes sont en dehors du Syndicat national des banques/Confédération démocratique du travail (SNB/CDT), qu’elles sont dénuées de toute représentativité légale et que tout acte émanant d’elles n’engage en rien le syndicat» (copie de cette lettre est jointe à la réponse du gouvernement).
- 485. Par ailleurs, la CNCA indique que, dans un courrier du 15 mai 2001 adressé au bureau exécutif de la CDT, elle a dénoncé l’ensemble des agissements de ces personnes exclues par la CDT, et particulièrement leur décision d’annoncer une grève juste avant d’entrer en réunion avec la direction générale de la CNCA, ainsi que celle de dénoncer un accord conclu la veille en présence de leur secrétaire général. A cet égard, la CNCA joint copie d’un communiqué de presse du Syndicat national des banques/CDT dénonçant l’appel à la grève lancé sur papier en-tête SNB/CDT et confirmant que le signataire, M. Kamar Bensalem, ne fait plus partie du Syndicat national des banques. Enfin, la CNCA affirme sa volonté de poursuivre le dialogue avec l’ensemble des représentants du personnel démocratiquement élus et déclare ne pas comprendre l’attitude des responsables de la CDT dans cette affaire.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité- 486. Le comité observe que ce cas concerne un conflit au sein de la Caisse nationale du Crédit agricole (CNCA), et notamment des allégations relatives à diverses sanctions à l’encontre de travailleurs suite à une grève, de mutations de responsables syndicaux et de refus de dialogue social. D’emblée, le comité note avec regret que le gouvernement, à travers la réponse qu’il a obtenue de la CNCA, n’a fourni que des observations très fragmentaires sur les allégations soulevées dans la plainte.
- 487. Le comité note que, suite à des élections syndicales au sein de la CNCA en janvier 2001, un bureau syndical de 29 membres a été élu et reconnu par la direction de la CNCA. Le comité note que les représentants du syndicat et la direction de la CNCA se sont rencontrés une première fois le 6 avril 2001, puis, suite à une grève de 24 heures décrétée le 12 avril, les parties se sont rencontrées à nouveau le 18 avril. Selon l’organisation plaignante, ces réunions n’ont eu aucune suite favorable quant aux revendications présentées. Le comité observe toutefois qu’il est difficile de faire état de refus ou d’absence de dialogue social puisque les parties se sont rencontrées à deux reprises pour négocier au mois d’avril 2001. Néanmoins, le comité tient à rappeler l’importance pour les employeurs et les syndicats de participer aux négociations de bonne foi et de déployer tous leurs efforts pour aboutir à un accord, des négociations véritables et constructives étant nécessaires pour établir et maintenir une relation de confiance entre les parties.
- 488. S’agissant de la grève du 12 avril 2001, le comité note que, selon l’organisation plaignante, 34 agents de la CNCA, dont deux membres du bureau syndical (MM. Karim Rachid et Aziz Youssef), auraient été victimes d’expulsions ou de suspensions pour avoir participé à cette grève. En outre, suite à cette grève ainsi qu’à celle des 13 et 14 juin 2001, l’organisation plaignante allègue que des mutations abusives à l’encontre de nombreux responsables syndicaux ont eu lieu. Par ailleurs, l’organisation plaignante allègue que M. Chatri Abdelkader, membre du bureau syndical de la CNCA, qui avait été suspendu le 13 avril 2001, aurait été révoqué et rayé définitivement des cadres de la CNCA. Le comité note que ni le gouvernement ni la CNCA ne fournissent d’éléments d’information concernant l’ensemble de ces allégations. Le comité demande donc au gouvernement d’envoyer sans tarder des informations détaillées sur toutes les allégations, et en particulier sur les personnes citées par l’organisation plaignante et qui auraient été victimes d’actes de discrimination antisyndicale suite à leur participation aux grèves des 12 avril, et des 13 et 14 juin 2001.
- 489. S’agissant du cas de M. Kamar Bensalem, qui selon l’organisation plaignante serait secrétaire général du bureau syndical de la CNCA, le comité observe que cet aspect du cas semble soulever certaines questions. En effet, le comité note que, selon une communication du 25 avril 2001 émanant de la CDT et adressée à la CNCA (communication jointe à la réponse du gouvernement), la CDT précise que MM. Kamar Bensalem et Faiçal Balafrej ne font pas partie du Syndicat national des banques/CDT, qu’ils sont dénués de toute représentativité légale et que tout acte émanant d’eux n’engage en rien le syndicat. En outre, copie d’un communiqué de presse du Syndicat national des banques/CDT (également joint à la réponse du gouvernement), dénonce l’appel à la grève lancé par M. Kamar Bensalem et confirme que ce dernier ne fait plus partie du Syndicat national des banques. Or, dans sa plainte, l’organisation plaignante ne fait aucune allusion à ces communications ou aux conséquences pouvant en découler. Dans ces conditions, le comité demande à l’organisation plaignante de fournir sans tarder des informations additionnelles sur le statut au sein de la SNB/CDT de MM. Kamar Bensalem et Faiçal Balafrej, puisque ces derniers semblent avoir joué un rôle important dans le cadre du conflit social à la CNCA.
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 490. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Le comité demande au gouvernement d’envoyer sans tarder des informations détaillées sur toutes les allégations, et en particulier sur les personnes citées par l’organisation plaignante et qui auraient été victimes d’actes de discrimination antisyndicale suite à leur participation aux grèves des 12 avril, et des 13 et 14 juin 2001.
- b) Le comité demande à l’organisation plaignante de fournir sans tarder des informations additionnelles sur le statut au sein de la SNB/CDT de MM. Kamar Bensalem et Faiçal Balafrej, puisque ces derniers semblent avoir joué un rôle important dans le cadre du conflit social à la CNCA.