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- 877. La plainte figure dans une communication de l’Organisation internationale des employeurs (OIE) envoyée au nom de la Fédération vénézuélienne des chambres et associations du commerce et de la production (FEDECAMARAS) et datée du 17 mars 2003 ainsi que dans des documents complémentaires datés du 16 avril 2003. Le gouvernement a fait parvenir ses observations dans une communication datée du 9 mars 2004.
- 878. Le Venezuela a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations des organisations plaignantes
A. Allégations des organisations plaignantes - 879. Dans leurs communications des 17 mars et 16 avril 2003, l’Organisation internationale des employeurs (OIE) et la Fédération vénézuélienne des chambres et associations du commerce et de la production (FEDECAMARAS) allèguent que le gouvernement du Venezuela a systématiquement pris, au cours des trois dernières années, des mesures répressives à l’encontre du patronat vénézuélien et de ses dirigeants visant à limiter et entraver les libertés civiques, syndicales et le droit d’organisation des employeurs nécessaires à la défense de leurs intérêts. Ces mesures ont également pour objectif de limiter l’exercice de leur droit à manifester pacifiquement reconnu par la législation vénézuélienne. Ces faits ont été dénoncés devant la Conférence internationale du Travail de 2001 et de 2002 ainsi que devant la Réunion régionale de l’OIT pour les Amériques de décembre 2002.
- 880. Ces actions répressives se sont traduites par un harcèlement physique, économique et moral à l’encontre du patronat vénézuélien et de ses dirigeants ainsi que par la marginalisation et l’exclusion des organisations d’employeurs lors des prises de décisions portant sur le fonctionnement du tripartisme et le dialogue social au sein de ce pays.
- 881. Les organisations plaignantes relèvent que le gouvernement viole la Constitution nationale en s’appliquant à exclure systématiquement les organisations d’employeurs et les syndicats les plus représentatifs du dialogue social national. En de rares occasions, le gouvernement s’est borné à consulter superficiellement quelques-uns des interlocuteurs sociaux les plus représentatifs pour sauver les apparences. D’autre part, le gouvernement a pris pour habitude de tenir de longues réunions avec des groupes peu représentatifs de la population, mais sympathisants notoires du régime politique. Cette attitude amenuise la possibilité de concilier les intérêts et de parvenir à un accord sur les questions d’intérêt collectif.
- Absence de dialogue entre le gouvernement et les organisations d’employeurs les plus représentatives
- 882. L’OIE et la FEDECAMARAS soulignent que depuis des années la Commission tripartite du Venezuela ne se réunit plus et le gouvernement ne consulte plus les principaux interlocuteurs sociaux, ou du moins plus de façon significative. De même, le gouvernement ne cherche pas, en collaboration avec les parties concernées, à trouver des solutions aux problèmes que rencontrent les interlocuteurs sociaux. Tel est le cas de l’adoption de la loi sur la procédure du travail, celui de l’adoption d’un décret concédant une augmentation générale du salaire minima de 20 pour cent (en contravention à la convention no 26 sur les méthodes de fixation des salaires minima ratifiée par le Venezuela en 1944) et, enfin, celui de la ratification récente de la convention no 169 relative aux peuples indigènes et tribaux (ratification bafouant la convention no 144 de l’OIT sur les consultations tripartites relatives aux normes internationales du travail).
- 883. Le gouvernement a constamment ignoré les recommandations du Comité de la liberté syndicale du Conseil d’administration du Bureau international du Travail, qui a pourtant attiré son attention sur le principe selon lequel les organisations d’employeurs et de travailleurs les plus représentatives, et en particulier les centrales, devraient être consultées de manière approfondie par les autorités sur des questions d’intérêt commun, et notamment sur des questions relatives à l’élaboration et à l’application de la législation les concernant ou aux méthodes de fixation des salaires minima. Le comité a demandé au gouvernement d’appliquer ce principe à l’avenir.
- 884. L’OIE et la FEDECAMARAS signalent que le gouvernement a toujours cherché à esquiver tout dialogue avec les employeurs et avec leurs organisations les plus représentatives. Ce dialogue est donc rompu depuis un certain temps déjà. Cette attitude est s’est spécialement manifestée lors de la préparation et de l’élaboration de la législation, affectant directement les intérêts du patronat vénézuélien. L’exemple le plus grave a été la façon dont le gouvernement a légiféré en s’appuyant sur la loi d’habilitation et par le biais de l’Assemblée nationale, le 13 novembre 2000. Cette dernière a purement et simplement refusé de remettre aux interlocuteurs sociaux les projets de lois en question pour analyse et a promulgué, en un seul jour, 49 décrets-lois, dont 47 auraient dû faire l’objet d’une consultation. En se comportant de la sorte, le gouvernement a non seulement attaqué directement les interlocuteurs sociaux, mais aussi mis en danger la législation en vigueur et violé la Constitution nationale, dont l’article 206 énonce que: «La loi établira les mécanismes de consultation de la société civile et des autres institutions des Etats par le biais du Conseil compétent en la matière.» Les décrets-lois susmentionnés portent sur des questions primordiales telles que la propriété privée, le droit à la libre entreprise, le droit au travail ou les investissements nationaux et étrangers. Ils sont entachés de nullité absolue puisque, en plus de leur teneur, leur forme et le moment choisi pour leur promulgation enfreignent non seulement la Constitution vénézuélienne et la loi organique de l’administration publique de ce pays, mais aussi la législation d’habilitation. Le président Hugo Chávez a abusé des pouvoirs qui lui ont été conférés par la loi d’habilitation puisque les décrets-lois ont été promulgués après le délai fixé par la loi et qu’ils portent sur des questions pour lesquelles il n’est pas habilité à légiférer. Les organisations tiennent à souligner à ce propos les points suivants:
- - Non-respect du devoir d’information préalable du pouvoir législatif national. La loi d’habilitation, qui fut en vigueur pendant un an, stipulait dans son article 4 que, dans un délai minimum de dix jours avant leur publication dans le Journal officiel, les lois et décrets formulés par le Président habilité à le faire devaient être envoyés à une commission spéciale de l’Assemblée nationale chargée d’évaluer leur teneur. Ce même article établit que: «Article 4. L’Assemblée nationale désignera une commission spéciale qui reflétera au mieux sa composition politique et qui sera informée par le pouvoir exécutif national, au plus tard dix (10) jours avant leur publication dans le Journal officiel, de la teneur des décrets élaborés sur la base des pouvoirs conférés par la présente loi.» Cette disposition avait pour objectif de permettre à l’Assemblée nationale (pouvoir législatif du Venezuela) de savoir suffisamment tôt si les décrets-lois édictés par le Président restaient dans les limites des pouvoirs accordés par la loi d’habilitation. Il s’agit là d’une obligation formelle et préalable à toute promulgation. Le non-respect de cette obligation a enfreint les termes et conditions de l’habilitation. Par conséquent, le Président n’ayant pas respecté cette obligation, il n’était pas autorisé à légiférer et il a violé l’article 187 de la Constitution vénézuélienne établissant la compétence de l’Assemblée nationale et les articles 202 à 215 de ladite Constitution qui régissent le mécanisme d’élaboration des lois au Venezuela.
- - Prolongation de l’exercice des pouvoirs conférés par la loi d’habilitation. La promulgation de décrets-lois après le 13 novembre 2001, date de caducité de la loi d’habilitation, est une violation des dispositions de la Constitution. L’article 215 stipule que: «La loi sera définitivement promulguée par la publication avec «contreseing» correspondant dans le Journal officiel de la République bolivarienne du Venezuela.» La publication de toute loi dans le Journal officiel après le 14 novembre 2001, c’est-à-dire après la date de caducité de la loi d’habilitation, suppose une prolongation de l’exercice des pouvoirs conférés par cette loi. Autrement dit, les décrets-lois promulgués après la date de caducité de cette loi sont frappés de nullité parce qu’édictés par un organe non habilité à légiférer sur des questions qui, conformément aux dispositions de la Constitution, relèvent des compétences du pouvoir législatif national. Ce non-respect de la date de caducité de la loi d’habilitation est une infraction à l’article 236, paragraphe 8, de la Constitution vénézuélienne autorisant le Président à légiférer uniquement lorsqu’il est habilité à le faire.
- - Extension des limites de la loi et usurpation de pouvoir. La loi d’habilitation octroyait au Président de larges pouvoirs lui permettant de légiférer sur de nombreuses questions. Cependant, les dispositions des six paragraphes de l’article 1 de cette loi définissent clairement les limites dans lesquelles doit s’exercer le pouvoir législatif. Plusieurs des décrets-lois édictés en vertu de la loi d’habilitation portent sur des questions relevant de la compétence exclusive de l’Assemblée nationale. La transgression des limites fixées suppose une usurpation des pouvoirs détenus par l’Assemblée nationale en vertu de la Constitution et devrait entraîner la nullité des lois.
- - Absence de mise en oeuvre du devoir de consultation prévu par la loi organique de l’administration publique. La loi organique de l’administration publique établit expressément la procédure à suivre par le Président de la République pour l’exercice des attributions législatives, conformément à la Constitution. Cette loi prévoit dans son article 86: «Article 86. Le ministre compétent présentera le projet de loi devant le Conseil des ministres afin que ce dernier décide des étapes ultérieures, et en particulier de la tenue de consultations et de l’élaboration des rapports nécessaires. Il fixera les termes et les conditions de son application...». Le pouvoir discrétionnaire du ministre qui propose le projet de loi inclut le choix de la forme que prendront les consultations mais n’autorise pas l’omission du processus de concertation qui est en outre prévu par la Constitution nationale. Les pouvoirs législatifs sont conférés au Président afin qu’ils les exercent au Conseil des ministres pour lequel la détention de ses pouvoirs est indispensable, sauf dans des cas de force majeure. Il n’y a pas eu de cas de force majeure pour ce qui est des décrets-lois promulgués en vertu de la loi d’habilitation. La durée d’application de la législation d’habilitation (une année) atteste que les cas où il faudrait légiférer dans l’urgence n’avaient pas été prévus. La loi de l’administration publique est une loi organique et est donc, dans la hiérarchie des normes, supérieure à la loi d’habilitation. La loi de l’administration publique est entrée en vigueur le 17 octobre 2001 et, à compter de cette date, le pouvoir exécutif a dû conformer la teneur des décrets-lois qu’il promulguait aux dispositions de cette loi.
- - La méconnaissance du droit constitutionnel à la participation citoyenne. La Constitution vénézuélienne établit comme principe général la participation citoyenne (par exemple, à l’élaboration de projets de lois, aux consultations tenues en vue d’abroger une loi, d’y ajouter une clause dérogatoire ou encore de révoquer le mandat des fonctionnaires publics). Dans ce contexte, l’article 211 inclut la consultation de l’ensemble des citoyens et de la société organisée lors du processus d’élaboration des décrets-lois. Cet article stipule que, lors des processus d’élaboration des lois, «... les organes de l’Etat, les citoyens et citoyennes, et la société seront consultés...». Les organisations d’employeurs et de travailleurs vénézuéliennes les plus représentatives, la FEDECAMARAS et la CTV (Confédération des travailleurs du Venezuela), qui sont les plus hauts représentants de la société civile organisée, furent exclues des consultations. Cette obligation de concertation s’applique pour toutes les lois sanctionnées et promulguées par l’Assemblée nationale. Il n’y a aucune raison pour laquelle les lois édictées par le Président en vertu de la loi d’habilitation fassent exception à cette règle, puisque la Constitution ne tolère aucune exception en la matière. Le délégant (Assemblée législative) ne peut transmettre au délégataire (Président) des attributions qu’il ne détient pas en vertu de la Constitution.
- - Les décrets-lois promulgués sont anticonstitutionnels. L’analyse des décrets lois-édictés par le Président en vertu des pouvoirs qui lui ont été conférés par la loi d’habilitation a révélé qu’ils enfreignaient les droits et les garanties constitutionnels, ce qui signifie qu’ils sont entachés de nullité. C’est le cas du droit de propriété privée et du droit à la liberté économique, qui sont affectés par les lois sur les terres et sur les hydrocarbures.
- 885. La FEDECAMARAS a toujours été ouverte au dialogue, alors que le gouvernement a maintenu une attitude hostile au droit des employeurs de participer, légitimement et de manière constructive, à l’élaboration et à la mise en oeuvre des politiques gouvernementales ayant directement trait aux secteurs de production du pays. En outre, le gouvernement n’a pas rempli ses obligations constitutionnelles (art. 299) «de favoriser conjointement avec l’initiative privée un développement harmonieux de l’économie nationale afin de générer des emplois, une forte valeur ajoutée nationale, d’élever le niveau de vie de la population et de renforcer la souveraineté économique du pays, tout en garantissant la sécurité juridique, la solidarité, le dynamisme et la pérennité de la croissance économique. Il faut assurer une juste redistribution de la richesse par une planification stratégique, démocratique, participative et en consultation ouverte». De plus, les initiatives du gouvernement vénézuélien, prises les plus souvent par le président Hugo Chávez lui-même, n’ont pas aidé les secteurs publics et privés nationaux à promouvoir le développement, comme le suggère la Constitution. Le gouvernement a, au contraire, conservé une attitude et des politiques préjudiciables aux entreprises. Les politiques économiques élaborées par le gouvernement, sans consulter les employeurs, ont conduit à une grave crise économique nationale qui a engendré une augmentation de la pauvreté et du chômage, la fermeture de nombreuses entreprises, la chute du PIB, du produit per capita et une dévaluation de la monnaie nationale. D’autre part, ces politiques agressives, en plus d’accroître la pauvreté, ont sapé le moral des employeurs comme des employés des diverses organisations.
- Journées nationales de grève civique, détention du président de la FEDECAMARAS en février 2003 et autres mesures de représailles
- 886. Si l’on considère le contexte susmentionné, une crise économique et sociale qui s’aggrave, des indicateurs économiques à la baisse, en raison de l’accroissement de la pauvreté et du chômage, une insécurité croissante dans toutes les couches sociales de la population et dans toutes les régions du pays, que se soit en milieu rural ou urbain; et devant les violations de la propriété privée, qu’il s’agisse de terres agricoles ou de locaux, motivées par les allocutions du chef de l’Etat diffusées à la radio et à la télévision, les employeurs ont exercé leur droit à manifester pacifiquement pour défendre leurs intérêts professionnels. Le 2 décembre 2001, la FEDECAMARAS a appelé à une première grève nationale civique de 24 heures. Soutenu par la CTV, ce débrayage paralysa le pays.
- 887. Pendant les mois qui suivirent, la FEDECAMARAS, en collaboration avec les organisations syndicales les plus représentatives, les principales ONG et les partis démocratiques, qui s’associèrent au sein de la «Coordination démocratique», ne cessa d’oeuvrer pour le respect des droits patronaux, (par exemple; l’inclusion du patronat dans les consultations nationales et le droit à la propriété privée), mais sans succès. Cette situation engendra donc une nouvelle vague de grèves les 9, 10 et 11 avril 2002. Ces grèves déclenchèrent une véritable crise nationale qui poussa le Président de la République à démissionner de ses fonctions. L’annonce publique de cette démission, effective deux jours seulement et annulée ensuite par le président Chavéz lui-même, fut faite par le Commandant en chef des forces armées, le Général Lucas Rincón, et largement diffusée par les médias.
- 888. La situation continua à se détériorer. Au cours des mois qui suivirent, le Président a préféré s’en prendre, au travers de discours publics diffusés à la radio et sur les chaînes nationales de télévision, aux organisations d’employeurs et à leurs dirigeants plutôt que d’entamer un dialogue et un rapprochement.
- 889. Ceci amena les différents groupes sociaux à radicaliser leurs positions. Le patronat et les travailleurs demandèrent alors à la FEDECAMARAS et à la CTV d’agir. Devant l’absence de dialogue et les violations répétées des droits des employeurs et des travailleurs, ces organisations annoncèrent à la mi-novembre 2002 que, si un terrain d’entente pour le règlement des sérieux problèmes nationaux n’était pas trouvé, elles entameraient une nouvelle journée de grève nationale le 25 novembre 2002.
- 890. Une table de négociation et d’accord, où membres du gouvernement et de la Coordination démocratique étaient représentés paritairement, fut mise en place au début du mois de novembre. Les participants, le docteur Cesar Gaviria Trujillo, Secrétaire général de l’Organisation des Etats américains (OEA), chargé de la médiation, les représentants du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), de l’ONU et du Centre Carter n’ont pu parvenir à un accord, et la grève nationale débuta le 2 décembre 2002.
- 891. Les organisations plaignantes allèguent que le président de la FEDECAMARAS, M. Carlos Fernández, fut arrêté en représailles aux actions qu’il avait menées en tant que représentant des employeurs du Venezuela. Sa détention atteste de l’insécurité qui règne dans le pays et des flagrantes violations des dispositions de la convention no 87 de l’OIT, des droits de l’homme et constitutionnels, ainsi que de l’absence d’une défense effective des droits des citoyens, dont la responsabilité incombe au Défenseur du peuple, tel que défini à l’article 280 de la Constitution.
- 892. M. Carlos Fernández ne s’est pas soustrait à la justice, bien au contraire, il s’est toujours rendu aux convocations des instances judiciaires, prouvant ainsi sa volonté d’établir la vérité. Sa détention enfreint les règles de procédure régulière et survient un jour après la signature du premier accord contre la violence et pour le respect mutuel par les participants à la table de négociation et d’accord, présidée par le Secrétaire général de l’OEA, après trois mois d’âpres négociations.
- 893. Les organisations plaignantes expliquent qu’il était presque minuit, le 19 février 2003, lorsque M. Carlos Fernández fut agressé à la sortie d’un restaurant par environ une dizaine d’individus qui ne portaient pas de signes distinctifs. Selon des témoins oculaires, ils ne portaient pas d’uniforme et ne semblaient pas être des fonctionnaires publics ni des policiers. Certains seraient arrivés à bord de voitures banalisées sans plaque minéralogique. M. Fernández pensa que l’on cherchait à l’enlever et tenta de se défendre. Après une bagarre au cours de laquelle M. Fernández reçut des coups à l’origine de blessures superficielles et d’hématomes au thorax, il fut immobilisé et poussé à l’intérieur de son véhicule. Des coups de feu furent tirés, probablement pour décourager quiconque d’intervenir. Ce n’est qu’une fois qu’il fut immobilisé que certains des individus se présentèrent comme étant des policiers.
- 894. Le président de la FEDECAMARAS fut transporté à bord de son propre véhicule jusqu’aux bureaux de la Direction des services de renseignements et de prévention (DISIP), police politique de l’Etat, où il arriva à 1 heure du matin environ, le 20 février. Après avoir enregistré son nom et sans aucune autre formalité légale, il fut immédiatement écroué dans une cellule de deux mètres sur deux, sans aération, sans lumière et où un matelas posé à même le sol faisait office de lit. Pendant toute la durée de sa détention, il fut coupé du monde extérieur. Ce ne fut que le lendemain matin que les membres de sa famille purent prendre contact avec lui. Ses avocats ne purent pénétrer dans les locaux où il était détenu. Les mauvais traitements dont M. Fernández fut victime contribuèrent à la détérioration de son état de santé et il dut recevoir des soins médicaux en urgence.
- 895. Selon la presse vénézuélienne, le président Hugo Chávez aurait fait, le mercredi 19 février, la déclaration suivante: «Lorsqu’ils m’ont appelé, il devait être environ minuit. Je leur ai demandé s’ils avaient un mandat et je leur ai dit de faire ce qu’ils avaient à faire … je me suis ensuite couché le sourire aux lèvres; à une heure du matin, j’ai demandé que l’on m’apporte le délicieux gâteau à la papaye que m’avait envoyé ma mère et je pensais tout bas: enfin, un juge a été capable d’agir.»
- 896. Le 21 février, un jour après son arrestation, M. Carlos Fernández fut escorté jusqu’au tribunal par une brigade spéciale réservée d’ordinaire aux criminels dangereux. L’audience commença vers les 9 heures du matin et fut suspendue à 23 heures. Elle repris le 22 février à 8 h 30 et dura jusqu’à 22 h 30, heure à laquelle le prisonnier fut reconduit à sa cellule.
- 897. Pendant les deux jours que dura le procès, des groupes violents menés par un député de la coalition au pouvoir, se réunirent devant le tribunal pour faire pression sur les juges et barrèrent la route à quiconque voulait entrer en proférant des insultes.
- 898. Les premières communications des autorités déclaraient publiquement que le gouvernement du Venezuela accusait M. Fernández des délits suivants: i) trahison de la patrie; ii) rébellion; iii) incitation à la délinquance; iv) conspiration (association illicite); et v) dégradation du bien public (incitation à la dégradation des biens publics).
- 899. Conformément à la décision de la juge qui reprit l’affaire, celui qui avait prononcé le premier verdict avait été récusé par la défense et avait décliné sa compétence, des cinq charges qui pesaient contre M. Fernández seules deux furent retenues, la rébellion et l’incitation à la délinquance.
- 900. Etant donné le mauvais état de santé de M. Fernández, le tribunal l’assigna à résidence, mais l’Office du procureur de la nation fit appel de cette décision. Même si les charges qui pesaient contre lui furent allégées et qu’il bénéficia de l’assignation à résidence, M. Carlos Fernández n’en était pas moins poursuivi par le gouvernement pour ses initiatives en tant que représentant des employeurs. Son arrestation et son procès constituent une menace pour les autres dirigeants employeurs et pour les organisations d’employeurs du Venezuela.
- 901. D’autre part, la Fédération nationale d’éleveurs (FEDENAGA), affiliée à la FEDECAMARAS, fut exclue du Conseil agricole, chargé entre autres de la délivrance des permis pour le transport d’animaux et de produits d’origine animale. La FEDENAGA a été exclue du conseil pour avoir soutenu la FEDECAMARAS dans ses critiques contre le gouvernement du Venezuela. Le ministre de l’Agriculture, M. Efrén Andrades, a déclaré que la FEDENAGA ne faisait plus partie du système de délivrance des licences. Ce système de licence permet de contrôler les transports d’animaux afin de prévenir les risques d’épidémies. La mesure prise par le gouvernement a porté préjudice aux activités des éleveurs affiliés à la FEDENAGA et a gravement nui à la Campagne nationale de vaccination contre la fièvre aphteuse.
- 902. En outre, le gouvernement favorisa le développement des activités d’une nouvelle organisation du nom de Confédération nationale des agriculteurs et éleveurs du Venezuela (CONFAGAN) au détriment de la FEDENAGA, l’organisation la plus représentative du secteur agricole vénézuélien. L’ingérence du gouvernement dans les affaires internes des organisations d’employeurs est une fois encore une violation de la liberté syndicale.
- 903. Les représentants du gouvernement vénézuélien, à commencer par le président Hugo Chávez lui-même, ont a plusieurs reprises insulté et menacé les membres des organisations d’employeurs. Ces manifestations d’hostilité se sont faites par le biais de communications dans les journaux, à la radio ou à la télévision, dont l’organisation plaignante mentionne quelques exemples.
- 904. Le 23 septembre 2002, Madame le Procureur général de la République, Mme Marisol Plaza, a déclaré que le pouvoir exécutif vénézuélien allait prendre des mesures répressives à l’encontre des organisations d’employeurs affiliées à la FEDECAMARAS qui avaient participé à la journée de protestation pour la défense de leurs intérêts.
- 905. Le législateur du parti au pouvoir, Omar Mezza, a déclaré que, si les employeurs décidaient de poursuivre leur protestation nationale, le gouvernement voterait une réforme de la loi du travail contraignant les patrons d’entreprises à poursuivre la production. Le porte-parole MVR, Omar Mezza, a précisé que cette réforme autoriserait les employés à utiliser les machines des unités de production pour garantir la continuité de l’activité de l’entreprise.
- 906. Le 9 janvier 2003, M. Nicolas Maduro, porte-parole du pouvoir exécutif, a menacé les employeurs du secteur des télécommunications et a dit:
- ... l'époque du dialogue et des communications télévisées est maintenant terminée et l’heure est venue d’appliquer les sanctions prévues par la loi en vigueur ... le temps est venu de prendre les mesures qui s’imposent, les quatre années de présidence de Hugo Chávez ont été une véritable guerre médiatique ... il faut sans plus attendre prendre des sanctions à l’encontre des médias qui n’ont pas su entendre le message que leur adressaient la plupart des Vénézuéliens, celui qui leur demandait de réfléchir et de reprendre le droit chemin en retrouvant leur rôle éducatif.
- Ce même jour, M. Maduro menaça également le secteur bancaire qui avait rejoint le mouvement national de protestation.
- 907. En outre, le 15 janvier 2003, le président Hugo Chávez insulta, au travers de déclarations publiques, les employeurs propriétaires de chaînes de télévision au Venezuela.
- 908. Le 17 févier 2003, le Président de la République menaça les entreprises agroindustrielles de mesures punitives parce qu’elles avaient décidé de fermer en raison de la chute de leurs ventes due à la réglementation des prix. Il a déclaré textuellement pendant la diffusion d’une des émissions de son programme Allô Président: «notre pays ne peut décemment abriter des saboteurs. Il nous faut nous débarrasser de tous les corrompus du secteur industriel.»
- 909. Le 12 décembre 2002, les locaux de la Chambre de commerce de Lara furent vandalisés par des groupes bolivariens (partisans du régime) parce qu’elle avait dénoncé la politique gouvernementale à l’égard des employeurs. A Lara, de nombreux commerçants qui avaient décidé de prendre part au mouvement de grève nationale ont été contraints d’ouvrir leurs commerces suite aux fortes pressions exercées par des partisans du régime. L’objectif de ces personnes était d’entraver les actions légitimes entreprises par les employeurs pour défendre leurs intérêts.
- 910. Le gouvernement ne s’est pas contenté d’agressions verbales, il a été jusqu’à harceler certains représentants patronaux. Voici quelques exemples probants de ce harcèlement:
- 1) Harcèlement du président du Conseil national du commerce et des services du Venezuela (CONSECOMERCIO). Le 18 février 2003, le bureau de M. Julio Brazón, président du CONSECOMERCIO, fut saccagé en représailles à sa participation à la dénonciation nationale des agissements du gouvernement. Les dégâts matériels furent très importants.
- 2) Harcèlement du président de la Chambre de commerce de Bajuma. Le 29 octobre 2002, le président de la Chambre de commerce de Bejuma, M. Adip Anka, reçut de la part de membres présumés du gouvernement des menaces de violences physiques. M. Adip Anka fut victime de ces menaces, dénoncées d’ailleurs aux autorités avant leur exécution parce qu’il avait participé au mouvement national de protestation initié par la FEDECAMARAS. Quelques jours auparavant, des tracts anonymes, visant à intimider les commerçants qui participeraient aux journées nationales de grèves organisées par la FEDECAMARAS, avaient été distribués dans les rues de Bejuma.
- 911. Ceux qui soutiennent la FEDECAMARAS, entité protectrice de leurs droits, subissent également une autre forme de pressions, de discrimination et de pénalisation. Ils sont durement sanctionnés par le système de contrôle des changes. Le régime de contrôle des changes imposé par le gouvernement a sérieusement affecté les ventes de milliers d’entreprises nationales. Dans des communiqués de presse, certains fonctionnaires publics ont déclaré que le gouvernement déciderait unilatéralement quelles entreprises pourraient obtenir des devises étrangères. D’autres déclarations officielles de fonctionnaires publics très hauts placés signalent que les employeurs et les entreprises ayant pris part à la grève lancée par la FEDECAMARAS n’auraient pas ce privilège. Il est clair qu’il s’agit là d’une mesure gouvernementale discriminatoire contre les entreprises et les employeurs membres de la FEDECAMARAS.
- 912. Le 25 janvier 2003, le ministre de la Production et du Commerce, M. Ramón Rosales, déclara au quotidien El Nacional que seuls les importateurs et exportateurs qui avaient soutenu le gouvernement auraient accès aux devises étrangères. Il faisait bien sûr référence à ceux qui n’avaient pas participé à la journée nationale de grève lancée par la FEDECAMARAS avait pris part. Le 5 février 2001, lors de la célébration de la quatrième année d’entrée en fonction de son gouvernement, le président Hugo Chávez annonça la mise en place d’un nouveau régime de contrôle des changes. Par le biais de cette annonce il disait clairement que ceux qui n’avaient pas appuyé son régime n’auraient pas accès aux devises étrangères. Le 1er mars, M. Edgar Hernández Behrens, président de la Commission d’administration des devises a déclaré que le président Hugo Chávez serait le seul à décider quels secteurs recevraient des dollars et lesquels ne les recevraient pas.
- 913. Après 55 jours de suspensions d’achat et de vente de devises, les employeurs affiliés à la FEDECAMARAS se trouvaient dans une situation très critique puisqu’ils ne pouvaient plus acheter les matières premières et les équipements nécessaires à la production d’aliments, de récipients, de machines, de pièces de rechange, de tissus, et autres biens et services dépendant directement ou indirectement des importations. Les stocks de la plupart des secteurs étaient au plus bas lorsque la grève pris fin au début du mois de février 2003. Les entreprises qui disposaient de matières premières ont pu reprendre leurs activités. Ce fut le cas des industries meunières et des fabricants de pièces automobiles, malgré les problèmes d’approvisionnement en gaz et en combustibles. Le gouvernement vénézuélien imposa cependant peu après un régime de contrôle des changes qui asphyxia quasiment le commerce international puisque toutes les opérations d’achat et de vente de devises étrangères étaient gelées. Les industries alimentaires, qui ont besoin d’énormément de devises pour l’importation du blé, du lait en poudre, de légumineux, d’huile brute, ont donc été confrontées à de sérieux problèmes puisqu’elles ne pouvaient plus rembourser leurs dettes. Les entreprises appartenant à des employeurs membres d’organisations ont donc été pénalisées et leur production sévèrement affectée. Les secteurs les plus touchés par la pénurie de matières sont, entre autres, ceux des industries alimentaires, des laboratoires pharmaceutiques, des usines de fabrication de matériel chirurgical et de matériaux de construction, mais aussi ceux des industries pétrochimiques, des usines de traitement du plastique, et des usines d’assemblage de véhicules, des industries métallurgiques, minières, d’agrochimie, textiles ainsi que du secteur de la confection.
- 914. La presse joue un rôle clé dans les pays démocratiques, et plus particulièrement lorsqu’un mécontentement de l’immense majorité de la population est évident. Au départ, les imprimeries qui importaient du papier pour l’impression des journaux figuraient sur la liste des assignations de devises. Mais, conformément à la résolution publiée dans le Journal officiel no 37647, le papier destiné à l’impression des journaux a été supprimé de la liste des assignations de devises et remplacé par le papier pour l’impression des manuels éducatifs. Il s’agit là d’une mesure discriminatoire. En effet, s’il est certain que l’éducation doit bénéficier d’un traitement spécial, il en va de même pour la presse qui est la garante de la liberté d’expression des pensées et des idées. En prenant cette mesure, le gouvernement a exercé une pression sur le secteur privé de la presse qui était affilié à la FEDECAMARAS.
- 915. Au début mars 2003, soixante jours s’étaient écoulés depuis le gel du marché des changes. Cette mesure avait eu un effet dévastateur sur le secteur agricole qui n’avait plus pu s’approvisionner en produits agrochimiques, en fertilisants et en matériel. A la date de la plainte, ce secteur n’avait toujours pas l’autorisation d’acheter des devises étrangères. Le Venezuela utilise 500 000 tonnes de fertilisants, en grande partie importés. La lenteur de délivrance de l’autorisation d’achat et de vente de devises a mis en danger les semailles d’hiver qui représentent 75 pour cent de la production annuelle de maïs blanc, de sorgho, de riz et d’autres produits essentiels à l’alimentation du pays. Le secteur privé agricole qui a publiquement dénoncé cette politique gouvernementale préjudiciable aux entreprises est pénalisé pour avoir exercé ses droits constitutionnels de défense de ses intérêts.
- Occupation illégale de plantations
- 916. Le gouvernement a autorisé, et même parfois incité par les discours du président Hugo Chávez, la confiscation et l’occupation de plantations en pleine production qui travaillaient pour la société. Cette situation a favorisé la création d’un climat hostile aux employeurs et a déclenché une vague de confiscations et de nouvelles occupations illégales de plantations. Ces confiscations sont une violation des lois en vigueur et une atteinte aux droits légitimes de propriété sur les produits concernés, comme le stipule l’article 115 de la Constitution:
- Le droit à la propriété est garanti. Toute personne à droit à l’usage, la jouissance, l’usufruit et à disposer de ses biens. La propriété sera soumise aux conditions, restrictions et obligations que la loi établira à des fins d’utilité publique ou d’intérêt général. Seulement pour cause d’utilité publique ou d’intérêt social, par jugement définitif et paiement préalable d’une juste indemnisation, pourra être déclarée l’expropriation de tout type de biens.
- Ce fut le cas entre autres des agriculteurs implantés au sud du lac de Maracaibo. Les organisations plaignantes signalent que le gouvernement avait décidé de concéder des titres de propriété provisoires sur les terres situées au sud du lac Maracaibo et qu’il avait menacé de faire de même dans d’autres états du pays. Cette décision qui enfreignait les droits de propriété et qui portait préjudice à plusieurs unités de production équipées de matériel onéreux, a engendré de vives réactions dans tout le pays. Le secteur privé ne s’opposa pas à la redistribution des terres, mais exigea qu’elle se fasse dans le plus grand respect des lois en vigueur. Le respect de l’Etat de droit est la base de la confiance et c’est pour cette raison qu’il est inacceptable que la redistribution des terres se fasse par des moyens tels que l’occupation de terres agricoles ou la confiscation de terrains soumis à un droit de propriété ou de possession.
- 917. L’article 115 de la Constitution consacre le respect de la propriété privée mais il considère qu’une expropriation est possible pour des raisons d’intérêt public ou social, par jugement définitif et paiement préalable d’une juste indemnisation. Cet article ne s’applique pas seulement aux propriétés privées mais également aux terres appartenant à la nation et qui au fil des années ont fait l’objet d’investissements privés. Pour en disposer, l’Etat doit en référer aux juges compétents, et, s’il s’agit de terres en friche, il doit observer la procédure d’expropriation décrite dans les lois régissant l’agriculture et dans la réforme agraire. Le recours à la Garde nationale pour appuyer l’occupation des propriétés privées sans observer les procédures légales constitue une violation du droit de défense, et du droit à obtenir un procès équitable, du droit de propriété et de l’interdiction de confisquer des terres comme le stipulent la Constitution et les lois.
- 918. De 1998 à avril 2003, 180 cas d’occupations illégales de lieux de production ont été dénoncés dans les Etats suivants: Anzoátegui, Apure, Barinas, Bolivar, Carabobo, Falcón, Guárico, Lara, Mérida, Miranda, Monágas, Portuguesa, Sucre, Táchira, Yaracuy et Zulia. La plupart de ces cas n’ont pas été résolus par les autorités compétentes.
- Les paramilitaires et les cercles bolivariens bénéficiant du soutien du gouvernement
- 919. Tel que dénoncé par les dirigeants de la Confédération des travailleurs du Venezuela (CTV) lors de la mission de contacts directs de l’OIT en mai 2002, «... la sécurité et la vie des dirigeants syndicaux sont menacées par des groupes de paramilitaires (tels que la Coordinadora Simón Bolivar, les mouvements Tupamaros et les cercles bolivariens armés)...». Les participants aux mouvements de protestation initiés par les interlocuteurs sociaux ont été persécutés et des contre-manifestations lancées. La mission de contacts directs, envoyée au Venezuela en mai 2002, a pris note avec préoccupation des informations concernant la formation présumée de groupes paramilitaires violents bénéficiant de l’appui du gouvernement et des actes de violence et de discrimination antisyndicale dont auraient été victimes les interlocuteurs sociaux au Venezuela. La mission a estimé que ces questions, parce que très graves, devraient faire l’objet d’une enquête adéquate et sérieuse. A ce propos, la mission a suggéré que soit constituée une commission spéciale, conciliable avec les institutions vénézuéliennes et formée de personnes bénéficiant de la confiance des interlocuteurs sociaux les plus représentatifs. Jusqu’à aujourd’hui le gouvernement n’a pas tenu compte de cette recommandation et la situation s’est aggravée depuis, puisque ces groupes violents ont poursuivi leurs activités avec l’assentiment, pour ne pas dire la bénédiction, du gouvernement. Par exemple, le 18 octobre 2002, le président Hugo Chávez a incité la population à la violence par des déclarations exhortant ses partisans à défendre la «révolution». Suite à ces paroles, les groupes paramilitaires (le Mouvement pour la cinquième République (Quinta República), la Jeunesse révolutionnaire du Mouvement pour la cinquième République (Juventud Revolucionaria del MVR), le Front institutionnel militaire (el Frente Institucional Militar) et la Force bolivarienne de libération (Fuerza Bolivariana)) ont entrepris une contre-manifestation violente pour faire échec au mouvement de protestation nationale lancé par la FEDECAMARAS.
- 920. Les organisations plaignantes allèguent la violation par le gouvernement de la convention no 87 et se réfèrent aux principes énoncés par le Comité de la liberté syndicale relatifs aux points abordés dans la plainte et demandent que:
- - les accusations portées contre le président de la FEDECAMARAS, M. Carlos Fernández, soient retirées et que sa libération soit ordonnée sur-le-champ. En outre, elles demandent qu’à l’avenir les employeurs, leurs dirigeants et leurs organisations n’aient plus à subir d’intimidations d’aucune sorte;
- - le harcèlement et les intimidations, dont sont victimes les organisations d’employeurs et leurs représentants, cessent;
- - des politiques non discriminatoires à l’encontre des entreprises et des employeurs affiliés à la FEDECAMARAS soient adoptées;
- - une analyse des 49 décrets-lois adoptés soit entreprise, afin qu’en collaboration avec les organisations les plus représentatives d’employeurs et de travailleurs les dispositions enfreignant les droits des interlocuteurs sociaux soient identifiées et rectifiées en conséquence;
- - à l’avenir, des consultations sérieuses soient organisées avec les organisations d’employeurs avant l’adoption de toute législation portant sur leurs intérêts professionnels.
- 21. L’OIE et la FEDECAMARAS concluent en ajoutant que les faits relatés dans cette plainte n’évoquent qu’une partie seulement des actions entreprises par le gouvernement du Venezuela à l’encontre de la FEDECAMARAS et de ses membres en représailles aux mouvements de protestation contre des pratiques gouvernementales abusives. Ces pratiques abusives constituent une ingérence indue dans les affaires internes des organisations et sont une forme de discrimination à l’encontre des employeurs vénézuéliens. Elles enfreignent les principes de la liberté syndicale tels qu’énoncés dans la convention no 87 de l’OIT ratifiée par le Venezuela.
- B. Réponse du gouvernement
- 922. Dans sa communication du 9 mars 2004, le gouvernement souligne en premier lieu que les accusations formulées par la FEDECAMARAS et l’OIE ont pour seul objectif de justifier leurs prises de positions et n’ont rien à voir avec la situation des organisations d’employeurs ou des syndicats et moins encore avec les faits relatés dans la présente plainte tels que «le mouvement national de protestation, les manifestations publiques ou la journée nationale de protestation». Le gouvernement déclare qu’il exposera ses arguments concernant les précédentes observations et qu’il démontrera que les actions de la FEDECAMARAS ont des visées uniquement politiques et qu’elles sont antidémocratiques, discriminatoires et autoritaires. Il ajoute que la FEDECAMARAS, véritable bastion du patronat, se croit au-dessus des lois. Elle cherche à justifier son appel public et réitéré au renversement du Président constitutionnel de la République bolivarienne élu démocratiquement par l’immense majorité du peuple vénézuélien, à deux reprises en moins de deux ans, et vainqueur de cinq autres élections. Les termes de «mouvement national de protestation, de manifestations publiques ou de journée nationale de protestation» semblent donc ici totalement hors contexte.
- 923. Les membres du comité de direction de la FEDECAMARAS ont dévié cette entité de son principal objectif qui est celui de toute organisation syndicale d’employeurs, et se sont livrés à un véritable prosélytisme politique. La FEDECAMARAS a, à plusieurs reprises et sans aucune preuve, taxé le Président de la République bolivarienne du Venezuela, Hugo Chávez, de despotisme. Afin de déstabiliser les institutions de l’Etat et d’instaurer par la force un régime dictatorial, la FEDECAMARAS a instigué ses membres à des actions subversives. Ces actions ont d’ailleurs abouti à la présidence de fait de M. Pedro Carmona Estanga (12 et 13 avril 2002) qui, jusqu’à ce qu’il s’autoproclame Président, était le dirigeant du syndicat patronal de la FEDECAMARAS.
- 924. M. Carlos Fernández succéda à M. Carmona à la présidence de la FEDECAMARAS puisqu’il était, lorsque M. Carmona pris de manière inconstitutionnelle la tête du gouvernement, le premier vice-président de cette institution. Le premier acte officiel de M. Carlos Fernández en tant que président de la FEDECAMARAS fut d’avaliser le régime Carmona, et c’est ainsi que, le 12 avril 2002, M. Fernández put signer «l’acte de constitution du gouvernement démocratique transitoire d’unité nationale» au nom des employeurs. Cet acte tentait de justifier le coup d’Etat orchestré par les employeurs, les militaires, les partis politiques d’opposition et la «société civile» en collaboration avec ledit «gouvernement démocratique transitoire d’unité nationale.» Peut-on parler ici de «mouvement national de protestation, de manifestations publiques ou de journée nationale de protestation»?
- 925. Ce qui vient d’être dit est fondamental pour comprendre et prouver que le président de la FEDECAMARAS, M. Carlos Fernández, ne menait pas des activités syndicales mais politiques et qu’il orchestrait des actions subversives et antidémocratiques. La période de trouble politique, économique et social qu’a connu le pays d’avril 2002 à mars 2003 est due à M. Carlos Fernández qui s’est servi de sa position de président de la FEDECAMARAS pour appeler à «une grève nationale civique» et pour inciter le peuple à des «mouvements de protestation, à des manifestations publiques ou à des journées de grève nationale» comme on peut le relever dans ses allégations. Les évènements qui se sont produits au Venezuela le 10 décembre 2001, les premiers jours du mois d’avril 2002, le 21 octobre, ou encore en décembre 2002 et en janvier 2003 n’étaient donc pas des grèves, mais la fermeture des usines par les employeurs, autrement dit un lock-out et un sabotage de l’industrie pétrolière de la part des ouvriers et des cadres dirigeants de la PDVSA (Petróleos de Venezuela SA). La plupart des travailleurs et travailleuses n’ont pas pris part aux «journées nationales de grève». Que serait-il advenu du gouvernement si l’ensemble des travailleurs et des employeurs avaient participé à quatre grèves générales, à la paralysie (au sabotage) de sa principale industrie et à l’arrêt total de la production pendant deux mois comme cela avait été prévu lors des grèves de décembre 2002 et de janvier 2003? Quoi que puissent en dire les organisations plaignantes les actions entreprises étaient illégales, subversives, antidémocratiques et ont été condamnées par une grande majorité du peuple vénézuélien. M. Fernández et la FEDECAMARAS ont donc violé la Constitution, bafoué la démocratie, incité le peuple à des débrayages illégaux et à des lock-out ponctuels et stratégiques d’entreprises locales, telles que les industries alimentaires, les distributeurs de carburants, les exploitations agricoles. Voilà ce qui peut être qualifié de «mouvements de protestation, de manifestations publiques ou de journées de grève nationale».
- 926. La fédération patronale FEDECAMARAS et ses dirigeants ont adopté depuis quatre ans une attitude antidémocratique. La première de ces démarches antidémocratiques fut le pacte de la Quinta Esmeralda qui devait se substituer, après le coup d’Etat, au pacte de Punto Fijo adopté par les partis politiques en 1961.
- 927. Pendant les quarante ans, de 1958 à 1998, pendant lesquels le «pacte de Punto Fijo» était en vigueur de nombreux employeurs ont pu bénéficier de certains privilèges; prêts, subventions de l’Etat, aucune sanction en cas de non-paiement des impôts, et plus particulièrement de l’impôt sur le revenu. Pendant cette période nombreux furent les emprunts qui ne furent pas remboursés à l’Etat. Beaucoup d’entreprises et de commerces auraient fait faillite sans de nouveaux prêts dont la plupart ne furent pas remboursés. Le pacte de Punto Fijo permit à de nombreux employeurs de devenir exportateurs grâce aux innombrables possibilités qu’offrait la rente pétrolière dont une minorité privilégiée avait l’usufruit. La corruption et l’impunité réapparurent. L’Etat, les politiciens corrompus, les partis politiques satisfaits de cette situation ainsi que de nombreux employeurs, principaux bénéficiaires de cette situation ne firent rien pour changer les choses.
- 928. Bon nombre de ces employeurs affiliés à la FEDECAMARAS tentèrent dès 1989, lorsque les premières mesures économiques néolibérales entrèrent en application et que les premiers effets de la globalisation se firent ressentir d’imposer une politique agressive de privatisation des services de la santé, de l’éducation et de la prévoyance sociale. Ils tentèrent également d’assouplir les lois régissant les rapports employeurs /employés et de réviser les droits des travailleurs et travailleuses, au nom du bien être collectif dans un pays où 80 pour cent de la population vivait dans la pauvreté.
- 929. Le décor ayant été planté, il ne faut plus parler de manque de dialogue, de la méconnaissance de la convention no 87 de l’OIT, du manque de devises pour assurer la continuité de l’activité des entreprises et de l’activité économique dans son ensemble, ou encore du non-respect des droits de propriété, de harcèlement, des persécutions et des agressions physiques subies par les employeurs affiliés à la FEDECAMARAS, et encore moins d’associations professionnelles favorisées car enregistrées légalement. Ce dont il s’agit réellement c’est que la FEDECAMARAS, organisation faîtière du patronat, n’est pas au-dessus de la Constitution de la République bolivarienne du Venezuela ni de la justice sociale.
- 930. Ce qu’il convient de souligner c’est que la FEDECAMARAS et ses membres qui ont orchestré le coup d’Etat d’avril 2002 et la tentative d’insurrection de décembre 2002 -janvier 2003 n’ont plus le pouvoir de créer des monopoles, ni de fixer des taux d’intérêt élevés et usuriers. Ils n’ont plus aucun contrôle sur la Force armée nationale pour promouvoir la contrebande, ce qui leur procurait des revenus nets d’impôts. Pour toutes les raisons citées, les institutions de la République bolivarienne du Venezuela et la société dans son ensemble connaissent, à l’heure actuelle, de profonds bouleversements.
- 931. La FEDECAMARAS et ses dirigeants ont organisé quatre «journées nationales de grève civique», s’apparentant toutes à des lock-out et dont le but politique est de nuire à l’économie et aux droits humains du peuple. Ces grèves qui se sont succédé à partir du 10 décembre 2001 étaient, selon la FEDECAMARAS, une réponse à l’approbation de 48 lois d’habilitation. La FEDECAMARAS a ensuite, ignorant tous les principes démocratiques, orchestré le coup d’Etat d’avril 2002 pour renverser la démocratie déjà ébranlée par d’autres évènements. Ce coup d’Etat, affirma cette fédération patronale, était une réponse au licenciement de certains dirigeants de l’entreprise Petróleos de Venezuela SA (PDVSA) et un moyen «d’en finir avec le tyran», en référence au président de la République bolivarienne du Venezuela. Cette grève ou lock-out annonçait le coup d’Etat qui installa le régime éphémère du président autoproclamé de la République bolivarienne, M. Pedro Carmona Estanga, qui était alors également le président de la fédération patronale FEDECAMARAS. S’agit-il d’un «mouvement national de protestation, de manifestations publiques ou d’une journée nationale de grève»? Il paraît clair que ces deux secteurs différents, à savoir les représentants des travailleurs de la CTV et les employeurs appartenant à la FEDECAMARAS dirigée par M. Carlos Fernández, se sont unis comme ils l’avaient fait à la fin de l’année 2001 pour mieux bafouer systématiquement l’Etat de droit et conspirer contre lui.
- 932. Il ne s’agit pas, dans le cas de la FEDECAMARAS, de «mouvements de protestation». Cette fédération patronale a toujours renié l’Etat de droit, et c’est aussi pour cette raison qu’en octobre 2002 elle appela à une nouvelle cessation d’activité à un nouveau lock-out, qu’elle justifia par la nécessité de «d’en finir avec le tyran» en référence au président de la République bolivarienne du Venezuela. Enfin, la FEDECAMARAS et son président, en liaison avec des groupes militaires putschistes, des partis politiques d’opposition et le comité directeur de la Confédération des travailleurs du Venezuela (CTV) ont été à l’origine de «la journée nationale de grève» ou le lock-out de décembre 2002-janvier 2003, appuyé par des médias dirigés par le successeur de M. Pedro Carmona Estanga, ex-président de la FEDECAMARAS, M. Carlos Fernández. Peut-on parler cette fois de «mouvement de protestation, de manifestations publiques ou de journée nationale de grève»?
- 933. Le gouvernement, et cela est incontestable, a parfaitement illustré sa vocation démocratique à travers la grande tolérance et l’infinie patience dont il a fait preuve face aux actions subversives de cette organisation d’employeurs et de ses complices. L’Exécutif national commença, dès le mois de février 2002, à rendre la communauté nationale et internationale attentive au fait que les actions planifiées par la fédération patronale FEDECAMARAS, les cadres illégaux de la CTV et les entrepreneurs propriétaires de certains médias visaient à créer un climat d’instabilité politique qui justifierait un coup d’Etat. Il avait dès lors précisé que des groupes militaires antipatriotiques et des partis d’extrême droite battus lors de nombreuses élections démocratiques participeraient à cette subversion.
- 934. Pendant le mois de décembre 2001 et également après le coup d’Etat d’avril 2002, la FEDECAMARAS et ses complices parvinrent à réinstaurer un régime autoritaire par des moyens désuets utilisés il y a de cela des décennies en Amérique latine et issus de la guerre froide qui dura 45 ans. Leurs actions subversives comptent avec le soutien international de pays (puissances) et d’institutions qui ont dépoussiéré les manuels sur les coups d’Etat du siècle dernier et qui ont même tenté d’appliquer la Charte démocratique de l’OEA. Les auteurs de ces actions n’ont pas tenté d’imposer leur volonté seulement au niveau national mais aussi au niveau international. Peut-on affirmer après ce qui vient d’être décrit que la FEDECAMARAS et ses représentants ont «exercé leur droit légitime à la protestation»?
- 935. Pour inciter au coup d’Etat, certains employeurs propriétaires de moyens de communication se sont transformés en de véritables outils de manipulation et de mensonges en vue de tromper la population, et plus particulièrement des classes moyennes qu’ils n’ont cessé d’effrayer en les menaçant de leur confisquer leurs terres et en leur faisant croire qu’un nouveau régime autoritaire allait être mis en place.
- 936. Différentes étapes ont mené au coup d’Etat, dont la FEDECAMARAS fut l’un des protagonistes. Tout commença par une série de grèves partielles lancées, avec peu de succès, par la direction illégitime de la CTV, au sein de secteurs qui ont trait aux droits de l’homme tels que ceux de la santé et des médecins ou de l’éducation. Contre toute attente, les cadres illégitimes de la CTV soutinrent la cessation d’activité illégale du personnel d’encadrement et de confiance de l’entreprise, Petróleos de Venezuela SA (PDVSA), personnel qui constitue l’employeur et qui n’a aucun lien avec les syndicats et encore moins avec la CTV ou la FEDECAMARAS.
- 937. L’organisation FEDECAMARAS a pris part à l’appel à la grève lancé par la CTV (en réalité, elle ne fait que lui rendre la pareille puisque cette dernière lui avait apporté son soutien lors de «la journée nationale de grève civique» du 10 décembre 2001). M. Pedro Carmona Estanga président de la FEDECAMARAS et les cadres illégitimes de la CTV appellent donc le 9 avril à une grève de 24 heures qui est un échec comme celle d’ailleurs du 10 décembre 2001, puisque qu’à peine 30 pour cent des travailleurs du pays y ont participé. Cette même nuit, ils appellent à une grève de 48 heures qui se soldera, elle aussi, par un échec puisqu’une grande partie des travailleurs, et de la population en général, n’y prendront pas part jugeant qu’il s’agissait d’une rébellion et non d’une manifestation revendicatrice pour l’amélioration des conditions sociales conformément à la Constitution. Malgré cela, la cessation de travail du 11 avril sera transformée en grève générale et les partisans du putsch seront appelés à manifestation qui devait ressembler à une manifestation «de masse» laissant présager un coup d’Etat préparé depuis des mois.
- 938. Ces événements ne rappellent-ils pas ceux qui se sont déroulés au Chili avant, pendant et après le coup d’Etat sanglant du 11 septembre 1973 qui visait à renverser le président élu démocratiquement par son peuple? Ces événements peuvent-ils être apparentés à «un mouvement de protestation, une manifestation publique ou à une journée nationale de grève».
- 939. Pour le gouvernement il ne fait aucun doute que l’appel à la grève générale lancé par la FEDECAMARAS et par les dirigeants illégitimes de la CTV faisait partie des plans de préparation du putsch qui incluaient l’organisation d’une manifestation des partis d’opposition qui irait jusqu’au palais du gouvernement se trouvant à environ 10 kilomètres de l’endroit où devait s’arrêter la manifestation conformément à l’autorisation délivrée par les pouvoirs publics. La FEDECAMARAS, la CTV et les autres participants cherchaient à faire s’affronter les détracteurs du régime et les partisans du gouvernement, c’est-à-dire les milliers d’hommes et de femmes qui s’étaient postés autour du palais présidentiel en signe de soutien au gouvernement, à son président, à la Constitution et aux droits de l’homme.
- 940. Pendant la manifestation de l’opposition, et ensuite lors du rassemblement autour du palais du gouvernement, les forces de police et les francs tireurs envoyés par le gouverneur de l’Etat du Miranda, Enrique Mendoza, membre du parti social-chrétien, ont eu un rôle déterminant. En outre, les maires des circonscriptions de Baruta et de Chacao dans l’Etat du Miranda, Enrique Capriles Rodonsky et Leopoldo López, appartenant tous deux au parti Justice d’abord, division du parti social-chrétien ou COPEI (Comité d’organisation politique des électeurs indépendants), et Alfredo Peña, maire de Caracas et chef de la police métropolitaine composée de 12 000 hommes et femmes entraînés pour des opérations telles que celles réalisées avant et après le coup d’Etat du 11 avril, ont aussi eu leur rôle à jouer lors de ces événements.
- 941. Le Président de la République, Hugo Rafael Chávez Frías, avait déjà averti des mois auparavant que les instigateurs de cette manifestation rendraient le gouvernement responsable des décès survenus en cas d’affrontement. Il y a eu au total le 11 avril 19 morts, dont la majorité parmi les partisans du régime du président Hugo Chávez. Les victimes ont été pour la plupart abattues d’une balle dans la tête.
- 942. En provoquant des affrontements où résonnent des coups de feu, des images retransmises par tous les médias, l’excuse était parfaite. Dès lors, le prétexte au putsch d’un groupe important de généraux et d’amiraux à l’arrestation et à l’inculpation du Président de la République, tenu pour responsable des meurtres et des assassinats ayant eu lieu le jour du coup d’Etat, était trouvé. Dans un moment de confusion et de violation de la Constitution par 20 militaires de haut grade, une rumeur s’est ensuite répandue comme une traînée de poudre, celle de la démission du président. Cette prétendue lettre de démission n’a jamais pu être produite puisqu’elle n’a jamais existé. Les putschistes ont donc fait valoir une autre thèse, celle de la vacance de pouvoir à laquelle M. Carmona a tenté de remédier en s’autoproclamant président de fait du Venezuela.
- 943. Les conspirateurs avaient auparavant argué de la démission du président Hugo Chávez qui avait cédé sa place à Diosdado Cabello Rondón, son vice-président et successeur, dans le cas où il ne pouvait plus assumer, temporairement ou définitivement, ses fonctions. Ils déclarent maintenant à l’opinion publique nationale et internationale que le Président a limogé tous ses ministres et qu’il a lui aussi renoncé à ses fonctions. «Ce sabordage n’est pas crédible, mais il parvient néanmoins à tenir les Vénézuéliens en haleine pendant quelques heures. C’est à ce moment précis que l’on a commencé à penser que le Président pouvait être responsable de la mort de certains manifestants de Chuao tentant d’approcher Miraflores.» (le quotidien Panorama, 22 avril 2002).
- 944. Au cours de la matinée du 12 avril 2002, alors que le président constitutionnel était en détention, M. Pedro Carmona Estanga, président de la fédération patronale FEDECAMARAS, entouré des militaires putschistes Vásquez Velasco, Medina Gómez et d’autres hauts gradés de la Force armée nationale, fait une déclaration depuis Fuerte Tiuna, quartier général de l’armée vénézuélienne où est détenu le président. Il prétend qu’il lui a été proposé de prendre la tête du gouvernement et s’empresse d’annoncer devant les médias qu’il accepte ces fonctions et qu’il va créer un gouvernement garantissant l’unité nationale. En quelques heures, cette après-midi là, Pedro Carmona Estanga s’était autoproclamé président et avait désigné les membres de ce gouvernement autoritaire transitoire.
- 945. Quelques heures plus tard, M. Carmona convoque une conférence de presse lors de laquelle il annonce officiellement qu’il a pris la tête du nouveau gouvernement de fait; Pedro Carmona est donc le premier président «non élu démocratiquement» des quarante-cinq dernières années de l’histoire de la République du Venezuela. C’est ainsi que s’achève un nouveau chapitre du récit des actions subversives, despotiques et antidémocratiques de la fédération patronale FEDECAMARAS et de ses dirigeants.
- 946. Des mois plus tard, le 22 octobre 2002, un groupe de militaires notoirement connus pour avoir participé au coup d’Etat du 11 avril s’est formé et, ne reconnaissant pas le pouvoir présidentiel, a appelé à une rébellion civile et militaire qui devait ressembler à celle du 11 avril de cette même année et qui conduisit à l’éphémère dictature de Pedro Carmona Estanga, alors président de la FEDECAMARAS. Le président Hugo Chávez, dans un souci de conciliation et de rétablissement du dialogue, invita ces militaires à cesser leur action et à se plier aux dispositions de la Constitution et des lois en vigueur.
- 947. La réponse des rebelles fut sans appel: aucun pardon (El Universal, 1er novembre 2002). Le Président de la République insista et leur dit que la voie révolutionnaire, fasciste et antidémocratique, n’était pas la bonne, mais qu’il fallait s’efforcer de parvenir à des accords démocratiques (El Universal, 8 novembre 2002). Que fit Carlos Fernández, président de la FEDECAMARAS? Il se rapprocha des militaires pour «mettre tout le monde d’accord» (El Universal, 7 novembre 2002). Quelques jours plus tard, le 11 novembre, M. Carlos Fernández rallia le camp de ces militaires et signa, soutenu par le président présumé de la CTV, M. Carlos Ortega, avec les militaires le «pacte démocratique». De nombreuses photographies montrent d’ailleurs Carlos Fernández et le Général putschiste, Medina Gómez, les bras levés en signe de victoire. Cependant, la phrase «grève nationale indéfinie» réapparaissait dans toutes les déclarations. Cette grève serait déclenchée si un accord n’était pas conclu quant à l’avenir politique du pays.
- 948. Les objectifs précis de cette «grève-sabotage» furent proclamés de différentes manières: pour l’obtention d’un référendum de révocation, pour que le président Hugo Chávez renonce à ses fonctions, qu’il s’en aille, ou pour que son gouvernement soit renversé, ou pour qu’il facilite de nouvelles élections. La présidente actuelle de la FEDECAMARAS, Mme Albis Muñoz, reconnaît le mobile politique de ces actions lors de l’assemblée annuelle de cette organisation: «La grève nationale civique que nous avons lancée avec toutes les forces d’opposition au cours des mois de décembre et janvier passés était le meilleur moyen pour obtenir des élections démocratiques qui tireraient le pays de la crise.» (www.fedecamaras.org.ve)
- 949. Lorsque débuta «la grève nationale civique», le gouvernement et la force d’opposition de Carlos Fernández adoptèrent deux attitudes opposées: le 2 décembre, qui marqua le début de la grève, le gouvernement organisa d’immenses marchés afin que la population puisse acheter des denrées alimentaires à bas prix, dont les ingrédients nécessaires à la confection des «hallacas», plat traditionnel typique de Noël au Venezuela. M. Carlos Fernández a dit à ce propos que le gouvernement avait obligé les fonctionnaires publics à se rendre sur ce grand marché en leur disant qu’une grève très sérieuse avait débuté (www.globovisión.com, 20 décembre 2002).
- 950. Le 5 décembre, la «Coordination démocratique», à laquelle appartiennent la CTV et la FEDECAMARAS en session permanente et contrôlant le déroulement de la grève, exhorta la population à ne pas reprendre le travail avant que les objectifs ne soient atteints. Le vice-président, José Vicente Rangel, souligna que le gouvernement devait maintenir le dialogue et revoir avec le docteur Gaviria l’ordre du jour pour la table de négociation et d’accord (El Mundo, 5 décembre 2003). Carlos Fernández soutenait déjà que la grève était un moyen de faire pression sur les participants à la table des négociations (il est notoire que le dialogue n’intéressait aucunement la FEDECAMARAS). Une fois encore, cette organisation adopte une position politique et agit de manière irrationnelle et destructrice. Une fois encore elle montre qu’elle ne croit pas au dialogue, et une fois encore elle ne fut suivie ni par le peuple ni par la démocratie.
- 951. Les enquêtes réalisées par la police vénézuélienne ont démontré que M. Carlos Fernández, était complice de la conspiration subversive des militaires dissidents (impliqués dans le coup d’Etat de 2002) de la Plaza Francia à Altamira. Ces militaires étaient également impliqués dans les assassinats de soldats sous leurs ordres lors de la prise de la Plaza Francia, dans les meurtres de trois jeunes personnes, dans des actes terroristes perpétrés au Consulat de Colombie à Caracas, et à l’Ambassade d’Espagne au Venezuela ainsi que dans des attentats terroristes. M. Carlos Fernández s’est-il comporté comme un dirigeant syndical qui se bat pour l’égalité, le progrès, le bien-être de la population et la justice sociale protégés par les conventions nos 87 et 98 de l’OIT?
- 952. Pour ce qui est de la détention judiciaire de M. Carlos Fernández, elle a eu lieu conformément à un mandat d’amener de l’Office du procureur de la République rédigé par Mme Luisa Ortega Díaz, sixième procureur du ministère public. Les charges retenues par le procureur de la République conformément au Code organique de procédure pénale (COPP) contre M. Fernández étaient les suivantes: incitation à la délinquance et au saccage, création d’organisations illicites et trahison de la patrie. Ces charges reposaient sur des preuves relatives au sabotage de l’industrie pétrolière lors de «la journée nationale de grève» ou lock-out en décembre 2002 et janvier 2003. Le juge chargé de l’affaire, Maikel Moreno, 34e juge pénal de la circonscription judiciaire de la zone métropolitaine de Caracas, fut à son tour récusé par les avocats de la défense de M. Fernández, et ce fut M. Gisela Hernández, 49e juge pénal, qui instruisit l’affaire.
- 953. Les accusations de trahison de la patrie, de conspiration et de saccage ne furent pas retenues par la nouvelle juge désignée après la récusation de M. Moreno. Elle maintint par contre les accusations de rébellion et d’incitation à la délinquance et décida, lors de l’audience préliminaire, d’assigner le président de la FEDECAMARAS à domicile dans sa résidence située à Valence, Etat de Carabobo, et non de l’écrouer pendant le procès.
- 954. Les avocats requirent l’assignation à domicile auprès du tribunal pour M. Carlos Fernández en raison de ses problèmes de tension artérielle qui débutèrent dès lors qu’il fut arrêté dans un restaurant de las Mercedes située à l’est de Caracas, par des forces de rétablissement de l’ordre de l’Etat qui détenaient un mandat d’arrêt du 34e juge pénal.
- 955. Suite aux interrogatoires de la procureur générale de la République auxquels il dut se soumettre en présence de ses avocats, M. Fernández fut raccompagné à son domicile où il était assigné et déclara qu’il avait été bien traité par les policiers de la DISIP (El Norte, 24 février 2003, www.elnorte.com.ve). L’épouse de M. Fernández, Sonia Fernández, déclara quant à elle «qu’elle avait pu téléphoner à son mari qui lui avait dit qu’il se trouvait au quartier général de la DISIP avec ses avocats et qu’il n’avait pas était maltraité. (...) Il m’a dit qu’ils l’avaient très bien traité, qu’il ne fallait pas que je m’inquiète et qu’il n’avait subi aucune violence physique» (El Universal, 20 février 2003, www.eud.com).
- 956. Lors de la procédure menée par l’Office du procureur général de la République, le Procureur général, le docteur Isaías Rodríguez, fit la déclaration suivante dans une communication: «Il faut rappeler que le citoyen Carlos Fernández a témoigné au ministère public, le 30 janvier, devant le procureur.» Il déclara ensuite aux médias qu’il fut à nouveau cité à comparaître en tant que prévenu. Pour sa part, le citoyen Carlos Ortega ne se rendit à aucune des citations à comparaître signifiée par l’Office du procureur général.
- 957. Le mardi 18 février, la procédure judiciaire se poursuivant devant l’autorité judiciaire compétente, conformément à l’article 250 du Code organique de procédure pénale (COPP), le procureur demanda au juge compétent la détention provisoire des intéressés afin que les citoyens Carlos Fernández et Carlos Ortega soient conduits devant le tribunal et que le juge compétent rende sa sentence.
- 958. Le mercredi 19 février 2003, le 34e juge pénal de la circonscription judiciaire de la zone métropolitaine de Caracas accéda à la requête et émit un mandat d’arrêt contre les citoyens susmentionnées. En 48 heures, l’individu appréhendé sera conduit devant le juge.
- 959. Pour poursuivre le récit exact des événements, il convient de dire qu’une Cour d’appel décida de libérer M. Fernández le 20 mars 2003, levant toutes les accusations portées contre lui et on ne sut rien des problèmes de tension dont souffrait M. Carlos Fernández. Ce dernier partit immédiatement pour les Etats-Unis où il réside aujourd’hui pour se soustraire à la justice.
- 960. Suite au jugement de la Cour d’appel de Caracas du 20 mars, la sixième procureur du ministère public, Luisa Ortega Díaz, présenta un recours devant la Cour suprême de justice (TSJ) où le magistrat José Delgado accéda à la requête de l’Office du procureur général de la République et ordonna de nouveau l’assignation à domicile de M. Carlos Fernández. En vertu de la sentence de la Cour suprême de justice lue par le président le 2 octobre 2003, le mandat d’arrêt fut maintenu et le 49e juge pénal fut chargé de maintenir l’assignation à domicile ou de prendre d’autres mesures.
- 961. Comment les organisations plaignantes, la FEDECAMARAS et l’OIE, pourront-elles prouver l’abus de pouvoir et la violation des droits de M. Carlos Fernández? Ce qui vient d’être démontré réfute les arguments de la FEDECAMARAS et de l’OIE selon lesquels la procédure légale n’aurait pas été respectée pour la détention de M. Carlos Fernández.
- 962. Il est nécessaire de rappeler ici ce qu’a fait M. Fernández pendant et après la grève (du 2 décembre au 4 février 2004) que Carlos Ortega, dirigeant de la CTV, et lui-même ont lancée. Ces deux dirigeants incitaient chaque jour, par le biais des différents médias, au sabotage de l’économie, à la méconnaissance de la Constitution, à la violence et à l’intolérance.
- 963. Les fais relatés par la suite prouvent que l’objectif de M. Carlos Fernández et de la fédération patronale FEDECAMARAS était de provoquer une insurrection capable de déstabiliser le pouvoir politique. C’est pour cette raison d’ailleurs que l’Office du procureur général de la République porte des accusations pour une série de délits contre M. Carlos Fernández, qui aujourd’hui fuit la justice.
- 964. Pendant ce qui a été appelé la «grève nationale civique» de décembre 2002 à janvier 2003, M. Carlos Fernández a donné quotidiennement des instructions, par le biais des médias, pour l’organisation de différentes opérations illégales, frauduleuses et préjudiciables à la population, comme par exemple le recueil de signatures pour l’organisation du référendum consultatif sur la révocation du mandat du président de la République bolivarienne du Venezuela. Il a également lancé plusieurs appels à des mouvements de protestation qui violaient les droits fondamentaux du peuple vénézuélien tels que: le retrait du droit au travail par la grève patronale ou le lock-out des entreprises et commerces situés dans les zones où vit la classe moyenne, la fermeture d’entreprises de secteurs clés de l’économie comme les industries alimentaires, les distributeurs de produits alimentaires et de médicaments qui ont payé à leurs employés cette journée chômée alors que ces derniers se regroupaient sur leur lieu de travail et demandaient à leurs directeurs de les laisser reprendre le travail. La réponse du soi-disant comité exécutif de la CTV et de la fédération patronale FEDECAMARAS aux employés fut la suivante: «nous sacrifier, voilà ce que nous devons faire pour en finir avec le tyran». Cette déclaration prouve que cette cessation d’activité revêt un caractère politique et anticonstitutionnel et qu’il ne s’agit pas d’un mouvement de revendication de travailleurs.
- 965. En outre, pendant la période en question, il a imposé à certaines classes sociales (en particulier à la classe moyenne) la fermeture d’autoroutes, d’avenues et de rues, enfreignant ainsi le droit à la libre circulation. Cette initiative a eu de graves conséquences pour les secteurs les plus vulnérables de la population (personnes âgées, malades, enfants et adolescents).
- 966. Il n’a cessé, preuve incontestable de son intolérance sociale, d’inciter les groupes fascistes de la population à fermer les commerces, les boulangeries, les supermarchés, les restaurants et autres entreprises de prestations de services. Ces mouvements de protestation se sont déroulés dans un climat d’agressivité et les participants, équipés de tout ce qui pouvait faire du bruit, étaient accompagnés de motards sur des motos de grosse cylindrée et de fonctionnaires de police des circonscriptions contrôlées par les forces d’opposition. Ils ont, à plusieurs reprises, violé le droit d’intégrité physique, celui de ne pas subir de pressions psychologiques et celui d’exercer librement ses droits économiques et sociaux, par exemple le droit de travailler et de gagner sa vie.
- 967. Avant et pendant la grève nationale civique ou le lock-out, fruit de la harangue de M. Fernández, des travailleurs ont été agressés, des véhicules des transports publics attaqués et certaines personnes gravement blessées (ceci uniquement parce qu’elles travaillaient).
- 968. Au cours des deux mois en question, des violations du droit à l’éducation, établi par la Constitution, par la Loi organique de protection des enfants et des adolescents et par la Convention internationale sur les droits des enfants, ont été constatées au mépris de leurs droits, et ce surtout dans les écoles privées ou dans celles se trouvant dans les circonscriptions sous tutelle de l’opposition.
- 969. Pour dénoncer la pauvreté engendrée par des siècles d’exclusion qui frappe une grande partie de la population vénézuélienne, les chefs d’entreprise des zones rurales ont déversé des millions de litres de lait dans les rivières et les bouches d’égout, ce qui a engendré une pénurie des produits de base de l’alimentation des enfants et des adolescents. Ils justifièrent cet immense gaspillage criminel par le fait qu’ils étaient en grève et qu’ils devaient «mettre un terme à cette tyrannie». C’est ainsi qu’ils enfreignirent le droit à l’alimentation au nom de la «démocratie».
- 970. M. Ortega et M. Fernández ont abusé de leur droit à l’information, à la libre expression et à l’utilisation des canaux de diffusion, que sont la radio et la télévision, pour inciter la population à la délinquance, pour susciter la désinformation, la haine, transmettre des messages subliminaux à travers la publicité et faire de la propagande de guerre. Ces tentatives «d’endoctrinement» (auxquelles ont participé la presse nationale et internationale) mettent en danger la santé mentale de la population. Le président de la CTV, M. Carlos Ortega, d’anciens hauts fonctionnaires de la société PDVSA et le président de la fédération patronale FEDECAMARAS ont été les porte-parole de toutes les opérations décrites auparavant. Il convient de rappeler en outre que M. Carlos Fernández avait signé l’accord de gouvernabilité qui «légitimait» le dictateur Pedro Carmona Estanga, président au moment du coup d’Etat de la FEDECAMARAS. Ce qui signifie que les messages diffusés par les médias, ci-dessus évoqués, n’étaient que de la propagande, des mensonges et de la manipulation.
- 971. Ils incitèrent à la violation du droit de libre circulation sur le territoire national. En outre, les forces d’opposition ont entrepris à plusieurs reprises des actions criminelles comme le sabotage des transports publics ainsi que celui des distributeurs de carburants, de médicaments et de produits alimentaires.
- 972. La période de «grève nationale civique» a aussi été l’occasion de nombreuses campagnes «anti-Force nationale armée». En effet, cette institution a été menacée de dissolution et ses représentants, comme les membres de leur famille, ont subi des menaces physiques et ont été injuriés à leur domicile. Les murs du domicile de ces personnes ont été recouverts d’injures, ce qui constitue une incitation à l’intolérance et à la violation de la démocratie et du droit à la liberté.
- 973. Les citoyens vénézuéliens ont vu leur droit à l’identité et leurs autres libertés civiles bafoués. Les mairies, préfectures et autres bureaux de l’Etat civil sous contrôle de l’opposition fasciste étant fermés, les citoyens n’ont pas pu, entre autres, enregistrer la naissance de leurs enfants, remplir leurs formalités de départ, se marier ou encore obtenir leur permis d’établissement.
- 974. Les installations de Petróleos de Venezuela SA ont été saccagées et ses activités interrompues. Les dégâts matériels ont été importants et l’interruption des activités de cette entreprise a fait perdre beaucoup d’argent au pays (une somme estimée à plus de dix milliards de dollars). Ces événements ont perturbé le bon déroulement des activités de la société étatique PDVSA qui génère 83 pour cent du PIB de la République et ont été préjudiciables au budget de l’Etat, et donc à ses investissements dans le secteur social. Ce sabotage est le fait d’anciens membres du comité de direction et de gérance de cette industrie pétrolière. Ils ont compté avec le soutien des médias et de la Coordination démocratique dont fait partie la FEDECAMARAS et le soi-disant comité directeur de la CTV. Cette entrave directe aux droits économiques a eu pour conséquence la suppression de 500 000 postes et la perte de plus de 10 milliards de dollars.
- 975. Cependant, les mesures prises par l’Etat à partir de mars 2003, suite à ce véritable sabotage de l’économie nationale, ont relancé la production de manière étonnante.
- 976. Cette «grève nationale civique» avait presque dévasté l’économie vénézuélienne en faisant chuter le PIB. M. Carlos Fernández est directement impliqué dans ce désastre économique en tant que président de la fédération patronale FEDECAMARAS.
- 977. Après avoir chuté vertigineusement pendant les trois premiers trimestres de l’année, la croissance du PIB reprit au cours du dernier trimestre, alors que la FEDECAMARAS perdait de sa crédibilité aux yeux de ses membres. Ces derniers, constatant l’échec du renversement du président constitutionnel de la République bolivarienne du Venezuela, commencèrent à réaliser des investissements, c’est-à-dire qu’ils commencèrent à ouvrir de nouvelles entreprises. L’activité des entreprises qui avaient souffert de la grève et celle de l’industrie pétrolière reprit, à la grande satisfaction des investisseurs. Sous un régime dictatorial sans politiques clairement définies pour le secteur privé, aurions-nous assisté à une reprise de l’économie traduite par la croissance du PIB après cette «grève nationale civique»?
- 978. Cet état de fait prouve que les allégations de la FEDECAMARAS, selon lesquelles les employeurs avaient été persécutés et marginalisés, qu’il y a avait un total manque de dialogue, etc., sont infondées. Les chiffres parlent d’eux-mêmes.
- 979. Entre le mois de novembre 2002 et le mois de février 2003, le chômage est passé de 15,7 pour cent à 20,7 pour cent, c’est-à-dire qu’il y a eu 553 515 chômeurs de plus. En novembre 2002, il y avait 1 852 736 chômeurs et, au mois de février 2003, ce chiffre est passé à 2 406 251. La «grève nationale civique», orchestrée par Carlos Fernández de la FEDECAMARAS et par Carlos Ortega dirigeant présumé de la CTV, a entraîné la suppression de 760 846 postes de travail (ce qui correspond à une augmentation du chômage de 5 pour cent). La suppression de postes fait-elle partie des attributions des dirigeants syndicaux? Est-ce ainsi que la FEDECAMARAS croit pouvoir justifier ses actions et démontrer à l’OIT qu’il y a eu violation de la convention no 87 de l’OIT?
- 980. Cependant, à la fin de l’année 2003, il est notoire que le chômage est retombé à son taux d’avant la «grève» et le sabotage de l’économie. La création de postes a été de 100 pour cent dans le secteur privé. S’il n’y avait pas eu de politiques claires régissant les entreprises privées, les organisations d’employeurs et le dialogue avec les investisseurs, le marché du travail aurait-il un jour été rétabli? Quel Président au monde aurait pu résister à un coup d’Etat, surmonter le sabotage de son économie et autres agressions en tout genre sans le soutien immensément majoritaire de son peuple?
- 981. Les agissements peu scrupuleux de Carlos Fernández et de la FEDECAMARAS, tels que les appels à la grève, le sabotage des raffineries, des puits de pétrole et autres installations qui sont à l’origine de fuites de pétrole et d’hydrocarbures, avaient pour but de nuire à la réputation du gouvernement vénézuélien et de lui faire endosser la responsabilité des dégâts causés à l’environnement en laissant entendre que le personnel engagé pour remplir les postes abandonnés de façon irresponsable par les cadres et le personnel de confiance légalement licenciés était «incompétent». Ces personnes ont même, de façon criminelle, monté des pièges qui auraient, en plus de polluer l’environnement, pu provoquer des accidents et tuer un nombre incalculable de personnes parmi la population vivant à proximité des centres d’extraction, de raffinage et de distribution des différents hydrocarbures de l’industrie pétrolière, patrimoine de l’humanité.
- 982. Les sources d’approvisionnement des industries sidérurgiques de la zone industrielle de Guyana furent sabotées afin d’anéantir le gouvernement vénézuélien et de nuire aux entreprises clés de la République comme aux fournisseurs de matières premières pour les marchés internationaux européen, américain, asiatique et africain.
- 983. Ils bloquèrent au port les bateaux transportant du carburant pour les automobiles et autres moyens de transport nationaux et sabotèrent les systèmes informatiques permettant de contrôler l’activité pétrolière. La Coordination démocratique à laquelle appartient la FEDECAMARAS donna, par l’intermédiaire de ses porte-parole, M. Ortega et M. Fernández, l’ordre aux employés des entreprises des zones sensibles de l’industrie pétrolière, travaillant au remplissage des citernes de combustible des camions, d’abandonner leur poste. La population a donc été contrainte à faire des heures de queue pour s’approvisionner en carburant et en gaz. Ce sabotage a donc eu de lourdes conséquences sur l’industrie pétrolière et sur le libre exercice des droits fondamentaux de l’homme.
- 984. La Coordination démocratique et ses porte-parole, MM. Ortega et Fernández, n’ont eu de cesse d’inciter les classes moyennes de la population à harceler des ambassades, comme celle du Brésil, parce qu’elle vendait du carburant à la République de l’Algérie parce qu’elle offrait à notre industrie pétrolière, dans le cadre de la coopération internationale, une assistance technique suite au brutal et impitoyable sabotage de l’économie nationale. Ils entamèrent en même temps une campagne médiatique grotesque contre certains employeurs et contre le gouvernement de la Colombie qui vendaient à la République bolivarienne du Venezuela de la viande, du lait et autres aliments faisant défaut à la population suite au lock-out des entreprises décidé par le soi-disant comité exécutif de la CTV et la FEDECAMARAS.
- 985. M. Fernández et M. Ortega ont élaboré des campagnes d’incitation à la délinquance et au non-paiement des impôts, des cotisations à la sécurité sociale et autres taxes. En conséquence, 600 000 personnes n’ont pas touché à temps leur pension mensuelle. D’autres personnes, malades du SIDA, diabétiques, atteintes d’insuffisance rénale et nécessitant des soins médicaux particuliers et onéreux, n’ont pu être prises en charge. Une fois encore, il s’agit là de violations du droit à la santé, à percevoir une pension en temps voulu, à la tranquillité et à la sécurité sociale.
- 986. Un horaire d’ouverture restreint fut imposé aux banques et aux institutions financières et il fut même question de prolonger encore la fermeture de ces sociétés. Durant cette période, l’accès aux comptes bancaires était difficile, et la population manquait d’espèces pour l’achat des denrées alimentaires de base, des médicaments, des billets pour les transports publics et des vêtements.
- 987. L’élaboration d’une campagne de publicité et de propagande contre la célébration de Noël (la campagne: «Vous fêterez Noël plus tard!» fut diffusée à la télévision, à la radio et dans la presse tout au long du mois de décembre) constitue une violation du droit culturel et du droit à la liberté de croyance religieuse. Cependant, c’est la période du Nouvel An qu’a choisie M. Fernández pour se rendre sur l’île de Aruba et abandonner ses rares partisans incités à passer Noël dans une entreprise de Altamira en signe de protestation.
- 988. L’opposition a enfreint le droit à la santé, et plus particulièrement celui des personnes souffrant de maladies chroniques graves, etc., en entravant la distribution de médicaments.
- 989. Elle a aussi transgressé le droit au divertissement en suspendant l’accès aux cinémas, aux lieux de promenade et de divertissement, et la saison des équipes vénézuéliennes professionnelles de base-ball.
- 990. On a violé les droits de l’homme et le principe de non-discrimination tout comme le droit à l’égalité quand, de manière systématique, les médias ont mis en danger la santé mentale des adultes et des enfants par la diffusion de propagande à contenu raciste et ségrégationniste, empêchant la coexistence harmonieuse et pacifique des différents secteurs de la population.
- 991. Il y a eu violation des droits à la vie et à l’intégrité physique lors de l’intervention violente de forces de police, sous contrôle des maires et gouverneurs de l’opposition, pour contenir la population qui manifestait contre les agissements fascistes de l’opposition. M. Ortega et M. Fernández en ont d’ailleurs profité pour dire que ces agissements étaient le fait du gouvernement et pour qualifier le Président de la République de tyran, d’assassin et de dictateur.
- 992. Les corps de police de l’opposition fasciste ont contrevenu, pendant des veillées funèbres, au droit au respect et à liberté de croyance religieuse par la diffamation et les injures proférées contre les familles des partisans du gouvernement, mortes pendant les mouvements de protestation.
- 993. Les droits économiques, le droit à la propriété individuelle et collective et le droit au travail ont également été bafoués. En effet, «la grève nationale civique» et la fermeture arbitraire des centres commerciaux par des propriétaires capitalistes qui se soucient peu des petites et moyennes entreprises et des emplois qu’elles créent ont occasionné des pertes irréparables pour les propriétaires d’arcades dans ces établissements.
- 994. En incitant à «la grève nationale civique» et au sabotage de l’économie qui engendra la suppression de 500 000 postes de travail dans les secteurs commercial, industriel et des services, une importante inflation et la chute de l’activité économique, les dissidents ont violé le droit au travail.
- 995. Les partis politiques de l’opposition, les médias, les porte-parole de la CTV et de la FEDECAMARAS ont largement répandu l’idéologie fasciste et ont prôné l’intolérance. Les participants aux mouvements de protestation furent invités à se vêtir de noir, couleur du deuil et de la désolation (le noir symbolise aussi le fascisme), et s’en sont pris aux déshérités en les traitant de vermines, d’ivrognes, d’incultes, d’édentés, et en les faisant passer pour des individus sales et malodorants.
- 996. La population fut poussée, de façon grotesque, à ne pas reconnaître les institutions publiques et à commettre des actes illégaux et troublant l’ordre public. Lorsque la Cour suprême a rendu des jugements favorables à l’opposition, comme par exemple la décision du 20 août 2002 stipulant qu’à défaut de preuves suffisantes les quatre généraux et amiraux de la Force armée nationale, qui avaient participé au coup d’Etat d’avril 2002, ne seraient pas jugés, les juges furent encensés comme des héros impartiaux et justes. Par contre, la sentence de la Cour suprême ordonnant à tous ceux qui avaient participé au sabotage de l’industrie pétrolière de se plier dorénavant à tous les décrets visant à redresser la situation, promulgués par le pouvoir exécutif, fut très mal reçue. Les partis d’opposition allèrent même jusqu’à dire qu’ils étaient «prisonniers» du pouvoir exécutif.
- 997. Après les deux mois de grève, la Coordination démocratique et ses porte-parole, Carlos Ortega et Carlos Fernández, ne savaient comment expliquer l’échec de cette grève et, comble de l’irresponsabilité, ils se rejetèrent la faute les uns sur les autres. C’est avec beaucoup d’insolence qu’ils firent les déclarations suivantes: «nous avons perdu le contrôle de cette grève», «nous ne souhaitions pas une grève indéfinie», «nous n’avons pas lancé cette grève dans le but d’obtenir la démission du Président de la République». Ces assertions lâches et irresponsables sont révélatrices de l’état d’esprit de ceux qui, aux niveaux national et international, ont fait confiance aux partis d’opposition et qui les ont soutenus. La lâcheté des opposants au régime prouve qu’ils ne revendiquaient pas pour le progrès et pour le respect des droits du peuple vénézuélien mais souhaitaient instaurer une véritable dictature. Tout ce qui vient d’être relaté ne définit-il pas très bien les notions de «mouvement de protestation, manifestations publiques ou journée de grève nationale»?
- 998. Pour ce qui est de la méconnaissance de la loi par des organisations syndicales d’employeurs ou de travailleurs, le Comité de la liberté syndicale a été très clair dans ces décisions:
- 204. Les questions politiques ne mettant pas en cause l’exercice des droits syndicaux échappent à la compétence du comité. Le comité s’est déclaré incompétent pour connaître d’une plainte, dans la mesure où les faits qui ont déterminé son dépôt peuvent avoir été des actes subversifs, et il est, au même titre, incompétent pour connaître des questions politiques évoquées éventuellement dans la réponse du gouvernement. (Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale de 1985, paragr. 201.)
- 450. Dans l’intérêt du développement normal du mouvement syndical, il serait désirable que les parties intéressées s’inspirent des principes énoncés dans la résolution sur l’indépendance du mouvement syndical adoptée par la Conférence internationale du Travail à sa 35e session (1952), qui prévoit notamment que l’objectif fondamental et permanent du mouvement syndical est le progrès économique et social des travailleurs et que, lorsque les syndicats décident, en se conformant aux lois et usages en vigueur et à la volonté de leurs membres, d’établir des relations avec les partis politiques ou d’entreprendre une action politique pour favoriser la réalisation de leurs objectifs économiques et sociaux, ces relations ou cette action politique ne doivent pas être de nature à compromettre la continuité du mouvement syndical ou de ses fonctions sociales et économiques, quels que soient les changements politiques qui peuvent affecter la situation dans le pays.
- 454. Les organisations syndicales ne doivent pas abuser de leur activité politique en outrepassant leurs fonctions propres et en promouvant des intérêts essentiellement politiques. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale de 1985, paragr. 355.]
- 457. Ce n’est que dans la mesure où elles prendront soin de ne pas conférer à leurs revendications professionnelles un caractère nettement politique que les organisations pourront légitimement prétendre à ce qu’il ne soit pas porté atteinte à leurs activités. D’autre part, la frontière entre ce qui est politique et ce qui est proprement syndical est difficile à tracer avec netteté. Les deux notions s’interpénètrent et il est inévitable, et parfois normal, que les publications syndicales comportent des prises de position sur des questions ayant des aspects politiques comme sur des questions strictement économiques et sociales. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale de 1985, paragr. 359.]
- 999. M. Carlos Fernández n’a pas agi pour «promouvoir et défendre les intérêts économiques et sociaux des travailleurs», il n’a pas non plus appelé à «un mouvement de protestation, à des manifestations publiques ou à une journée nationale de grève».
- 1000. Pour ce qui est des commentaires de la FEDECAMARAS et de l’OIE concernant la loi d’habilitation et le dialogue, le gouvernement souligne que les allégations de la FEDECAMARAS et de l’OIE tendent à occulter les actions subversives, illégales, autoritaires de la fédération patronale FEDECAMARAS et de ses dirigeants. Elles affirment dans leurs allégations qu’il n’y a eu aucune tentative de dialogue et illustrent leur propos en citant l’exemple de la promulgation illégale de 49 lois dont le gouvernement de la République bolivarienne du Venezuela a informé ponctuellement les parties intéressées. Il ne relève pas des compétences du Comité de la liberté syndicale d’examiner des faits qui n’ont rien à voir avec la liberté syndicale. Le comité ne peut donc pas soumettre de recommandations sur des questions qui relèvent des compétences de la Cour suprême et qui ne sont pas traitées dans la convention no 87 de l’OIT.
- 1001. Cependant, c’est dans un esprit de collaboration et de coopération que le gouvernement de la République bolivarienne du Venezuela déclare, de façon sérieuse et responsable, que les décrets-lois de la loi d’habilitation sont le fruit d’une longue concertation entre les citoyens, les divers secteurs sociaux, académiques et culturels du pays, les organisations d’employeurs et lui-même. En consultant les parties intéressées, le gouvernement national de la République bolivarienne du Venezuela a exprimé sa profonde conviction démocratique et a respecté son obligation constitutionnelle. Il estime en outre que la concertation est la base d’une cohabitation harmonieuse des différents acteurs sociaux au sein de la République bolivarienne du Venezuela.
- 1002. Précédents: Il convient de préciser les étapes du processus d’approbation des lois d’habilitation par le pouvoir exécutif national.
- 1003. La promulgation de la loi d’habilitation relève des compétences du Président de la République, conformément à la Constitution. Il peut donc légiférer par le biais de décrets-lois, comme le stipule clairement le quatrième paragraphe de l’article 203 de la Constitution de la République bolivarienne du Venezuela: «Sont des lois d’habilitation celles sanctionnées par l’Assemblée nationale, par les trois cinquième de ses membres, dans le but d’établir les directives, propositions et le cadre des matières qui sont déléguées au Président ou à la Présidente de la République avec rang et valeur de loi. Les lois habilitation doivent fixer le délai de leur exécution.»
- 1004. C’est ainsi que, conformément à la Constitution et comme dans toutes les démocraties telles que celle du Venezuela, le Président de la République bolivarienne du Venezuela demanda à l’Assemblée nationale son habilitation à légiférer sur des questions aussi sérieuses que les droits de l’homme. L’Assemblée nationale accéda à sa demande dans la loi autorisant le Président de la République à édicter des décrets ayant force de loi dans le cadre des matières qui lui sont déléguées, qui fut publiée dans le Journal officiel no 37077 du 14 novembre 2000. Le pouvoir exécutif national dispose d’une période de un (1) an pour légiférer sur les questions énumérées dans le tableau ci-dessous:
- Domaine de la production et domaine social Nombre de lois approuvées
- Développement industriel 1 décret-loi
- Développement agricole 4 décrets-lois
- Développement durable 3 décrets-lois
- Système financier 11 décrets-lois
- Développement des régions, bien-être social 3 décrets-lois
- et communautés
- Industrie pétrolière 1 décret-loi
- Secteur des services 7 décrets-lois
- Développement des institutions 19 décrets-lois
- 1005. Toutes les lois sont fondamentales pour l’évolution de la situation des habitants de la République. Elles sont totalement inhérentes à l’application progressive des droits de l’homme. Les lois d’habilitation se complètent pour une meilleure application des dispositions de la Constitution de la République bolivarienne du Venezuela et pour garantir le respect des engagements de la République en matière de droits de l’homme.
- 1006. Le pouvoir exécutif national a commencé à consulter le secteur patronal et l’a fait participer à l’élaboration des lois d’habilitation dès qu’il y fut autorisé, le 14 novembre 2000. Cette date a marqué le début d’une série de réunions ayant pour objectif d’établir un programme de travail, de définir une méthode de travail et d’étudier les propositions respectives. Les organisations syndicales affiliées à la FEDECAMARAS, comme toutes les autres, ont eu la possibilité de prendre part à chacune des étapes de ce processus.
- 1007. Il convient de souligner que, pendant le coup d’Etat du 12 avril 2002, l’annonce de la suspension de ces mêmes décrets-lois fut très chaleureusement accueillie par la fédération patronale FEDECAMARAS, les cadres illégitimes de la CTV, les médias, les partis politiques d’opposition de la «Coordination démocratique» et les militaires putschistes, et même reconnus par les hommes de lois travaillant sur les droits de l’homme. La suspension des lois d’habilitation s’accompagna de la dissolution de tous les pouvoirs publics constitutionnels, soumis au référendum, à savoir les pouvoirs exécutif, législatif, judiciaire, électoral et citoyen. Par conséquent, la question de savoir quelles étaient les lois qui ont motivé le coup d’Etat se pose. Ce coup d’Etat, comme le savent le Comité de la liberté syndicale et la communauté internationale, n’a duré que 47 heures, à la suite duquel l’Etat de droit et la Constitution furent rétablis par le peuple et la Force armée nationale patriotique. Le pouvoir du Président de la République bolivarienne du Venezuela, Hugo Chávez, fut lui aussi rétabli. En d’autres termes, le peuple et la Force armée nationale redonnèrent force et vigueur aux droits de l’homme.
- 1008. Pendant la période d’élaboration desdits décrets-lois, de nombreux secteurs de la société, y compris les organisations patronales et de travailleurs, furent consultés. Par la suite, la fédération patronale FEDECAMARAS s’est exclue d’elle-même de ce processus d’élaboration parce qu’elle refusait de participer à la plupart des consultations. Les organisations d’employeurs et de travailleurs, c’est-à-dire les fédérations et syndicats principaux et secondaires, n’ont pas pour autant cessé d’être consultées. Certains décrets-lois ont d’ailleurs été acceptés à la majorité et d’autres pas, ce qui se produit dans toutes les démocraties. Ces problèmes ont été résolus par le dialogue et par l’apport de réformes élaborées par l’Assemblée nationale ou par l’annulation, partielle ou totale, du décret-loi selon les griefs exprimés par les parties devant la Cour suprême de justice. Au fur et à mesure que les discussions avançaient, certains désaccords sont apparus et les employeurs ont radicalisé leur position car ils souhaitaient imposer leur point de vue sans tenir compte de la population marginalisée et pauvre. Le vice-président de la FEDECAMARAS et les représentants de la chambre de la construction et du CONINDUSTRIA (Conseil national de l’industrie) se réunirent avec le cabinet exécutif dirigé par le ministre de la Planification, Jorge Giordani, directeur du cabinet économique de l’Exécutif national, le 28 août 2001, et également avec la commission spéciale chargée de la rédaction de la loi sur les hydrocarbures, incorporée à la loi d’habilitation, pour qu’ils présentent leurs observations. Lors de ces réunions, ils discutèrent des autres questions couvertes par la loi d’habilitation quant aux différents secteurs de l’économie.
- 1009. Il est absolument normal que des désaccords surviennent lors de l’élaboration de textes de lois dans les Etats de droit et les démocraties. Parvenir à un accord est d’autant plus difficile que la République bolivarienne du Venezuela fait participer son peuple aux processus décisionnels. Après un long combat, le peuple vénézuélien est fier de constater que la neuvième Constitution bolivarienne tient désormais compte des droits de l’homme et que ces droits sont appliqués et mis en oeuvre progressivement avec un objectif profondément démocratique.
- 1010. Les quarante-neuf décrets-lois abondent dans le sens de la Constitution nationale et de la justice sociale, reflet des droits de l’homme reconnus aux niveaux régional et universel, et en particulier au sein de l’OIT. Les lois susmentionnées sont favorables aux familles de paysans, à tous les pêcheurs, aux membres des coopératives, à l’environnement, à la population vénézuélienne vivant dans le dénuement et tenue à l’écart pendant des siècles de la démocratie représentative en place de 1958 à 1998. Au cours de cette période, le Venezuela n’a fait, aux plans national et international, que peu de progrès en matière de droits de l’homme qui ont été fréquemment violés. Voilà qui est paradoxal pour une démocratie qui plaide aujourd’hui la cause des droits de l’homme auprès de toutes les instances régionales et universelles compétentes.
- 1011. Depuis son arrivée au pouvoir en 1999, le président Hugo Rafael Chávez Frías, élu démocratiquement par son peuple, a toujours été ouvert au dialogue avec tous les secteurs sociaux, et plus particulièrement avec le secteur des entreprises. Son attitude à cet égard est toujours restée la même et ne va pas changer. C’est ainsi qu’après de longues journées de dialogue avec les différents acteurs sociaux une nouvelle étape de mise en application de la Constitution de la République bolivarienne du Venezuela a commercé en 1999.
- 1012. Cette nouvelle étape de dialogue débute par l’approbation de la loi d’habilitation; en voici un exemple lié à M. Pedro Carmona Estanga, président alors récemment élu de la FEDECAMARAS:
- Moins de 48 heures après avoir pris les fonctions de président de la FEDECAMARAS, Pedro Carmona Estanga reçut non seulement l’appui majoritaire des employeurs, mais aussi celui des membres des pouvoirs exécutif et législatif. Les employeurs promirent en outre de favoriser le dialogue et déclarèrent que «l’entretien avec le président constitue une étape décisive. Cette réunion permettra d’aborder des thèmes fondamentaux tels que la relance économique, les investissements comme moteur du développement national, l’emploi et l’insécurité publique à laquelle il faut remédier car il s’agit d’un problème important dans notre société. Le président du CONINDUSTRIA, M. Lope Mendoza, s’est félicité de la décision du gouvernement d’entamer le dialogue avec les représentants du secteur national de la production.» Où y a-t-il un manque de dialogue, de décisions concertées et une violation de la liberté syndicale et du droit de propriété privée?
- 1013. Il est important de souligner que, lorsque M. Vicente Brito présidait la FEDECAMARAS, il s’était opposé à la politique gouvernementale, y compris pendant le processus d’adoption de la Constitution en 1999. M. Brito s’est toujours opposé à l’approbation de cette Constitution et il incita la population à voter «non» lors du référendum d’adoption de la nouvelle Constitution. Un des arguments évoqués pour justifier ce refus était de nature discriminatoire puisqu’il était avancé que la nouvelle Constitution reconnaissait les peuples indigènes qui vivaient depuis des millénaires sur notre territoire. Il convient de noter que, sous la présidence de M. Brito, le premier vice-président de la FEDECAMARAS était M. Pedro Carmona Estanga, qui lui succédera ensuite.
- 1014. Une fois élu à la présidence de la FEDECAMARAS, M. Carmona critiqua son prédécesseur et fit la déclaration suivante: «La FEDECAMARAS ne doit pas intervenir dans la politique interne, celle des partis, mais doit se concentrer sur les politiques d’importance majeure telles que celles adoptées en matière économique, d’équité sociale, de respect de la propriété privé, de sécurité et d’investissement.» Ce fut pour discuter de ces lignes politiques que les dirigeants de la FEDECAMARAS furent reçus au Palais du gouvernement le 10 août 2001 par le président Hugo Chávez. Voici ce que déclara ensuite M. Carmona:
- ... Ce fut une réunion très riche, où tout le monde s’est exprimé avec sincérité, sans éluder aucune question, dans un total respect mutuel et avec pour but un rapprochement constructif des institutions nationales. (...) Les dirigeants de la FEDECAMARAS, les présidents des organisations des différents secteurs ainsi que le cabinet économique ont décidé d’une réunion de travail, à laquelle participerait le Président de la République, afin de pouvoir y discuter de thèmes spécifiques nécessitant une concertation ou une prise de décisions. (...) Il fut décidé également d’élever le débat et de minimiser les controverses publiques en maintenant les canaux ce communication appropriés. Cette réunion fut donc positive et ouvrit la voix au dialogue...
- 1015. La sincérité du gouvernement et sa volonté d’instaurer le dialogue et de parvenir à une entente avec les employeurs et les secteurs de production sont évidentes. M. Carmona fut invité à se joindre aux visites officielles du président Hugo Chávez en Colombie et au Chili en septembre 2001, afin de montrer que le pays entier prenait part aux accords commerciaux, culturels et concernant les échanges de biens et services. Qui mieux que le plus haut représentant de la fédération patronale de la République bolivarienne du Venezuela pourrait entamer des négociations avec les employeurs d’autres pays?
- 1016. Par la suite, les dirigeants de la FEDECAMARAS, constatant que leurs exigences n’étaient pas docilement acceptées par le gouvernement et par les participants à l’élaboration des lois d’habilitation, ont commencé à être beaucoup moins ouverts au dialogue. Les dirigeants de la FEDECAMARAS ont une fois encore prouvé qu’ils ignoraient le sens des mots «consensus» et «équité», mais surtout qu’ils ne savaient pas agir de façon constructive. Pour quelle raison les différentes organisations d’employeurs affiliées à la FEDECAMARAS se sont-elles retirées des discussions sur la promulgation des lois d’habilitation? Parce qu’ils ne pensaient pas que le nouveau texte de Constitution serait appliqué à la lettre, qu’ils pourraient le transgresser et l’adapter à leurs propres intérêts, comme ils le firent avec la Constitution de 1961 et le pacte de Punto Fijo, dont il a été question précédemment dans la présente réponse.
- 1017. Les organisations patronales, loin de se plier aux règles démocratiques garantes d’une cohabitation pacifique, ont entamé une série d’actions illégales. Ces organisations n’ont tout d’abord pas répondu aux convocations des instances judiciaires. Elles ont ensuite exigé l’arrêt de la distribution des terres en friche, propriété de l’Etat, aux paysans et à leurs familles, les privant ainsi de la possibilité de les cultiver dans un pays où 90 pour cent des terrains agricoles appartiennent à des propriétaires terriens et sont inexploités. En outre, nombreux sont les propriétaires terriens qui n’ont pas produit les pièces justificatives de leur droit de propriété. Les organisations se sont, dans ce cas, opposées à une politique constitutionnelle sociale et économique d’inclusion de la population vivant dans la pauvreté. Les employeurs souhaitaient ainsi pousser le pays à l’autosuffisance et stopper les importations de 90 pour cent des aliments consommés par la population de la République bolivarienne du Venezuela. Selon la convention no 87 de l’OIT, est-il interdit de produire des aliments, de générer des bénéfices ou encore de redistribuer équitablement les terres cultivables?
- 1018. Les représentants de la FEDECAMARAS accusent le gouvernement de décréter des lois de manière unilatérale, sans qu’il y ait de dialogue, en violation de la Constitution nationale. Pourtant, alors que les employeurs de la FEDECAMARAS en faisaient de même, ils se réunissaient de manière subversive avec des éléments politiques opposants pour organiser des actes de sabotage de l’économie à des fins éminemment politiques, tels que l’appel à la grève proféré progressivement par région dans le pays, comme cela a été le cas dans l’Etat de Zulia. L’appel a été lancé le 9 octobre 2001, en menaçant d’étendre les manifestations, les menaces les plus radicales émanant de la corporation agricole de la Fédération nationale d’éleveurs (FEDENAGA), filiale de la FEDECAMARAS, qui a menacé de paralyser la production de viande et de lait et d’étendre la grève à d’autres régions. Est-ce là une façon d’ouvrir le dialogue?
- 1019. Parallèlement, le gouvernement national a encouragé une rencontre visant à dialoguer et à parvenir à des accords, pour laquelle le président Hugo Chávez a réuni une commission spéciale dans le but de débattre des différends, et les producteurs ont suspendu la grève «jusqu’à nouvel ordre, à la demande des producteurs agricoles eux-mêmes». A l’évidence, cette première tentative de paralyser les secteurs de la production a échoué, étant donné que le commerce, le trafic et les banques ont fonctionné normalement, selon le ministre de l’Intérieur et de la Justice et le gouverneur de l’Etat (El Universal, 10 octobre 2001): «Malgré la fermeture de la route panaméricaine - qui, pendant plus de huit heures, a paralysé la libre circulation entre les municipalités du sud de Lago -, l’arrêt de travail appelé par les éleveurs de Zulia n’a pas remporté le succès escompté par la corporation agricole de la ville et n’a été suivi qu’à 30 pour cent.» (ibid.).
- 1020. Pourtant, la FEDECAMARAS restait systématiquement et volontairement fermée au dialogue et, devant ce refus systématique, le gouvernement national a maintenu le dialogue et les négociations avec les secteurs des petites et moyennes entreprises, secteurs traditionnellement exclus des grandes décisions politiques, économiques, sociales et liées aux entreprises prises par la FEDECAMARAS et par les gouvernements successifs assurant la présidence du mandat national actuel, cette exclusion émanant, comme indiqué précédemment, du pacte de Punto Fijo.
- 1021. Les débats, le dialogue et les accords avec les petits employeurs regroupés au sein de la FEDEINDUSTRIA ont été fructueux et ont débouché sur des accords de coopération et de financement en faveur des employeurs et des producteurs de petite et moyenne taille des Etats de Cojedes, de Táchira, de Zulia, de Monagas et de Falcón, par le biais du Fonds national de garanties réciproques pour l’industrie de petite et moyenne taille (FONPYME), le président de la FEDECAMARAS reconnaissant que, dans l’Etat de Falcón, le fait d’avoir décrété zone libre cette entité fédérale a «relancé le tourisme national».
- 1022. Le gouvernement national n’a jamais cessé de chercher le dialogue et, à cet égard, il est important de souligner que, lors de l’appel à «la grève civique» lancé par la FEDECAMARAS le 10 décembre 2001, le Président de la République bolivarienne du Venezuela a désigné le ministre de la Défense d’alors, José Vicente Rangel Vale, actuellement vice-président du pouvoir exécutif de la République, pour qu’un effort de dialogue soit fait au plus haut niveau et, en guise de réponse, la fédération patronale FEDECAMARAS et son président d’alors, Pedro Carmona Estanga, l’ont ignoré, prétextant qu’elle ne voulait dialoguer qu’avec le Président constitutionnel de la République, Hugo Chávez; ce qui prouve une fois de plus l’arrogance de la direction patronale et son intolérance face à l’appel au dialogue pour débattre et chercher des solutions aux différends, mais cela démontrait aussi clairement qu’un coup d’Etat était en train de se préparer, lequel a éclaté en avril 2002.
- 1023. Devant le différend soulevé par le secteur patronal à propos de la législation approuvée, différend provoqué principalement par les dirigeants de la FEDECAMARAS, l’Assemblée nationale de la République bolivarienne du Venezuela a réuni une commission spéciale, laquelle a invité les différents secteurs à présenter leurs observations sur les instruments légaux, processus normal puisque la modification de la législation approuvée relevait de cette instance étatique, le mandat d’habilitation du pouvoir exécutif national étant périmé. Lors des réunions de l’Assemblée nationale, les secteurs patronaux ont présenté leurs revendications après avoir tenté de paralyser le pays le 10 décembre 2001, comme indiqué précédemment.
- 1024. Les éléments susmentionnés démontrent une fois de plus que l’Etat vénézuélien a mis en place des mécanismes d’entente par le biais du dialogue et non par le chantage et l’intention d’ignorer l’Etat de droit, la démocratie et les droits de l’homme, comme l’ont fait les organisations patronales réunies au sein de la FEDECAMARAS, qui ont toujours masqué la solution du coup d’Etat, alors qu’ils se disaient démocratiques face à l’opinion publique nationale et internationale.
- 1025. En janvier 2002, le président de la FEDECAMARAS de l’époque, Pedro Carmona Estanga, «... a mis l’accent sur la confiance qu’il avait en l’indépendance de l’Assemblée nationale et du Tribunal suprême de justice dans leur prise de décisions». En dehors des moyens juridiques qu’offre la juridiction démocratique du pays, dont certains ont été utilisés légalement par des dirigeants de la FEDECAMARAS en tant qu’organisation d’entreprises pour présenter une action en nullité à l’encontre des lois approuvées et des normes contenues dans divers articles des 48 lois, dans le même temps, les dirigeants d’entreprise agissaient selon un calendrier politique autoritaire très bien organisé, lequel s’est achevé partiellement le 12 avril 2002 avec le gouvernement de facto de Pedro Carmona Estanga, ancien président de la FEDECAMARAS, et, en cette brève période de dictature, la FEDECAMARAS et M. Carmona ont ignoré la Constitution de la République, mais ils ont aussi mis à mal, matraqué et violé les droits de l’homme, ont dissous les institutions de l’Etat et ont décidé de plus de suspendre l’ensemble des 48 décrets-lois en vigueur; il est difficile d’imaginer plus fort pouvoir et autoritarisme. Ce comportement va-t-il être cautionné par le Comité de la liberté syndicale; cette façon d’agir des corporations et de ses dirigeants est-elle protégée par la convention no 87 de l’OIT?
- 1026. Si la fédération patronale FEDECAMARAS et son président sortant, Pedro Carmona Estanga, ainsi que le président Carlos Fernández qui lui a succédé croyaient réellement en la démocratie, pourquoi n’ont-ils pas recouru à l’article 74 de la Constitution nationale, article stipulant qu’il est possible de soumettre les décrets ayant force de loi à un référendum abrogatoire, si celui-ci est demandé par au moins 5 pour cent des électeurs et s’il est validé par l’assistance indispensable de 40 pour cent des électeurs? Pourquoi alors l’ancien président de la FEDECAMARAS a préféré agir en violant les lois et en rompant le processus constitutionnel, avec l’appui du vice-président et du président de la fédération patronale FEDECAMARAS, Carlos Fernández, lui ayant succédé?
- 1027. Les méthodes qu’a utilisées la FEDECAMARAS avec les gouvernements précédents, à savoir de présenter des lois devant le pouvoir législatif par l’intermédiaire de députés proches de leurs courants politiques, lois qui seraient discutées pendant un laps de temps variable selon leur forme, leur contenu et les intérêts des secteurs politiques et patronaux, ont été progressivement changées par l’administration gouvernementale actuelle, en démocratisant la participation de tous les secteurs sociaux et non de secteurs spécifiques.
- 1028. Ont également été changés les habitudes et les privilèges dont les employeurs usaient pour retenir ou retarder les projets de loi favorables à leurs intérêts économiques et sociaux dans une mesure inacceptable. A titre d’exemple, on peut citer la Commission nationale pour les prix et les salaires (à laquelle participaient la FEDECAMARAS et la CTV), qui a débattu pendant huit mois, entre 1988 et 1989, des salaires des travailleurs et de prix plus convenables pour les producteurs et les commerçants, s’ajoutant à cela le gel de la production ou la rétention de produits alimentaires de base.
- 1029. Ces commissions s’interposant pour leurs propres intérêts sans accords concrets ont tant et si bien abusé qu’un mécontentement social s’est progressivement installé et a finalement explosé lors des événements appelés «Caracazo» du 27 février 1989, événements dont on subit encore aujourd’hui les conséquences et dont des milliers de familles font encore le deuil, ces dernières faisant toutes partie de quartiers et de secteurs populaires du pays; à propos de cet événement, il n’a pas encore été établi de responsabilités administratives, politiques et pénales concernant ceux qui avaient le pouvoir à ce moment-là et qui ont donné l’ordre de tirer sur un peuple qui n’était pas armé. Quelques jours après le «Caracazo», le gouvernement de l’époque a décrété une augmentation de salaire et le gel du prix des produits de première nécessité; 400 personnes ont été assassinées par les forces armées et de police de l’époque.
- 1030. Sans les attitudes autoritaires de la fédération patronale FEDECAMARAS, par exemple ignorer le dialogue, se retirer de la table des négociations, imposer ses critères et faire du chantage «si on ne mettait pas leurs propres intérêts avant ceux des principales organisations», détruire les gazettes officielles où les lois étaient publiées, appeler à l’insurrection, faire des coups d’Etat, le dialogue aurait sans aucun doute été différent entre le gouvernement national et le secteur patronal de la FEDECAMARAS qui s’est mis en marge de la loi. Les agissements de la FEDECAMARAS n’ont pas fait échouer les intentions du gouvernement national de modifier le dialogue et de passer d’un dialogue et d’une prise de décisions où règne l’exclusion à un dialogue large et visant à l’intégration, productif et non discriminatoire, s’inscrivant de plus dans le cadre de la Constitution et dans la légalité et non en dehors de celui-ci, comme le faisait la FEDECAMARAS.
- 1031. Le gouvernement vénézuélien, croyant fermement en un dialogue, a ensuite réuni une commission présidentielle visant à promouvoir et à coordonner les tables de négociation nationales, commission présidée par le vice-président exécutif de la République bolivarienne du Venezuela, le docteur José Vicente Rangel, par le biais du décret no 1753; participaient à cette commission les personnes représentant de grands secteurs de la vie nationale dans le but d’établir, dans la pratique, une démocratie sociale et participative visant à ouvrir de nouvelles voies de représentativité et de participation dans la gestion publique.
- 1032. Ce processus a été entrepris immédiatement après le coup d’Etat, coup d’Etat impulsé par des actions subversives dans l’intention évidente de déstabiliser les institutions de l’Etat, d’imposer une dictature et de prendre le pouvoir par la force comme cela s’est fait pendant une brève période, à savoir les 12 et 13 avril 2002; le gouvernement du Venezuela rappelle à cet égard que l’un des auteurs principaux de la déstabilisation politique, économique et sociale a été M. Pedro Carmona Estanga, président de la FEDECAMARAS, et par la suite son premier vice-président, Carlos Fernández, qui a assuré la présidence de la FEDECAMARAS après l’exil de M. Carmona, actuellement fugitif devant la justice vénézuélienne, les dirigeants de la FEDECAMARAS ayant tous deux fait mauvais usage de l’arrêt de travail ou de la grève en l’appelant illégalement et de manière subversive.
- 1033. Rien d’étonnant donc que la FEDECAMARAS ait refusé de prendre part à la table des négociations mise en place immédiatement après que le peuple vénézuélien et les Forces armées nationales ont restitué le pouvoir au Président de la République bolivarienne du Venezuela, ainsi que la Constitution et les institutions démocratiques ignorées par MM. Carmona et Carlos Fernández, présidents de la fédération patronale FEDECAMARAS; ce qui prouve que l’intention de ces employeurs est de continuer à envisager le coup d’Etat et de maintenir un dialogue où règne l’exclusion concernant la souplesse et la dérégulation des relations du travail, et leur attitude montre qu’ils ne s’intéressent qu’à leurs propres intérêts, à leur arrogance, à l’exclusion et à leur position de classe supérieure.
- 1034. Lors des réunions organisées dans le cadre de la table des négociations, après le coup d’Etat d’avril 2002, des représentants du secteur des entreprises ont participé, par exemple FEDEINDUSTRIA, la CONFAGAN, des représentants de PMI et de PME, de secteurs économiques comme celui de l’automobile, du textile, des produits pharmaceutiques, et des personnalités de divers horizons comme Monseigneur Mario Moronta, au nom de l’Eglise catholique, M. Francisco Natera, ancien président de la FEDECAMARAS, du secteur du travail syndical, journalistes et intellectuels des médias, représentants des secteurs de l’automobile, des produits chimiques et pharmaceutiques, de la confection, du textile, de l’économie sociale, du transport public, du tourisme et bien d’autres secteurs. Ces tables de négociation ont contribué à rétablir la confiance entre les employeurs et les travailleurs concernant la gestion gouvernementale, en vue de solidifier une économie réellement productive, durable, diversifiée et solidaire.
- 1035. La FEDECAMARAS n’a pas voulu prendre part aux négociations car la Confédération des travailleurs du Venezuela n’a pas été intégrée aux discussions. L’Exécutif national ne pouvait intégrer la CTV car celle-ci n’a pas de dirigeants syndicaux légitimes; en raison du différend interne au syndicat, plusieurs personnes du secteur de la CTV se disent faire légalement partie du comité exécutif de la CTV mais n’en fournissent pas la preuve et, de ce fait, ils n’ont pas pu participer aux tables de négociation; le gouvernement du Venezuela a donc envoyé une invitation personnelle à celui se disant président de la CTV, M. Carlos Ortega; l’appel au dialogue n’a donc exclu personne et, même de cette façon, la FEDECAMARAS a refusé d’y participer et, une fois de plus, l’organisation a fait du chantage en déclarant: «vous faites ce que nous voulons ou nous ne participons pas; en d’autres termes, soit vous reconnaissez un comité exécutif illégal de la CTV, soit nous ne participons pas au dialogue», telle a été une fois encore la position de la FEDECAMARAS face aux appels au dialogue du gouvernement national.
- 1036. «Les tables de négociation de mai 2002 ont été mises en place en fonction du contexte d’affrontement politique entre les défenseurs du modèle rentier et oligarchique qui luttaient pour le contrôle du gouvernement par voie inconstitutionnelle et ceux qui défendent la légalité et la légitimité du gouvernement vénézuélien» dans l’objectif spécifique de parvenir à des consensus sur les difficultés des secteurs productifs, des employeurs et des travailleurs, et sur les actions à entreprendre à court, moyen et long terme; mesures visant à relancer l’appareil productif, à renforcer le caractère institutionnel, dans le respect des normes juridiques, à la participation directe des représentations légales et légitimes des organisations de travailleurs et d’employeurs, et à rétablir le respect des droits des travailleurs. Ces tables de négociation ont constitué un cadre permettant d’atténuer l’affrontement politique, offrant un modèle paradigmatique où tout le monde est gagnant et où ont prédominé le dialogue et le consensus à propos d’idées opposées et de conflit ouvert, le tout dans un climat de compréhension et de confiance privilégiant les idées et les propositions visant à parvenir à une solution économique et au développement intégral.
- 1037. La mise en place des tables de négociation, après le coup d’Etat impulsé par la FEDECAMARAS, a contribué à redresser la gestion du gouvernement qui avait, sans aucun doute, été affectée par les événements liés au coup d’Etat d’avril 2002, et ce à l’aide de mesures ayant contribué à la reprise économique du pays, fondées sur les dispositions de la Constitution et sur des orientations politiques de la nation établies dans le Plan de développement économique et social 2001-2007 dans le but de continuer vers le redressement, la reprise et la reconversion de l’appareil industriel, la production et l’emploi. La coopération intra et interinstitutionnelle a été renforcée, tout comme le processus d’application des accords, tout cela débouchant sur un processus de transition du modèle économique, qui dépendait de la rente pétrolière, vers un modèle de développement endogène diversifié, durable et soutenable, offrant des emplois dignes et décents. Il s’agit là de changements structurels non seulement dans le domaine politique, mais aussi dans les domaines social et économique.
- 1038. La FEDECAMARAS, de sa propre volonté, n’a pas participé à ce grand processus mais, toutefois, les corporations qu’elle regroupe, réunies en chambres sectorielles et régionales, y ont participé; par conséquent, le dialogue n’a jamais été interrompu et se poursuit encore aujourd’hui, et une méthodologie de suivi des accords auxquels on est parvenu est maintenue. Cette gestion, s’inscrivant dans le cadre de la participation directe et du rôle de premier plan que jouent les citoyens et les citoyennes, établit des engagements et l’obligation de rendre compte de la part du gouvernement, des employeurs, des travailleurs et des organisations de l’économie sociale et solidaire.
- 1039. Par ailleurs, le dialogue a été maintenu, s’approfondissant et évoluant en fonction de la conjoncture politique, dialogue se situant au plus haut niveau entre le gouvernement national et l’opposition politique; c’est ainsi que s’est formée, en novembre 2002, la table de négociation, de dialogue et d’accord, au sein de laquelle la fédération patronale FEDECAMARAS a été représentée par l’intermédiaire de M. Rafael Alfonso, président de la Chambre vénézuélienne des produits alimentaires (CAVIDEA).
- 1040. A participé à la table de négociation et d’accord en qualité de facilitateur M. Cesar Gaviria Trujillo, Secrétaire général de l’Organisation des Etats américains (OEA), sur invitation du gouvernement vénézuélien, avec le soutien du Centre Carter et du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD). Au cours de la période allant de novembre 2002 à mai 2003, le dialogue et les négociations ont avancé lentement, les membres gouvernementaux désignés comme représentants à la table, maintenant la ferme position d’agir toujours dans le cadre de la Constitution nationale de la République bolivarienne du Venezuela, et jamais en dehors de celle-ci, ont établi une consigne populaire: «toujours dans le cadre de la Constitution, jamais à l’extérieur de celui-ci». Le 29 mai 2002, l’accord susmentionné a été signé.
- 1041. La Commission d’administration des devises (CADIVI) est une mesure nécessaire face au sabotage politique, social, antidémocratique et économique imposé par la FEDECAMARAS.
- 1042. Au début de l’année 2002, tous les indicateurs économiques prévoyaient, pour le premier semestre de l’année, une reprise économique progressive du pays. Mais des facteurs externes, manoeuvrés par des secteurs politiques et économiques, contraires aux plans de reprise élaborés par le gouvernement national, ont mis un frein et ont fait reculer l’économie vénézuélienne: il s’agit du coup d’Etat du 11 avril, de la fuite de capitaux, de la spéculation, de l’évasion fiscale et de la grève sabotant l’industrie pétrolière, principale source de revenus du pays.
- 1043. Les conséquences de ces actes de l’opposition ont eu un impact immédiat, celui-ci se traduisant par les éléments suivants: baisse des réserves internationales et des revenus pétroliers, perte des apports fiscaux, déstabilisation de la valeur extérieure de la monnaie, incertitudes, investissement pour subvenir aux besoins des contingences occasionnées par le manque d’approvisionnement de combustible et de certains produits alimentaires de première nécessité dû, entre autres, à la grève.
- 1044. L’économie vénézuélienne a été durement touchée et était au bord de l’effondrement début 2003, année au cours de laquelle, selon les prévisions macroéconomiques, on serait parvenu à la consolidation des programmes sociaux destinés à améliorer la qualité de vie de toute la population.
- 1045. Face à cette situation, le gouvernement national a décidé de prendre une mesure économique devant être maintenue jusqu’à ce que les effets pernicieux se répercutant sur l’économie nationale disparaissent et cèdent la place à une croissance durable que l’on avait tentée de freiner.
- 1046. Le 5 février, un régime de contrôle des changes a été mis en place suite à une convention souscrite par le ministère des Finances représentant l’Exécutif national et la Banque centrale du Venezuela.
- 1047. Pour pouvoir appliquer ladite convention, le Président de la République au Conseil des ministres a décrété, le 5 février 2003, la création d’une Commission d’administration des devises (CADIVI).
- 1048. La CADIVI a été créée pour administrer avec efficacité et transparence, en fonction de critères techniques, le marché national des changes et pour relever le défi de contribuer, par son application correcte et avec le concours d’autres politiques, à parvenir à la stabilité économique et au progrès de la nation, éléments ayant été consacrés principes souverains par la Constitution nationale de la République bolivarienne du Venezuela.
- 1049. Le gouvernement a annexé un graphique en signalant que ce graphique explique clairement selon lui l’autre partie du plan des conspirateurs dans laquelle apparaissent M. Carlos Fernández et la FEDECAMARAS. A droite du graphique figure le niveau de réserves internationales du Venezuela en dollars, sur la partie horizontale du graphique sont indiqués les mois de l’année 2002, où l’on peut noter la baisse des réserves internationales par rapport à un autre graphique, cette baisse étant ce qui a obligé le gouvernement national, conjointement avec la Banque centrale du Venezuela, à contrôler le déséquilibre de circulation des devises vers l’extérieur; on voit donc la conspiration envers le pays, d’après les indicateurs illustrés, et, pendant une courte période, la fuite des devises aurait laissé le pays sans moyen de pouvoir acheter des produits à l’extérieur, de l’alimentation, des médicaments, d’autant plus lorsque les entrées de devises provenant de la vente du pétrole et de ses dérivés se sont arrêtées du fait du sabotage systématique de cette industrie pendant deux mois.
- 1050. Il faut souligner que le contrôle de devises a entraîné une augmentation du montant des réserves internationales enregistré au début de l’année quand le sabotage pétrolier (entraînant l’effondrement des exportations), associé à la spéculation de la monnaie (provoquant une fuite soudaine des devises), avait fait baisser les réserves internationales jusqu’à 13 635 millions de dollars américains (y compris le Fonds intergouvernemental pour la stabilisation macroéconomique (FIEM)) au mois de janvier 2003.
- 1051. Par la suite, une reprise a été enregistrée et plus de 700 000 emplois, qui avaient été supprimés après le sabotage de notre économie, ont été récupérés; si l’on avait refusé des devises aux employeurs, aurait-on pu récupérer plus de 700 000 emplois au cours des trois derniers trimestres 2003?
- 1052. L’Etat vénézuélien, par ce processus et en raison du caractère éminemment politique, subversif, antidémocratique que le dirigeant syndical Carlos Fernández et la fédération patronale FEDECAMARAS ont représenté après le coup d’Etat et pendant la période de sabotage de l’économie vénézuélienne, demande au Comité de la liberté syndicale de considérer que la plainte présentée ne mérite pas d’être examinée de façon plus approfondie et, par conséquent, réitère sa disposition à fournir toutes les informations que le comité estime nécessaires pour pouvoir confirmer les observations exposées.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité - 1053. Le comité observe que, dans le présent cas, l’OIE et la FEDECAMARAS ont présenté des allégations ayant trait à:
- - la mise à l’écart et l’exclusion des organisations patronales et de la FEDECAMARAS dans le processus de décisions, rendant impossibles le dialogue social, le tripartisme et les consultations de manière générale (en particulier en ce qui concerne des lois importantes touchant directement les employeurs) et qui, par conséquent, ne respectent pas les recommandations du Comité de la liberté syndicale lui-même;
- - les actions et ingérences du gouvernement pour encourager la création et favoriser la mise en place d’une nouvelle organisation d’employeurs dans le secteur agricole au détriment de la FEDENAGA, organisation la plus représentative de ce secteur;
- - les violations de droits de l’homme et de droits fondamentaux dans l’exercice d’activités des organisations d’employeurs visées à la convention no 87, et en particulier agressions, actes d’intimidation de la part des autorités ou de groupes paramilitaires et représailles à l’encontre de la FEDECAMARAS, de ses organisations affiliées et de ses dirigeants dans l’exercice de son droit à manifester pendant les grèves nationales civiques, à savoir:
- - la détention de M. Carlos Fernández le 19 février 2003 pour réprimer ses agissements en qualité de président de la FEDECAMARAS, sans ordre judiciaire et sans garantie du respect de la loi; selon les plaignants, il a fait l’objet de mauvais traitements et d’insultes de la part de groupes violents dirigés par un député partisan du gouvernement;
- - le harcèlement physique, économique et moral par le biais de menaces et d’agressions à l’encontre du patronat vénézuélien et de ses dirigeants de la part des autorités ou de personnes proches du gouvernement (plusieurs cas sont exposés en détails);
- - le fonctionnement de groupes paramilitaires avec l’appui du gouvernement, agissant contre des locaux d’une organisation d’employeurs et contre les actions de revendication de la FEDECAMARAS;
- - la création d’un climat hostile aux employeurs, et ce en permettant aux autorités (et parfois en stimulant) le pillage et l’occupation d’exploitations agricoles en pleine production et en violation de la Constitution et de la législation, et sans suivre les procédures légales; les plaignants font état de 180 cas d’interventions illégales dans des propriétés de production et signalent que la plupart de ces cas n’ont pas été réglés par les autorités compétentes;
- - l’application d’un système de contrôle des changes décidé unilatéralement, discriminant les entreprises de la FEDECAMARAS eu égard aux autorisations administratives d’achat de devises étrangères, et ce pour réprimer la centrale d’employeurs d’avoir participé aux arrêts de travail nationaux.
- 1054. De manière générale, le comité doit souligner la gravité des faits allégués et déplore le fait que, bien que les plaintes aient été présentées en mars 2003, la réponse du gouvernement datée du 9 mars 2004 ne répond pas, de manière spécifique, à une partie importante des allégations.
- 1055. Le comité observe qu’en réponse à la plainte dans son ensemble et à un incident mentionné par les plaignants (selon lequel l’arrêt de travail des 9, 10 et 11 avril 2002 a provoqué la crise nationale suite à laquelle le Président de la République a démissionné, démission confirmée publiquement par le militaire le plus gradé du pays et qui n’a duré que quelques jours puisqu’elle a ensuite été annulée par le Président lui-même) le gouvernement déclare que: 1) les accusations des plaignants n’ont pour seul motif que de justifier leurs positions n’ayant rien à voir avec la situation que vivent les organisations patronales ou les syndicats et qui, au contraire, sont strictement politiques et illégales, antidémocratiques et discriminatoires, et l’institution FEDECAMARAS est de nature éminemment politique, subversive et antidémocratique; 2) des dirigeants de la FEDECAMARAS ont fait preuve d’actes subversifs visant clairement à déstabiliser les institutions de l’Etat, à imposer une dictature et à prendre le pouvoir par la force, comme cela s’est produit les 12 et 13 avril 2002 lors d’un coup d’Etat par lequel M. Pedro Carmona, ancien président de la FEDECAMARAS, a été nommé président de facto; 3) l’arrêt de travail de la fédération patronale FEDECAMARAS en avril 2002 s’est transformé le 11 avril 2002 en grève générale appelant tous les éléments participant au coup d’Etat à manifester, ce qui a donné à la «manifestation» un effet de masse visant à justifier le coup d’Etat qui avait été planifié quatre mois auparavant; 4) M. Carlos Fernández, président de la FEDECAMARAS, a avalisé la dictature le 12 avril 2002 en signant «l’acte de constitution du gouvernement de transition démocratique et d’unité sociale» représentant les employeurs; 5) la FEDECAMARAS, la CTV et d’autres secteurs, pendant les arrêts de travail, ont procédé entre 2001 et 2003 à des actes qualifiés de subversifs, en ce qu’ils visaient à renverser le Président de la République, et ont été rejetés par la grande majorité du peuple vénézuélien; ces arrêts de travail se sont produits suite à une transformation et à un changement profonds des institutions et de la société vénézuélienne face à l’application de mesures néolibérales faites précédemment, à la mondialisation tendant à l’exclusion, à la privatisation et à la dérégulation des droits des travailleurs et à la perte de contrôle de l’appareil économique de l’Etat de la part de la FEDECAMARAS; la perte de privilèges de la FEDECAMARAS et le fait que les éléments dont il est question dans le présent cas n’entrent pas dans le cadre de la Constitution.
- 1056. A cet égard, le comité abordera les questions relatives aux arrêts de travail un peu plus loin mais souhaite toutefois souligner que la présente plainte ne concerne pas M. Pedro Carmona, qu’il s’agit de situations à la fois antérieures et postérieures aux événements des 12 et 13 avril 2002 (en particulier s’agissant de l’arrêt de travail allant de décembre 2002 à janvier 2003), que son mandat se limite à examiner les allégations de violations des droits des organisations d’employeurs et de travailleurs, de leurs représentants et de leurs affiliés et qu’il ne constitue pas un forum international compétent pour traiter de questions exclusivement politiques.
- 1057. Le comité regrette toutefois que, dans sa réponse, le gouvernement incrimine indistinctement et à plusieurs reprises la FEDECAMARAS et l’ensemble de ses dirigeants, sans appuyer par des preuves solides ou des décisions judiciaires cette incrimination globale.
- a) Conclusions sur les allégations d’exclusion et de mise à l’écart des corporations et de la FEDECAMARAS du dialogue social, en particulier lors de l’élaboration de lois touchant leurs intérêts et de la mise en place de politiques économiques
- 1058. L’OIE et la FEDECAMARAS soulignent le fait que le gouvernement n’a pas convoqué la Commission tripartite du Venezuela depuis plusieurs années et signalent que, en violation de la législation et la Constitution de la République, ils n’ont pas été consultés lors de l’élaboration de lois, de textes juridiques ou de politiques économiques touchant directement leurs intérêts, à savoir:
- - la loi de procédure du travail;
- - l’octroi d’une augmentation généralisée du salaire minimum de 20 pour cent par le biais de décret;
- - la ratification de la convention (no 169) de l’OIT sur les peuples indigènes et tribaux, 1989;
- - l’établissement unilatéral d’un nouveau régime de contrôle bancaire imposé par les autorités et, de manière plus générale, la mise en place de politiques et d’orientations économiques notoirement contre les entreprises; et
- - la législation d’habilitation du 13 novembre 2000 qui a autorisé le Président de la République à édicter 49 décrets-lois dans des domaines touchant les intérêts des employeurs.
- 1059. En ce qui concerne les 49 décrets-lois promulgués par le Président de la République en vertu de la législation d’habilitation de l’Assemblée nationale du 14 novembre 2000, le comité prend note que, selon le gouvernement: 1) lesdits décrets-lois résultent d’une large consultation de la population, de divers secteurs sociaux et culturels du pay,s et que l’on a consulté les organisations tant du sommet comme de la base avec lesquelles on a travaillé à leur élaboration; 2) lors dudit processus, depuis le début, chacune des chambres patronales concernées et affiliées à la FEDECAMARAS a participé et de nombreux secteurs de la vie du pays ont été consultés, y compris les organisations patronales et de travailleurs (syndicats et fédérations); 3) le 10 août 2001, le Président de la République s’est réuni avec le comité directeur de la FEDECAMARAS dans son ensemble et «il a été convenu d’organiser une réunion de travail entre la FEDECAMARAS et le cabinet économique pour aborder les thèmes particuliers nécessitant une action ou des consultations ... avec le Président de la République»; 4) le 28 août 2001, le vice-président de la FEDECAMARAS et des représentants de la Chambre de la construction et de CONINDUSTRIA se sont réunis avec le cabinet exécutif, dirigé par le ministre de la Planification, et avec la commission spéciale chargée de l’élaboration de la loi sur les hydrocarbures afin de faire valoir leurs observations; lors des réunions et des rencontres qui ont suivi, les autres thèmes de la législation ont été discutés par secteur économique; en septembre 2001, le président de la FEDECAMARAS a été invité à faire partie des accompagnants du Président de la République en voyage officiel pour donner l’occasion à l’organisation patronale de négocier des affaires; 5) ensuite, lorsque les dirigeants de la FEDECAMARAS ont pris conscience que leurs revendications unilatérales n’étaient pas acceptées docilement par les autorités et les autres secteurs participant à l’élaboration des décrets-lois, ils ont commencé à rejeter le dialogue par intérêt personnel et ils se sont fermés volontairement au dialogue sur une décision propre; 6) face à ce rejet, le gouvernement a maintenu un dialogue et des négociations avec les secteurs des petites et moyennes entreprises regroupées au sein de la FEDEINDUSTRIA et des accords de coopération et de financement ont été conclus; 7) on est parvenu à un consensus pour la plupart des décrets-lois mais pas pour tous (dans sa réponse, le gouvernement ne fait pas clairement apparaître, lorsqu’il parle de consensus, s’il se réfère uniquement à la FEDEINDUSTRIA ou si cela concerne certaines chambres affiliées à la FEDECAMARAS; néanmoins, étant donné que le gouvernement se demande «pourquoi les différentes corporations regroupées au sein de la FEDECAMARAS se sont retirées du dialogue visant à parvenir à des accords sur la promulgation des lois», il semble que les consensus auxquels le gouvernement fait allusion ne concernent pas les secteurs des corporations de la FEDECAMARAS).
- 1060. Le comité note que, selon le gouvernement, les 49 décrets-lois couvriraient des domaines d’une importance vitale pour l’exercice des droits de l’homme et bénéficieraient directement à la part immense de la population défavorisée du pays, exclue pendant des siècles de ladite démocratie représentative. Le gouvernement signale aussi que certains dirigeants de la FEDECAMARAS ont présenté des actions en nullité contre des lois approuvées et contre des normes contenues dans divers articles des 49 décrets-lois et par conséquent, il a décidé de suspendre l’effet de l’ensemble de ces derniers.
- 1061. Le comité prend note des observations du gouvernement venant appuyer son point de vue sur l’autoexclusion de la FEDECAMARAS du dialogue, selon lesquelles: 1) après avoir tenté de paralyser le pays le 10 décembre 2001, l’Assemblée nationale, devant le différend posé principalement par les dirigeants de la FEDECAMARAS, a réuni une commission spéciale et a invité les différents secteurs à y participer; ces derniers ont assisté aux réunions; et 2) pendant l’arrêt de travail déclenché par la FEDECAMARAS le 11 décembre 2001, l’organisation a refusé de dialoguer avec le Vice-président de la République, sous prétexte qu’elle ne voulait dialoguer qu’avec le Président de la République. Le comité note également que le gouvernement allègue le refus de la FEDECAMARAS de faire partie de la Commission présidentielle et des tables de dialogue nationales (mai 2002) instaurées par les autorités, sous prétexte que l’on n’y avait pas intégré la Confédération des travailleurs du Venezuela (selon le gouvernement, celle-ci n’a pas été intégrée car elle n’avait pas de représentants légitimes). Le comité souligne cependant que, selon le gouvernement, ces commissions comprenaient des journalistes, des intellectuels, l’Eglise catholique, etc., et que les tables de dialogue en question ne semblent pas concerner une négociation ou une consultation bipartite ou tripartite au sens des instruments de l’OIT (en effet, le gouvernement signale qu’il s’agit d’une gestion entrant dans le cadre de la participation directe et de premier plan que jouent les citoyens et les citoyennes, établissant des engagements, et l’obligation de rendre compte de la part du gouvernement, des employeurs, des travailleurs et des organisations de l’économie sociale et solidaire») ni celles réalisées dans le cadre de la commission spéciale de «l’Assemblée législative» à laquelle le gouvernement a fait référence, ou aux négociations et consultations de la table de négociation et d’accord, instituée en novembre 2002 et à laquelle, selon ce qu’a déclaré le gouvernement, a participé la FEDECAMARAS et au cours de laquelle gouvernement et «opposition» sont parvenus à un accord politique le 29 mai 2002 afin d’agir toujours dans le cadre de la Constitution nationale (au cours de ce processus, le Secrétaire général de l’Organisation des Etats américains a été invité à participer).
- 1062. Le comité en conclut qu’au cours du processus d’élaboration des 49 décrets-lois en vertu de la législation d’habilitation du 13 novembre 2000 - processus qui devait légalement se terminer en une année - des consultations ont été réalisées avec la FEDECAMARAS et ses organisations affiliées pendant la première phase, et en particulier en août 2001. Que ces consultations aient été de véritables consultations visant à parvenir à des consensus comme le soutient le gouvernement ou des consultations minimales et superficielles visant à couvrir les apparences comme le prétendent l’OIE et la FEDECAMARAS (qui mettent en relief toutefois que le gouvernement a effectué des consultations approfondies avec des groupes peu représentatifs de la population en faveur du régime politique), le comité ne dispose pas d’éléments suffisants pour pouvoir se prononcer sur la question. Quoi qu’il en soit, le comité observe que ce qu’affirme le gouvernement concernant l’autoexclusion de la FEDECAMARAS du dialogue en général, et en particulier sur les 49 décrets-lois à partir de septembre 2001, ne semble pas constituer des preuves concluantes (par exemple, déclarations institutionnelles de la FEDECAMARAS, invitations des autorités gouvernementales déclinées pour traiter, dans un cadre bipartite ou tripartite, de questions de travail, sociales ou économiques, etc.). Pour revenir aux 49 décrets-lois, en dehors du fait qu’il est étrange que l’on ait choisi de régler nombre de questions importantes et complexes (hydrocarbures, développement économique et social, réforme agraire, etc.) dans un court délai d’un an et en vertu de décrets-lois promulgués par le pouvoir exécutif, le comité souligne que, dans sa réponse, le gouvernement n’a pas répondu de manière spécifique aux allégations relatives à d’importants vices de forme juridiques et constitutionnels concernant ces décrets-lois et la procédure suivie pour leur approbation, vices que les organisations plaignantes énumèrent en détail et de manière assez convaincante dans leur plainte et également dans une importante annexe qui ne figure pas dans le présent rapport. En effet, dans sa réponse, le gouvernement n’a pas abordé en détail ces événements et s’est limité à signaler que certains dirigeants de la FEDECAMARAS avaient présenté des actions en nullité contre les lois approuvées et contre les normes contenues dans les 49 décrets-lois et qu’il a alors été décidé de suspendre l’effet de ces décrets-lois (le comité croit comprendre que l’autorité judiciaire ne s’est pas encore prononcée à ce sujet). Par conséquent, le comité ne peut pas déterminer si le gouvernement a pris en compte le point de vue de la FEDECAMARAS sur les vices de forme juridiques et constitutionnels qu’elle invoque ou s’il a ignoré ce point de vue lors de l’élaboration des 49 décrets-lois.
- 1063. En ce qui concerne le nouveau régime de contrôle des changes, le comité note que le gouvernement a fondé ledit régime sur le fait que le pays était au bord de l’effondrement début 2003 car il y avait un déséquilibre de circulation de devises vers l’extérieur qui avait empêché la République de pouvoir acheter des produits alimentaires, des médicaments et autres intrants de l’étranger. Le comité note que le gouvernement déclare que le nouveau régime de contrôle des changes a été mis en place par une convention signée entre le ministère des Finances et la Banque centrale du Venezuela et que, par la suite, le Président de la République au Conseil des ministres a décrété, le 5 février 2003, la création d’une Commission d’administration des devises. Le comité observe pourtant que si le gouvernement a invoqué une situation d’urgence économique pour justifier le nouveau système de contrôle des changes, aucun élément n’indique dans sa réponse qu’il a effectué des consultations auprès de la FEDECAMARAS sur ce nouveau régime alors que celui-ci touche clairement les intérêts de l’organisation.
- 1064. Le comité entend souligner par ailleurs les points suivants: 1) la réponse du gouvernement ne fait état d’aucun accord ni de consultation bipartite ou tripartite avec la FEDECAMARAS au sens des instruments de l’OIT, à partir de septembre 2001, en matière (politiques ou lois) de travail ou économique; 2) le gouvernement n’a pas nié que la Commission tripartite nationale ne s’était pas réunie depuis des années comme l’indiquent les allégations; et 3) le gouvernement n’a pas nié non plus l’allégation relative à l’absence de consultations de la FEDECAMARAS concernant le processus d’élaboration de lois importantes comme la loi de procédure du travail, l’augmentation généralisée du salaire minimum de 20 pour cent par voie de décret ni concernant le processus de ratification de la convention no 169 de l’OIT, le nouveau régime de contrôle des changes ou, de manière plus générale, concernant l’établissement de politiques et d’orientations économiques.
- 1065. Dans ces conditions, le comité conclut et déplore que, depuis des années, le gouvernement n’ait pas convoqué la Commission tripartite nationale et qu’il n’ait pas l’habitude d’effectuer des consultations bipartites ou tripartites auprès de la FEDECAMARAS au sens des instruments de l’OIT concernant les politiques ou les lois qui touchent fondamentalement les intérêts de l’organisation sur des aspects de travail, sociaux et économiques, violant ainsi les droits principaux de cette centrale d’employeurs. Le comité attire l’attention du gouvernement sur la recommandation (no 113) sur la consultation aux échelons industriel et national, 1960 (entre les autorités publiques et les organisations d’employeurs et de travailleurs), qui établit que les consultations «devraient avoir pour objectif, en particulier, de permettre l’examen en commun, par les organisations d’employeurs et de travailleurs, des problèmes d’intérêt mutuel en vue d’aboutir, dans toute la mesure possible, à des solutions acceptées de part et d’autre» et comprend parmi les domaines de consultation «la préparation et la mise en oeuvre de la législation touchant leurs intérêts». Le comité signale une fois encore au gouvernement le principe sur lequel il a déjà attiré son attention dans son 330e rapport, cas no 2067 (Venezuela), paragraphe 175, reproduit ci-dessous:
- Les organisations d’employeurs et de travailleurs les plus représentatives, et en particulier les centrales, devraient être consultées de façon très sérieuse par les autorités sur les questions d’intérêt commun, y compris sur tout ce qui se rapporte à l’élaboration et à l’application de la législation relative aux questions relevant de leur domaine d’intérêt, ainsi qu’à l’établissement des salaires minimums; les lois, programmes et mesures que les autorités publiques doivent adopter ou appliquer auraient de ce fait un fondement plus solide, susciteraient une plus large adhésion et seraient mieux appliqués. Dans cette perspective, et dans la mesure du possible, le gouvernement devrait également s’appuyer sur le consensus des organisations d’employeurs et de travailleurs; celles-ci doivent pouvoir partager la responsabilité du bien-être et de la prospérité de la communauté dans son ensemble. Cela est d’autant plus valable si l’on tient compte de la complexité croissante des problèmes auxquels doivent faire face les sociétés et bien évidemment la société vénézuélienne. Nulle autorité publique ne saurait prétendre qu’elle détient tout le savoir ni supposer que les solutions qu’elle propose sont systématiquement le mieux à même d’atteindre les objectifs visés.
- 1066. Le comité souligne que la consultation tripartite doit se dérouler avant que le gouvernement ne soumette un projet à l’Assemblée législative ou n’élabore une politique de travail, social ou économique, et que cette consultation doit faire partie des éléments préalables à la soumission au gouvernement, précisément parce que les centrales majoritairement représentatives des employeurs et des travailleurs représentent ces derniers; en d’autres termes, elles représentent dans ce cas des milliers d’employeurs et une partie très importante du monde du travail. De même, et de manière plus générale, le comité rappelle que la Déclaration de Philadelphie de 1944 faisant partie de la Constitution de l’OIT réaffirme l’un des principes fondamentaux sur lesquels se fonde l’OIT: «la lutte contre le besoin doit être menée avec une inlassable énergie au sein de chaque nation et par un effort international continu et concerté dans lequel les représentants des employeurs et des travailleurs, coopérant sur un pied d’égalité avec ceux des gouvernements, participent à de libres discussions et à des décisions de caractère démocratique en vue de promouvoir le bien commun».
- 1067. Concernant ce qui a été dit précédemment, le comité demande instamment au gouvernement de cesser de mettre la FEDECAMARAS à l’écart et de l’exclure du dialogue social et d’appliquer pleinement à l’avenir la Constitution de l’OIT et les principes mentionnés sur la consultation et le tripartisme. Le comité prie aussi instamment le gouvernement de convoquer sans tarder et périodiquement la Commission tripartite nationale et d’examiner dans ce cadre, avec les interlocuteurs sociaux, l’ensemble des lois et décrets adoptés en l’absence de consultation tripartite.
- 1068. Dans une perspective plus globale, le comité souhaite se référer à la déclaration du gouvernement selon laquelle il indique ne pas reconnaître la légitimité du comité exécutif de la Confédération des travailleurs du Venezuela (CTV) (le comité a demandé expressément au gouvernement de le reconnaître [voir 330e rapport, cas no 2067, paragr. 173], tout comme au contexte général du pays où règne un climat d’affrontement politique et social toujours plus fort, ce que le comité regrette profondément. Le comité considère que le fait de ne pas reconnaître le comité exécutif de la CTV et de mettre la FEDECAMARAS à l’écart et de l’exclure du dialogue social, quelles que soient les raisons du gouvernement, constitue l’un des facteurs essentiels ayant conduit à l’affrontement social et politique, et, de l’avis du comité, il faut remédier d’urgence à cette situation. Il est évident que ces organisations (qui sont les centrales les plus représentatives) ne partagent pas le modèle économique et social du gouvernement mais que les exclure du système institutionnel social ne contribue pas à la paix sociale, à la tranquillité publique et à la stabilité sociale en général et, au contraire, génère dans la pratique des conflits permanents et la mobilisation de milliers d’employeurs et de centaines de milliers de travailleurs qui ne peuvent pas se faire entendre par l’intermédiaire des organisations qu’ils ont choisies. Le comité considère en conséquence que le gouvernement doit donner une nouvelle orientation aux relations de travail et reconsidérer son attitude à l’égard de la FEDECAMARAS et de la CTV.
- 1069. En cette période critique que vit le pays, et observant que depuis des années un conflit permanent existe entre le gouvernement d’un côté et la FEDECAMARAS et la CTV de l’autre, le comité offre au gouvernement la contribution de l’OIT et met son expérience au service de l’Etat et de la société pour que les autorités et les interlocuteurs sociaux retrouvent la confiance et, dans un climat de respect mutuel, établissent un système de relations de travail fondé sur les principes de la Constitution de l’OIT et de ses conventions fondamentales, et sur l’entière reconnaissance, avec toutes les conséquences que cela implique, des centrales les plus représentatives et de toutes les organisations et tendances importantes du monde du travail.
- b) Conclusions sur les allégations relatives à des actions et à des ingérences du gouvernement visant à promouvoir et favoriser une nouvelle organisation d’employeurs dans le secteur agricole au détriment de la FEDENAGA, organisation la plus représentative de ce secteur
- 1070. Les organisations plaignantes ont allégué que le gouvernement avait encouragé la mise en place de la Confédération nationale des agriculteurs et éleveurs du Venezuela (CONFAGAN) au détriment de la Fédération nationale d’éleveurs (FEDENAGA), véritable organisation représentative de ce secteur, en procédant à des actions favorisant CONFAGAN, le gouvernement s’ingérant ainsi dans les affaires internes des organisations d’employeurs. Les organisations plaignantes déclarent que la FEDENAGA a été exclue du Conseil agricole en raison de l’appui qu’elle avait accordé à l’action publique de la FEDECAMARAS contre le gouvernement. Le comité déplore que le gouvernement n’ait pas répondu à ces allégations (il a simplement indiqué que la FEDENAGA avait menacé de paralyser la production de viande et de lait en 2001 et d’étendre l’arrêt de travail de l’Etat de Zulia à d’autres régions) et, par conséquent, demande au gouvernement de réintégrer l’organisation FEDENAGA au Conseil agricole et de cesser de favoriser l’organisation CONFAGAN au détriment de la FEDENAGA.
- c) Conclusions sur l’arrêt de travail national entre décembre 2002 et janvier 2003 et sur la détention et le mauvais traitement du président Carlos Fernández le 19 février 2003 pour réprimer ses actions en qualité de président de la FEDECAMARAS et sans avoir la garantie du respect de la loi
- 1071. En ce qui concerne les mauvais traitements dont a été victime M. Carlos Fernández, président de la FEDECAMARAS, pendant sa détention, le comité prend note des déclarations du gouvernement selon lesquelles sa détention a été remplacée, par l’autorité judiciaire, par une assignation à résidence, les avocats de M. Carlos Fernández ayant allégué des problèmes de tension artérielle. Le comité prend note des coupures de presse auxquelles le gouvernement fait référence, dans lesquelles M. Carlos Fernández et son épouse ont déclaré que celui-ci avait été bien traité par la police l’ayant arrêté, qu’il n’avait pas été maltraité physiquement ni agressé. Le comité souligne que les coupures de presse ont une valeur probatoire limitée et que l’organisation plaignante a allégué ce qui suit: 1) M. Carlos Fernández a été agressé le 19 février 2003 par des individus dont on ignorait l’identité, qui ne portaient pas d’uniforme et n’avaient pas l’air d’être fonctionnaires ni policiers, qu’ils étaient arrivés à bord de véhicules non immatriculés et sans plaque minéralogique, et sans ordre judiciaire; 2) M. Carlos Fernández pensait qu’il s’agissait d’un enlèvement et a tenté de se défendre; après une violente bagarre au cours de laquelle M. Fernández a été frappé, lui provoquant des blessures superficielles et des hématomes sur le thorax, il a été immobilisé et poussé à l’intérieur de sa voiture; 3) des tirs ont été lancés, et ce n’est que par la suite que sont arrivées des personnes s’identifiant comme étant de la police; 4) le 20 février 2003, il a été enfermé dans une cellule de deux mètres sur deux, sans ventilateur, sans lumière et dotée seulement d’un petit matelas par terre.
- 1072. Etant donné que le gouvernement n’a pas répondu de manière spécifique à ces points, le comité lui demande d’ouvrir une enquête sur le sujet et de le tenir informé.
- 1073. En ce qui concerne les allégations relatives à la violation du respect de la loi, le comité prend note que, selon les allégations: 1) M. Carlos Fernández a été détenu le 19 février 2003 sans qu’il lui ait été présenté d’ordre judiciaire; 2) le 20 février 2003, il a été privé de communication et n’a pas pu joindre ses avocats; 3) les coupures de presse attribuent au Président de la République des expressions laissant à penser qu’il n’est pas étranger à cette détention; 4) les 21 et 22 février, il a fait une déclaration devant l’autorité judiciaire; 5) des groupes violents dirigés par un député partisan du gouvernement ont tenté de faire pression sur l’autorité judiciaire les 21 et 22 février, en se regroupant et en bloquant l’entrée du tribunal et en proférant des insultes; 6) le 23 février 2003 (c’est ce qu’il semble se dégager des allégations), la détention est passée à une assignation à résidence par décision judiciaire en raison de l’état de santé de M. Carlos Fernández; 7) le juge qui a ordonné la mesure initiale de détention a été récusé par la défense et s’est retiré; 8) des cinq accusations imputées initialement à l’encontre de M. Carlos Fernández, trois ont été éliminées (trahison de la patrie, association délictueuse et saccage (incitation au pillage de la nation)), les charges restantes étant la rébellion civile et l’incitation à commettre des délits.
- 1074. Le comité souhaite faire référence à une annexe envoyée par les plaignants (qui ne figure pas dans l’analyse des allégations afin d’éviter les répétitions) reproduite ci-dessous et rendant compte d’un certain nombre d’irrégularités et de violations au respect de la loi, le gouvernement n’ayant pratiquement pas répondu à ces allégations:
- Le processus suivi par les autorités vénézuéliennes au cours de la détention de M. Carlos Fernández Pérez met en évidence l’intention de le laisser sans défense devant les charges qui lui ont été imputées.
- M. Carlos Fernández a été convoqué au ministère public le 30 janvier de cette année, afin de faire une déposition en qualité de témoin.
- Après avoir fait sa déposition, on lui a indiqué que son statut avait changé et on lui a envoyé un avis de citation pour qu’il présente une nouvelle déposition le 4 février en compagnie de ses défenseurs, mais cette fois en qualité d’accusé.
- Le jour fixé pour la présentation de la déposition, les défenseurs qu’il avait désignés ont demandé d’ajourner l’acte de déposition, étant donné qu’ils n’avaient pas eu accès au dossier. A cette occasion, le sixième procureur du ministère public a refusé de montrer le dossier aux avocats sur des motifs tout à fait illégaux.
- Au vu de la conduite du ministère public, Carlos Fernández s’est présenté devant le juge, le même que celui qui avait entendu ses défenseurs, et a exercé le droit que la défense peut invoquer, à savoir que la déposition devant être recueillie par les procureurs du ministère public ne doit pas s’effectuer au bureau mais en présence du juge de contrôle (no 6, art. 125, Code organique de procédure pénale).
- Le 6 février, le bureau du ministère public a accordé l’accès au dossier. De manière illégale, en raison de l’attitude des défenseurs, le sixième procureur, Luisa Ortega, a remis des avis de citation destinés à Carlos Fernández, afin qu’il présente sa déposition au siège du ministère public. Les avis sont incohérents puisque, dans l’un, il est indiqué qu’il doit comparaître le lundi 10 et, dans l’autre, le mardi 11.
- Le lundi 10, M. Carlos Fernández s’est présenté au bureau du ministère public en compagnie de ses défenseurs et a informé le bureau qu’il ne comparaîtrait pas puisqu’il usait de son droit de faire sa déposition devant le juge de contrôle.
- Le mercredi 12, le Premier juge de contrôle refuse le droit de faire la déposition devant le tribunal. Le lundi 17 février, la défense fait appel et, la décision étant en instance, il est alors dans l’obligation de faire sa déposition au bureau du ministère public.
- Le lendemain, le 18 février, la décision étant toujours en instance, ce qui conforterait l’obligation de faire la déposition au bureau du ministère public avant que l’appel n’ait été prononcé, le bureau du ministère public recourt à un juge différent de celui que l’on connaissait, lequel demande la détention de Carlos Fernández.
- Cette requête, sans que puisse s’exercer sa défense par le biais de la déposition, n’a pas de sens. Celle-ci ne peut s’appliquer qu’à ceux ayant refusé de comparaître. Ce qui n’est pas le cas de M. Carlos Fernández qui, face à la procédure initiale faite à son encontre, s’est montré pleinement disposé à coopérer avec les autorités judiciaires.
- Il a comparu à deux reprises devant le bureau du ministère public. La première fois, lorsqu’il a fait une déposition en qualité de témoin, il était coupable de fraude devant la loi puisque qu’à ce moment là, conformément au Code organique de procédure pénale, le contenu de l’enquête l’avait impliqué dans l’affaire et il a été privé du droit de défense, étant donné qu’on ne lui avait pas permis d’agir ni d’être en présence de ses avocats. Malgré cela, M. Carlos Fernández a fait acte de présence au siège du ministère public.
- La deuxième fois qu’il se rend au bureau, il ne s’agit pas d’assumer un acte de révolte mais de faire savoir aux procureurs qu’il ne présentera pas sa déposition, et ce en vertu du droit de faire une déposition devant le tribunal.
- La réaction du docteur Luisa Ortega, sixième procureur du ministère public, devant l’exercice du droit susmentionné et devant une décision sans appel, a été de le traiter comme s’il avait refusé de présenter sa déposition et, sans l’avoir entendu et sans lui avoir permis de se défendre ou l’inviter à faire des démarches qui auraient pu lui être favorables, et parvenir ainsi à défaire les fondements des accusations qui ont ensuite été faites à son encontre, elle a demandé sa détention.
- M. Carlos Fernández ne s’est pas montré opposé ni rebelle face au procureur. Il s’est montré enclin à se soumettre à l’accusation pénale dont il faisait l’objet, il devenait alors poursuivi sans que le respect de la loi ne s’applique.
- Devant les agissements du procureur, les droits suivants ont été violés:
- - Tutelle judiciaire effective: le Premier juge de contrôle a ignoré le droit selon lequel une déposition peut être faite au bureau du ministère public en présence du juge, afin de contrôler l’activité du ministère public.
- - Le droit à la défense a été violé puisqu’il n’a pas été informé des charges existantes à son encontre avant que sa détention n’ait été demandée. La hâte du procureur lui a permis de ne pas attendre la décision de l’appel sur le droit exercé par Carlos Fernández.
- - Il ne lui a pas été permis de recourir à la défense établie par l’article 131 du Code organique de procédure pénale, qui prend effet lorsque l’on présente une déposition.
- - De même, eu égard à sa détention, on l’a empêché illégalement de faire des démarches visant à démontrer l’inexistence de délits.
- - En ce qui concerne le contenu de la requête présentée par le procureur, il viole également son droit à la défense étant donné que les éléments qu’on lui incrimine ne sont pas individualisés et, bien que cinq délits lui aient été attribués, il n’a pas été fait état de preuves relatives à chacun des délits, ces derniers étant globalisés, ce qui conduit la défense à devoir deviner ce qu’il faut démontrer pour chacun des cinq délits imputés.
- - La requête a été présentée devant un juge incompétent puisqu’il ne s’agissait pas de celui qui avait prévenu. Il s’agit d’un juge différent de celui qui avait effectué les premiers actes de la procédure, tels que la désignation de défenseurs, et qui a décidé de demander de prendre la déposition devant le tribunal et de déclarer par anticipation le manque de fondement de la mesure de privation judiciaire préventive de liberté (nos 6 et 8 de l’article 125 du Code organique de procédure pénale).
- - Malgré le fait que le juge devant lequel la requête a été faite sache à la suite de la détention qu’il n’était pas compétent et que c’était le Premier juge de contrôle qui l’était, il n’a pas reconnu la cause et n’a pas remis le cas au Premier juge de contrôle, raison pour laquelle il a fallu le récuser.
- - Sur les cinq délits imputés, suite à la décision de la juge à qui le dossier a été remis après la récusation susmentionnée, deux seulement ont subsisté: délit de rébellion et d’incitation à commettre des délits. Les conduites attribuées à M. Carlos Fernández ne rentrent pas dans le cadre de ces délits. Par conséquent, il y a violation du principe de légalité, établi à l’alinéa 6 de l’article 49 de la Constitution nationale. A titre d’exemple, la rébellion implique qu’il y ait une insurrection, une levée d’armes, et l’arrêt de travail déclenché par la FEDECAMARAS a été pacifique, appuyé par la société civile, sans arme et dans l’exercice d’un droit démocratique.
- - La juge qui a ordonné la dernière décision a violé le principe relatif au juge naturel car celui qui était compétent pour connaître la cause, comme indiqué précédemment, et qui avait prévenu était le Premier juge de contrôle.
- - Malgré le fait qu’il y ait un juge naturel qui avait prévenu le premier, le bureau du ministère public n’a pas présenté sa requête de privation de liberté devant ce juge mais l’a présenté devant un autre, lequel, sans aucun doute, ne connaissait pas les droits susmentionnés. La représentante du ministère public ne fait aucunement état de cet élément et l’on peut donc affirmer qu’elle a occulté cette information au moment de demander la détention de Carlos Fernández.
- - Ont donc été violés, entre autres, le droit à la défense, le droit au Juge naturel, l’obligation du ministère public d’être de bonne foi dans le processus pénal (art. 49 de la Constitution du Venezuela, alinéas 1, 3, 4 et 6).
- 1075. Le comité prend note des déclarations du gouvernement selon lesquelles: 1) la détention de M. Carlos Fernández provient d’une requête conforme au droit et effectuée par le ministère public général de la République en la personne du sixième Procureur du ministère public; 2) la procédure a été ouverte à l’origine pour incitation à commettre des délits, saccage, conspiration et trahison de la patrie à la demande du bureau du ministère public de la République conformément au Code organique de procédure pénale, ces faits ayant été imputés avant la réunion de preuves qui démontraient les dommages causés au pays du fait du sabotage de l’industrie pétrolière lors de «l’arrêt de travail» ou lock-out dirigé, de manière publique et notoire, par M. Fernández de décembre 2002 et janvier 2003; 3) le juge de la cause a été le 34e du contrôle pénal de la circonscription judiciaire de la zone métropolitaine de Caracas qui, à son tour, a été récusé par les avocats de M. Fernández, le dossier ayant été remis à la 49e juge de contrôle; 4) ladite juge n’a pas accepté les délits de trahison de la patrie, de conspiration et de saccage mais a maintenu les accusations de rébellion civile et d’incitation à commettre des délits et a confiné M. Fernández à une assignation à résidence pendant la durée du jugement pour des motifs de problèmes de tension artérielle; 5) le 30 janvier 2003, M. Fernández a fait une déposition en qualité de témoin dans les locaux du ministère public et a reçu un nouvel avis de citation pour présenter sa déposition en qualité d’accusé qu’il n’a pas présentée; 6) le 18 février, la représentation du ministère public a demandé la privation judiciaire de liberté devant le juge de contrôle pour que M. Fernández soit conduit devant l’organe juridictionnel et que le juge statue sur la pertinence; 7) le 19 février 2003, le 34e juge de contrôle a accordé la requête et a ordonné l’arrestation de M. Fernández; 8) le 20 mars 2003, une Cour d’appel a décidé de libérer M. Fernández et de retirer les charges pesant contre lui; M. Fernández a alors immédiatement quitté le pays; 9) le 20 mars 2003, le 6e procureur du ministère public a interjeté une action de protection devant le Tribunal suprême de justice (salle constitutionnelle), qui a accepté les allégations de ministère public général de la République et a ordonné de nouveau la détention à résidence de M. Carlos Fernández, ordre que le Tribunal suprême de justice a ordonné de maintenir au moyen d’un avis lu par le président dudit tribunal le 2 août 2003; M. Fernández est par conséquent en fuite.
- 1076. Le comité observe que le gouvernement a transmis la sentence du Tribunal suprême de justice (8/VIII/03) qui annule la sentence de la Cour d’appel pour vice de forme (absence de signature de l’un des trois magistrats (21/III/03) qui s’était absenté quelques heures du tribunal en raison de problèmes de santé), mais il regrette que le gouvernement n’ait pas transmis la sentence de la Cour d’appel qui avait statué sur le fond de l’affaire. Le comité observe également que les déclarations du gouvernement n’apportent pas de réponses à chacune des violations du respect de la loi et aux irrégularités dont, selon l’annexe du plaignant reproduite ci-dessus, aurait été victime M. Fernández et considère que l’organisation plaignante a apporté des éléments suffisamment convaincants du manque d’impartialité dans cette affaire. Plus particulièrement, le comité est surpris d’observer qu’un juge a été récusé, que trois des charges ont été supprimées par un autre juge et que la Cour d’appel a fini par abandonner toutes les charges, de sorte que la sentence de cette Cour a été mise en appel devant le Tribunal suprême de justice, lequel a annulé la sentence pour vice de forme et a demandé de nouveau au ministère public (auprès du même procureur qui avait imputé initialement les cinq charges) la détention de M. Fernández.
- 1077. Pour ce qui est du fond de l’affaire, le comité observe que le point de vue des plaignants et du gouvernement diverge, quoi que les deux points de vue se rejoignent sur la détention de M. Carlos Fernández, président de la FEDECAMARAS, qui serait liée à l’arrêt de travail national ayant eu lieu du 2 décembre 2002 à fin janvier 2003.
- 1078. Le comité observe que, selon les organisations plaignantes, la détention de M. Fernández constitue une mesure de représailles et une discrimination face à l’exercice du droit de manifestation pacifique de la FEDECAMARAS et de ses activités revendicatives contre les abus du gouvernement et la crise économique et sociale que la politique gouvernementale avait générée, le manque de dialogue avec la FEDECAMARAS et la violation des droits des employeurs et des travailleurs, débouchant sur l’insécurité, les violations de la propriété privée par des interventions dans les propriétés agricoles et immobilières, incitées par le chef d’Etat, accroissement de la pauvreté et du chômage, agressions verbales publiques du chef d’Etat envers les employeurs et ses dirigeants, etc. Dans ce contexte, divers arrêts de travail nationaux ont eu lieu, la détention de M. Carlos Fernández se produit après le début de l’arrêt de travail du 12 décembre 2002 qui se termine fin janvier 2003; cet arrêt de travail a été lancé par la Coordination démocratique regroupant la FEDECAMARAS, les organisations syndicales les plus représentatives, les principales ONG et les partis politiques.
- 1079. Le comité observe toutefois que le gouvernement soutient que: 1) l’objectif de «l’arrêt de travail» de la FEDECAMARAS et de la Coordination démocratique (au sein de laquelle elle était intégrée) n’a rien à voir avec les situations dans lesquelles se trouvent les organisations patronales ou les syndicats et n’est qu’à des fins politiques, insurrectionnelles, subversives et antidémocratiques; l’objectif de l’arrêt de travail national commencé en décembre 2002 ne visait au contraire qu’à renverser le Président de la République; les objectifs ont été énoncés de différentes manières: «pour qu’ait lieu un référendum révocatoire», «pour que le Président tombe» ou «pour que le Président facilite la voie vers un processus électoral»; 2) sur la page Web de la FEDECAMARAS, il est indiqué que l’arrêt de travail a constitué «son principal moyen de pression pour exiger que le pays sorte de la crise de façon démocratique et par des élections», et la Coordination démocratique a encouragé la population à manifester tant que le but électoral n’a pas été atteint (à savoir le référendum révocatoire du Président de la République); 3) pendant l’arrêt de travail, des militaires dissidents situés sur la Plaza Francia à Altamira ont été impliqués dans les homicides de trois jeunes et dans des actes terroristes envers les sièges du consulat de Colombie et de l’ambassade d’Espagne, et à d’autres endroits; 4) lors de l’arrêt de travail, M. Carlos Fernández s’est rapproché des militaires participant au coup d’Etat d’avril 2002 pour «harmoniser les critères» et, peu de temps après, il s’est allié à ces militaires rebelles (qui appelaient à la désobéissance civile dans un but insurrectionnel) pour signer un «pacte démocratique» contre le gouvernement; l’expression «arrêt de travail national indéfini» a alors été employée dans toutes les déclarations; 5) M. Fernández a donné des instructions publiques pour recueillir illégalement et frauduleusement des signatures pour appeler à un référendum consultatif qui était censé se transformer en référendum révocatoire; il a incité publiquement à procéder à des actes de sabotage de l’économie, à la violence et à l’intolérance sociale; il a appelé publiquement les patrons à fermer les entreprises (y compris celles produisant de l’alimentation et des médicaments) qui payaient les salaires des travailleurs alors qu’ils ne travaillaient pas; il a incité la population à bloquer violemment les autoroutes et les routes; il a poussé des secteurs fascistes à fermer brutalement les commerces, les supermarchés, etc., accompagné par la police municipale de l’opposition lors de l’arrêt de travail et, suite à l’admonestation de M. Fernández, des agressions ont eu lieu sur des travailleurs et des véhicules de transport public et, dans certains cas, des personnes ont été gravement blessées; 6) le droit à l’éducation et à la libre circulation et à la santé des individus a été violé; des patrons paysans ont déversé des millions de litres de lait dans les rivières ou autres voies d’écoulement, laissant la population face au manque de produits de première nécessité; 7) il a été abusé (principalement par M. Ortega et M. Fernández) du droit à l’information, à la liberté d’expression et à la télévision et aux moyens de communication de masses, par le biais de techniques subliminales de publicité et de propagande de guerre, de mensonges, de manipulations et de désinformation, ils ont incité à violer la libre circulation; des fonctionnaires du gouvernement et leurs familles ont été menacés physiquement et verbalement; les installations de l’entreprise Petróleos de Venezuela SA ont été interrompues et sabotées de manière terroriste, provoquant des dommages aux équipements ainsi qu’aux finances du pays (soit plus de 10 milliards de dollars), étant donné que cette entreprise rapporte 83 pour cent du PIB de la République; plus de 500 000 emplois ont été perdus et le chômage a augmenté de cinq points (passant de 15,7 pour cent à 20,7 pour cent); dans l’industrie pétrolière, des sabotages sur des raffineries et des puits de pétrole ou sur d’autres installations ont eu lieu et ont provoqué l’écoulement de pétrole brut; ils ont paralysé ou mouillé des navires; ils ont saboté des valves et des clés d’accès aux centres informatiques de l’industrie pétrolière; 8) les sources d’énergie des industries de l’aluminium et du fer au Guyana ont été sabotées; 9) le harcèlement des ambassades étrangères a été encouragé; des campagnes ont été faites pour que les impôts et les cotisations de la sécurité sociale ne soient pas calculés; 10) des horaires restreints ont été établis dans les entités financières; une campagne publicitaire et de propagande a été mise sur pied contre la célébration de la nativité, etc.
- 1080. Le comité a conscience que les grèves nationales civiques sont des manifestations publiques massives et complexes au cours desquelles organisations d’employeurs et de travailleurs abritaient des membres sympathisants de partis politiques et des ONG et où le droit de manifestation implique, de fait, des lock-out et des grèves générales probablement indéfinis qui ont duré, dans le cas de l’arrêt de travail de décembre 2002 à janvier 2003, deux mois.
- 1081. Le comité observe que le gouvernement a invoqué essentiellement l’illégalité et l’illégitimité de ces arrêts de travail dans leur caractère exclusivement politique et insurrectionnel (ils visaient à renverser le Président de la République) et a soutenu que la détention de M. Carlos Ortega était légale et légitime. Pour traiter de tels sujets, le comité souhaite mettre en relief une série de questions.
- 1082. La première question est que la Constitution de la République accorde largement le droit de réunion publique et de grève sans autorisation (art. 53), dans le secteur public et le secteur privé (art. 97), et autres droits de l’homme et contient également des dispositions sur la révocation de toutes les charges et de la magistrature par le biais d’un référendum (art. 72). Ainsi, l’article 350 dispose que «le peuple du Venezuela, fidèle à sa tradition républicaine, à la lutte pour l’indépendance, la paix et la liberté, ignorera tout régime, toute législation ou autorité qui serait contraire aux valeurs, aux principes et aux garanties démocratiques ou qui amoindrirait les droits de l’homme» (à cet égard, dans un rapport du Secrétaire général de l’OEA joint en annexe par le gouvernement, il est indiqué qu’il faut éviter d’interpréter cette disposition comme un droit général à la rébellion). Ces droits, s’inscrivant dans le cadre d’une Constitution récente, n’ont pas été élaborés par la législation et celle-ci manque de précision (par exemple, dans le cas de conflits entre droits constitutionnels et services minimums à mettre en place en cas de grève); il en résulte des confusions et, bien que cela ne justifie rien, cela peut expliquer une partie des abus et des limites outrepassées, auxquels le gouvernement fait référence et que le comité déplore profondément. La deuxième question qui se pose est de savoir si l’arrêt de travail national dont il est question était exclusivement politique et insurrectionnel, comme l’indique le gouvernement (auquel cas le comité ne serait pas compétent en la matière). A cet égard, le comité souligne que l’arrêt de travail susmentionné n’a pas donné lieu à quelque coup d’Etat que ce soit et que, si le gouvernement a fourni des informations montrant que l’objectif principal était la chute du Président de la République ou la réalisation d’un référendum révocatoire, les dispositions constitutionnelles susmentionnées ne semblent pas permettre d’attribuer d’illégalité ou d’illégitimité, ou de caractère insurrectionnel en soi à cet objectif (ou à cette revendication), dans l’hypothèse où il s’agirait du seul et unique objectif (de plus, le gouvernement a envoyé en annexe un accord politique (avec l’appui de l’OEA) conclu après l’arrêt de travail national entre le gouvernement et la Coordination démocratique - organisatrice dudit arrêt de travail - dans lequel les parties font une déclaration contre la violence et pour la paix et la démocratie et dans lequel ils se proposent justement de contribuer à une solution à la crise par voie électorale et font référence aux référendums révocatoires (art. 72 de la Constitution) s’ils sont demandés officiellement par un nombre minimum d’électeurs). Le comité souligne toutefois que les allégations formulées dans la présente plainte montrent que pour la FEDECAMARAS et les employeurs l’arrêt de travail est lié directement à la politique sociale du gouvernement et à ses conséquences et à l’exclusion de la FEDECAMARAS du dialogue social par le gouvernement; en outre, le gouvernement lui-même a reconnu dans sa réponse qu’il n’accordait pas de légitimité au comité exécutif de la Confédération des travailleurs du Venezuela (CVT) qui a également participé à l’arrêt de travail national et qui est la centrale des travailleurs la plus représentative (la chronologie elle-même des déclarations faites pendant l’arrêt de travail national, que le gouvernement joint en annexe, expose, de l’avis du comité, des déclarations revendicatrices de M. Carlos Fernández montrant que l’arrêt de travail national était un acte de revendication de la FEDECAMARAS lié aux entreprises et, de fait, ce dirigeant mentionne «des politiques économiques mal avisées, la dévaluation, la fixation de contrôle des changes ... l’objectif du gouvernement étant de supprimer l’entreprise privée» ... «nous ne sommes pas d’accord qu’ils continuent à fermer des entreprises»..., «40 milliards de dollars ont été perdus dans les remaniements administratifs irréguliers du gouvernement...»). Par conséquent, le comité ne peut pas partager le point de vue du gouvernement selon lequel l’arrêt de travail national n’avait rien à voir avec les situations dans lesquelles se trouvaient les organisations patronales ou les syndicats. Par ailleurs, le comité rappelle le principe selon lequel, «dans une situation où elles estimeraient ne pas jouir des libertés essentielles indispensables pour mener à bien leur mission, les organisations de travailleurs [et d’employeurs] seraient fondées à demander la reconnaissance de ces libertés, et de telles revendications devraient être considérées comme entrant dans le cadre d’activités syndicales légitimes». [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 28.]
- 1083. La troisième question concerne la détention de M. Carlos Fernández, président de la FEDECAMARAS, dont les plaignants mentionnent le caractère discriminatoire et qui résulte de ses agissements en qualité de dirigeant employeur. Le comité observe que l’arrêt de travail a été suivi à une échelle inhabituelle (selon les déclarations de l’actuelle présidente de la FEDECAMARAS, figurant dans une des annexes du gouvernement, en quelques jours, la participation a été de 1 million et demi de personnes) et note que le gouvernement déclare qu’il y a eu des sabotages et des actes de violence générant des blessures physiques, venant s’ajouter à d’innombrables violations des droits de l’homme et à des pertes économiques et d’emplois démesurées. Le comité le regrette profondément et espère que les auteurs de ces délits seront sanctionnés. Le comité observe que le gouvernement accuse le président de la CTV et le président de la FEDECAMARAS d’avoir incité à commettre une bonne partie de ces délits et de ces infractions, mais il n’a pas démontré ni mis en relief le lien de causalité concret existant entre les différentes déclarations concrètes («admonestations» selon le gouvernement) ou d’éventuelles actions du président de la FEDECAMARAS ou de telles infractions, de sorte qu’il semble lui imputer une incitation générique globale plutôt qu’individuelle et causale; par ailleurs, dans la chronologie des déclarations faites pendant l’arrêt de travail national que le gouvernement a jointes en annexe, ne figure aucune déclaration selon laquelle M. Carlos Fernández a appelé à la violence ou à commettre des délits. Le comité rappelle qu’«il convient de ne pas confondre l’exercice par les syndicats [ou les organisations d’employeurs] de leurs activités spécifiques, c’est-à-dire la défense et la promotion des intérêts professionnels des travailleurs ou des employeurs, avec l’éventuelle poursuite de la part de certains de leurs membres d’autres activités, étrangères au domaine syndical. La responsabilité pénale que pourraient encourir ces personnes du fait de tels actes ne devrait en aucune façon entraîner des mesures équivalant à priver les syndicats eux-mêmes [ou les organisations d’employeurs] ou l’ensemble de leurs dirigeants de leurs possibilités d’action». [Voir Recueil, op. cit., paragr. 456.] Par ailleurs, le comité observe qu’il semble se dégager de la réponse du gouvernement que, parmi les organisateurs de l’arrêt de travail national qui s’associaient à la Coordination démocratique (FEDECAMARAS, CTV, ONG, importants partis politiques), seuls le président de la FEDECAMARAS et le président de la CTV ont fait l’objet d’un ordre de détention.
- 1084. Tenant compte de tous ces éléments et du contexte constitutionnel vénézuélien particulier, le comité estime que la détention de M. Carlos Fernández, outre le fait d’être discriminatoire, visait à neutraliser le dirigeant des employeurs ou à le réprimer, en raison de ses activités de défense des intérêts des employeurs et, par conséquent, prie instamment le gouvernement de prendre les mesures nécessaires dont il dispose pour que la procédure judiciaire contre M. Carlos Fernández soit immédiatement sans effet et pour qu’il puisse sans tarder revenir au Venezuela sans risquer de faire l’objet de représailles. Le comité demande au gouvernement de le maintenir informé à cet égard. Le comité déplore profondément la détention de ce dirigeant employeur et souligne pour finir que la détention de dirigeants employeurs pour des raisons liées à des actes de revendication légitimes constitue un grave obstacle à l’exercice de leurs droits et viole la liberté syndicale, et demande au gouvernement de respecter ce principe.
- d) Conclusions sur les allégations relatives à des discriminations dans l’application du nouveau système de contrôle des changes
- 1085. En ce qui concerne les allégations relatives à l’application du nouveau système de contrôle des changes de 2001 (suspension des libres opérations d’achat et de vente de devises) mis en place de manière unilatérale par les autorités, discriminant les entreprises de la FEDECAMARAS eu égard aux autorisations administratives pour l’achat de devises étrangères (pour réprimer la participation de cette dernière aux arrêts de travail nationaux), le comité observe que le gouvernement répond en posant la question suivante: après l’arrêt de travail national (de décembre 2002 à janvier 2003), dans les trois derniers trimestres de l’année 2003, comment aurait-on rattrapé les plus de 700 000 emplois qui avaient été supprimés après le sabotage de l’économie nationale si l’on avait refusé les devises aux entreprises? Le comité souligne toutefois que les allégations se fondent sur des déclarations du ministère de la Production et du Commerce et du Président de la République. Le comité a examiné dans une autre partie les justifications à ce régime données par le gouvernement.
- 1086. Concernant les allégations de discrimination et de graves difficultés exprimées par les plaignants, suite à l’impact négatif de ce régime établi de manière unilatérale par les autorités dans nombre d’industries, le comité demande au gouvernement d’examiner sans tarder avec la FEDECAMARAS la possibilité de modifier le régime actuel et de garantir entre-temps, en cas de plaintes, l’application de ce régime sans aucune discrimination par l’intermédiaire d’organes impartiaux. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard.
- e) Conclusions sur les allégations relatives au harcèlement physique, économique et moral (dont des menaces et des agressions contre le patronat vénézuélien et ses dirigeants de la part des autorités ou de gens proches du gouvernement); fonctionnement de groupes paramilitaires violents avec l’appui du gouvernement agissant contre les locaux d’une organisation d’employeurs et contre des actes de revendication de la FEDECAMARAS; pillage et occupation autorisés de FINCAS en pleine production ou parfois stimulés par les autorités en violation de la Constitution et sans suivre les procédures légales; politique de harcèlement du secteur privé de la communication
- 1087. Le comité déplore que le gouvernement n’ait pas répondu de manière spécifique à ces allégations. Dans ces conditions, le comité demande au gouvernement de prendre sans tarder les mesures nécessaires pour que:
- - les autorités ne cherchent pas à intimider, à faire pression ou à menacer les employeurs et leurs organisations en raison de leurs activités revendicatives légitimes, en particulier dans le secteur des moyens de communication et dans le secteur agroindustriel;
- - s’ouvre sans tarder une enquête sur: 1) les actes de vandalisme effectués dans les locaux de la Chambre de commerce de Lasa par des groupes bolivariens partisans du régime (12 décembre 2002); 2) le pillage du bureau de M. Julio Brazón, président du CONSECOMERCIO (18 février 2003); 3) les menaces de violence du 29 octobre 2002 proférées par de supposés membres du parti du gouvernement à l’encontre de M. Adip Anka, président de la Chambre de commerce de Bejuma;
- - s’ouvre sans tarder une enquête sur les allégations relatives à 180 cas (jusqu’en avril 2003) non réglés par les autorités liés à des interventions illégales dans des propriétés des Etats de Anzoátegui, Apure, Barinas, Bolívar, Carabobo, Cojidas, Falcón, Guárico, Lora, Mérida, Miranda, Monagas, Portuguesa, Sucre, Taclira, Trujillo, Yanacuy et Zulia, et lui demande, dans le cas d’expropriation, de respecter pleinement la législation et les procédures prévues en la matière;
- - s’ouvre d’urgence une enquête indépendante (réalisée par des personnalités ayant la confiance des centrales de travailleurs et d’employeurs) sur les groupes paramilitaires violents mentionnés dans les allégations (Coordinadora Simón Bolívar, Movimientos Tupamaros et Círculos Bolivarianos Armados, Quinta República, Juventud Revolucionaria del MVR, Frente Institucional Militar et Fuerza Bolivariana) dans le but de les démanteler et de les désarmer, et de garantir que, lors des manifestations, il n’y ait pas de heurts et d’affrontements de la part de ces groupes envers les manifestants, et de le maintenir informé à cet égard.
- 1088. De manière générale, le comité exprime sa profonde préoccupation concernant ces allégations et le manque de respect des droits des organisations d’employeurs, de leurs représentants et de leurs affiliés. Le comité porte à l’attention du gouvernement que les droits des organisations d’employeurs et de travailleurs ne peuvent s’exercer que dans un climat exempt de violence, de pressions ou de menaces de toutes sortes à l’encontre des dirigeants et des membres de ces organisations, et il appartient aux gouvernements de garantir le respect de ce principe. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 47.] Le comité souligne également le principe selon lequel la liberté syndicale ne peut s’exercer que dans une situation où les droits fondamentaux de l’homme sont respectés et garantis, en particulier ceux relatifs à la vie, à la sécurité de la personne, au respect de la loi et à la protection des locaux et des propriétés des organisations d’employeurs et de travailleurs. Le comité demande au gouvernement de garantir pleinement à l’avenir le respect de ces droits.
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 1089. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver le présent rapport, et en particulier les recommandations suivantes:
- a) De manière générale, le comité souligne la gravité des faits allégués et déplore que, malgré les plaintes qui ont été présentées en mars 2003, la réponse du gouvernement datée du 9 mars 2004 ne réponde pas, de manière spécifique, à une partie importante des faits allégués.
- b) Tenant compte de la nature des allégations présentées et de la réponse du gouvernement, le comité exprime, de manière générale, sa profonde préoccupation et le manque de respect des droits des organisations d’employeurs, de leurs représentants et de leurs affiliés. Le comité porte à l’attention du gouvernement que les droits des organisations d’employeurs et de travailleurs ne peuvent s’exercer que dans un climat exempt de violence, de pressions ou de menaces de toutes sortes à l’encontre des dirigeants et des membres de ces organisations; le comité souligne également le principe selon lequel la liberté syndicale ne peut s’exercer que dans une situation où les droits fondamentaux de l’homme sont respectés et garantis, en particulier ceux relatifs à la vie, à la sécurité de la personne, au respect de la loi et à la protection des locaux et des propriétés des organisations d’employeurs et de travailleurs. Le comité prie instamment le gouvernement de garantir pleinement à l’avenir le respect de ces principes;
- c) le comité déplore que, depuis des années, le gouvernement n’ait pas convoqué la Commission tripartite nationale et que, de manière générale, il ait pour habitude de ne pas faire de consultations bipartites ou tripartites avec la FEDECAMARAS, eu égard aux politiques et aux lois touchant fondamentalement ses intérêts dans les affaires en matière de travail, sociales ou économiques, violant par là même les droits essentiels de cette centrale d’employeurs; le comité prie instamment le gouvernement de cesser de mettre à l’écart et d’exclure la FEDECAMARAS du dialogue social, et d’appliquer pleinement à l’avenir la Constitution de l’OIT et les principes susmentionnés en matière de consultation et de tripartisme. Le comité prie instamment le gouvernement de réunir sans tarder et périodiquement la Commission tripartite nationale et d’examiner dans ce contexte avec les interlocuteurs sociaux l’ensemble des lois et décrets adoptés en l’absence de consultation tripartite.
- d) En cette période critique que vit le pays et observant que, depuis des années, il existe un conflit permanent entre le gouvernement d’un côté et la FEDECAMARAS et la CTV de l’autre, le comité offre au gouvernement la contribution de l’OIT pour mettre son expérience au service de l’Etat et de la société pour que les autorités et les interlocuteurs sociaux retrouvent la confiance et, dans un climat de respect mutuel, établissent un système de relations de travail fondé sur les principes de la Constitution de l’OIT et de ses conventions fondamentales, et sur l’entière reconnaissance, avec toutes les conséquences que cela implique, des centrales les plus représentatives et de toutes les organisations et tendances significatives du monde du travail.
- e) Le comité prie instamment le gouvernement de réintégrer l’organisation FEDENAGA au Conseil agricole et de cesser de favoriser l’organisation CONFAGAN au détriment de la FEDENAGA.
- f) Le comité estime que la détention du président de la FEDECAMARAS, M. Carlos Fernández, outre le fait d’être discriminatoire, visait à neutraliser ce dirigeant ou de le réprimer en raison de ses activités de défense des intérêts des employeurs et, par conséquent, prie instamment le gouvernement de prendre les mesures dont il dispose pour que la procédure judiciaire à l’encontre de M. Carlos Fernández soit immédiatement sans effet et pour qu’il puisse revenir sans tarder au Venezuela sans risquer de faire l’objet de représailles. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard, déplore profondément la détention de ce dirigeant et souligne que la détention de dirigeants employeurs pour des raisons liées à des actes de revendication légitimes constitue un grave obstacle à l’exercice de leurs droits et viole la liberté syndicale. Le comité demande au gouvernement de respecter ce principe et d’ouvrir une enquête sur la manière dont la police a procédé à la détention de M. Carlos Fernández, sur l’absence de moyen de communication dont il a fait l’objet pendant une journée et sur les caractéristiques de la cellule dans laquelle il a été incarcéré, et de le tenir informé à ce sujet.
- g) En ce qui concerne les allégations relatives à l’application du nouveau système de contrôle des changes de 2001 (suspension des libres opérations d’achat et de vente de devises) établi unilatéralement par les autorités, discriminant les entreprises de la FEDECAMARAS, eu égard aux autorisations administratives pour l’achat de devises étrangères (pour réprimer la participation de cette dernière aux arrêts de travail nationaux) et au vu des allégations de discrimination et des graves difficultés exprimées par les plaignants suite à l’impact négatif du régime dans nombre d’industries, le comité demande au gouvernement d’examiner sans tarder avec la FEDECAMARAS la possibilité de modifier le régime actuel et de garantir entre-temps, en cas de plaintes, l’application de celui-ci sans aucune discrimination par l’intermédiaire d’organes impartiaux. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé à cet égard.
- h) Le comité prie instamment le gouvernement de prendre sans tarder les mesures nécessaires pour que:
- i) les autorités ne cherchent pas à intimider, à faire pression ou à menacer les employeurs et leurs organisations en raison de leurs activités revendicatives légitimes, en particulier dans le secteur des moyens de communication et dans le secteur agroindustriel;
- ii) s’ouvre sans tarder une enquête sur: 1) les actes de vandalisme effectués dans les locaux de la Chambre de commerce de Lasa par des groupes bolivariens partisans du régime (12 décembre 2002); 2) le pillage du bureau de M. Julio Brazón, président du CONSECOMERCIO (18 février 2003); 3) les menaces de violence proférées le 29 octobre 2002 par de supposés membres du parti du gouvernement à l’encontre de M. Adip Anka, président de la Chambre de commerce de Bejuma;
- iii) s’ouvre sans tarder une enquête sur les allégations relatives à 180 cas (jusqu’en avril 2003) non réglés par les autorités liés à des interventions illégales dans des propriétés des Etats de Anzoátegui, Apure, Barinas, Bolívar, Carabobo, Cojidas, Falcón, Guárico, Lora, Mérida, Miranda, Monagas, Portuguesa, Sucre, Taclira, Trujillo, Yanacuy et Zulia, et demande qu’en cas d’expropriation la législation et les procédures prévues à cet effet soient pleinement respectées; et
- iv) s’ouvre d’urgence une enquête indépendante (réalisée par des personnalités ayant la confiance des centrales de travailleurs et d’employeurs) sur les groupes paramilitaires violents mentionnés dans les allégations (coordinadora Simón Bolívar, Movimientos Tupamaros et Círculos Bolivarianos Armados, Quinta República, Juventud Revolucionaria del MVR, Frente Institucional Militar et Fuerza Bolivariana), dans le but de les démanteler et de les désarmer, et de garantir que, lors des manifestations, il n’y ait pas de heurts ni d’affrontements émanant de ces groupes envers les manifestants et de le tenir informé à cet égard.