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Rapport où le comité demande à être informé de l’évolution de la situation - Rapport No. 344, Mars 2007

Cas no 2373 (Argentine) - Date de la plainte: 30-JUIL.-04 - Clos

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  1. 254. Le comité a examiné le présent cas pour la dernière fois à sa réunion de novembre 2005 et a présenté un rapport intérimaire au Conseil d’administration. [Voir 338e rapport, paragr. 359 à 384.] Dans une communication de juin 2006, la Centrale des travailleurs argentins (CTA) a envoyé des observations complémentaires.
  2. 255. Le gouvernement a envoyé ses observations dans des communications datées du 24 février et du 16 août 2006.
  3. 256. L’Argentine a ratifié la convention (nº 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (nº 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.

A. Examen antérieur du cas

A. Examen antérieur du cas
  1. 257. A sa réunion de novembre 2005, le comité a formulé les recommandations suivantes [voir 338e rapport, paragr. 384]:
  2. – S’agissant de la résolution no 2735/04 aux termes de laquelle le sous-secrétariat du Travail et de la Sécurité sociale de la province de Mendoza a déclaré illégale la démonstration de force (assemblée sur le lieu de travail) décidée le 22 juin 2004 par les travailleurs de la municipalité de Godoy Cruz, le comité rappelle qu’il estime que la déclaration d’illégalité d’actions de revendications, telles que la grève ou des mesures équivalentes comme la déclaration de l’assemblée permanente, ne devrait pas être de la compétence du gouvernement mais d’un organe indépendant ayant la confiance des parties. A cet égard, le comité demande au gouvernement de le tenir informé du résultat de la procédure d’amparo engagée par l’ATE, qui est en instance devant l’autorité judiciaire de la province.
  3. – Quant à l’allégation relative aux sommations à comparaître imposées à 45 travailleurs ayant participé à la démonstration de force du 22 juin 2004, déclarée illégale par l’autorité administrative de la province de Mendoza, le comité, tout en prenant note que le recours en amparo formé par l’ATE devant l’autorité judiciaire au sujet de la déclaration d’illégalité porte également sur cette question, demande au gouvernement de le tenir informé du résultat de cette procédure.
  4. – Le comité demande au gouvernement d’envoyer ses observations au sujet des nouvelles allégations présentées par communication de mai 2005, relatives aux actes de discrimination antisyndicale (transferts et élaboration d’une liste noire) à l’encontre des travailleurs ayant participé aux démonstrations de force du mois d’avril 2005 (les 4, 5, 6, 7, 8, 12, 13, 14, 20, 21, 22, 26, 27 et 28) dans la province de Misiones.
  5. B. Informations complémentaires
  6. 258. Dans leur communication de juin 2006, les organisations plaignantes font référence aux allégations déjà présentées relatives au transfert de travailleurs de la Direction générale du cadastre du sous-secrétariat d’Etat des Finances, des Travaux et des Services publics de la province de Misiones, en raison de leur participation à la démonstration de force des 4, 5, 6, 7, 8, 12, 13, 14, 20, 21, 22, 26, 27 et 28 avril 2005 dans toutes les entités publiques de la province de Misiones, et au recrutement de travailleurs pour briser la grève (à la communication est jointe une liste du gouvernement sur laquelle figurent les noms de neuf personnes recrutées et liées par contrat). De même, les organisations plaignantes joignent le texte du décret n° 493/05 en vertu duquel les travailleurs susmentionnés ont été recrutés.
  7. C. Réponses du gouvernement
  8. 259. Dans sa communication du 24 février 2006, le gouvernement indique que le recours d’amparo formé par l’organisation plaignante ATE se trouve toujours au stade de présentation des preuves.
  9. 260. Dans sa communication du 16 août 2006, le gouvernement fait référence aux allégations relatives aux actes de discrimination antisyndicale à l’encontre des travailleurs ayant participé à la démonstration de force du mois d’avril 2005 dans la province de Misiones et, en particulier, au recrutement de travailleurs à la Direction provinciale du cadastre de la province de Misiones, alors que cette entité faisait l’objet d’une démonstration de force. Selon les organisations plaignantes, le 1er avril 2005, le sous-secrétariat du Travail et de l’Emploi de Misiones a été informé qu’un arrêt de travail, un état d’alerte, une assemblée permanente et une mobilisation seraient organisés du 4 au 28 avril de la même année par les employés de l’administration publique de la province pour réclamer une augmentation de salaires et de meilleures conditions de travail et, étant donné qu’à la Direction nationale du cadastre les démonstrations de force ont été plus importantes, le gouvernement de la province a émis le décret no 493/05, en vertu duquel neuf travailleurs ont été recrutés à la Direction générale du cadastre de la province afin d’augmenter les effectifs et de ne pas perturber le service. Les organisations plaignantes ajoutent que, quelques jours plus tard, trois travailleurs de la Direction générale du cadastre, qui avaient participé à la grève, ont été transférés vers une autre entité. En résumé, selon les organisations plaignantes, la province de Misiones a sanctionné certains travailleurs en raison de leur participation à la grève, les a transférés et a recruté du personnel pour minimiser l’efficacité de l’action revendicative.
  10. 261. A cet égard, le gouvernement rejette tous les faits allégués et rejette, en particulier, l’allégation selon laquelle le droit de grève a été violé. A ce sujet, le gouvernement indique que le droit de grève est exercé sur tout le territoire national. En témoigne la reconnaissance de ce droit, non seulement à l’échelon constitutionnel mais aussi dans les traités internationaux ratifiés par l’Argentine et qui ont rang constitutionnel, comme il a été indiqué de manière récurrente dans cette affaire. Le gouvernement considère qu’à aucun moment les agissements de la province de Misiones ne peuvent être interprétés comme une violation du droit de grève, et que la démonstration de force n’a aucun rapport avec le transfert de trois travailleurs ou le recrutement de neuf autres. Comme l’indiquent les termes du décret susmentionné par les organisations plaignantes, ces mesures sont liées à la modernisation de la fonction publique de la province et aux nouveaux systèmes informatiques qui nécessitent du personnel spécialisé.
  11. 262. Le gouvernement ajoute qu’il n’est pas non plus exact qu’une liste noire aurait été élaborée contenant le nom des personnes ayant participé à cette action revendicative et qui aurait visé à sanctionner les travailleurs en violation présumée des dispositions des articles 3 et 10 de la convention no 87. Le gouvernement réaffirme une fois encore que l’Etat argentin et la province de Misiones respectent le droit de grève, celui-ci étant entendu comme l’arrêt de travail concerté résultant d’une action légitime de protection collective. Néanmoins, selon le gouvernement, dans la présente affaire, il faut prendre en considération les circonstances suivantes pour comprendre que l’action en question ne répondait pas aux caractéristiques requises: 1) la démonstration de force concerne des travailleurs qui exercent des fonctions liées à l’activité judiciaire et notariale, puisqu’il s’agit de toutes les activités relatives à l’exercice et aux restrictions en matière de droit de propriété. Telle est la fonction de la Direction provinciale du cadastre. Sur le registre sont reportés tous les «éléments nouveaux et le statut juridique» de la vie d’une propriété (interdictions, saisie, ventes, etc.), à partir duquel tous les certificats que les travailleurs émettent sont faits au nom de l’Etat et attestent les mouvements relatifs à ces propriétés; 2) ces tâches, qui font partie du fonctionnement de l’Etat, nécessitent le maintien d’un service et du personnel adéquats, étant donné la complexité du système des archives. Le transfert et l’augmentation des effectifs ont été décidés pour répondre à la modernisation technologique et non pour des motifs liés à la démonstration de force. En témoigne le fait qu’aucune note administrative ne fait état de questions relatives au transfert; 3) la démonstration de force a généré de lourdes conséquences, pour ce qui de l’intérêt juridique à protéger, étant donné que cela aurait porté atteinte au droit des travailleurs indépendants qui ont besoin des services publics pour effectuer leurs démarches administratives et pour obtenir des informations liées au cadastre. Il faut en outre souligner que ces services sont payés et que le fait de ne pas les fournir pourrait entraîner également la responsabilité de l’Etat vis-à-vis de tiers qui porteraient plainte; et 4) la démonstration de force ne s’est pas faite uniquement sous forme «d’arrêt de travail», mais aussi sous forme de grève perlée, s’étant accompagnée de la vente de nourriture, de l’utilisation d’éléments sonores pendant les horaires d’ouverture et de la concentration de personnes à la porte d’entrée de l’organisme, perturbant par là même le travail des non-grévistes ou faisant obstacle à l’entrée du public. Tout cela a généré, d’une part, un dysfonctionnement des services puisqu’il y a véritablement eu une occupation des lieux de travail, là où se trouvaient des documents extrêmement délicats, dont la perte, la détérioration ou la négligence auraient pu donner lieu à des actions pénales et, d’autre part, la montée de la tension de ceux qui étaient pressés par le temps en raison de la vente de propriétés ou d’ordonnance judiciaire dont le délai d’exécution est impératif, le tout ayant créé une situation proche de la violence. Le gouvernement considère que ces agissements n’ajoutent rien à la revendication des travailleurs et dépassent largement l’objectif de cette démonstration.
  12. 263. Enfin, le gouvernement indique qu’il n’est pas non plus exact que la liste de personnes ayant participé à la démonstration de force constitue une «liste noire». Le gouvernement explique que, étant donné que la démonstration de force avait perturbé l’enregistrement mécanique des entrées et des sorties et que pendant cette démonstration les membres du personnel avaient abandonné leur poste de travail pour participer aux défilés, il a fallu recueillir des informations pour faire un contrôle et savoir quelles étaient les personnes – sans porter atteinte à cette forme d’action – qui ne s’étaient pas rendues au travail pour raisons diverses et si leur absence était justifiée.

D. Conclusions du comité

D. Conclusions du comité
  1. 264. Le comité rappelle qu’à sa réunion de novembre 2005 il a demandé au gouvernement de le tenir informé des résultats du recours d’amparo syndical formé par l’ATE concernant la résolution no 2735/04, aux termes de laquelle le sous-secrétariat du Travail et de la Sécurité sociale de la province de Mendoza a déclaré illégale la démonstration de force (assemblée sur le lieu de travail), décidée le 22 juin 2004 par les travailleurs de la municipalité de Godoy Cruz, et concernant la sanction présumée de sommation à comparaître imposée à 45 travailleurs ayant participé à la démonstration de force du 22 juin 2004, déclarée illégale par l’autorité administrative de la province de Mendoza. A cet égard, le comité prend note de l’information du gouvernement selon laquelle le recours d’amparo en question est toujours au stade de présentation des preuves. Le comité observe que, le 12 mai 2005, le gouvernement avait indiqué la même chose et il considère que le délai de presque deux ans pour statuer sur un recours d’amparo concernant des droits syndicaux est trop long. Dans ces circonstances, le comité déplore un tel délai, rappelle que «l’administration dilatoire de la justice constitue un déni de justice» [voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 105] et s’attend à ce que l’autorité judiciaire se prononce dans un futur proche. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé du résultat du recours en question.
  2. 265. De même, à sa réunion de novembre, le comité a demandé au gouvernement de lui envoyer ses observations sur les allégations relatives à des actes de discrimination antisyndicale (transferts de travailleurs et élaboration d’une liste noire) portant atteinte aux travailleurs de la Direction générale du cadastre qui ont participé aux démonstrations de force du mois d’avril 2005 dans toutes les entités publiques de la province de Misiones, ainsi qu’au recrutement de travailleurs pour briser la grève. Le comité prend note que le gouvernement rejette toute les allégations et qu’il déclare que: 1) l’Etat et la province de Misiones respectent le droit de grève et que la démonstration de force en question n’a pas seulement pris la forme d’un arrêt de travail mais également de grève perlée, s’étant accompagnée de la vente de nourriture, de l’utilisation d’éléments sonores pendant les horaires d’ouverture et de la concentration de personnes à la porte d’entrée de l’organisme, faisant obstacle à l’accès des non-grévistes et du public; 2) la démonstration de force a été organisée par des travailleurs qui exercent des fonctions liées à l’activité judiciaire et notariale, puisqu’il s’agit de toutes les activités relatives à l’exercice et aux restrictions en matière de droit de propriété (à la Direction générale du cadastre, les travailleurs émettent des certificats au nom de l’Etat attestant les mouvements relatifs aux propriétés); 3) le transfert de trois travailleurs et le recrutement de neuf autres n’ont aucun rapport avec la démonstration de force, mais sont liés à la modernisation de la fonction publique dans la province et aux nouveaux systèmes informatiques qui nécessitent du personnel spécialisé; et 4) il est inexact qu’une liste noire a été élaborée mais, étant donné que la démonstration de force a perturbé l’enregistrement mécanique des entrées et des sorties et qu’en raison de la grève les travailleurs avaient quitté leur poste de travail pour participer aux défilés, il a fallu recueillir des informations pour pouvoir faire un contrôle et savoir quelles étaient les personnes qui ne s’étaient pas rendues au travail et si ces absences étaient justifiées.
  3. 266. En ce qui concerne l’allégation de recrutement de briseurs de grève, le comité observe qu’il ressort des documents joints par les organisations plaignantes que le recrutement contesté de neuf travailleurs a été décidé par le décret no 493 du 18 avril 2005 du gouvernement de la province de Misiones, que l’exposé des motifs indique que la Direction générale du cadastre de la province de Misiones doit augmenter ses effectifs pour pouvoir répondre au Projet de modernisation du cadastre qui a été lancé et qu’il est absolument nécessaire, pour pouvoir améliorer les services publics de la province tel que défini en temps utile par l’entreprise consultante, de se doter de personnel qualifié et sélectionné avec soin en fonction de ses compétences et de ses connaissances spécialisées dans le domaine de la gestion des informations liées au cadastre. De même, il ressort dudit décret qu’à partir du 1er janvier 2005 neuf personnes ont été recrutées et liées par contrat jusqu’au 31 décembre 2005 pour les services rendus. En ce qui concerne l’allégation de transfert de trois travailleurs, pour raison antisyndicale, le comité observe que ce transfert a été décidé par la résolution no 170 du 29 avril 2005 du secrétariat d’Etat des Finances, des Travaux et des Services publics de la province de Misiones et que, selon l’exposé des motifs de ladite résolution, le sous-secrétariat du gouvernement et des enregistrements du ministère de l’Intérieur demande des agents administratifs et/ou techniques de la Direction générale du cadastre ayant des connaissances en matière de cadastre pour assumer des fonctions dans les services de défense civile, et que la Direction générale du cadastre propose les trois travailleurs en question, qui disposent de l’expérience, de l’ancienneté et des connaissances en la matière.
  4. 267. Dans ces circonstances, compte étant tenu des éléments indiqués par le gouvernement ainsi que du contenu des décrets mentionnés par les organisations plaignantes, le comité ne poursuivra pas l’examen de ces allégations.

Recommandation du comité

Recommandation du comité
  1. 268. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver la recommandation suivante:
    • Mettant l’accent sur le fait qu’une période de presque deux ans avant de rendre une décision quant au recours en amparo concernant des questions relatives à la liberté d’association est trop longue, le comité s’attend à ce que l’autorité judiciaire se prononce dans un futur proche sur le recours d’amparo formé par l’ATE pour s’opposer à la résolution no 2735/04 en vertu de laquelle le sous-secrétariat du Travail et de la Sécurité sociale de la province de Mendoza a déclaré illégale la démonstration de force (assemblée sur le lieu de travail) organisée le 22 juin 2004 par les travailleurs de la municipalité de Godoy Cruz, ainsi que sur l’allégation de la sommation à comparaître imposée à 45 travailleurs ayant participé à la démonstration de force du 22 juin 2004, déclarée illégale par l’autorité administrative de la province de Mendoza. Rappelant que la responsabilité de déclarer une grève illégale ne devrait pas reposer sur le gouvernement mais sur un organe indépendant ayant la confiance des parties impliquées, le comité demande au gouvernement de le tenir informé du résultat du recours en amparo en question.
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