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- 929. La plainte figure dans les communications de l’Internationale des travailleurs du bâtiment et du bois (IBB) du 15 février et du 19 juin 2006. L’Union internationale des travailleurs de l’alimentation, de l’agriculture, de l’hôtellerie-restauration, du tabac et des branches connexes (UITA), dans sa communication du 27 février 2006, s’est associée à ce cas. La Confédération internationale des syndicats libres (CISL), dans ses communications des 27 juin et 25 juillet 2006, s’est également associée au cas et a transmis des allégations supplémentaires.
- 930. Le gouvernement a envoyé ses observations dans les communications des 17 mars, 2 juin et 20 juillet 2006.
- 931. L’Indonésie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, ainsi que la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949.
A. Allégations des organisations plaignantes
A. Allégations des organisations plaignantes- 932. Dans sa communication du 15 février 2006, l’Internationale des travailleurs du bâtiment et du bois (IBB) a déposé une plainte au nom de son organisation affiliée, la Fédération indonésienne des travailleurs du bois, des forêts, et autres (SP Kahutindo). Afin de remettre ce cas dans son contexte, l’IBB explique qu’en 2003 les travailleurs de PT Musim Mas ont créé un syndicat local affilié à la Confédération des syndicats pour la prospérité indonésienne (SBSI). Au milieu de l’année 2003, un syndicat concurrent, «jaune», appelé le Syndicat des travailleurs de Musim Mas (SP MM), a été constitué par la direction de l’entreprise. Durant toute l’année 2004, les responsables du SBSI, y compris son président, ont fait l’objet d’un harcèlement, ont été arbitrairement transférés de poste et ont fini par être licencié par PT Musim Mas. Les autres responsables du SBSI ont voté le démantèlement du syndicat pour ne plus subir de harcèlement. En 2004 également, M. Hadi Surya et quatre autres travailleurs ont été transférés à de nouveaux postes de travail distants d’environ 15 kilomètres de leur domicile après qu’ils eurent refusé de signer un document déclarant qu’ils appartenaient au SP MM. Comme l’entreprise a refusé de fournir un moyen de transport aux travailleurs en question, ils n’ont pas pu se présenter au travail et ils ont été licenciés pour absentéisme le 10 août 2004. Le 24 février 2005, la Commission de règlement des différends du travail (P4D) de la province de Riau a rendu une décision en faveur du licenciement de M. Hadi Surya. Les organisations plaignantes déclarent que le P4D n’a pas été convaincu par l’argumentation de l’entreprise qui expliquait que le transfert de M. Hadi Surya faisait partie de la rotation normale du personnel et a trouvé «tout naturel» que les travailleurs ne puissent pas se présenter au travail en raison de l’absence de moyen de transport, mais il a malgré tout autorisé le licenciement. Les organisations plaignantes ont fourni des extraits de cette décision. L’IBB explique ensuite que le syndicat local SP Kahutindo a été créé à la plantation et à l’usine de transformation d’huile de palme de PT Musim Mas en octobre 2004, et a été enregistré le 9 décembre 2004. Le syndicat avait 1 183 membres sur un total de 2 000 employés, incluant 300 travailleurs sous contrat temporaire. Voici les événements qui ont conduit au dépôt de la plainte.
- 933. Le 15 janvier 2005, M. Marlin Sutari, membre du SP Kahutindo, a été battu par ses supérieurs, y compris le chef de la sécurité, M. Sanusi Hasibuan. Quand il a essayé de se défendre, il a été emmené au commissariat de police local et accusé d’agression sur la personne de M. Hasibuan. Contrairement à la loi, sa famille n’a pas été informée de son arrestation ni de sa détention. M. Sutari a porté plainte à la police à propos de l’agression de M. Hasibuan et de ses acolytes, mais la police n’a jamais donné suite à cette plainte.
- 934. Durant le mois de janvier 2005, les demandes de congé syndical déposées par les responsables du SP Kahutindo afin de pouvoir mener à bien leurs activités syndicales, y compris des réunions au bureau local de la main-d’œuvre, ont été ignorées par la direction de PT Musim Mas, qui a refusé de reconnaître le syndicat. La direction leur a tout d’abord déduit une partie de leurs salaires pour avoir participé à des activités syndicales, puis les a transférés à de nouveaux postes. Le 14 février 2005, le SP Kahutindo a demandé aux services de la main-d’œuvre de la province de Riau d’intervenir pour contraindre la direction de PT Musim Mas à cesser ses actes d’intimidation, de harcèlement et le transfert punitif des responsables du syndicat, qui avaient eu lieu en janvier 2005, mais en vain.
- 935. Le 19 février 2005, PT Musim Mas a demandé l’autorisation de licencier M. Robin Kimbi, le président du SP Kahutindo, pour absentéisme (son licenciement a été approuvé par le P4D le 28 juillet 2005).
- 936. En outre, les organisations plaignantes allèguent qu’en plus de MM. Robin Kimbi et Hadi Surya deux autres responsables du SP Kahutindo, MM. J. Siallagan et Lambok Siallagan, ont été licenciés par l’entreprise et cinq autres responsables du syndicat ont été obligés à démissionner en février 2005. Le 24 février 2005, le syndicat a de nouveau déposé une demande officielle aux services de la main-d’œuvre locaux pour qu’ils interviennent à propos des travailleurs licenciés. Comme la fois précédente, ils n’ont reçu aucune réponse. En avril 2005, après avoir déposé un préavis en bonne et due forme auprès des autorités locales et de l’entreprise, les membres du SP Kahutindo se sont mis en grève pour exiger la réintégration des dirigeants de leur syndicat qui avaient été licenciés et demander le respect des normes minimales du travail.
- 937. Le 13 juin 2005, le bureau de la main-d’œuvre de Pelalawan, après avoir effectué une visite sur le terrain pour faire une enquête sur les conditions de travail de PT Musim Mas à la demande du parlement local, a envoyé une lettre à PT Musim Mas demandant à la direction de l’entreprise de respecter les normes minimales du travail. La direction a pourtant ignoré cette demande du bureau de la main-d’œuvre, et une deuxième grève a eu lieu du 1er au 5 août. Le 5 août, à la suite de négociations entre la direction de PT Musim Mas et les dirigeants du SP Kahutindo, le bureau de la main-d’œuvre de Pelalawan a fait une déclaration appelant les travailleurs à reprendre le travail et l’entreprise à accepter la reprise du travail sans manœuvres d’intimidation. Le 10 août, direction et syndicat ont signé un accord reconnaissant la légalité des deux grèves et traitant du licenciement de neuf autres membres du syndicat, qui était intervenu depuis février. Les organisations plaignantes ont présenté une copie de ces trois documents.
- 938. Le 22 août 2005, le bureau de la main-d’œuvre a ordonné à PT Musim Mas pour la deuxième fois d’appliquer les normes minimales du travail relatives aux congés annuels, aux congés de maternité et aux congés de maladie, aux heures de travail, aux heures supplémentaires et à la sécurité sur les lieux de travail. Le 6 septembre, suite au refus de la direction de respecter cette ordonnance, le SP Kahutindo a déposé un nouveau préavis de grève.
- 939. Le 9 septembre 2005, en dépit des recommandations précises du parlement local demandant à PT Musim Mas de reconnaître le SP Kahutindo et de négocier avec lui et de respecter la décision du bureau de la main-d’œuvre du 13 juin, l’entreprise a conclu un accord sur les congés annuels à venir avec le SP MM, sans consulter le SP Kahutindo ni même l’informer. La direction de PT Musim Mas ayant clairement démontré sa mauvaise foi, le SP Kahutindo, qui avait appris que l’entreprise avait l’intention de faire venir des travailleurs de remplacement le jour prévu de la grève, a décidé d’avancer la date de celle-ci au 13 septembre. Plus de 1 000 travailleurs ont participé à cette grève. A 10 heures du matin, PT Musim Mas a amené 100 travailleurs de remplacement qui venaient d’être engagés. Le jour suivant, un camion de l’entreprise a foncé sur un piquet de grève, blessant deux syndicalistes. Lorsque les travailleurs ont essayé de faire une déclaration à la police, cette dernière leur a demandé la preuve médicale des blessures subies. Mais quand les travailleurs sont retournés à l’hôpital pour demander leur dossier médical, ils ont constaté qu’il était déjà aux mains de l’entreprise. La police a donc refusé d’enregistrer la plainte déposée par les travailleurs.
- 940. Le 15 septembre, une foule de travailleurs a enfoncé la porte de la raffinerie, la sortant de son rail. La direction de l’entreprise a porté plainte auprès de la police en accusant cinq dirigeants du SP Kahutindo (M. Robin Kimbi, le président du syndicat, MM. Safrudin et Akhen Pane, les deux vice-présidents, M. Suyahman, le secrétaire du syndicat, et M. Masri Sebayang, le secrétaire d’une filiale du syndicat), d’être responsables des dégâts causés à la porte. Quelques heures plus tard, les cinq dirigeants ont été invités par la police à pénétrer dans le bureau de la raffinerie, au prétexte que la direction souhaitait négocier avec eux. Cependant, dès qu’ils ont pénétré dans le bureau, ils ont été arrêtés par la police, emmenés au commissariat, puis inculpés de violation de l’article 170 du Code pénal.
- 941. Le 16 septembre, le reste des manifestants a été délogé de force par la police et n’a pas été autorisé à regagner leurs domiciles sur la propriété de l’entreprise. Les organisations plaignantes ajoutent que, le 18 octobre, un sixième responsable du syndicat, le vice-président M. Sruhas Towo, a été arrêté, inculpé et incarcéré avec les cinq autres dirigeants syndicaux à la prison de Bangkinang. Cinq des six dirigeants syndicaux ont été reconnus coupables de crimes contre l’ordre public causant des dommages aux personnes ou à la propriété et condamnés à des peines de quatorze mois à deux ans de prison. Le procès de la sixième personne est en cours pour les mêmes charges.
- 942. Le 22 septembre 2005, l’entreprise a entamé la procédure de licenciement de 701 travailleurs, qui a été officiellement autorisée par le P4D le 16 décembre. Le 26 décembre, l’entreprise a eu recours aux forces armées de la police paramilitaire locale pour déloger les travailleurs et les 1 000 membres de leurs familles, dont environ 350 enfants, de la plantation; 300 enfants ont été expulsés des écoles de la plantation.
- 943. Les organisations plaignantes estiment que la chronologie des faits énoncés ci-dessus démontre clairement que PT Musim Mas a systématiquement refusé de reconnaître les syndicats autres que celui que la direction a elle-même créé et de négocier avec eux. Les responsables et les membres des syndicats indépendants, le SBSI d’abord et ensuite le SP Kahutindo, ainsi que les travailleurs qui ont refusé de s’affilier au SP MM ont fait l’objet d’intimidation, de harcèlement, ont été transférés vers d’autres postes de travail et dans certains cas licenciés. En dépit de ces violations manifestes des droits des travailleurs, le bureau de la main-d’œuvre du district de Pelalawan, au lieu de remplir ses obligations et de faire respecter la liberté syndicale et le droit de négociation collective, a ignoré les plaintes répétées de harcèlement à l’encontre des responsables syndicaux, déposées par le SP Kahutindo. C’est seulement après l’intervention du parlement local du district (qui lui aussi n’a réagi qu’après la grève et la manifestation devant le bâtiment du parlement) que le bureau de la main-d’œuvre du district a entrepris une enquête sur les conditions de travail à PT Musim Mas. Il a constaté plusieurs manquements aux normes minimales du travail. Au lieu de faire appliquer par l’entreprise les décisions des 13 juin et 22 août, le chef du bureau de la main-d’œuvre du district s’est associé au chef des services de la main-d’œuvre de la province de Riau pour décharger PT Musim Mas de tout acte délictueux dans un communiqué conjoint, le 24 octobre 2005.
- 944. De plus, d’après les organisations plaignantes, le P4D et la Commission centrale de règlement des différends du travail (P4P) ont joué leur rôle habituel en légitimant les attaques de l’employeur contre les syndicats et en approuvant systématiquement les licenciements des dirigeants et les membres du SP Kahutindo. La police locale a également été complice de nombreux événements impliquant des violations de la liberté syndicale et du droit de négociation collective, et a refusé de mener une enquête ou d’enregistrer les plaintes pour violence déposées par les membres du SP Kahutindo à l’encontre de l’entreprise.
- 945. Les dirigeants syndicaux se sont vus refuser à plusieurs reprises la libération sous caution, en dépit de la nature relativement mineure des délits retenus contre eux. Au cours du procès contre les cinq dirigeants du syndicat, le procureur a déclaré que les cinq dirigeants syndicaux, «et 1 000 autres travailleurs», ont enfoncé la porte, ce qui a occasionné des blessures légères à deux personnes. Le procureur n’a, à aucun moment de son intervention, prouvé ni même prétendu que c’était les actions des cinq dirigeants syndicaux, et seulement les leurs, qui avaient conduit à ce que la porte sorte de son rail et soit renversée. Plutôt que d’arrêter et de poursuite les 1 000 travailleurs pour le fait d’avoir renversé la grille, la police, le Procureur de la République et les juges de la Cour de l’Etat de Bangkinang ont préféré rendre les six dirigeants syndicaux individuellement responsables. Ils ont été reconnus coupables et condamnés pour leurs activités syndicales et leur rôle en tant que dirigeants de syndicat.
- 946. En dépit des appels répétés du FSP Kahutindo, de l’IBB et de l’UITA, le ministère central de la Main-d’œuvre n’est pas intervenu pour protéger la liberté syndicale et le droit de négociation collective des travailleurs de PT Musim Mas ni leurs dirigeants syndicaux. Ils demandent donc instamment au gouvernement d’Indonésie de prendre les mesures nécessaires pour résoudre ce cas dans le respect de ses obligations en tant que signataire des conventions nos 87 et 98, en faisant en sorte que les six responsables syndicaux soient immédiatement libérés de façon inconditionnelle, que les charges retenues contre eux soient abandonnées et qu’une enquête soit menée en toute transparence sur les agissements des autorités locales et de la police. Le gouvernement doit également intervenir pour garantir la sécurité des dirigeants syndicaux après leur libération et veiller à ce que les 701 membres du syndicat soient réintégrés immédiatement et que leurs familles puissent revenir à leurs logements et aux écoles de la plantation.
- 947. Dans les communications des 19 juin 2006 de l’IBB (conjointement avec l’UITA) et 27 juin 2006 de la CISL, les organisations plaignantes allèguent que, le 7 juin 2006, l’entreprise a accepté de payer la somme de 123 dollars des Etats-Unis (l’équivalent de six semaines de salaires) à un groupe de 211 travailleurs, en échange de quoi les travailleurs ont renoncé à leur droit de faire appel contre leurs licenciements illégaux et ont accepté d’appeler l’IBB à renoncer à la plainte devant l’OIT. Une partie de ce soi-disant «règlement» incluait une déclaration écrite des six dirigeants emprisonnés qui renonçaient à leur droit de faire appel devant la Cour suprême d’Indonésie de leur condamnation pénale. L’IBB et la CISL estiment que ce «règlement», qui cherche à légitimer les licenciements massifs à titre de représailles et la répression brutale ainsi qu’à criminaliser l’activité syndicale, ne rend pas justice aux travailleurs licenciés ni à ceux qui sont emprisonnés. Par conséquent, l’IBB, l’UITA et la CISL rejettent fermement les termes de ce «règlement» et remettent en question la légitimité des circonstances dans lesquelles il a été négocié ainsi que l’accord des dirigeants syndicaux emprisonnés.
- B. Réponse du gouvernement
- 948. Dans sa communication du 17 mars 2006, le gouvernement déclare qu’une inspection menée par l’inspecteur du travail les 11 et 12 novembre 2005 avait révélé que 2 016 personnes étaient employées à PT Musim Mas. Quatre syndicats étaient établis au sein de l’entreprise: le PUK SPSI NIBA, le FKUI SBSI, le SP Musim Mas (SP MM) et le SP Kahutindo. M. Robin Kimbi, le président du SP Kahutindo, avait été licencié pour avoir exercé des activités en violation des règles de l’entreprise, après que trois avertissements lui furent notifiés. Son licenciement avait été légalisé par une décision de la Commission régionale de règlement des différends du travail (P4D) en date du 28 juillet 2005. Une copie de cette décision lui avait été notifiée les 20 août et 6 septembre 2005, M. Robin Kimbi avait fait appel devant le P4P. Le 7 octobre, le P4P avait rejeté son appel car le délai de quatorze jours pour faire appel avait expiré. Pour exprimer leur solidarité, environ 701 travailleurs de PT Musim Mas environ s’étaient mis en grève, en alléguant que l’entreprise violait les normes minimales du travail et pour obliger la direction de l’entreprise à réembaucher M. Robin Kimbi. La direction avait demandé aux travailleurs de reprendre le travail. Devant leur refus, la direction avait décidé de recruter de nouveaux employés et avait entamé la procédure de licenciement de 701 travailleurs devant le P4P. De plus, au cours de la grève du 15 septembre 2005, des travailleurs avaient endommagé la propriété de l’entreprise, certains employés de bureau avaient été blessés et, en conséquence, l’ensemble de l’activité de la raffinerie d’huile de palme en pâtissait. La police locale avait pris des mesures pour mettre fin au chaos en arrêtant cinq dirigeants syndicaux, MM. Robin Kimbi, Masri Sebayang, Suyahman, Akhen Pane et Safrudin.
- 949. En outre, le gouvernement a indiqué que les 14 et 15 novembre 2005, une inspection effectuée par la Chambre provinciale des représentants et les bureaux de la main-d’œuvre provinciaux et régionaux avait conclu que l’entreprise ne violait pas les normes minimales du travail.
- 950. Le 3 février 2006, le Conseil des juges du tribunal régional avait déclaré les cinq dirigeants syndicaux arrêtés coupables de blessures à des personnes et de dommages à la propriété de l’entreprise. MM. Masri Sebayang et Robin Kimbu avaient été condamnés à deux ans de prison. MM. Suyahman, Akhen Pane et Safrudin avaient été condamnés à quatorze mois de prison. Le gouvernement a fait observer qu’il n’était pas autorisé à intervenir dans les décisions de la justice.
- 951. Dans sa communication du 2 juin 2006, le gouvernement déclare que, même si l’entreprise avait rejeté la demande du SP Kahutindo visant à amender la convention collective encore en vigueur qui avait été négociée avec le SP MM (représentant plus de 50 pour cent des travailleurs), PT Musim Mas n’avait jamais émis d’objections à la création et à l’existence du SP Kahutindo. Le gouvernement nie également qu’un syndicat concurrent «jaune» ait été créé par la direction et indique qu’avant la constitution du SP Kahutindo trois autres syndicats, tous établis en accord avec la législation en vigueur, étaient déjà en activité dans l’entreprise.
- 952. Quant aux allégations de non-renouvellement de 300 contrats, le gouvernement indique que PT Musim Mas emploie 2 000 travailleurs avec des contrats à durée indéterminée et n’a pas de travailleurs sous contrat à durée déterminée.
- 953. Dans sa communication du 20 juillet 2006, le gouvernement informe que les deux parties, le SP Kahutindo et PT Musim Mas, ont abouti à un accord, attesté par le gouvernement local, pour résoudre leur différend. Le gouvernement en présente les éléments suivants. Le P4P a tranché sur l’affaire du licenciement des 701 travailleurs le 6 décembre 2005, qui a été réglée entre les deux parties par une convention collective le 7 juin 2006. Conformément au même verdict du P4D, MM. Masri Sebayang, Robin Kimbu, Suyahman, Akhen Pane et Safrudin qui avaient été condamnés à des peines de prison par le tribunal du district de Bangkinang dans une décision du 3 février 2006 (confirmée par la Haute Cour de Riau le 18 avril 2006) et M. Sruhas Towo, condamné à une peine de prison le 17 mars 2006 par le tribunal du district de Bangkinang, avaient reçu une indemnité. De plus, un accord était intervenu entre PT Mas et ces travailleurs, aux termes duquel l’affaire pénale avait été instruite et tranchée par les tribunaux. Le conflit entre PT Musim Mas et le SP Kahutindo était donc dorénavant considéré comme réglé.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité- 954. Le comité note que dans le présent cas les allégations des organisations plaignantes, l’Internationale des travailleurs du bâtiment et du bois (IBB), l’Union internationale des travailleurs de l’alimentation, de l’agriculture, de l’hôtellerie-restauration, du tabac et des branches connexes (UITA) et la Confédération internationale des syndicats libres (CISL), portent sur la violation systématique par la direction de PT Musim Mas de la liberté syndicale et du droit de négociation collective de la Fédération indonésienne des travailleurs du bois, des forêts, et autres (SP Kahutindo), affiliée de l’IBB.
- 955. En particulier, les organisations plaignantes allèguent que la direction de l’entreprise a refusé de reconnaître le SP Kahutindo, préférant traiter avec le syndicat des travailleurs de Musim Mas (le SP MM), un syndicat «jaune». Les organisations plaignantes allèguent également que les dirigeants syndicaux se sont vus constamment refuser des congés syndicaux pour pouvoir mener à bien leurs différentes activités syndicales. De son côté, le gouvernement réfute purement et simplement cette information en indiquant que le SP MM ainsi que deux autres syndicats existaient dans l’entreprise avant la création du SP Kahutindo et que le SP MM ne pouvait en aucune façon être considéré comme un syndicat «jaune». Le gouvernement ajoute que si, à un moment, la direction de l’entreprise a refusé la demande du SP Kahutindo de modifier les termes de la convention collective, ce refus reposait sur le fait que cette convention collective négociée avec le SP MM, syndicat représentant plus de 50 pour cent des travailleurs, était encore en vigueur. Le comité doit cependant faire observer que les organisations plaignantes prétendent que le SP Kahutindo représentait 1 183 des 2 000 travailleurs de l’entreprise, une revendication que le gouvernement n’a pas directement réfutée. Dans ces circonstances, le comité ne peut pas déterminer clairement lequel des deux syndicats était le plus représentatif pour négocier une convention collective. Il demande au gouvernement de lui faire parvenir des informations à ce sujet, en particulier sur la représentativité précise du SP MM et du SP Kahutindo, à l’époque de la négociation.
- 956. Les organisations plaignantes ont également allégué que les membres du SP Kahutindo ont fait l’objet d’intimidation et de harcèlement. A titre d’exemple, ils font référence au cas de M. Marlin Sutari, qui avait été battu par ses supérieurs et par le chef de la sécurité, et ensuite arrêté et accusé lui-même d’agression. Bien qu’il ait porté plainte, aucune suite n’avait jamais été donnée à sa plainte. Les organisations plaignantes allèguent également que l’on avait infligé aux membres du SP Kahutindo des déductions sur leurs salaires pour avoir effectué leurs activités syndicales et qu’on les avait transférés sur de nouveaux postes, licenciés et obligés à démissionner. L’IBB a présenté des extraits de la décision du P4D confirmant le licenciement de M. Hadi Surya, qui aurait fait partie des quatre travailleurs transférés sur un nouveau poste, distant de 15 kilomètres de son logement, et aurait ensuite été licencié pour absentéisme, en représailles de son refus de signer un document déclarant qu’il était membre du SP MM.
- 957. Le comité observe que les extraits de la décision du P4D, dans le cas de M. Hadi Surya, tout en autorisant le licenciement, semblent constater que le transfert n’était pas «approprié en raison de la distance entre le poste de travail dans lequel l’employé devait travailler et son logement, qui était d’environ 15 kilomètres, que ce dernier devait y aller à pied parce que l’employeur ne lui avait pas fourni de moyen de transport et qu’il était donc naturel que l’employé ne se présente pas au travail comme l’espérait son employeur». Le P4D, constatant, cependant, qu’il n’y avait plus d’«harmonie» entre l’employeur et son travailleur, avait autorisé le licenciement, tout en obligeant l’employeur à payer une double indemnité. Observant que M. Surya avait allégué que son transfert était dû à son refus de rejoindre le SP MM, un élément qui n’a apparemment pas été examiné par le P4D dans son examen du licenciement, le comité rappelle que les travailleurs doivent avoir le droit de rejoindre les organisations de leur choix, sans que l’employeur interfère dans ce choix, et souligne l’importance qu’il attache à ce que les travailleurs et les employeurs puissent effectivement former en toute liberté des organisations de leur choix et y adhérer librement. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, quatrième édition, 1996, paragr. 274.] Le comité demande au gouvernement de diligenter une enquête indépendante sur ces allégations de représailles et, si elles s’avéraient exactes, d’assurer à M. Surya un dédommagement approprié pour les préjudices subis, y compris par son éventuelle réintégration.
- 958. Le comité observe que le gouvernement n’a pas présenté d’informations contredisant les événements suivants relatés par les organisations plaignantes. Après avoir adressé en vain plusieurs appels aux autorités, les membres du SP Kahutindo se sont mis en grève en avril 2005 pour protester contre la violation des droits syndicaux et des normes minimales du travail. Le 13 juin 2005, le bureau de la main-d’œuvre a enjoint à PT Musim Mas de remédier à plusieurs violations des droits des travailleurs. Cependant, devant le refus de l’entreprise de s’exécuter, une autre grève a eu lieu du 1er au 5 août 2005. A la suite d’une déclaration du bureau de la main-d’œuvre, le syndicat et la direction de l’entreprise ont signé, le 10 août, un accord reconnaissant la légalité des deux grèves et traitant du licenciement de neuf membres du syndicat. Le 22 août 2005, le bureau de la main-d’œuvre a ordonné une fois de plus à PT Musim Mas de respecter certains droits du travail. Le 6 septembre, la direction ayant refusé de s’exécuter, le SP Kahutindo a déposé un nouveau préavis de grève. Ayant appris que l’entreprise avait l’intention d’engager des travailleurs pour les remplacer, le syndicat a entamé la grève le 13 septembre. Les organisations plaignantes rapportent que 100 travailleurs de remplacement ont été engagés par l’entreprise. Durant la grève, deux membres du syndicat ont été blessés quand un camion de l’entreprise a foncé sur un piquet de grève. Ces travailleurs, qui n’ont pas été en mesure d’obtenir la preuve médicale de leurs blessures et de leur hospitalisation car, apparemment, elle se trouvait entre les mains de l’entreprise, n’ont pas pu porter plainte.
- 959. Le 15 septembre, la foule des travailleurs a enfoncé la porte de la raffinerie, la sortant de son rail. La direction de l’entreprise a porté plainte auprès de la police en accusant cinq dirigeants du SP Kahutindo (M. Robin Kimbi, le président du syndicat, MM. Safrudin et Akhen Pane, les deux vice-présidents, M. Suyahman, le secrétaire du syndicat, et M. Masri Sebayang, le secrétaire d’une filiale du syndicat) d’être responsables des dégâts causés à la porte. Quelques heures plus tard, les cinq dirigeants ont été arrêtés par la police, emmenés au commissariat, puis inculpés de violation de l’article 170 du Code pénal. Le 16 septembre, les manifestants restants ont été délogés de force par la police et n’ont pas été autorisés à regagner leurs domiciles sur la propriété de l’entreprise. Le 18 octobre, un sixième responsable du syndicat, le vice-président M. Sruhas Towo, a été arrêté, inculpé et incarcéré avec les cinq autres dirigeants syndicaux à la prison de Bangkinang. Les six dirigeants syndicaux ont été reconnus coupables de crimes contre l’ordre public causant des dommages aux personnes ou à la propriété et condamnés à des peines de quatorze mois à deux ans de prison. A cet égard, le comité rappelle que les principes de la liberté syndicale ne protègent pas les abus dans l’exercice du droit de grève qui constituent des actions de caractère délictueux. En outre, des sanctions pénales ne devraient pouvoir être infligées pour faits de grève que dans les cas d’infraction à des interdictions de la grève conformes aux principes de la liberté syndicale. Toute sanction infligée en raison d’activités liées à des grèves illégitimes devrait être proportionnée au délit ou à la faute commis, et les autorités devraient exclure le recours à des mesures d’emprisonnement contre ceux qui organisent une grève pacifique ou y participent. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 598-599.]
- 960. Le 22 septembre 2005, l’entreprise a entamé la procédure de licenciement de 701 travailleurs, qui a été officiellement autorisée par le P4D le 16 décembre. Le 26 décembre, l’entreprise a eu recours aux forces armées de la police paramilitaire locale pour déloger les travailleurs et les 1 000 membres de leurs familles, dont environ 350 enfants, de la plantation; 300 enfants ont été expulsés des écoles de la plantation. Alors que les organisations plaignantes ont également allégué que les contrats de travail de 300 travailleurs n’ont pas été renouvelés, le gouvernement a réfuté cette allégation en déclarant que l’entreprise n’employait pas de travailleurs ayant des contrats à durée déterminée.
- 961. Le comité prend également note du fait qu’un accord est intervenu entre PT Musim Mas et le SP Kahutindo, le 7 juin 2006. D’après les informations présentées par les organisations plaignantes, l’entreprise a accepté de payer la somme de 123 dollars des Etats-Unis (l’équivalent de six semaines de salaires) à un groupe de 211 travailleurs, en échange de quoi les travailleurs ont renoncé à leur droit de faire appel contre leurs licenciements illégaux et ont accepté d’appeler l’IBB à renoncer à la plainte devant l’OIT. Une partie de ce règlement incluait une déclaration écrite des six dirigeants emprisonnés qui renonçaient à leur droit de faire appel devant la Cour suprême d’Indonésie de leur condamnation pénale. Selon le gouvernement, les six dirigeants syndicaux ont également reçu un dédommagement, conformément à la décision de décembre 2005 du P4D relative au licenciement de 701 travailleurs. Le gouvernement ajoute que, d’après les termes de l’accord, les poursuites pénales ayant déjà fait l’objet d’une décision des tribunaux, le conflit entre PT Musim Mas et le SP Kahutindo était dorénavant considéré comme réglé.
- 962. Le comité prend note du fait que le gouvernement estime que le conflit entre le SP Kahutindo et PT Musim Mas est maintenant résolu, alors que l’IBB, l’UITA et la CISL estiment que ce «règlement» cherche à légitimer les licenciements massifs à titre de représailles et la répression brutale, ainsi qu’à criminaliser l’activité syndicale, et ne rend pas justice aux travailleurs licenciés ni à ceux qui sont emprisonnés. Par conséquent, ces organisations rejettent fermement les termes de ce règlement et remettent en question la légitimité des circonstances dans lesquelles il a été négocié, ainsi que l’accord des dirigeants syndicaux emprisonnés.
- 963. Le comité regrette que ni les organisations plaignantes ni le gouvernement n’aient fourni une copie de cet accord. De plus, le comité prend note du fait que les organisations plaignantes, tout en remettant en question la légitimité de cet accord, et les circonstances dans lesquelles il a été négocié, n’ont fourni aucune précision pour aider le comité à comprendre leur point de vue. Toutefois, les informations reçues ne permettent pas de déterminer si l’accord a été signé au nom des 701 travailleurs licenciés, ou seulement de 211, chiffre cité par les organisations plaignantes. Le comité demande donc au gouvernement et aux organisations plaignantes de lui communiquer des informations à ce sujet, ainsi qu’une copie de cet accord. En outre, le comité est particulièrement préoccupé, à la lumière des allégations graves qui ont été faites dans ce cas, par le prétendu accord avec les dirigeants syndicaux emprisonnés, qui purgent apparemment des peines allant jusqu’à deux ans de prison pour avoir sorti de son rail la porte de l’entreprise. Le comité demande au gouvernement de diligenter immédiatement une enquête indépendante sur les circonstances dans lesquelles cet accord a été obtenu et de l’informer des résultats de cette enquête. Concernant les allégations sur le non-renouvellement de 300 contrats de travail, le comité demande aux organisations plaignantes de lui fournir des informations supplémentaires en réponse à l’affirmation du gouvernement qu’il n’y a pas de contrats à durée déterminée à PT Musim Mas.
- 964. Le comité exprime sa préoccupation devant le nombre d’allégations graves concernant les événements qui se sont déroulés à PT Musim Mas, auxquelles le gouvernement n’a pas répondu sinon en renvoyant à l’accord conclu. Il fait plus particulièrement référence aux allégations d’agression contre M. Sutari et à la plainte qu’il aurait déposée à ce sujet et à laquelle la police n’aurait pas donné suite, à l’intervention violente de la police et de l’employeur durant la grève, occasionnant des blessures à deux travailleurs, à l’embauche de travailleurs de remplacement par l’employeur pendant la grève, au licenciement de 701 travailleurs qui avaient participé à la grève et aux allégations au sujet de nombreuses plaintes et demandes d’intervention auprès des autorités pour qu’elles remédient aux violations des droits syndicaux par l’entreprise, qui sont restées sans réponse ou n’ont pas été suivies d’effet.
- 965. Concernant l’allégation d’agression physique sur la personne de M. Sutari, le comité demande au gouvernement de diligenter immédiatement une enquête judiciaire indépendante à ce propos, dans le but d’éclaircir complètement les faits, de déterminer les responsabilités, de punir les responsables et d’empêcher que ces actes ne se répètent. Il demande au gouvernement de le tenir informé à ce sujet.
- 966. Concernant la grève engagée par le syndicat en septembre 2005, le comité attire l’attention du gouvernement sur les principes suivants:
- En ce qui concerne l’information fournie par le plaignant selon laquelle l’entreprise a recruté 100 travailleurs pour remplacer les grévistes:
- n L’embauche de travailleurs pour briser une grève dans un secteur qui ne saurait être considéré comme un secteur essentiel au sens strict du terme, où la grève pourrait être interdite, constitue une violation grave de la liberté syndicale. Si une grève est légale, l’utilisation d’une main-d’œuvre étrangère à l’entreprise afin de remplacer les grévistes, pour une durée indéterminée, comporte un risque d’atteinte au droit de grève qui peut affecter le libre exercice des droits syndicaux. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 570 et 571.]
- S’agissant de l’intervention de la police pendant la grève et de l’expulsion forcée des manifestants par la force:
- n Les autorités ne devraient recourir à la force publique en cas de grève que si l’ordre public est réellement menacé. L’intervention de la force publique devrait être proportionnée à la menace pour l’ordre public qu’il convient de contrôler, et les gouvernements devraient prendre des dispositions pour que les autorités compétentes reçoivent des instructions appropriées en vue de supprimer le danger qu’impliquent les excès de violence lorsqu’il s’agit de contrôler des manifestations qui pourraient troubler l’ordre public. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 582.]
- En ce qui concerne le licenciement des travailleurs ayant participé à la grève:
- n Nul ne devrait faire l’objet de sanctions pour avoir déclenché ou tenté de déclencher une grève légitime. Le licenciement de travailleurs pour fait de grève constitue une grave discrimination en matière d’emploi pour exercice d’activité syndicale licite contraire à la convention no 98. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 590, 591 et 597.]
- 967. Le comité attend du gouvernement qu’il assure le respect complet de ces principes à l’avenir. Le comité demande au gouvernement d’ouvrir sans délai une enquête indépendante sur les agissements des différentes parties durant le mouvement de grève, y compris les allégations de blessures subies par les deux travailleurs lorsqu’un camion de l’entreprise a foncé sur un piquet de grève, afin d’éclaircir totalement les faits, de déterminer les responsabilités, de punir les responsables et d’empêcher que ces actes ne se répètent. Il demande au gouvernement de le tenir informé à ce sujet.
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 968. Au vu des conclusions intérimaires qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
- a) Le comité demande au gouvernement de lui faire parvenir des informations sur la représentativité précise du SP MM et du SP Kahutindo, à l’époque de la négociation.
- b) Le comité demande au gouvernement de diligenter une enquête indépendante sur les allégations de licenciement antisyndical de M. Surya, et, si elles s’avéraient exactes, de lui assurer un dédommagement approprié pour les préjudices subis, y compris par son éventuelle réintégration.
- c) Le comité demande au gouvernement et aux organisations plaignantes de préciser si l’accord a été signé au nom des 701 travailleurs licenciés, ou seulement de 211, chiffre cité par les organisations plaignantes, et de lui communiquer une copie de cet accord. En outre, le comité demande au gouvernement de diligenter immédiatement une enquête indépendante sur les circonstances dans lesquelles l’accord avec les dirigeants syndicaux emprisonnés a été obtenu et de l’informer des résultats de cette enquête.
- d) Concernant les allégations sur le non-renouvellement de 300 contrats de travail à la suite du mouvement de grève, le comité demande aux organisations plaignantes de lui fournir des informations supplémentaires en réponse à l’affirmation du gouvernement qu’il n’y a pas de contrats à durée déterminée à PT Musim Mas.
- e) Concernant l’allégation d’agression physique sur la personne de M. Sutari, le comité demande au gouvernement de diligenter immédiatement une enquête judiciaire indépendante à ce propos, dans le but d’éclaircir complètement les faits, de déterminer les responsabilités, de punir les responsables et d’empêcher que ces actes ne se répètent. Il demande au gouvernement de le tenir informé à ce sujet.
- f) Le comité attire l’attention du gouvernement sur les principes suivants:
- En ce qui concerne l’information fournie par le plaignant selon laquelle l’entreprise a recruté 100 travailleurs pour remplacer les grévistes:
- - L’embauche de travailleurs pour briser une grève dans un secteur qui ne saurait être considéré comme un secteur essentiel au sens strict du terme, où la grève pourrait être interdite, constitue une violation grave de la liberté syndicale. Si une grève est légale, l’utilisation d’une main-d’œuvre étrangère à l’entreprise afin de remplacer les grévistes, pour une durée indéterminée, comporte un risque d’atteinte au droit de grève qui peut affecter le libre exercice des droits syndicaux.
- S’agissant de l’intervention de la police pendant la grève et de l’expulsion forcée des manifestants par la force:
- - Les autorités ne devraient recourir à la force publique en cas de grève que si l’ordre public est réellement menacé. L’intervention de la force publique devrait être proportionnée à la menace pour l’ordre public qu’il convient de contrôler, et les gouvernements devraient prendre des dispositions pour que les autorités compétentes reçoivent des instructions appropriées en vue de supprimer le danger qu’impliquent les excès de violence lorsqu’il s’agit de contrôler des manifestations qui pourraient troubler l’ordre public.
- En ce qui concerne le licenciement des travailleurs ayant participé à la grève:
- - Nul ne devrait faire l’objet de sanctions pour avoir déclenché ou tenté de déclencher une grève légitime. Le licenciement de travailleurs pour fait de grève constitue une grave discrimination en matière d’emploi pour exercice d’activité syndicale licite contraire à la convention no 98.
- S’agissant de la condamnation de six dirigeants syndicaux à des peines de quatorze mois et deux ans de prison pour dommages aux personnes ou à la propriété:
- - Les principes de la liberté syndicale ne protègent pas les abus dans l’exercice du droit de grève qui constituent des actions de caractère délictueux. En outre, des sanctions pénales ne devraient pouvoir être infligées pour faits de grève que dans les cas d’infraction à des interdictions de la grève conformes aux principes de la liberté syndicale. Toute sanction infligée en raison d’activités liées à des grèves illégitimes devrait être proportionnée au délit ou à la faute commis, et les autorités devraient exclure le recours à des mesures d’emprisonnement contre ceux qui organisent une grève pacifique ou y participent.
- g) Le comité demande au gouvernement d’ouvrir sans délai une enquête indépendante sur les agissements des différentes parties durant le mouvement de grève, y compris les allégations de blessures subies par les deux travailleurs lorsqu’un camion de l’entreprise a foncé sur un piquet de grève, afin d’éclaircir totalement les faits, de déterminer les responsabilités, de punir les responsables et d’empêcher que ces actes ne se répètent. Il demande au gouvernement de le tenir informé à ce sujet.