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Rapport où le comité demande à être informé de l’évolution de la situation - Rapport No. 375, Juin 2015

Cas no 3063 (Colombie) - Date de la plainte: 04-MARS -14 - Clos

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Allégations: Violation du droit de négociation collective au sein de plusieurs entreprises constituées sous la forme de sociétés anonymes (S.A. E.S.P.), à savoir: Termotasajero, Energie du Pacifique (EPSA), Compagnie d’électricité de Tulua (CETSA), Centrale hydroélectrique de Caldas (CHEC) et Entreprise d’énergie du Quindío (EDEQ)

  1. 116. La plainte figure dans une communication du Syndicat des travailleurs de l’énergie de Colombie en date du 4 mars 2014.
  2. 117. Le gouvernement a fait parvenir ses observations dans des communications en date du 8 juillet 2014 et du 9 mars 2015.
  3. 118. La Colombie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, la convention (no 151) sur les relations de travail dans la fonction publique, 1978, et la convention (no 154) sur la négociation collective, 1981.

A. Allégations de l’organisation plaignante

A. Allégations de l’organisation plaignante
  1. 119. Dans sa communication en date du 4 mars 2014, l’organisation plaignante dénonce tout d’abord la posture antisyndicale du pouvoir judiciaire colombien, telle qu’elle se manifeste dans un arrêt rendu dans une procédure en protection des droits constitutionnels, dans lequel la Cour suprême refuse aux travailleurs de l’entreprise Termotasajero, entreprise de service public constituée sous la forme d’une société anonyme (S.A. E.S.P.), les augmentations prévues dans la convention collective pour les années 2003 à 2007, alors que la Cour d’appel de Cúcuta avait ordonné leur versement. L’organisation plaignante conteste en outre la décision du ministère du Travail d’autoriser le licenciement de 16 travailleurs de cette même entreprise, prétendument pour raison économique.
  2. 120. L’organisation plaignante allègue également que la Centrale hydroélectrique de Caldas (CHEC) et l’Entreprise d’énergie du Quindío (EDEQ), deux entreprises de service public constituées sous la forme de sociétés anonymes (S.A. E.S.P.), refusent de négocier collectivement. A cet égard, l’organisation mentionne les faits suivants, survenus au sein de la CHEC: i) des entraves au processus de négociation ont cours depuis plus de deux ans; ii) alors que la procédure de pourparlers directs qui avait été prolongée était sur le point de se conclure, l’entreprise a retiré l’ensemble de ses propositions, et elle est revenue sur la totalité des accords conclus pendant le processus de négociation; iii) face au retard dans la constitution du tribunal arbitral, le syndicat s’est vu dans l’obligation de retirer son cahier de revendications pour le présenter à nouveau; et iv) lors du nouveau cycle de négociations, l’entreprise a tenté d’engager la procédure en l’absence du syndicat.
  3. 121. L’organisation plaignante allègue en outre que l’entreprise Energie du Pacifique (EPSA) et la Compagnie d’électricité de Tulua (CETSA), deux entreprises de service public constituées sous la forme de sociétés anonymes (S.A. E.S.P.), refusent systématiquement de négocier collectivement, si bien que les cahiers de revendications ne débouchent jamais sur la conclusion d’accords, et qu’il faut toujours demander la constitution de tribunaux arbitraux, qui tardent indûment avant de rendre leur sentence. L’organisation ajoute que l’EPSA, qui n’était pas satisfaite du contenu de la dernière sentence arbitrale, a fait valoir des arguments financiers pour tenter d’éviter qu’elle soit rendue.

B. Réponse du gouvernement

B. Réponse du gouvernement
  1. 122. Dans une communication en date du 8 juillet 2014, le gouvernement transmet les réponses des différentes entreprises mentionnées dans la plainte. L’entreprise Termotasajero présente ainsi les informations suivantes: i) l’arrêt de la Cour suprême que l’organisation plaignante conteste est parfaitement conforme aux dispositions constitutionnelles et légales applicables en Colombie; ii) la disposition de la convention collective (dont la période de validité courait du 1er mars 2000 au 28 février 2002), invoquée pour réclamer une augmentation de salaire pour les années 2003 à 2007, portait expressément et uniquement sur des augmentations devant être versées pour 2000 et 2001; iii) par conséquent, l’extension de la durée de validité de la convention, qui intervenait faute de conclusion d’un nouvel accord, ne pouvait s’appliquer à la disposition en question, qui portait sur une période précise, clairement délimitée; iv) cet élément explique que la justice ait toujours rejeté les prétentions du syndicat, autant dans l’action en protection des droits constitutionnels que dans les procédures présentées par la voie ordinaire; et v) la Cour suprême doit encore rendre sa décision dans le cadre de la procédure par la voie ordinaire.
  2. 123. Pour sa part, l’entreprise Energie du Pacifique (EPSA) indique que, conformément à la législation colombienne en vigueur, l’entreprise a conclu à la fois une convention collective, qui la lie aux travailleurs syndiqués, et un accord collectif. S’agissant du processus de négociation collective, qui portait sur un cahier de revendications unique présenté par le syndicat pour cette entreprise ainsi que pour la Compagnie d’électricité de Tulua (CETSA), l’entreprise présente les informations suivantes: i) malgré les différentes propositions présentées par l’entreprise, aucun accord n’a pu être trouvé à l’issue des différentes étapes des pourparlers directs, procédure qui a pris fin officiellement le 19 décembre 2011 avec le procès-verbal de clôture visé par le ministère du Travail; ii) le 2 avril 2012, le syndicat a demandé la désignation d’un tribunal arbitral, qui a été constitué le 2 mai 2013 et qui a rendu sa sentence le 29 mai 2013; iii) l’entreprise a dû présenter un recours en annulation contre cette décision, qu’elle jugeait contraire au droit; et iv) la chambre chargée des affaires relatives au travail de la Cour suprême doit maintenant se prononcer sur ce recours en annulation.
  3. 124. La CETSA mentionne également le processus de négociation collective fondé sur le cahier de revendications unique mentionné au paragraphe précédent, en précisant que l’étape des pourparlers directs a pris fin officiellement le 19 décembre 2011 et qu’elle a donné lieu à un procès-verbal de clôture visé par le ministère du Travail. L’entreprise ajoute que le tribunal arbitral a été constitué le 24 juin 2013 et qu’il s’est prononcé le 24 juillet 2013 dans une décision définitive, mise à exécution depuis.
  4. 125. L’Entreprise d’énergie du Quindío (EDEQ) nie avoir cherché à éviter la négociation, affirmant au contraire que le syndicat a refusé de dénoncer la convention en vigueur pour obtenir par cette voie son renouvellement automatique. De son côté, la Centrale hydroélectrique de Caldas (CHEC) déclare que le recours aux tribunaux arbitraux s’explique par le caractère déraisonnable des revendications présentées par le syndicat lors des négociations et par une posture intransigeante, qui amène cette organisation à refuser de signer des accords dès lors qu’elle n’obtient pas satisfaction à l’ensemble de ses revendications. L’entreprise ajoute que les faits exposés montrent clairement que les normes applicables à la négociation collective ont été pleinement respectées, ce que les tribunaux ont confirmé dans les faits en rejetant les différents recours en protection des droits constitutionnels présentés par le syndicat.
  5. 126. Le gouvernement fait parvenir ensuite ses propres observations et présente les informations suivantes: i) l’organisation plaignante a demandé à l’administration du travail d’ouvrir une enquête sur la CETSA et l’EPSA pour refus de négocier et violation de la convention collective; ii) le ministère du Travail n’a pas jugé opportun d’engager une procédure administrative, estimant que le litige portait sur l’interprétation d’une norme juridique et qu’il relevait par conséquent des autorités judiciaires; iii) l’autorisation, par le ministère de la Santé et de la Protection sociale de l’époque, du licenciement pour motif économique de 16 travailleurs de Termotasajero est dépourvue de tout rapport avec la liberté syndicale; iv) la décision judiciaire relative à la demande d’annulation de la sentence arbitrale portant sur la négociation entre l’organisation plaignante et l’EPSA est toujours pendante; v) les représentants de l’organisation plaignante et la CHEC ont signé le 4 juin 2014, dans le cadre de la Commission spéciale de traitement des conflits déférés à l’OIT (CETCOIT), un accord prévoyant la poursuite des négociations sur le cahier de revendications; l’organisation plaignante et l’EDEQ ont signé par ailleurs un accord dans lequel elles conviennent de renoncer à porter leur différend devant la justice et d’engager une procédure de pourparlers directs.
  6. 127. Dans une communication en date du 9 mars 2015, le gouvernement indique que, à la suite du premier accord conclu par l’organisation plaignante et la CHEC dans le cadre de la CETCOIT en juin 2014, les parties ont signé en janvier 2015 une convention collective de travail valable jusqu’en 2017. Par conséquent, l’organisation plaignante a retiré les 27 recours qu’elle avait engagés contre l’entreprise devant l’administration du travail.

C. Conclusions du comité

C. Conclusions du comité
  1. 128. Le comité observe que, dans le cas à l’examen, l’organisation plaignante allègue, d’une part, la posture antisyndicale du pouvoir judiciaire colombien, telle qu’elle se manifeste dans un arrêt de la Cour suprême et, d’autre part, la violation du droit de négociation collective par quatre entreprises du secteur de l’électricité. Le comité observe également que les entreprises concernées aussi bien que le gouvernement soulignent que les dispositions constitutionnelles et légales ont été pleinement respectées dans les cas visés dans la plainte, que plusieurs entreprises déclarent qu’il est difficile de négocier avec l’organisation plaignante du fait d’une position intransigeante et que le gouvernement fait état de la conclusion récente d’une convention collective entre l’organisation plaignante et l’une des entreprises mentionnées dans la plainte.
  2. 129. S’agissant des allégations de l’organisation plaignante quant à la posture antisyndicale du pouvoir judiciaire, qui se serait vérifiée dans le conflit opposant le SINTRAELECOL et l’entreprise Termotasajero, le comité observe que le différend découle de l’interprétation de la disposition d’une convention collective relative à des augmentations de salaire devant être versées en 2000 et 2001, la question étant de savoir si cette disposition était toujours applicable les années suivantes compte tenu de l’extension de la durée de validité de la convention, qui intervenait faute de conclusion d’un nouvel accord. Dans ces circonstances, le comité ne poursuivra pas cet aspect de la plainte.
  3. 130. S’agissant de la contestation de l’autorisation délivrée par le ministère de la Santé et de la Protection sociale de l’époque concernant le licenciement de 16 travailleurs de la même entreprise, prétendument pour motif économique, le comité observe que les faits allégués ne peuvent par aucun aspect être assimilés à une violation éventuelle des principes de la liberté syndicale et de la négociation collective. Dans ces circonstances, le comité ne poursuivra pas l’examen de cette allégation.
  4. 131. S’agissant de la violation alléguée du droit de négociation collective par la Centrale hydroélectrique de Caldas (CHEC), le comité prend note avec satisfaction des éléments suivants: i) suite à l’accord conclu par l’organisation plaignante et l’entreprise en juin 2014, dans le cadre de la CETCOIT, les parties ont signé en janvier 2015 une convention collective valable jusqu’en 2017; ii) suite à la signature de cette convention, l’organisation plaignante a retiré les 27 recours qu’elle avait introduits contre l’entreprise devant l’administration du travail.
  5. 132. S’agissant de la violation alléguée du droit de négociation collective par l’Entreprise d’énergie du Quindío (EDEQ), le comité observe que l’organisation plaignante et l’entreprise affirment l’une et l’autre que l’autre partie n’a pas la volonté de dialoguer et de trouver un accord. Le comité prend note également avec intérêt de l’information du gouvernement quant à la conclusion, en juin 2014, d’un accord par lequel l’organisation plaignante et l’entreprise sont convenues de renoncer à porter le différend devant la justice et d’entamer une procédure de pourparlers directs. Rappelant qu’il importe qu’employeurs et syndicats participent aux négociations de bonne foi et déploient tous leurs efforts pour aboutir à un accord, des négociations véritables et constructives étant nécessaires pour établir et maintenir une relation de confiance entre les parties [voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 935], le comité encourage les parties à intensifier les efforts visant à instaurer une relation fondée sur le dialogue et le respect mutuel, et il prie le gouvernement de le tenir informé de l’issue des négociations.
  6. 133. S’agissant de la violation alléguée du droit de négociation collective par la Compagnie d’électricité de Tulua (CETSA), le comité note que l’échec des efforts visant à amener les parties à un accord a conduit à la constitution d’un tribunal arbitral qui a rendu une sentence, laquelle est en cours d’exécution. Dans ces circonstances, le comité ne poursuivra pas l’examen de cette allégation.
  7. 134. S’agissant de la violation alléguée du droit de négociation collective par l’entreprise Energie du Pacifique (EPSA), le comité observe que l’organisation plaignante et l’entreprise affirment l’une et l’autre que l’autre partie n’a pas la volonté de dialoguer et de trouver un accord. Le comité observe également que, face au désaccord des parties, un tribunal arbitral a été constitué et que la sentence qu’il a rendue a été contestée par l’entreprise dans un recours en annulation sur lequel la chambre chargée des affaires relatives au travail au sein de la Cour suprême doit encore se prononcer. Dans ces circonstances, le comité rappelle qu’employeurs et syndicats doivent négocier de bonne foi en s’efforçant d’arriver à un accord et que des relations professionnelles satisfaisantes dépendent essentiellement de l’attitude qu’adoptent les parties l’une à l’égard de l’autre et de leur confiance réciproque. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 936.] Considérant en outre que la judiciarisation systématique des relations de travail ne contribue pas à l’établissement de relations de confiance entre les parties, le comité invite l’organisation plaignante et l’entreprise à envisager de se prévaloir des mécanismes de conciliation existant dans le pays pour renouer le dialogue. Le comité prie le gouvernement de le tenir informé de l’évolution de la situation et de l’issue du recours en annulation engagé contre la sentence arbitrale.

Recommandations du comité

Recommandations du comité
  1. 135. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver les recommandations suivantes:
    • a) S’agissant de la violation alléguée du droit de négociation collective par l’Entreprise d’énergie du Quindío (EDEQ), le comité encourage les parties à intensifier les efforts déployés depuis 2014 en vue d’instaurer une relation fondée sur le dialogue et le respect mutuel, et il prie le gouvernement de le tenir informé de l’issue des négociations.
    • b) S’agissant de la violation alléguée du droit de négociation collective par l’entreprise Energie du Pacifique (EPSA), le comité invite l’organisation plaignante et l’entreprise à envisager de se prévaloir des mécanismes de conciliation existant dans le pays pour renouer le dialogue.
    • c) Le comité prie le gouvernement de le tenir informé de l’évolution de la situation et de l’issue du recours en annulation engagé contre la sentence arbitrale.
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