Allégations: L’organisation plaignante dénonce la perpétration de plusieurs actes antisyndicaux, en particulier des licenciements abusifs et des pressions exercées sur des travailleurs par l’entreprise Kraft Foods Colombia S.A. pour qu’ils renoncent à leur affiliation syndicale
- 132. La plainte figure dans une communication en date du 13 mai 2010, présentée par le Syndicat national des travailleurs du système agroalimentaire (SINALTRAINAL).
- 133. Le gouvernement a présenté ses observations dans des communications du mois d’août 2011 et du 10 septembre 2015.
- 134. La Colombie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, et la convention (no 154) sur la négociation collective, 1981.
A. Allégations de l’organisation plaignante
A. Allégations de l’organisation plaignante- 135. L’organisation plaignante allègue l’existence d’une série d’actes antisyndicaux de la part de l’entreprise Kraft Foods Colombia S.A. (ci-après l’entreprise), y compris des licenciements abusifs, des pressions visant à obtenir des travailleurs qu’ils renoncent à leurs contrats de travail, des agressions et des menaces de mort. L’organisation plaignante dénonce premièrement une atteinte au droit à l’intégrité de la personne de plusieurs de ses membres, en déclarant notamment que: i) le 20 mars 2004, alors que plusieurs membres du SINALTRAINAL menaient une grève de la faim dans plusieurs villes du pays, une enveloppe signée par un groupe paramilitaire (Autodefensas Unidas de Colombia) [Autodéfenses unies de Colombie] a été découverte au siège du SINALTRAINAL – Palmira, Valle del Cauca, contenant des menaces de mort contre les dirigeants du SINALTRAINAL – Palmira, qui travaillent pour l’entreprise; ii) une plainte à ce sujet a été déposée auprès du ministère public; iii) le 18 juin 2004, le président du SINALTRAINAL – Palmira, M. José Fraybel Melo, a reçu des menaces similaires par téléphone, qui ont également été signalées au Procureur général de la nation; iv) le 7 octobre 2004, le chef de la sécurité de l’entreprise a verbalement agressé et photographié un groupe de travailleurs affiliés au SINALTRAINAL qui tenait une réunion en face du site de Palmira de l’entreprise – fait qui a été signalé au Procureur général de la nation en lien avec les plaintes antérieurement déposées; enfin v) le 25 novembre 2004, un pamphlet contenant des menaces de mort contre les dirigeants syndicaux a été découvert dans les locaux de l’entreprise, fait qui a été immédiatement signalé au Procureur général de la nation en lien avec les plaintes antérieurement déposées.
- 136. L’organisation plaignante déclare en second lieu qu’en vertu du décret no 2351 de 1965, lorsque la majorité des travailleurs d’une entreprise sont membres d’un syndicat, la convention collective signée par ce dernier s’applique à tous les travailleurs de cette entreprise, et les travailleurs non syndiqués doivent payer leurs cotisations syndicales pour pouvoir bénéficier de cette convention. L’organisation plaignante allègue que, depuis 2002, l’entreprise a manqué à son obligation légale de déduire les cotisations susmentionnées au profit du SINALTRAINAL et que, dans un premier temps, après avoir sanctionné l’entreprise par une décision en date du 19 mars 2004, le ministère de la Protection sociale a finalement décidé d’annuler sa sanction par une autre décision en date du 28 septembre 2004.
- 137. Troisièmement, l’organisation plaignante dénonce une série de licenciements et des pressions visant à forcer les travailleurs affiliés au SINALTRAINAL à démissionner, en particulier: i) le licenciement, le 7 novembre 2003, de MM. Fabio Sánchez, Jorge Montoya, Jorge Bermúdez et José Luis Lozano, tous membres du SINALTRAINAL; ii) des pressions exercées, le 17 février 2005, sur sept travailleurs administratifs pour les forcer à signer leur démission; iii) des pressions exercées par l’entreprise à l’encontre de huit travailleurs membres du SINALTRAINAL, aboutissant, le 4 juin 2005, à leur démission et à l’acceptation par ces derniers d’une pension anticipée; iv) des pressions exercées, le 11 juin 2005, sur 30 travailleurs membres du SINALTRAINAL pour les forcer à démissionner et, devant leur refus, l’intervention d’un escadron antiémeute de la police nationale au cours de laquelle ont été blessés Raúl Andrés Ortiz, Eduardo Herrán, Brigitee Narváez, Hernando López, Diego Segura, Jhon Jairo Millán, Jhon Jairo Tascón, Orlando Medina, Martha Piedrahita, Héctor Fabio Palacios, Diego Ledesma, Amparo Cifuentes, Martha Ruiz, Sohelly Toro, Juan Carlos Castro, Edison Becerra, Jenny Murcia, Luz Myriam Ceballos et Diego Ladino, plusieurs de ces personnes étant dirigeants syndicaux du SINALTRAINAL (le syndicat déclare à ce sujet que, malgré les nombreuses plaintes déposées, les autorités n’ont pas sanctionné les responsables de ces agressions); enfin v) le 6 octobre 2005, le licenciement unilatéral et abusif des membres syndicaux Mme Marta Piedrahita et M. Héctor Fabio Palacio, à la suite de leur refus de signer leur démission – décision à la suite de laquelle les intéressés ont engagé plusieurs actions judiciaires.
- 138. L’organisation plaignante allègue par ailleurs que, le 2 février 2007, 25 travailleurs temporaires, alors au service de l’entreprise, ont adhéré au SINALTRAINAL. L’entreprise a refusé de les reconnaître comme membres du syndicat, a licencié 22 d’entre eux et a forcé les trois travailleurs restants à renoncer à leur affiliation syndicale sous peine de ne pas voir leurs contrats de travail renouvelés.
- 139. L’organisation plaignante allègue en outre que, depuis 2003, la stratégie de l’entreprise consiste à réduire le nombre de travailleurs directs pour affaiblir le syndicat; elle est passée de 230 travailleurs employés directement par elle-même en 2003 (au nombre desquels 148 étaient membres du SINALTRAINAL) à 139 en 2010 (au nombre desquels 94 étaient membres du SINALTRAINAL). Elle ajoute que cette réduction s’accompagne de pressions de la part de l’entreprise pour que les travailleurs n’adhèrent pas au syndicat et du recours à des travailleurs externes n’ayant jamais eu de contacts avec le syndicat – faits qui ont été signalés à plusieurs reprises à l’inspection du travail et aux autorités locales.
- 140. Enfin, l’organisation plaignante dénonce l’installation de caméras vidéo dans l’ensemble des locaux de l’entreprise, y compris dans les zones où les travailleurs prennent leurs repas. Elle estime que ces caméras ne servent pas réellement à protéger la sécurité physique des travailleurs mais à les surveiller, ce qui est interdit par la législation colombienne.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement- 141. Dans une communication en date du mois d’août 2011, le gouvernement a fait parvenir ses observations relatives aux allégations de menaces de mort contre les dirigeants syndicaux du SINALTRAINAL. Il déclare que, mis à part les menaces à l’encontre de M. José Fraybel Melo, les autres faits dénoncés ont déjà fait l’objet d’un examen par le comité dans le cadre des cas nos 1787 et 2761. Rappelant sa politique en matière de protection des dirigeants syndicaux et des syndicalistes et de lutte contre l’impunité, le gouvernement fait savoir que la plainte pour menaces à l’encontre de M. José Fraybel Melo a donné lieu à une enquête ouverte par l’unité spécialisée du procureur général no 83 de Cali, dossier no 5407. Le gouvernement indique qu’il continuera à fournir des informations à cet égard dans le cadre des cas nos 1787 et 2761.
- 142. Dans une communication en date du 10 septembre 2015, le gouvernement transmet tout d’abord les observations de l’entreprise Kraft Foods Colombia S.A. en liquidation, dans lesquelles il est indiqué que: i) l’entreprise en liquidation n’a pas connaissance des faits se rapportant à l’année 2004 mentionnés dans la plainte; ii) l’entreprise en liquidation n’a pas trace de différends du travail ou d’enquêtes administratives se rapportant aux faits dénoncés; enfin iii) en 2011, le ministère du Travail a autorisé la résiliation des contrats de travail en raison de la fermeture définitive de l’usine de l’entreprise.
- 143. Le gouvernement transmet ensuite les observations de la Direction territoriale du ministère du Travail du département de Valle del Cauca dans lesquelles elle indique que: i) l’entreprise a sollicité, le 31 janvier 2011, l’autorisation de fermer définitivement et de résilier 160 contrats de travail encore en vigueur; ii) l’organe de coordination du groupe de gestion du travail du ministère du Travail a conclu que l’autorisation de licenciement collectif pour cause de fermeture permanente de l’entreprise était techniquement et économiquement viable; iii) par décision du 6 mai 2011, la résiliation des contrats de travail de MM. José Fraybel Melo Bedoya et Raúl Andrés Ortiz López a été autorisée avant l’expiration de leur mandat syndical; iv) M. Ortiz López, vice-président du SINALTRAINAL, section de Palmira, a formé un recours en révision et engagé une action contre l’autorisation de son licenciement mais, dans les deux cas, la décision initiale a été maintenue; enfin v) il n’existe actuellement aucune enquête administrative du travail en cours à l’encontre de l’entreprise.
- 144. Enfin, le gouvernement fait parvenir ses propres observations sur les allégations figurant dans la plainte. En ce qui concerne l’allégation relative à la non-déduction par l’entreprise des cotisations syndicales des travailleurs non syndiqués qui bénéficient de la convention collective signée par le SINALTRAINAL, en violation de la législation colombienne, le gouvernement déclare que: i) la non-déduction des cotisations syndicales par l’entreprise ne s’appliquait qu’aux travailleurs «représentants de l’employeur»; ii) à cet égard, la jurisprudence de la Cour suprême de justice exclut les représentants de l’employeur des avantages des conventions collectives; iii) en outre, la législation colombienne prévoit que les travailleurs non syndiqués peuvent renoncer à l’application de la convention collective, et donc être exemptés du paiement des cotisations syndicales; iv) l’administration du travail a certes décidé en première instance de sanctionner l’entreprise, mais cette décision a été annulée en appel; enfin v) le syndicat n’a pas contesté ladite décision en justice.
- 145. En ce qui concerne la résiliation des contrats de travail de Mme Piedrahita et de M. Héctor Fabio Palacio, le gouvernement déclare que: i) les deux travailleurs ont effectivement été licenciés sans motif et ont reçu à ce titre les indemnités correspondantes; ii) tous deux ont saisi le juge de la protection des droits fondamentaux pour obtenir leur réintégration; enfin iii) alors que le recours de Mme Piedrahita a été rejeté, M. Palacio a obtenu un jugement en faveur de sa réintégration, qui a été exécuté par l’entreprise.
- 146. En ce qui concerne les licenciements sans motif supposé, le 7 novembre 2003, de MM. Fabio Sánchez, Jorge Montoya, Jorge Bermúdez et José Luis Lozano, le gouvernement déclare que l’organisation plaignante ne fournit pas les documents permettant d’établir les faits relatifs à ces licenciements. De la même manière, concernant les pressions supposément exercées par l’entreprise pour obliger sept travailleurs à démissionner le 17 février 2005, le gouvernement souligne que l’organisation plaignante ne fournit pas la preuve de ces allégations et que le syndicat mentionne aussi l’acceptation par les travailleurs des accords proposés.
- 147. En ce qui concerne les autres licenciements mentionnés dans la plainte, le gouvernement ajoute que rien n’indique qu’ils ont été contestés en justice. Il estime que, lorsque les voies de recours internes n’ont pas été saisies, on ne saurait prétendre que l’Etat a manqué à ses obligations de respecter le droit à la liberté syndicale et les conventions internationales pertinentes. Le gouvernement indique aussi que ce raisonnement s’applique également à la réunion organisée par l’entreprise le 11 juin 2005 avec 30 travailleurs, qui s’est conclue par la signature de documents entre les parties, ainsi qu’aux pressions supposément exercées contre huit travailleuses en vue de les obliger à démissionner et à accepter une pension anticipée.
- 148. Pour ce qui est de l’affiliation syndicale des travailleurs engagés par l’intermédiaire d’une agence d’emploi privée et du refus par l’entreprise de reconnaître cette affiliation et des licenciements supposés de ces derniers, le gouvernement indique que: i) les travailleurs temporaires jouissent des mêmes droits que les autres pour constituer des syndicats; ii) néanmoins, en l’espèce, le droit de ces travailleurs de s’affilier au SINALTRAINAL, syndicat opérant dans le secteur agroalimentaire, est, comme le démontre la position de l’entreprise, sujet à caution; iii) ce différend devra être réglé par les tribunaux nationaux; enfin iv) la plainte et ses annexes ne contiennent aucune indication selon laquelle le syndicat aurait engagé une action judiciaire sur cette question.
- 149. S’agissant de la réduction alléguée du nombre de membres syndicaux consécutive à la politique du travail de l’entreprise, le gouvernement déclare que ni les chiffres fournis par l’organisation plaignante (une baisse des effectifs de l’entreprise de 230 travailleurs en 2003 à 139 travailleurs en 2010, d’une part, et une baisse du nombre des membres syndicaux de 148 en 2003 à 94 en 2010, d’autre part) ni les annexes présentées ne montrent l’existence d’une politique antisyndicale de l’entreprise. A cet égard, le gouvernement indique que les communications du syndicat à l’entreprise et aux autorités administratives mentionnent une série de difficultés alléguées, en particulier des mauvais traitements à l’encontre des travailleurs en général et des violations de la convention collective, ou une non-conformité avec celle-ci du fait notamment du non-recrutement de travailleurs locaux, mais ne font pas état d’une politique de réduction des travailleurs affiliés au syndicat.
- 150. En ce qui concerne l’installation de caméras de sécurité par l’entreprise, le gouvernement déclare que: i) l’entreprise a fait savoir que l’installation de caméras de sécurité fait partie d’un plan de sécurité du lieu de travail et que cette mesure est nécessaire pour obtenir une certification technique; ii) l’installation de caméras vidéo ne viole aucune disposition réglementaire en Colombie; enfin iii) le syndicat n’indique pas en quoi les caméras vidéo ont contribué à une violation de la liberté syndicale.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité- 151. Le comité note que le présent cas porte sur la dénonciation d’une série d’actes antisyndicaux de la part de l’entreprise Kraft Foods Colombia S.A., en particulier des licenciements abusifs, des pressions exercées sur les travailleurs pour les forcer à démissionner, des agressions et des menaces de mort.
- 152. En ce qui concerne les allégations de menaces de mort à l’encontre des dirigeants syndicaux de l’organisation plaignante, le comité prend note des informations transmises par le gouvernement ainsi que de son indication selon laquelle il continuera à fournir des informations à cet égard dans le cadre des cas nos 1787 et 2761, lesquels concernent des plaintes pour des actes de violence et des menaces contre des dirigeants syndicaux et des syndicalistes en Colombie. Observant que les menaces dénoncées par l’organisation plaignante dans le présent cas ont eu lieu entre le 20 mars et le 25 novembre 2004, une période couverte par le cas no 1787, et que, en outre, le cas mentionné porte déjà sur plusieurs allégations de menaces dénoncées par l’organisation plaignante, le comité renvoie l’examen de ces aspects au cas no 1787.
- 153. Le comité prend note de la réponse de l’entreprise indiquant qu’elle a été liquidée en 2011 et qu’elle n’a pas trace de différends du travail ou d’enquêtes administratives se rapportant aux faits dénoncés. Le comité prend également note de la réponse du gouvernement communiquée cinq ans après la présentation de la plainte qui indique d’une manière générale que: i) l’entreprise a été liquidée en 2011, ce qui l’a autorisée à résilier la totalité de ses contrats de travail; ii) il n’existe actuellement aucune enquête administrative du travail en cours à l’encontre de l’entreprise; iii) de nombreuses allégations ne sont pas corroborées par des documents; et iv) dans la majorité des faits signalés, les voies de recours internes n’ont pas été saisies pour trouver une solution à la situation, raison pour laquelle on ne saurait invoquer une violation par l’Etat des principes de la liberté syndicale et des conventions de l’OIT correspondantes ratifiées par le pays.
- 154. En rapport avec les allégations spécifiques figurant dans la plainte, le comité prend note en premier lieu du fait que l’organisation plaignante allègue que, en violation de la législation en vigueur, l’entreprise a manqué à son obligation légale de recouvrir, au profit du SINALTRAINAL, les cotisations syndicales des travailleurs non syndiqués jouissant de la convention collective signée par ladite organisation et que, dans un premier temps, après avoir sanctionné l’entreprise, le ministère de la Protection sociale a finalement annulé sa décision. Le comité prend également note des indications du gouvernement selon lesquelles: i) la non-déduction des cotisations ne concernait que les représentants de l’employeur, conformément à la jurisprudence de la Cour suprême de justice; ii) en outre, la législation colombienne prévoit que les travailleurs non syndiqués peuvent renoncer à l’application de la convention collective et donc être exemptés du paiement des cotisations en faveur du syndicat; enfin iii) la décision finale de l’administration du travail de ne pas imposer de sanction à l’entreprise n’a pas été contestée en justice. De plus, à la lumière des documents transmis par le gouvernement, le comité observe que la non-déduction des cotisations par l’entreprise ne concernait que les travailleurs non syndiqués qui avaient expressément exprimé leur désir de ne pas payer cette cotisation, ce qui est compatible avec le principe de la liberté syndicale. Dans ces conditions, le comité ne poursuivra pas l’examen de cette allégation.
- 155. En ce qui concerne le licenciement sans motif, le 6 octobre 2005, des membres syndicaux Mme Marta Piedrahita et M. Héctor Fabio Palacio, le comité prend note des indications du gouvernement selon lesquelles: i) les deux travailleurs ont effectivement été licenciés sans motif et ont reçu à ce titre les indemnités correspondantes; ii) tous deux ont saisi le juge de la protection des droits fondamentaux pour obtenir leur réintégration; enfin iii) alors que le recours de Mme Piedrahita a été rejeté, M. Palacio a obtenu un jugement en faveur de sa réintégration, qui a été exécuté par l’entreprise. A la lecture des jugements joints à la plainte, le comité observe en outre que la réintégration de M. Palacio n’était pas fondée sur le caractère antisyndical allégué mais sur sa situation de père chef de famille. Le comité observe également que Mme Piedrahita n’a pas contesté son licenciement pour son caractère antisyndical, mais parce qu’elle jouissait d’une protection renforcée en tant que mère et chef de famille. Dans ces conditions, le comité ne poursuivra pas l’examen de cette allégation.
- 156. Par ailleurs, le comité constate qu’il ne dispose que d’informations limitées en ce qui concerne les allégations suivantes portant sur la résiliation de contrats de travail: i) la résiliation, le 7 novembre 2003, des contrats de travail de MM. Fabio Sánchez, Jorge Montoya, Jorge Bermúdez et José Luis Lozano; ii) les pressions exercées, le 17 février 2005, sur sept travailleurs administratifs pour les forcer à signer leur démission; iii) les pressions exercées par l’entreprise à l’encontre de huit travailleurs membres du SINALTRAINAL, aboutissant, le 4 juin 2005, à leur démission et à l’acceptation par ces derniers d’une pension anticipée. Le comité observe en particulier que la plainte ne contient pas de détails expliquant le caractère antisyndical des résiliations et qu’il n’a reçu aucune indication selon laquelle les résiliations des contrats de travail alléguées, lesquelles ont eu lieu il y a plus de dix ans, ont donné lieu à des actions judiciaires ou à des différends administratifs du travail. Dans ces conditions, le comité ne poursuivra pas l’examen de ces allégations.
- 157. En ce qui concerne les agressions alléguées à l’encontre de 30 travailleurs, au nombre desquels plusieurs dirigeants syndicaux du SINALTRAINAL, par un escadron antiémeute de la police nationale le 11 juin 2005 après que, selon l’organisation plaignante, ces travailleurs ont refusé de signer la résiliation de leur contrat de travail, le comité note avec un profond regret que le gouvernement n’a fourni, en temps voulu, aucune observation sur les faits susmentionnés. A cet égard, le comité doit fermement rappeler au gouvernement que les autorités ne devraient avoir recours à la force publique que dans des situations où l’ordre public serait sérieusement menacé. L’intervention de la force publique devrait rester proportionnée à la menace pour l’ordre public qu’il convient de contrôler, et les gouvernements devraient prendre des dispositions pour que les autorités compétentes reçoivent des instructions appropriées en vue d’éliminer le danger qu’impliquent les excès de violence lorsqu’il s’agit de contrôler des manifestations qui pourraient troubler l’ordre public. [Voir Recueil de décisions et de principes du Comité de la liberté syndicale, cinquième édition, 2006, paragr. 140.]
- 158. En rapport avec le refus de l’entreprise de reconnaître, en février 2007, l’affiliation au SINALTRAINAL de 25 travailleurs exécutant leurs tâches dans le cadre de contrats de travail conclus avec des agences de travail temporaire et le licenciement consécutif de 22 travailleurs, le comité note que le gouvernement déclare que: i) si les travailleurs employés par des agences de travail temporaire jouissent de la liberté syndicale, le droit des travailleurs susmentionnés d’adhérer au SINALTRAINAL, en tant que syndicat sectoriel, peut donner lieu à des controverses, lesquelles doivent être réglées devant les tribunaux nationaux; et que ii) rien n’indique que des procédures judiciaires ont été engagées en rapport avec la situation des 25 travailleurs susmentionnés dans la plainte. A cet égard, le comité note effectivement en premier lieu que l’organisation plaignante n’indique pas avoir contesté, administrativement ou judiciairement, le refus de l’entreprise de reconnaître l’affiliation syndicale des travailleurs ou le licenciement de 22 d’entre eux. Le comité souhaite néanmoins rappeler, comme il l’a fait dans des cas antérieurs relatifs à la Colombie (voir cas no 2556, 349e rapport, mars 2008), que la nature juridique du lien entre les travailleurs et l’employeur ne devrait avoir aucune incidence sur le droit de s’affilier à des organisations de travailleurs et de participer aux activités de celles-ci et que, à cet égard, tous les travailleurs qui exercent leurs activités au sein d’entreprises agroalimentaires, quel que soit le type de lien qui les unit à ces entreprises, devraient pouvoir s’affilier aux organisations syndicales qui représentent les intérêts des travailleurs de ce secteur. Le comité prie le gouvernement de s’assurer de l’application de ce principe à l’avenir.
- 159. En ce qui concerne la stratégie alléguée de l’entreprise consistant à réduire le nombre de travailleurs directs pour affaiblir le SINALTRAINAL, le comité note que l’organisation déclare que: i) la baisse des effectifs de l’entreprise, de 230 travailleurs directs en 2003 à 139 travailleurs en 2010, s’est accompagnée d’une baisse du nombre des membres syndicaux de 148 en 2003 à 94 en 2010; et ii) l’entreprise a exercé des pressions pour que les travailleurs n’adhèrent pas au syndicat et a embauché des travailleurs d’autres villes ayant eu peu de contacts avec le syndicat. Le comité note par ailleurs que le gouvernement signale que ces chiffres ne démontrent en aucune manière l’existence d’une politique antisyndicale et que, de fait, les nombreuses communications envoyées par le SINALTRAINAL à l’entreprise et à l’administration du travail entre les années 2003 et 2010, critiquant par exemple le recours insuffisant à la main-d’œuvre locale, ne mentionnent aucunement une politique de l’entreprise visant à réduire le nombre de travailleurs syndiqués. A cet égard, le comité rappelle qu’il ne peut se prononcer sur les allégations concernant les programmes et les mesures de restructuration ou de rationalisation économique, que ceux-ci impliquent ou non des réductions de personnel ou des transferts d’entreprises ou des services du secteur public au secteur privé, que dans la mesure où ils ont donné lieu à des actes de discrimination ou d’ingérence antisyndicaux. Quoi qu’il en soit, le comité ne peut que déplorer que, dans le cadre de rationalisation et de réduction du personnel, le gouvernement n’ait pas consulté les organisations syndicales ou essayé de parvenir à un accord avec elles. [Voir Recueil, op. cit., paragr. 1079.] A cet égard, le comité observe que l’organisation plaignante ne mentionne pas de faits spécifiques tendant à indiquer que la réduction des effectifs de l’entreprise avait une finalité antisyndicale. Dans ces conditions, le comité ne poursuivra pas l’examen de cette allégation.
- 160. En ce qui concerne l’installation de caméras de sécurité au sein de l’entreprise, y compris dans les zones où les travailleurs prennent leurs repas, afin, selon organisation syndicale, d’instaurer un contrôle à caractère policier sur les travailleurs, le comité note que: i) l’entreprise indique que les caméras vidéo servent à garantir la sécurité des travailleurs; enfin ii) le gouvernement déclare que cette installation ne viole aucune réglementation et que l’organisation plaignante n’indique pas en quoi les caméras vidéo ont contribué à une violation de la liberté syndicale. Notant que l’organisation plaignante n’allègue aucune utilisation antisyndicale concrète des caméras vidéo ni qu’elles ont été positionnées spécifiquement pour contrôler les activités syndicales des travailleurs, le comité ne poursuivra pas l’examen de cette allégation.
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 161. Au vu des conclusions qui précèdent, le comité invite le Conseil d’administration à approuver la recommandation suivante:
- Le comité prie le gouvernement de veiller à ce que tous les travailleurs, indépendamment de la nature juridique de la relation qui les lie à l’entreprise pour fournir leurs services, puissent librement adhérer aux organisations syndicales qui représentent les intérêts des travailleurs du secteur d’activité où ils accomplissent leurs tâches.