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Suites données aux recommandations du comité et du Conseil d’administration
Suites données aux recommandations du comité et du Conseil d’administration- 70. Le comité a examiné pour la dernière fois ce cas relatif à une décision de la Cour suprême qui a conclu que les travailleurs qui s’étaient tondu ou rasé les cheveux au travail s’étaient engagés dans une grève illégale non protégée, confirmant ainsi le licenciement de 29 responsables syndicaux et permettant le licenciement de 61 syndicalistes, en violation des principes de liberté syndicale et d’expression, à sa réunion d’octobre 2010. [Voir 358e rapport, approuvé par le Conseil d’administration à sa 309e session, paragr. 827-867.] A cette occasion, le comité a formulé les recommandations suivantes [voir 358e rapport, paragr. 867]:
- a) Le comité prie le gouvernement de le tenir informé sur la réforme législative lancée qui aboutira selon ce dernier, entre autres, à modifier l’article 263(g) du Code du travail.
- b) Prenant note de l’indication du gouvernement selon laquelle il a rencontré les parties concernées et entamé des entretiens exploratoires en vue de trouver des solutions originales au conflit, le comité demande au gouvernement, dans le contexte présent, de réexaminer avec la direction de l’hôtel et les travailleurs licenciés concernés la faisabilité de leur réintégration et, pour ceux qui ne peuvent être réintégrés immédiatement, la possibilité de les inscrire dans une liste prioritaire de réengagement ou de leur verser une indemnité adéquate. Il demande par ailleurs au gouvernement de réexaminer le caractère adéquat de l’indemnité des licenciements offerte aux 61 membres syndicaux licenciés pour s’assurer qu’ils ont été indemnisés à hauteur du préjudice subi. Le comité demande au gouvernement de le tenir informé des progrès réalisés pour parvenir à une solution satisfaisante pour toutes les personnes concernées.
- 71. Les organisations plaignantes fournissent des informations complémentaires dans des communications en date des 27 octobre 2010, 30 avril 2013 et du 8 mai 2019. Ils demandent au comité d’examiner le cas afin que le gouvernement soit tenu de respecter et d’appliquer les traités internationaux, y compris les conventions de l’OIT, et allèguent que, même si le ministère du Travail et de l’Emploi (DOLE) a pris certaines mesures pour assurer le respect des recommandations du comité, toutes ses initiatives n’ont pas incité la direction de l’hôtel à abandonner ses réticences. Les plaignants allèguent qu’aucun développement n’a vu le jour concernant la solution originale recherchée par les parties. Le gouvernement n’a pas apporté l’aide prévue aux travailleurs par le programme de subsistance, et les travailleurs licenciés, même si la direction leur a rendu visite, n’ont pas accepté de rémunération. De plus, la Cour suprême continue d’effacer des dossiers les requêtes déposées par les travailleurs qui remettent en question la constitutionnalité des aspects de fond et de procédure de la décision pertinente, sans aborder ces questions, et le solliciteur général doit encore intervenir dans le processus judiciaire et demander à la Cour suprême d’examiner l’affaire en assemblée plénière. Les dirigeants et les membres syndicaux licenciés ont individuellement écrit aux juges adjoints de la Cour suprême pour les exhorter à réexaminer l’affaire. La dernière requête en révision a été déposée en septembre 2018, et les plaignants estiment qu’il incombe à la cour d’entendre l’affaire en formation plénière. Enfin, les plaignants dénoncent le fait que la section locale créée par la direction a une fois de plus été réorganisée et est maintenant affiliée au NUWHRAIN.
- 72. Le gouvernement présente ses observations dans des communications en date des 15 novembre 2010, 1er juin 2011 et 26 mai 2014. En ce qui concerne le différend entre la direction de l’hôtel et le syndicat hôtelier qui concerne des allégations de licenciements antisyndicaux, le gouvernement réaffirme que le DOLE a étendu aux deux parties la possibilité d’étudier une «solution originale» acceptable et ajoute que, si des discussions préliminaires ont eu lieu avec la direction de l’hôtel sur la réintégration des travailleurs concernés pour occuper d’autres fonctions ou postes, le ministère et le syndicat examinaient également une intervention immédiate à l’intention des travailleurs concernés, comme une aide de subsistance. Selon le gouvernement, la possibilité de réintégration des travailleurs était nulle étant donné le caractère définitif de la décision de la Cour suprême, et le président du syndicat considérait également que la réintégration n’était pas possible étant donné que la même direction et les mêmes avocats s’occupaient toujours du dossier. Néanmoins, le syndicat examinait une proposition de projet et sa capacité à mettre en œuvre la subvention de subsistance. Le DOLE a également demandé à la direction de l’hôtel et au syndicat de se réunir pour étudier les options concernant les recommandations du comité, ainsi qu’une réunion avec les représentants de la haute cour pour discuter des questions soulevées par la décision pertinente, mais les réunions ne se sont pas concrétisées, et les recommandations du comité ont donc été présentées devant l’organe de contrôle du Conseil national tripartite pour la paix au travail (NTIPC-MB).
- 73. Le gouvernement fait savoir en outre que deux résolutions conjointes du secteur du travail ont été publiées en ce qui concerne le présent cas. Premièrement, la résolution conjointe no 2, série de 2013, intitulée «Appel à tous les organismes publics pour qu’ils défendent la protection et la promotion des droits des travailleurs», demandant au DOLE et au ministère du Budget et de la Gestion de notifier à tous les services gouvernementaux de s’abstenir d’engager des entreprises ou organisations commerciales qui violent les droits des travailleurs et de faire du respect de ces droits un facteur dans l’achat des produits et services aux entreprises ou aux organisations commerciales. Le présent cas a servi d’exemple spécifique, et la résolution a été transmise à tous les organismes, agences et services gouvernementaux. Deuxièmement, la résolution conjointe no 3, série de 2013, intitulée «Appel au bureau du solliciteur général pour qu’il introduise une requête devant la Cour suprême dans l’affaire Dusit», demandant au bureau du solliciteur général, en tant qu’avocat du peuple, de procéder à l’intervention nécessaire pour que la Cour suprême prenne connaissance des recommandations de l’OIT et examine en assemblée plénière la décision de la deuxième chambre qui aurait étendu la définition juridique de la grève pour y inclure des modes d’expression pacifiques, ce qui constitue une violation manifeste de l’article 8, alinéa 2, de la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948. Cette résolution a été transmise au bureau du solliciteur général, mais ce dernier a indiqué que ni le bureau ni d’autres organes judiciaires n’avaient le pouvoir d’intervenir pour une réouverture de l’affaire, du fait que la décision était définitive et exécutoire, et que seule la Cour suprême était en mesure, de sa propre initiative, d’ordonner une réouverture du cas.
- 74. En ce qui concerne l’amendement de l’article 263(g) du Code du travail, le gouvernement fournit des informations détaillées sur la réforme législative en cours et indique qu’une partie de la réforme qui vise à renforcer la capacité des syndicats et à éliminer les obstacles à l’exercice effectif des droits des travailleurs a progressé. En particulier, un projet de loi a été soumis au Conseil national tripartite pour la paix au travail (NTIPC) visant à modifier l’article 263(g) du Code du travail, qui autorise le ministre du Travail et le Président à se déclarer compétents à l’égard des différends du travail qui présentent un intérêt national. L’amendement limite l’attribution de compétence au concept de services essentiels de l’OIT et supprime les sanctions pénales pour la simple participation à une grève illégale fondée sur le non-respect des exigences administratives. Le gouvernement indique que le projet de loi a fait l’objet de consultations tripartites et qu’il a ensuite été modifié en profondeur pour tenir compte des discussions avec les experts du BIT. Le projet de loi offre une certaine souplesse dans la détermination des secteurs fournissant des services essentiels en fonction de la situation prévalant dans le pays et fixe simplement le critère des «services essentiels» comme critère d’orientation pour une liste de secteurs fournissant des «services essentiels» tels que déterminés par consultation tripartite. Le projet de loi vise donc à limiter l’attribution automatique de compétence à deux situations, l’une concernant la notion de services ou de secteurs essentiels de l’OIT, déterminée par consultation tripartite comme fournissant des services essentiels, dont l’interruption mettrait en danger, dans l’ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne, et l’autre concernant les services non essentiels à la demande des deux parties impliquées dans le conflit après conciliation obligatoire.
- 75. Le gouvernement fait savoir en outre que plusieurs mesures administratives provisoires ont été prises, à savoir l’approbation par le NTIPC de l’ordonnance ministérielle no 40-G-03, série de 2010, modifiant l’ordonnance ministérielle no 40, série de 2003, qui prévoit les modalités de la prise de compétence du secrétaire d’Etat au Travail au titre de l’article 263(g) du Code du travail. En février 2011, des directives opérationnelles portant sur l’ordonnance ministérielle no 40-G-03, série de 2010, ont également été publiées afin de clarifier davantage sa mise en œuvre, de l’harmoniser avec d’autres directives et de préciser quand et comment la police interviendra dans les cas de grève et de lock-out. D’après le gouvernement, l’application de l’ordonnance ministérielle dans les affaires concrètes a consisté à recourir à un usage intensif de la conciliation-médiation plutôt qu’à la prise de compétence du secrétaire, et le pourcentage des cas liés au travail dans lesquels le secrétaire a assumé sa compétence par rapport au nombre total des cas liés au travail a sensiblement diminué. En octobre 2013, une ordonnance du DOLE no 40-H-13 a été publiée afin de contribuer à faire passer l’exercice de prise de compétence du critère de «secteur indispensable à l’intérêt national» au critère de «services essentiels». L’ordonnance ministérielle fournit une liste indicative des secteurs indispensables à l’intérêt national, harmonisée avec les critères des services essentiels de la convention no 87. Ces secteurs comprennent le secteur hospitalier, l’industrie de l’énergie électrique, les services d’approvisionnement en eau (sauf les services d’approvisionnement en eau à petite échelle, comme les stations d’embouteillage et de remplissage) et le contrôle du trafic aérien, et d’autres secteurs peuvent être ajoutés sur recommandation du NTIPC. L’ordonnance ministérielle réitère aussi la procédure de prise de compétence du secrétaire lorsque l’une ou l’autre partie, ou les deux, parties invoquent l’application de l’exercice de la prise de compétence par le biais d’une demande en ce sens. Si elle est invoquée par les deux parties, sa mise en œuvre est automatique quelle que soit la catégorie de secteur; si elle est invoquée par l’une des parties, la requête déclenchera la tenue d’une conciliation exhaustive sous l’égide du bureau du secrétaire jusqu’à ce qu’un règlement soit conclu. Dans les deux cas, un accord amiable est conclu, et la sentence arbitrale est le dernier recours. L’ordonnance ministérielle a été élaborée par l’entremise du NTIPC, les partenaires tripartites ont été en mesure d’en affiner les éléments pendant sa mise en œuvre, et les expériences positives ont contribué à leur adoption tripartite. Selon le gouvernement, l’ordonnance administrative devrait faciliter l’adoption du projet de loi sur la prise de compétence au Congrès.
- 76. Enfin, le gouvernement fournit des informations détaillées sur d’autres aspects des réformes législatives et institutionnelles en cours dans le pays, en particulier dans le système d’arbitrage et de jugement des conflits du travail, y compris les activités de grande ampleur de renforcement des capacités et de sensibilisation à la liberté syndicale et à la négociation collective, ainsi qu’au respect des autres normes internationales du travail.
- 77. En ce qui concerne les allégations de licenciements antisyndicaux et la décision de la Cour suprême de 2008 confirmant le licenciement de 29 responsables syndicaux et permettant le licenciement de 61 syndicalistes, le comité croit comprendre, d’après les informations fournies par le gouvernement et les organisations plaignantes, que malgré les efforts spécifiques du gouvernement pour assurer le respect des recommandations précédentes du comité, y compris l’organisation de réunions entre les parties et une demande au solliciteur général d’intervenir auprès de la Cour suprême pour qu’elle réexamine la décision contestée, aucun progrès important n’a été réalisé dans le rétablissement de la situation des travailleurs licenciés. Notant en outre que le syndicat hôtelier et le gouvernement, bien que pour des raisons différentes, estiment que la réintégration des travailleurs concernés n’est pas possible et que les recommandations du comité ont été présentées à l’organe de contrôle du NTIPC-MB, le comité veut croire que des progrès seront accomplis sans délai pour trouver une solution satisfaisante et prie le gouvernement de fournir des informations à jour sur la situation actuelle des travailleurs licenciés, notamment tout accord de compensation conclu, ainsi que sur l’allégation selon laquelle un syndicat soutenu par la direction aurait de nouveau été créé dans l’hôtel. Le comité prie en outre le gouvernement de l’informer de toute conclusion de l’organe de contrôle du NTIPC-MB à cet égard, ainsi que de toute mesure prise en conséquence.
- 78. En ce qui concerne la modification de l’article 263(g) du Code du travail (devenu l’article 278(g)), le comité prend note de l’indication du gouvernement selon laquelle un projet de loi a été présenté au Congrès visant à limiter l’attribution automatique de compétence à deux situations, l’une concernant la notion de services essentiels de l’OIT déterminée par consultation tripartite et l’autre concernant les services non essentiels à la demande des deux parties impliquées dans le conflit après conciliation obligatoire. En outre, l’ordonnance ministérielle no 40-H-13 a été publiée pour aider à faire passer l’exercice de prise de compétence du critère de «secteur indispensable à l’intérêt national» au critère de «services essentiels» et devrait, selon le gouvernement, faciliter l’adoption au Congrès du projet de loi sur l’exercice de prise de compétence. Tout en prenant dûment note des efforts du gouvernement et des mesures administratives adoptées à cet égard, le comité rappelle que la réforme législative visant à modifier l’article 278(g) du Code du travail est en cours depuis de nombreuses années. Dans ces conditions, le comité s’attend à ce que les modifications législatives soient adoptées dans un très proche avenir et à être tenu informé à cet égard.