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Allégations: Les organisations plaignantes dénoncent une série de violations de la liberté syndicale et du droit de négociation collective au sein d’une entreprise du secteur minier et de plusieurs de ses entreprises contractantes
- 124. La plainte figure dans des communications de la Centrale unitaire des travailleurs de Colombie (CUT) et du Syndicat national des travailleurs du secteur de la mécanique métallique, de l’industrie métallique, de la métallurgie, des chemins de fer et des entreprises de commercialisation et de transport du secteur (SINTRAIME) en date des 9 décembre 2014 et 2 juin 2016.
- 125. Le gouvernement a fait parvenir ses commentaires par des communications en date des 26 octobre 2015, 13 février 2018, 12 février 2019, 14 août 2020 et 17 et 23 février 2021.
- 126. La Colombie a ratifié la convention (no 87) sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, 1948, la convention (no 98) sur le droit d’organisation et de négociation collective, 1949, et la convention (no 154) sur la négociation collective, 1981.
A. Allégations des organisations plaignantes
A. Allégations des organisations plaignantes- 127. Dans leur première communication en date du 9 décembre 2014, les organisations plaignantes allèguent l’existence d’une série de violations de l’exercice de la liberté syndicale au sein de la Drummond Company Inc., entreprise multinationale du secteur minier (ci-après «l’entreprise principale») ainsi que dans plusieurs de ses entreprises contractantes. Les organisations plaignantes indiquent que: i) l’entreprise principale exploite le charbon dans les mines de Pribbenow et El Descanso, situées dans le département de Cesar; ii) l’entreprise General de Equipos de Colombia S.A. GECOLSA (ci après «l’entreprise contractante A») exerce des activités de maintenance des équipements et de soutien aux opérations minières dans les mines de l’entreprise principale; et iii) l’entreprise DIMANTEC LTDA (ci-après «l’entreprise contractante B») exerce des activités de maintenance des équipements et de soutien aux opérations dans l’entreprise principale, mais par le biais d’un contrat commercial avec l’entreprise contractante A. Les organisations plaignantes expliquent que le SINTRAIME compte un grand nombre d’adhérents au sein de l’entreprise contractante B et qu’au moment des faits, il existait une convention collective signée par le SINTRAIME et l’entreprise contractante B, en vigueur du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2013 (ci-après la «convention collective de 2012»).
- 128. Les organisations plaignantes indiquent que le 13 décembre 2013, le SINTRAIME a présenté un cahier de revendications à l’entreprise contractante B et dénoncent le fait que l’entreprise a initialement refusé de négocier avec le syndicat, de sorte qu’elles ont dû déposer une plainte auprès du ministère du Travail pour demander son intervention. Selon les organisations plaignantes, à partir du 9 juillet 2014, une fois la phase de règlement direct épuisée, le SINTRAIME a exercé son droit de grève dans les différentes régions de Colombie où il est présent. Elles dénoncent le fait que, une fois la grève déclarée, l’entreprise contractante B: i) n’a pas permis aux dirigeants syndicaux d’entrer pour inspecter les scellés placés par les inspecteurs du travail sur les machines et les outils utilisés par les travailleurs en grève; ii) a fait venir des travailleurs d’autres entreprises contractantes pour remplacer les travailleurs en grève; iii) a empêché les travailleurs en grève œuvrant dans la ville de Soledad de se placer devant leurs installations, en les harcelant en permanence pour qu’ils s’en retirent; iv) l’entreprise, par l’intermédiaire de superviseurs non syndiqués, a diffusé de fausses informations concernant l’état des négociations entre l’entreprise et le syndicat, et a recueilli des signatures pour demander la levée de la grève; et v) pendant la semaine du 4 au 9 août 2014, la direction de l’entreprise a exercé des pressions illégitimes sur les travailleurs pour qu’ils votent en faveur de la levée de la grève et de la convocation d’un tribunal d’arbitrage. En outre, les organisations plaignantes soulignent que le vote en faveur de la levée de la grève a été caractérisé par l’absence de contrôles lors du vote, la participation de personnel extérieur à l’entreprise contractante B, et la mise à disposition de véhicules par l’employeur pour transporter les votants; en outre, une fois l’ordre de reprise du travail émis en août 2014, l’employeur a interdit aux travailleurs en grève et aux dirigeants du SINTRAIME d’accéder au chantier d’El Cerrejón.
- 129. Les organisations plaignantes ajoutent qu’entre le 31 juillet et le 5 août 2014, durant le débrayage, des tracts ont été distribués par une organisation criminelle dénommée «Los Rastrojos», exigeant que les dirigeants syndicaux mettent fin à la grève et quittent l’entreprise pour éviter toute atteinte à leur vie. Elles soulignent que, bien qu’elles aient signalé ces actes au ministère du Travail, au bureau de la procureure déléguée aux affaires du travail et de la sécurité sociale, au bureau du vice-président et au cabinet du Président de la République, les personnes concernées n’ont pas pu bénéficier de la protection de l’État.
- 130. Dans leur communication en date du 2 juin 2016, les organisations plaignantes allèguent que l’entreprise principale s’est livrée à des actes d’intermédiation illégale du travail afin de réduire le coût de la main-d’œuvre et annuler les droits syndicaux des travailleurs par rapport à l’entreprise principale. Les organisations plaignantes expliquent que, par une décision en date du 28 avril 2014, le ministère du Travail a infligé une amende totale de 3 696 000 pesos colombiens aux entreprises contractantes A et B pour externalisation illégale du travail; les entreprises concernées ont déposé un recours en réexamen. Elles indiquent que, face à la décision de sanction, en décembre 2014, l’entreprise contractante A a modifié son objet social et divisé ses missions, en créant une nouvelle entreprise dans le secteur minier, l’entreprise Relianz Mining Solutions S.A.S. (ci-après «l’entreprise contractante C»), qui, à partir de ce moment, était chargée d’attribuer des contrats à l’entreprise contractante B. En ce qui concerne le recours en réexamen des entreprises, elles soulignent que le 3 juin 2015, le ministère du Travail a révoqué la décision du 28 avril 2014 car, bien qu’il ait reconnu l’existence d’une intermédiation interdite du travail, il a constaté une violation des droits de la défense à l’encontre des entreprises et a ordonné la réouverture complète de la procédure administrative, y compris les enquêtes correspondantes. Les organisations plaignantes indiquent que le 3 décembre 2014, le SINTRAIME a déposé trois plaintes pour intermédiation illégale du travail contre l’entreprise principale et les entreprises contractantes B et C, qui ont ensuite été jointes à l’enquête menée pour l’intermédiation illégale. Le 20 janvier 2016, le ministère du Travail a de nouveau engagé des poursuites contre l’entreprise principale et les entreprises contractantes A et B pour externalisation irrégulière du travail présumée, en vertu de l’article 63 de la loi no 1429 de 2010.
- 131. Les organisations plaignantes ont également dénoncé le licenciement collectif de travailleurs de l’entreprise contractante B. Elles expliquent que le 20 octobre 2015, l’entreprise contractante B a fait savoir par une communication publique que, à partir du 31 décembre 2015, l’entreprise contractante C résilierait les contrats relatifs aux activités de maintenance des machines, étant donné que l’entreprise principale ne l’avait pas retenue dans les appels d’offres pour fourniture de services et que, en conséquence, les contrats des travailleurs de l’entreprise contractante B, y compris ceux des membres du SINTRAIME, seraient résiliés. Elle a également fait savoir qu’à compter de ce moment-là serait mené un processus de transition entre l’entreprise contractante A et l’entreprise ayant remporté l’appel d’offres, à savoir l’entreprise CHM Minería (ci-après «l’entreprise contractante D»). Elles indiquent que lors d’une réunion convoquée le 14 décembre 2015 par le ministère du Travail dans le cadre du licenciement collectif, à laquelle ont assisté les dirigeants du SINTRAIME, l’entreprise contractante B a souligné que le non-renouvellement des contrats était dû aux activités syndicales menées au sein de l’entreprise et a invité les dirigeants du SINTRAIME à encourager la démission des travailleurs de l’entreprise, tandis que l’entreprise contractante C déclarait que ce problème lui était également étranger et qu’il s’agissait d’une question purement commerciale. Les organisations plaignantes dénoncent le fait que, bien que le ministère du Travail ait eu connaissance de tous ces éléments, il n’en n’a pas fait mention dans l’aide-mémoire adressé aux instances centrales de Bogota, raison pour laquelle le 16 décembre 2015, le SINTRAIME a envoyé une lettre au ministre du Travail dénonçant les licenciements et la persécution antisyndicale menés au sein de l’entreprise contractante B.
- 132. Les organisations plaignantes considèrent que le non-renouvellement du contrat commercial avait des visées antisyndicales, puisque celui-ci annulait légalement la possibilité d’assurer la continuité de la convention collective au sein de l’entreprise contractante D et que les membres du SINTRAIME étaient engagés par la même entreprise tout en conservant leurs droits du travail. En outre, elles affirment que le ministère du Travail a manqué à ses obligations d’inspection et de surveillance. Les organisations plaignantes indiquent que, au 27 mai 2016, 360 travailleurs engagés par l’entreprise contractante B avaient subi des pressions pour signer des «lettres de départ volontaire à la retraite», 185 travailleurs avaient été licenciés, et 135 travailleurs avaient été engagés par l’entreprise contractante D. Elles soulignent que, compte tenu de la gravité des faits, l’organisation syndicale a engagé une action en protection contre le ministre du Travail pour son manque de diligence dans les enquêtes sur l’intermédiation illégale du travail signalée, ainsi que contre l’entreprise contractante B pour violation des droits de la défense des syndicalistes dans le cadre des licenciements collectifs. Elles affirment que l’annulation des contrats de travail a eu lieu sans l’autorisation du ministère du Travail de procéder aux licenciements collectifs, ce qui dénoterait une stratégie antisyndicale et des actes de représailles de la part des entreprises. Selon les organisations plaignantes, la première décision de sanction du ministère du Travail contre les entreprises B et C pour externalisation illégale de travail a généré un climat de discrimination antisyndicale contre les membres du SINTRAIME. Néanmoins, l’annulation de cette même sanction par le ministère du Travail a servi de prétexte pour mettre en œuvre des licenciements collectifs qui ont directement touché les membres du SINTRAIME. Les organisations plaignantes soulignent que l’État avait une obligation claire d’enquêter avec diligence sur les actes de discrimination antisyndicale et de les sanctionner, et soulignent que, malgré le fait que l’organisation syndicale plaignante ait déposé plusieurs plaintes en matière de travail, le ministère du Travail n’a sanctionné aucun des comportements décrits.
- 133. Enfin, les organisations plaignantes indiquent que, parallèlement aux événements susmentionnés, le 11 décembre 2015, l’entreprise contractante B a engagé une procédure de licenciement contre des travailleurs ayant participé à une cessation collective d’activités entre le 14 mars et le 3 avril 2013 au sein de l’entreprise Trateccol Ltda (ci-après «l’entreprise E»). Elles expliquent que le 27 novembre 2013, l’entreprise E a fusionné avec l’entreprise contractante B. Cette fusion a entraîné l’extension de la convention collective de 2012 signée entre le SINTRAIME et l’entreprise contractante B aux travailleurs de l’entreprise E (cette convention était en vigueur puisque le tribunal arbitral n’avait pas encore rendu sa sentence). Elles ajoutent que malgré le fait que, le 9 avril 2014, la Chambre de cassation du travail de la Cour suprême de justice a déclaré l’illégalité de la grève de 2013 au sein de l’entreprise E, l’entreprise contractante B a dû respecter la procédure de licenciement prévue par la convention collective de 2012. Selon l’article 5 de la convention collective de 2012, en cas de licenciement pour cause juste, l’entreprise devait entendre les arguments à décharge dans les trois jours ouvrables et les travailleurs licenciés devaient bénéficier de garanties minimales, en particulier d’une assistance syndicale appropriée. Elles soulignent que: i) les séances d’audition ont commencé au moins dix jours après la confirmation par la Cour suprême de justice de l’illégalité de la grève; ii) les convocations aux auditions ont été faites sans que les travailleurs ne puissent bénéficier des garanties minimales prévues par la convention collective de travail: ils n’ont pas disposé d’un délai suffisant pour présenter leurs arguments de défense, prendre connaissance des charges à leur encontre ou convoquer un comité syndical pour les accompagner dans la procédure; iii) l’entreprise contractante B n’a pas demandé l’intervention immédiate du ministère du Travail pour identifier les travailleurs qui devaient être licenciés; et iv) l’entreprise a profité de la situation pour procéder à d’autres types de licenciements de travailleurs syndiqués pour diverses violations alléguées, telles que le non-respect des consignes de sécurité ou la falsification de certificats médicaux d’incapacité de travail.
B. Réponse du gouvernement
B. Réponse du gouvernement- 134. Par des communications en date des 26 octobre 2015, 13 février 2018, du 12 février 2019 et 14 août 2020, le gouvernement présente ses observations, les observations de l’entreprise principale et celles des entreprises contractantes A et B. Premièrement, en ce qui concerne le refus allégué de l’entreprise contractante B de négocier le cahier de revendications avec l’entreprise contractante B, le gouvernement a transmis les observations de cette dernière, qui a nié avoir refusé de négocier le cahier de revendications avec le SINTRAIME. Selon l’entreprise concernée, le SINTRAIME a présenté un premier cahier de revendications le 1er novembre 2013 et celui-ci a été retiré par l’organisation syndicale le 10 décembre 2013, après la décision des travailleurs de convoquer un tribunal d’arbitrage. Ce même jour, le SINTRAIME a déposé un nouveau cahier de revendications comportant des changements minimes, et l’entreprise en a informé par écrit le ministère du Travail afin que ce dernier puisse déterminer la bonne façon de procéder et dire si l’entreprise était obligée d’entamer des négociations sur le deuxième cahier. Le gouvernement, pour sa part, soutient qu’il n’y a eu aucun refus de la part de l’entreprise contractante B de négocier avec l’organisation syndicale ni aucune mauvaise foi de la part de l’entreprise concernée, puisque celle-ci venait de passer par une phase de règlement direct et était convaincue à tort qu’elle n’était pas tenue de négocier une nouvelle fois.
- 135. Deuxièmement, le gouvernement communique les observations de l’entreprise contractante B concernant les actes d’ingérence allégués pendant le déroulement de la grève déclarée par le SINTRAIME en juillet 2014. Cette entreprise déclare que: i) le vote qui a eu lieu entre le 26 et le 28 juin 2014, pour déterminer si le conflit collectif avec le SINTRAIME devait conduire à la grève ou au tribunal d’arbitrage, a été entaché d’irrégularités: l’organisation syndicale n’a pas permis l’accompagnement du vote par le ministère du Travail, un lieu indépendant et secret n’a pas été mis en place pour procéder au vote, l’urne n’avait pas de scellé au début de la journée du vote et certains travailleurs de l’entreprise n’ont pas été appelés à voter; ii) il ressort du procès-verbal du ministère du Travail que, lors des votes de juin 2014, les membres du SINTRAIME ont commis des actes de contrainte, proféré des menaces et exercé des violences à l’encontre des travailleurs qui souhaitaient voter pour que le conflit collectif soit soumis au tribunal arbitral; iii) dès le début de la grève, le 9 juillet 2014, les dirigeants du SINTRAIME ont empêché le personnel syndiqué et non syndiqué de pénétrer dans les installations de l’entreprise principale et des entreprises contractantes A et B; iv) les membres du SINTRAIME ont entravé les activités du personnel d’autres entreprises contractantes et procédé à des blocages des routes d’accès aux installations et projets miniers des entreprises, en agressant et en menaçant les travailleurs qui voulaient fournir leurs services; v) en raison des nombreuses irrégularités évoquées, l’entreprise a déposé une demande de déclaration d’illégalité de la grève et, le 16 novembre 2016, la Chambre de cassation du travail de la Cour suprême de justice s’est prononcée en faveur de l’entreprise contractante B; vi) à aucun moment les travailleurs en grève n’ont été remplacés; les entreprises bénéficiant des services de l’entreprise contractante B ont simplement engagé d’autres entreprises; vii) en ce qui concerne la levée de la grève, ces actions ont été menées par un groupe de travailleurs non syndiqués qui n’avaient pas été appelés à voter; viii) concernant les allégations selon lesquelles l’entreprise contractante B n’a pas permis à la majorité des travailleurs d’entrer sur le chantier d’El Cerrejón une fois la grève levée, elle conteste les faits tels qu’exposés par les organisations plaignantes et souligne que les personnes affectées aux contrats commerciaux en cours sont entrées sans problème pour effectuer leur travail; et ix) le retard dans la constitution du tribunal arbitral est dû à la notification tardive par le SINTRAIME de la nomination de son arbitre.
- 136. Le gouvernement communique également les observations de la Direction territoriale du ministère du Travail du département de l’Atlántico, qui indique que: i) le 9 juillet 2014, le ministère du Travail a envoyé des inspecteurs pour enquêter sur les plaintes déposées par l’organisation syndicale et, n’ayant constaté aucune violation du droit de grève, a déclaré l’enquête close; ii) en ce qui concerne le refus allégué de l’entreprise contractante B d’autoriser les travailleurs en grève à se placer devant les locaux de l’entreprise contractante A, elle indique que, bien que les tentes aient été situées dans les locaux de l’entreprise contractante A et que cette dernière ait demandé qu’elles soient déplacées car elles gênaient l’entrée de ses travailleurs, les autorités sont intervenues en vue de s’assurer que les travailleurs demeurent sur le site susmentionné; iii) en ce qui concerne les allégations selon lesquelles la direction de l’entreprise contractante B aurait exercé des pressions illégitimes sur les travailleurs pour qu’ils votent en faveur de la levée de la grève, il ressort de la décision du 15 août 2014 que les inspecteurs du travail étaient présents et ont veillé à ce que les travailleurs votent librement et spontanément, et une fois qu’il a été constaté que les travailleurs de l’entreprise contractante B avaient voté pour la levée de la grève, les scellés ont été retirés, ce dont les dirigeants syndicaux du SINTRAIME ont été informés. Le gouvernement estime que le ministère du Travail a mis en œuvre les mesures administratives réclamées par le SINTRAIME en rapport avec le refus allégué de négocier, a procédé au scellement des installations lorsque la grève a été déclarée et a mis en place le tribunal d’arbitrage lorsque les travailleurs en ont décidé ainsi. Il indique également que l’organisation syndicale concernée n’a fourni aucune preuve concernant les irrégularités alléguées durant la levée de la grève, la convocation du tribunal d’arbitrage ou la violation alléguée du droit d’association ou de négociation collective.
- 137. En ce qui concerne le processus de négociation du deuxième cahier de revendications, le gouvernement indique que, par décision du 15 août 2014, le vice-ministre des Relations de travail a ordonné la convocation d’un tribunal arbitral pour trancher le conflit entre le SINTRAIME et l’entreprise contractante B et, tout en reconnaissant qu’il y a eu des retards, précise que ceux-ci étaient dus à la démission de l’un des arbitres et au désaccord entre les parties concernant la nomination du troisième arbitre. Il indique en outre que, par un jugement du 8 février 2017, la Cour suprême de justice a rejeté le recours en annulation formé par les parties contre la sentence arbitrale rendue par le tribunal d’arbitrage obligatoire, et que, à la suite de ce jugement, l’entreprise a payé aux travailleurs membres du SINTRAIME les ajustements ordonnés. Le gouvernement souligne également que le 22 mars 2019, une nouvelle convention collective de deux ans a été signée entre l’entreprise contractante B et le SINTRAIME, avec effet du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2019.
- 138. Troisièmement, en ce qui concerne les menaces alléguées de l’organisation criminelle dénommée «Los Rastrojos», le gouvernement transmet les observations de l’entreprise contractante B, qui nie avoir une quelconque relation avec une quelconque organisation criminelle. Il transmet également les observations de l’Unité nationale de protection (UNP). L’UNP déclare avoir pris une série de mesures en faveur des dirigeants et membres du SINTRAIME: i) M. William Eduardo Kerguelen González n’a pas fourni les documents nécessaires pour activer le dispositif de protection; le commandant du Département de Cesar a néanmoins été prié d’organiser des rondes préventives à son domicile pour une durée de quatre mois; ii) des mesures ont été adoptées en faveur de MM. Rafael Ojeda Castro, Sergio Becerra Moreno et Ismael Avedaño, qui leur ont été communiquées par le Comité d’évaluation des risques et de recommandation des mesures (CERREM); iii) en ce qui concerne M. Rafael de la Hoz Fontalvo, la temporalité du cas a été réévaluée et le cas était en attente d’examen et de signature par le directeur du CERREM; et iv) concernant M. Nelson Enrique Mendoza Jiménez , aucune mesure de protection n’a été mise en œuvre en raison du niveau de risque évalué.
- 139. Quatrièmement, le gouvernement transmet les observations de l’entreprise principale et des entreprises contractantes A et B concernant les allégations d’intermédiation illégale du travail par les entreprises susmentionnées pour se soustraire au respect des normes du travail et des droits syndicaux. Selon l’entreprise principale: i) les entreprises contractantes et sous-traitantes citées par les organisations plaignantes n’ont pas été constituées dans le but spécifique de conclure des contrats avec l’entreprise principale; ces entreprises interviennent depuis longtemps sur le marché et possèdent un solide réseau de clients variés dans différents secteurs d’activité; ii) l’objet social de l’entreprise principale est différent de celui des entreprises contractantes; iii) les organisations plaignantes, en indiquant que le SINTRAIME a signé une convention collective avec l’entreprise contractante B, reconnaissent expressément la qualité d’employeur de cette entreprise et apportent une preuve de la jouissance des droits à la liberté syndicale et à la négociation collective des travailleurs de cette entreprise; iv) l’entreprise principale ne sous-traite pas ses propres activités commerciales, mais fait appel à des entreprises pour l’entretien et la réparation de certains des équipements qu’elle utilise, compte tenu du très haut niveau de spécialisation et de l’expérience particulière requis pour réaliser ces travaux; v) les opérations effectuées par les entreprises contractantes ont été réalisées avec une totale autonomie administrative, technique et financière de la part de ces dernières, sans que l’entreprise principale n’ait une quelconque influence sur le recrutement du personnel utilisé par ces entreprises; vi) en 2012, l’entreprise principale et les entreprises contractantes A et B ont fait l’objet d’une première enquête, à la demande du SINTRAIME, pour intermédiation illégale du travail présumée, et en 2013 le ministère du Travail a ordonné le classement de la plainte pour absence de fondement à une sanction; vii) en 2014, une autre enquête a été menée pour la même raison, contre les mêmes entreprises et déclenchée par la même organisation plaignante, et la Direction territoriale de l’Atlántico, a rendu une décision le 19 octobre 2015 par laquelle elle a acquitté les entreprises concernées; viii) en 2017, de manière irrégulière, le ministère du Travail a de nouveau mené une enquête contre l’entreprise principale, et par une nouvelle décision, l’entreprise a été sanctionnée; ix) l’entreprise a déposé des recours en réexamen et en appel auprès du ministère du Travail et a ensuite introduit une action en annulation et en rétablissement des droits devant le tribunal administratif contre les différentes décisions rendues par le ministère du Travail; x) en mai 2017, le tribunal administratif de Cesar a déclaré l’action intentée recevable et celle-ci est en cours de résolution; et xi) à ce jour, il y a huit syndicats actifs dans l’entreprise et plusieurs conventions collectives sont en vigueur, ce qui atteste du respect de la liberté syndicale par l’entreprise .
- 140. En ce qui concerne les allégations d’intermédiation illégale du travail, l’entreprise contractante A déclare que: i) le processus de scission qui a conduit à la création de l’entreprise contractante C n’avait pas un but antisyndical, mais visait plutôt à adapter l’entreprise aux réalités et aux besoins de chacun des marchés auxquels elle participait, en laissant à l’entreprise contractante A l’importation des machines, et en divisant le reste de ses activités en sociétés afin d’assurer une plus grande simplicité, une plus grande efficacité et une meilleure gestion de la structure des opérations; ii) depuis le 1er janvier 2015, chacune des entreprises créées exerce son objet social, ses activités commerciales, salariales et administratives de manière autonome et indépendante, en tant que personne morale totalement indépendante; iii) l’entreprise contractante A n’a pas contracté et ne contracte pas d’activités relevant des missions de l’entreprise principale, sa participation dans la chaîne de valeur est clairement définie, les relations commerciales avec l’entreprise principale se sont limitées à l’entretien et à la réparation d’une série d’équipements et de machines qui nécessitent du personnel et des machines spécialisés; iv) la Direction territoriale de l’Atlántico du ministère du Travail a enquêté sur les faits et a exonéré l’entreprise contractante A et les autres entreprises défenderesses des accusations indiquées; v) l’entreprise a une longue et fructueuse histoire de relations syndicales, plusieurs syndicats sont actifs en son sein, et elle entretient d’excellentes relations direction-salariés; et vi) depuis 2016, une sentence arbitrale est appliquée avec le SINTRAIME, sans que, à ce jour, l’organisation syndicale n’ait présenté une réclamation ou une plainte quelconque aux autorités judiciaires ou du travail.
- 141. L’entreprise contractante B souligne pour sa part que le SINTRAIME, en reconnaissant expressément dans l’article 3 de la convention collective de 2012 que cette entreprise conclut et exécute des contrats commerciaux dans le cadre de son activité régulière, et en ne formulant aucune observation quant à leurs effets sur la liberté syndicale, a implicitement accepté le fait que ces contrats ne violent pas les droits des travailleurs et a reconnu le statut d’employeur de l’entreprise contractante B, ainsi que la véritable nature entrepreneuriale de la société. En outre, elle souligne que, par décision du 12 octobre 2017, le ministère du Travail a décidé de lever la sanction imposée en première instance à l’entreprise contractante B.
- 142. Dans ses observations, le gouvernement déclare que l’objet social des entreprises susmentionnées est totalement différent, de sorte que le recours par l’entreprise principale à d’autres entreprises contractantes n’impliquait aucune activité permanente propre à l’entreprise principale: i) l’objet social de l’entreprise principale est la prospection, le transport et l’exploitation du charbon; ii) elle est essentiellement engagée dans la commercialisation et la représentation de marques de machines lourdes pour différents secteurs, activités exercées directement, avec une organisation et des ressources administratives et commerciales propres, formellement et directement liées par les différentes modalités des contrats de travail prévues par le droit du travail; et iii) l’entreprise contractante C est spécialisée dans la fourniture de services d’entretien, de réparation, de reconstruction, de fabrication, de montage et d’assemblage de tout type de machines. Le gouvernement note que, selon l’article 34 du Code du travail, sont considérées comme des entreprises contractantes indépendantes les personnes physiques ou morales qui contractent l’exécution d’un ou de plusieurs travaux ou la prestation de services au profit de tiers, pour un prix donné, en assumant tous les risques, pour les réaliser avec leurs propres moyens et avec une liberté et une autonomie techniques et de gestion. Il souligne également que, en vertu de l’article 333 de la Constitution politique, les entrepreneurs en Colombie jouissent du droit à la liberté d’entreprise qui leur permet d’exercer librement leur activité, dans les limites du bien commun. Les entreprises sont donc habilitées à se consacrer amplement à leur objet social par le biais de la liberté contractuelle, en respectant les règles régissant le travail décent, c’est-à-dire en offrant toutes les garanties légales.
- 143. Le gouvernement déclare, en ce qui concerne les procédures menées par le ministère du Travail en rapport avec les allégations d’intermédiation illégale du travail, que: i) le 21 novembre 2013, le vice-ministre des Relations de travail et de l’Inspection a chargé l’Unité des enquêtes spéciales d’ouvrir une enquête préliminaire sur les allégations d’intermédiation illégale du travail; ii) par résolution du 27 avril 2015, la Coordination de l’Unité des enquêtes spéciales a ordonné de sanctionner les entreprises contractantes A et B pour intermédiation interdite du travail, décision qui a ensuite été contestée par les entreprises; iii) par décision du 3 juin 2015, la Coordination de l’Unité des enquêtes spéciales a annulé l’acte administratif et a ordonné à la place la réouverture de l’enquête dans les deux entreprises contractantes; iv) le SINTRAIME a déposé des plaintes administratives auprès du ministère du Travail contre l’entreprise principale et les entreprises contractantes A et B, qui ont ensuite été jointes dans l’enquête contre les différentes entreprises; v) le 8 mars 2016, des accusations ont de nouveau été portées contre les trois entreprises faisant l’objet de l’enquête et la procédure administrative de sanction a été ouverte pour des allégations d’externalisation illégale de la main-d’œuvre et d’embauche abusive d’entreprises de services temporaires; vi) le 23 septembre 2016, l’autorité administrative a ordonné des sanctions contre l’entreprise principale et les entreprises contractantes A et B, à la suite desquelles les entreprises concernées ont exposé leurs arguments à décharge respectifs; vii) par une décision en date du 19 septembre 2017, l’autorité administrative a statué sur le recours en réexamen et il a été ordonné que le dossier soit envoyé à la Direction de l’inspection, du suivi, du contrôle et de l’aménagement du territoire afin de statuer sur le recours en appel déposé de manière subsidiaire; et viii) par une décision en date du 12 octobre 2017, le ministère du Travail a décidé de lever la sanction infligée à l’entreprise contractante B en première instance, et cette dernière a été acquittée de tous les chefs d’accusation relatifs à l’intermédiation illégale du travail alléguée.
- 144. Cinquièmement, le gouvernement transmet les observations de l’entreprise contractante B concernant l’allégation relative au licenciement antisyndical des travailleurs de l’entreprise, à compter du 11 décembre 2015, par suite de l’annulation du contrat commercial signé entre les entreprises contractantes B et C. À cet égard, il déclare que: i) la décision de l’entreprise contractante C de ne pas continuer à utiliser ses services a gravement affecté l’entreprise et entraîné des difficultés financières et administratives, qui ont modifié l’équilibre économique et financier de l’entreprise et ont eu des conséquences sur la composition démographique des travailleurs de l’entreprise; ii) les travailleurs syndiqués comme les travailleurs non syndiqués ont été affectés par l’annulation du contrat commercial, ce qui confirme qu’il ne s’agissait pas d’un acte de discrimination antisyndicale; et iii) il s’agissait d’un motif légal de résiliation des contrats de travail, car celle-ci ne résultait pas d’une décision unilatérale de l’employeur, mais de la prise en considération de faits objectifs, indépendants de la volonté de l’entreprise. Le gouvernement, pour sa part, fait valoir qu’il ressort des différentes décisions relatives aux actions en protection intentées par les travailleurs concernés à la suite de la rupture de leur contrat de travail que les tribunaux ont considéré que l’action en protection n’était pas un mécanisme approprié et que les travailleurs devaient s’en remettre à la justice ordinaire; il souligne enfin que les organisations plaignantes n’ont pas fourni la preuve qu’elles avaient eu recours à cette instance.
- 145. Sixièmement, le gouvernement transmet les observations de l’entreprise contractante B concernant le licenciement de travailleurs de l’entreprise E, qui a ensuite fusionné avec l’entreprise contractante B, licenciements qui, selon les allégations des organisations plaignantes, auraient violé la convention collective du travail de 2012 et auraient un caractère antisyndical. L’entreprise contractante B déclare que: i) la décision rendue par la Cour suprême de justice déclarant l’illégalité de la cessation des activités qui a eu lieu entre le 14 mars et le 3 avril 2013 est devenue ferme le 7 décembre 2015; ii) l’entreprise a rempli l’obligation qui lui incombe en vertu du décret no 2164 de 1959 de soumettre à l’inspecteur du travail, dans le cadre d’une grève déclarée illégale, une liste des travailleurs qu’elle juge nécessaire de licencier pour avoir participé à la suspension du travail ou y être intervenu; iii) la procédure prévue par la convention collective pour la convocation à la présentation des arguments à décharge a été respectée à l’égard de tous les travailleurs, dont les droits à la défense et à une procédure régulière ont été garantis; iv) l’article 5 de la convention collective de 2012 précise que la présentation des arguments à décharge par le travailleur doit avoir lieu dans les trois jours ouvrables suivants, et ce délai a été respecté puisque la convention précitée n’a pas fixé de délai minimum pour la tenue de l’audience, de sorte que rien n’empêchait que les procédures respectives soient menées à bien le jour même où les travailleurs et le SINTRAIME ont été informés; v) contrairement à ce qui a été allégué par les organisations plaignantes, il ressort du procès-verbal de la présentation des arguments à décharge que les travailleurs concernés ont pu bénéficier de la présence, de la participation et de l’accompagnement des dirigeants syndicaux; vi) les faits dénoncés ont été portés à l’attention des tribunaux compétents pour examiner les recours en protection, et ont abouti à des jugements en faveur de l’entreprise contractante B tant en première qu’en deuxième instance; et vii) en ce qui concerne les poursuites engagées par des travailleurs demandant leur réintégration, l’entreprise contractante B déclare que les cas sont en instance. Pour sa part, le gouvernement indique que, dans le cadre d’une action en protection introduite devant la première chambre du tribunal pénal municipal compétent en matière de respect des garanties fondamentales de Soledad Atlántico, cette juridiction a considéré qu’aucune volonté de persécution contre l’entité syndicale n’a été constatée, qu’aucune preuve n’a été apportée que les travailleurs licenciés exerçaient un rôle particulièrement actif ou de direction au sein du syndicat, et que le syndicat disposait d’autres moyens de défense judiciaire appropriés et adéquats dans le cadre de la juridiction du travail ordinaire. En rapport avec ce qui ce qui précède, le gouvernement déclare que l’organisation syndicale n’a pas fourni de preuves, que cette instance n’avait pas connaissance que les travailleurs licenciés avaient saisi la justice ordinaire, et qu’il n’était pas précisé quels travailleurs avaient été licenciés. Le gouvernement rappelle que le Comité de la liberté syndicale a indiqué qu’il ne lui appartenait pas de statuer sur la rupture des contrats de travail, sauf dans la mesure où ils impliquent une discrimination antisyndicale. En ce qui concerne l’allégation selon laquelle l’entreprise contractante B n’a pas demandé au ministère du Travail d’intervenir pour identifier les travailleurs ayant participé à la cessation d’activités déclarée illégale, le gouvernement indique que la Cour constitutionnelle a estimé qu’il n’est pas nécessaire d’engager une procédure préalable devant le ministère du Travail pour licencier un travailleur ayant participé à une cessation d’activités déclarée illégale. L’employeur doit uniquement épuiser une procédure préalable afin d’analyser le comportement de l’employé, garantir son droit à la défense et à une procédure régulière, et souligne qu’il n’est pas nécessaire qu’une telle procédure soit menée par le ministère du Travail. Le gouvernement rappelle que l’entreprise contractante B a mené une procédure de licenciement contre les travailleurs ayant participé à la cessation d’activités et que, comme le soulignent les organisations syndicales dans leurs allégations, les travailleurs ont été informés individuellement de leur licenciement et ont reçu individuellement une date de convocation, ce qui montre que l’entreprise a respecté la procédure préalable visée par la Cour constitutionnelle.
- 146. Par des communications supplémentaires reçues le 17 et 23 février 2021, le gouvernement soumet d’abord des commentaires actualisés des entreprises contractantes A et B et de l’entreprise principale. L’entreprise contractante A, après avoir réaffirmé son engagement en faveur de la liberté syndicale, souligne en particulier que: i) elle compte des employés associés à quatre organisations syndicales différentes, dont trois sont des syndicats industriels et une est un syndicat d’entreprise; ii) la sentence arbitrale rendue le 1er octobre 2015 à la suite des négociations avec le SINTRAIME reste en vigueur et constitue actuellement une source d’avantages pour un travailleur de l’entreprise principale; iii) les négociations menées avec SINTRAINDUSTRIA, d’une part, et SINTRAMETAL, d’autre part, conduisent à la création de tribunaux d’arbitrage ; et iv) en octobre 2019 a été fondée le syndicat des travailleurs de GECOLSA-SEGECSA avec lequel la première convention collective a été signée en septembre 2020. L’entreprise contractante B, réaffirmant également la pleine application des conventions nos 87 et 98 en son sein, indique pour sa part que: i) elle a signé une nouvelle convention collective avec le SINTRAIME pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2020; ii) la phase de négociation pour le renouvellement de cette convention a été ouverte le 11 février 2021; iii) elle a également signé une autre convention collective avec l’organisation syndicale SINTRAPCA pour la période du 1er avril 2017 au 31 mars 2020; et iv) n’ayant pas abouti à un accord, les négociations pour le renouvellement de la convention avec SINTRAPCA, suite à la décision de SINTRAPCA à cet égard et conformément à la législation en vigueur, le Ministère du Travail doit achever la formation d’un tribunal d’arbitrage. L’entreprise principale déclare que: i) il y a actuellement neuf organisations syndicales au sein de l’entreprise, avec un taux de syndicalisation de 63,86 pour cent, ce qui est bien supérieur à la moyenne nationale (5 pour cent), ce qui démontre le plein respect de la liberté syndical au sein de l’entreprise; ii) l’entreprise a signé des conventions collectives avec huit de ces organisations.
- 147. Le gouvernement poursuit en affirmant qu’il n’y a pas eu violation des conventions et des principes de l’OIT sur la liberté syndicale dans le cas présent, que les différentes entreprises mentionnées ont des conventions collectives en vigueur et que, en ce qui concerne les faits allégués, le ministère du Travail a agi avec diligence pour faire respecter la législation du travail.
C. Conclusions du comité
C. Conclusions du comité- 148. Le comité observe que le présent cas concerne des allégations de violations de la liberté syndicale au sein d’une entreprise principale et de plusieurs de ses sous-traitants opérant dans le secteur minier: l’entreprise contractante A (qui, selon le gouvernement, est principalement engagée dans la commercialisation et la représentation de marques de machines lourdes pour différents secteurs, et qui est responsable de l’entretien des équipements et du soutien aux opérations minières dans les mines de l’entreprise principale), l’entreprise contractante B (qui est responsable des activités d’entretien, de réparation et de construction au sein de l’entreprise principale, par le biais d’un contrat commercial avec l’entreprise contractante A et, par la suite avec l’entreprise contractante C), et l’entreprise contractante C (qui résulte du processus de scission de l’entreprise contractante A en décembre 2014). Le comité observe que, dans ce contexte, les organisations plaignantes allèguent les violations suivantes: i) le refus par l’entreprise contractante B de négocier une nouvelle convention collective avec le SINTRAIME; ii) dans le cadre d’une action de grève, divers actes d’ingérence de l’entreprise contractante B, y compris l’embauche de travailleurs pour remplacer les travailleurs en grève et des actes de coercition; iii) des menaces de mort proférées par une organisation criminelle contre des membres et des dirigeants du SINTRAIME visant à mettre fin à la grève et la passivité des autorités publiques face à ce fait; iv) une intermédiation illégale du travail visant à réduire le coût de la main-d’œuvre et à empêcher le plein exercice des droits syndicaux par les travailleurs des entreprises contractantes par rapport à l’entreprise principale; v) dans le cadre d’une restructuration et de l’annulation du contrat commercial entre les entreprises contractantes B et C, le licenciement antisyndical massif de travailleurs de l’entreprise contractante B; et vi) le caractère antisyndical du licenciement par l’entreprise contractante B de syndicalistes ayant participé à une grève au sein d’une entreprise qui a ensuite fusionné avec l’entreprise contractante B et la violation des règles de procédure établies dans la convention collective de l’entreprise.
- 149. En ce qui concerne le refus allégué de l’entreprise contractante B de négocier une nouvelle convention collective, le comité observe qu’il ressort des différents éléments présentés par les parties que, au moment des faits, une convention collective était en vigueur entre le SINTRAIME et l’entreprise contractante B, qui était valable du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2013. Il observe que les organisations plaignantes et le gouvernement soulignent que: i) après une première tentative infructueuse du SINTRAIME de négocier un premier cahier de revendications, l’organisation syndicale a présenté un deuxième cahier de revendications à l’entreprise contractante B afin de négocier une nouvelle convention collective; ii) entre le 28 et le 30 juin 2014, le SINTRAIME a organisé un vote pour décider si le conflit conduirait à une grève ou à un tribunal d’arbitrage; iii) le 9 juillet 2014, une fois toutes les étapes de règlement direct épuisées, le SINTRAIME a déclenché une grève; iv) par la suite, un groupe de travailleurs a voté pour la levée la grève et la mise en place du tribunal d’arbitrage; v) le 15 août 2015, le vice-ministre des Relations de travail et de l’Inspection a ordonné la convocation d’un tribunal d’arbitrage et, malgré plusieurs retards attribués aux deux parties, le 15 février 2016, le tribunal d’arbitrage a rendu une sentence arbitrale valable jusqu’au 31 décembre 2017. Le comité observe que deux conventions collectives ont ensuite été signée entre l’entreprise contractante B et le SINTRAIME, la première avec effet du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2019 et la seconde du 1er janvier au 31 décembre 2020, et des négociations sont en cours pour la renouveler. Étant donné que le cahier de revendications auquel il est fait référence dans le présent cas a donné lieu à une décision arbitrale dont l’application n’a pas été contestée par les organisations plaignantes et que de nouvelles conventions collectives ont ensuite été conclues entre les parties, et, en l’absence de tout élément supplémentaire de la part des organisations plaignantes, le comité ne poursuivra pas l’examen de cette allégation.
- 150. En ce qui concerne les allégations d’ingérence de l’entreprise contractante B dans le cadre de la grève menée par le SINTRAIME entre le 9 juillet et le 15 août 2014, le comité constate que: i) d’une part, les organisations plaignantes dénoncent des actes d’ingérence et d’intimidation suite à la déclaration de la grève le 9 juillet 2014 (interdiction d’accès des représentants du SINTRAIME aux locaux de l’entreprise, remplacement de travailleurs en grève, harcèlement des travailleurs en grève), ainsi que lors des actions visant à mettre fin à la grève (diffusion de fausses informations sur l’état des négociations entre l’entreprise et le syndicat, collecte de signatures pour demander la levée de la grève, intimidation de travailleurs par la direction de l’entreprise pour qu’ils votent en faveur de la levée de la grève, irrégularités lors du vote pour la levée de la grève, mise à disposition de véhicules par l’employeur pour transporter les votants; enfin, à la suite de l’ordre de reprise du travail, interdiction d’accès au chantier pour les travailleurs en grève et les responsables syndicaux); ii) d’autre part, l’entreprise contractante B déclare qu’il y a eu des irrégularités dans le vote tenu entre le 26 et le 28 juin 2014 par lequel les travailleurs devaient décider si le conflit conduirait à un tribunal d’arbitrage ou à une grève (absence d’accompagnement du vote par le ministère du Travail, non-convocation de tous les travailleurs, et actes de contrainte, menaces et violences à l’encontre des travailleurs qui voulaient que le conflit collectif soit soumis au tribunal d’arbitrage), et qu’il y a eu des excès dans l’exercice du droit de grève (les grévistes auraient bloqué les voies d’accès des travailleurs non syndiqués aux projets et installations minières des entreprises contractantes, en menaçant les travailleurs qui voulaient fournir leurs services); et iii) le gouvernement souligne que, au début de la grève, le ministère du Travail a envoyé des inspecteurs pour enquêter sur les plaintes déposées par l’organisation syndicale et que, ne constatant aucune irrégularité, il a déclaré l’enquête close; il indique en outre qu’il ressort de la décision du ministère du Travail du 15 août 2014 que les inspecteurs étaient présents lors du vote au cours duquel il a été décidé de lever la grève et qu’ils ont veillé à ce que les travailleurs votent librement et volontairement. Le comité prend note des versions contradictoires des parties en ce qui concerne la commission alléguée d’actes d’ingérence et de violence lors des votes pour déclarer et lever la grève, ainsi que lors de la cessation des activités. Le comité observe également que, à la demande de l’entreprise contractante B et par décision du 16 novembre 2016, la Chambre de cassation du travail de la Cour suprême de justice a déclaré la grève illégale, estimant que, en vertu de l’article 444 du Code du travail, l’organisation syndicale, du fait qu’elle était minoritaire, devait recueillir la majorité des voix des travailleurs de l’entreprise susmentionnée avant de procéder à un blocage des activités. Dans ces conditions, le comité ne poursuivra pas l’examen de cette allégation.
- 151. En ce qui concerne les allégations de menaces de mort par une organisation criminelle dénommée «Los Rastrojos», le comité prend note des allégations des organisations plaignantes selon lesquelles, pendant le débrayage qui a eu lieu entre le 31 juillet et le 5 août 2014, des tracts ont été distribués pour demander aux dirigeants syndicaux de mettre fin à la grève et que, bien que ces actes aient été signalés aux autorités compétentes, les dirigeants menacés n’ont pas bénéficié de la protection de l’État avant décembre 2014. Le comité prend note de la liste des mesures prises par l’Unité nationale de protection, communiquée par le gouvernement, en faveur de MM. Rafael Ojeda Castro, M. Sergio Becerra Moreno et M. Ismael Avedaño. Il prend également note des indications selon lesquelles M. William Eduardo Kerguelen n’a pas fourni la documentation nécessaire pour réactiver la protection et que, en ce qui concerne M. Nelson Enrique, aucune mesure de protection n’a été mise en œuvre en vertu du niveau de risque évalué. Observant que le gouvernement ne fournit pas d’informations sur l’ouverture éventuelle d’une enquête sur ces menaces de mort, le comité rappelle que l’exercice des droits syndicaux est incompatible avec tout type de violence ou de menace et qu’il appartient aux autorités de diligenter une enquête dans les plus brefs délais et, le cas échéant, de sanctionner tout acte de cette nature. [Voir Compilation des décisions du Comité de la liberté syndicale, sixième édition, 2018, paragr. 88.]
- 152. En ce qui concerne les allégations d’intermédiation illégale du travail, le comité comprend, sur la base des informations fournies par les organisations plaignantes et le gouvernement, que: i) les entreprises contractantes ont été sanctionnées une première fois le 27 avril 2014 pour des actes d’intermédiation illégale du travail, à la suite de quoi les entreprises concernées ont introduit un recours en réexamen; ii) en décembre de la même année, l’entreprise A a modifié son objet social et divisé ses missions, en créant l’entreprise C; iii) par décision du 3 juin 2015, le ministère du Travail s’est prononcé en faveur des entreprises et a ordonné la reprise des enquêtes correspondantes; iv) le 20 janvier 2016, le ministère du Travail a de nouveau engagé des poursuites contre l’entreprise principale et les entreprises contractantes pour intermédiation illégale du travail; v) bien qu’une nouvelle sanction ait été initialement infligée par le ministère du Travail (décision du 23 septembre 2016), l’entreprise contractante B a ensuite été acquittée (décision du 12 octobre 2017). Compte tenu de ce qui précède, le comité estime nécessaire de souligner qu’il ne ressort pas des décisions du ministère du Travail ni des rapports administratifs de l’inspection du travail communiqués par les parties que les actions intentées par le SINTRAIME pour faire déclarer irrégulières les activités d’intermédiation du travail aient mis en évidence l’existence d’une motivation antisyndicale présumée. Le comité rappelle qu’il est compétent pour traiter des cas d’atteintes à la liberté syndicale et non des cas d’abus en matière d’intermédiation du travail ou d’utilisation abusive de contrats temporaires, même si de nombreux travailleurs sont concernés par ces situations, et qu’il n’est appelé à se prononcer que sur les allégations présentées par l’organisation plaignante qui établissent un lien entre les cas en question et le fait que les travailleurs concernés soient affiliés à un syndicat ou participent à des activités syndicales [voir Compilation, paragr. 37]. Compte tenu de ce qui précède, le comité ne poursuivra pas l’examen de cette allégation.
- 153. En ce qui concerne l’allégation relative à la motivation antisyndicale de l’annulation du contrat commercial signé entre les entreprises B et C et au caractère antisyndical des licenciements qui ont eu lieu par la suite au sein de l’entreprise B, le comité note que les organisations plaignantes affirment que, à partir du mois de décembre 2015, un grand nombre de travailleurs de l’entreprise contractante B, qui comptait une forte présence syndicale, ont été licenciés. Il note également que, selon les organisations plaignantes, l’annulation du contrat commercial visait à annuler juridiquement la possibilité de donner une continuité à la convention collective dans l’entreprise ayant remporté l’appel d’offres et à empêcher les membres du SINTRAIME d’être embauchés par la nouvelle entreprise tout en conservant leurs droits au travail. Le comité note que les organisations plaignantes allèguent en outre que: i) la résiliation des contrats de travail a eu lieu sans l’autorisation du ministère du Travail; ii) la procédure convenue dans la convention collective signée entre le SINTRAIME et l’entreprise contractante B n’a pas été respectée; iii) la première décision de sanction du ministère du Travail pour sous-traitance illégale de main-d’œuvre aurait créé un climat de discrimination antisyndicale à l’encontre des membres du SINTRAIME; et iv) le ministère du Travail aurait manqué à ses obligations d’inspection et de contrôle en ne répondant pas à une plainte déposée le 16 décembre 2015 auprès de cette institution pour licenciements et persécution antisyndicale dans le cadre de l’annulation du contrat commercial signé entre les entreprises contractantes B et C. Le comité note que, pour sa part, l’entreprise contractante B déclare, dans ses observations, que la décision de l’entreprise contractante C d’annuler le contrat commercial avec son entreprise a eu des répercussions financières importantes et que cette action a touché à la fois les travailleurs syndiqués et non syndiqués. Le comité note également que le gouvernement indique que: i) il ressort des différentes décisions concernant les actions en protection engagées par les travailleurs affectés par la résiliation de leur contrat de travail que les tribunaux ont considéré que l’action en protection n’était pas un mécanisme approprié et que les travailleurs devraient s’en remettre à la justice ordinaire; et ii) les organisations plaignantes n’ont pas fourni la preuve qu’elles avaient eu recours à cette instance.
- 154. Le comité prend bonne note des différents éléments fournis par les parties. Le comité observe, d’après un document communiqué par l’entreprise contractante B, que: sur les 523 travailleurs de cette entreprise qui ont bénéficié du plan de retraite volontaire, 53 pour cent étaient du personnel syndiqué; sur les 137 travailleurs qui ont été placés en interne dans une autre opération, 40 pour cent étaient du personnel syndiqué; et que sur les 77 travailleurs qui n’ont pas bénéficié du plan de retraite volontaire, 87 pour cent étaient du personnel syndiqué. Le comité note également que, parmi les actions en protection engagées par les travailleurs licenciés et communiquées par les parties, aucune n’apporte la preuve d’une violation alléguée des droits syndicaux. À la lumière de ces éléments, le comité ne poursuivra pas l’examen de cette allégation.
- 155. Sans préjudice de ce qui précède, le comité note que le SINTRAIME allègue que le ministère du Travail n’a pas donné suite à sa plainte du 16 décembre 2015 concernant des licenciements et des actes de persécution antisyndicale dans le cadre de l’annulation du contrat commercial signé entre les entreprises contractantes B et C, et que le gouvernement ne déclare pas qu’une enquête a été menée en relation avec ces allégations. À cet égard, le comité rappelle que, lorsqu’elles sont saisies de plaintes en discrimination antisyndicale, les instances compétentes doivent mener immédiatement une enquête et prendre les mesures nécessaires pour remédier aux conséquences des actes de discrimination antisyndicale qui auront été constatés [voir Compilation, paragr. 1159] et veut croire que le gouvernement veillera au plein respect de ce qui précède.
- 156. Enfin, en ce qui concerne le licenciement en décembre 2015 par l’entreprise B de syndicalistes qui avaient participé à une grève en 2013 dans une entreprise qui avait ensuite fusionné avec l’entreprise B, et les allégations connexes de discrimination antisyndicale et de violation du processus disciplinaire établi par la convention collective, le comité observe qu’il ressort clairement des informations et des documents fournis par les parties que: i) la Chambre de cassation du travail de la Cour suprême de justice a jugé le 9 avril 2014 que la grève menée par ce groupe de travailleurs était illégale; ii) il ressort des arguments à décharge présentés, communiqués par le gouvernement, que les travailleurs concernés ont eu deux jours pour se présenter devant l’employeur et qu’ils ont pu bénéficier de l’assistance de deux membres du syndicat; iii) la première chambre du tribunal pénal municipal compétent en matière de respect des garanties fondamentales de Soledad Atlántico, statuant sur une action en protection, a établi le 12 janvier 2016 qu’aucune volonté de persécution contre l’entité syndicale n’a été constatée, et a considéré que ce cas devait être porté devant la justice ordinaire, où une large appréciation des preuves pourrait être donnée afin de montrer s’il y a réellement eu un impact sur l’association syndicale; et iv) il n’y a pas d’informations sur d’éventuelles actions engagées devant la justice ordinaire concernant les faits dénoncés. Sur la base des éléments susmentionnés, le comité ne poursuivra pas l’examen de cette allégation.
Recommandation du comité
Recommandation du comité- 157. Au vu des conclusions qui précèdent, lesquelles ne requièrent pas d’examen plus approfondi, le comité invite le Conseil d’administration à adopter la recommandation suivante:
- Le comité veut croire que le gouvernement s’assurera que, face à des plaintes de discrimination antisyndicale ou de menaces, les instances compétentes mèneront immédiatement une enquête et prendront les mesures nécessaires pour remédier aux conséquences des actes qui auraient été constatés.